Pniné Halakha

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04. Les Birkot hacha’har pour celle qui n’éprouve pas la jouissance correspondante

Les grands Richonim (décisionnaires du 11ème au 16ème siècle) sont partagés sur la question suivante : une personne qui ne jouit pas de façon personnelle de l’objet d’une des bénédictions matinales peut-il néanmoins la prononcer ? Par exemple, une femme aveugle peut-elle dire Poqéa’h ‘ivrim (« qui rends la vue aux aveugles ») ?

Selon Maïmonide (Téphila 7, 9), seul celui qui jouit d’une chose peut dire la bénédiction qui s’y rapporte. Par conséquent, une femme qui a dormi la nuit dans ses vêtements ne doit pas dire Malbich ‘aroumim (« qui habilles ceux qui sont nus »), puisqu’elle n’a pas à s’habiller le matin. Une invalide privée de la faculté de marcher ne dit pas Hamékhin mits’adé gaver (« qui orientes les pas de l’homme »). Une femme paralysée, qui ne peut mouvoir ses membres, ne dit pas Matir assourim (« qui délivres les captifs »), ni Zoqef kéfoufim (« qui redresse ceux qui sont courbés »). Tel est l’usage d’une partie des Juifs originaires du Yémen. L’auteur du Choul’han ‘Aroukh lui-même (Ora’h ‘Haïm 46, 8) tient compte de l’opinion de Maïmonide et décide que, dans de tels cas, on récite ces bénédictions sans mentionner le nom de Dieu (A-donaï, Elo-hénou) ni Sa royauté (Mélekh ha-‘olam).

Face à cela, selon les Guéonim, parmi lesquels Rav Netronaï Gaon et Rav Amram Gaon[c] – et c’est en ce sens que s’exprime le Colbo (chap. 1) –, il faut dire toutes les bénédictions du matin dans l’ordre, que l’on jouisse ou non de ce à quoi elles se rapportent, car ces bénédictions matinales ont été instituées pour la jouissance qu’en tirent la généralité des gens. De plus, le fait que d’autres jouissent d’une certaine chose profite, de manière indirecte, à celui-là même qui n’en jouit pas directement. Aussi, même une personne paralysée qui ne peut se redresser, bénira Dieu pour le fait que d’autres puissent se redresser et l’aider. De même, une aveugle dira la bénédiction Poqéa’h ‘ivrim (« qui rends la vue aux aveugles ») pour ce que d’autres peuvent voir, et peuvent grâce à cela lui indiquer son chemin, lui préparer tout ce dont elle a besoin. C’est dans ce sens que tranche le Rama (Ora’h ‘Haïm 46, 8).

Dans le même sens, selon le saint Rabbi Isaac Louria, tout Juif doit dire le rituel des bénédictions du matin dans son intégralité, afin de louer Dieu pour les bienfaits généraux dont Il gratifie le monde. Or, dans les coutumes de prière, les Séfarades ont pris, sur de nombreux points, l’usage d’aller selon les vues de Rabbi Isaac Louria. Aussi, les Séfarades ont-ils, eux aussi, pour coutume de dire toutes les Birkot hacha’har dans l’ordre, sans distinction[2].


[c]. Gaon, plur. Guéonim : maîtres des académies babyloniennes à l’époque post-talmudique (du 6ème au 11ème siècle de l’ère civile).

[2]. La bénédiction Ché-‘assa li kol tsorki – ou kol tsorkhaï, selon les versions –(« qui as comblé tous mes besoins ») a été instituée en référence au port des chaussures. Les jours de Kippour et du 9 av (tich’a bé-av), où l’on ne porte pas de chaussures [de cuir], les Ashkénazes, ainsi qu’une minorité de Séfarades, ont coutume de réciter néanmoins cette bénédiction, afin de louer Dieu pour la jouissance que l’on tire, en général, du port de chaussures, et pour le fait que l’on peut, même durant ces jours, porter des chaussures autres que de cuir. La majorité des Séfarades, en revanche, ne prononcent pas la bénédiction Ché-‘assa li kol tsorki ces jours-là, puisque le port de chaussures de cuir y est interdit (cf. La Prière d’Israël 9, note 1).

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