Pniné Halakha

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09. Savons et cosmétiques

Les décisionnaires sont partagés quant au statut des produits destinés à s’appliquer sur le corps, et auxquels du ‘hamets est mêlé : faut-il les interdire à Pessa’h ? Certes, les savons, shampooings et crèmes diverses ne sont pas faits directement à partir de ‘hamets, mais il arrive que l’on y mette de l’alcool qui, lui, est fait à partir de blé, ou d’autres composants faits à base de ‘hamets ; la question de leur statut halakhique se pose donc.

Certains auteurs disent que, selon nos sages, s’oindre avec un mélange contenant du ‘hamets est interdit au même titre que boire un mélange de ‘hamets. Aussi, même si le ‘hamets en question n’est pas consommable par un chien, il garde le statut de ‘hamets dès lors qu’il convient à une application corporelle, et il est donc interdit de l’utiliser à Pessa’h. Aussi faut-il se servir, à Pessa’h, de savons, de shampooings et de crèmes cachères pour Pessa’h.

D’autres soutiennent que, lorsque nos sages ont comparé l’onction à la boisson, ils ne visaient là que l’interdit de s’oindre le jour de Kippour, ainsi que l’interdit d’utiliser une huile prélevée pour la térouma (part réservée aux prêtres) ; quant aux autres choses que la Torah interdit, en revanche, seule leur consommation est interdite, et non le fait de s’en oindre. Et bien qu’il soit également interdit de tirer profit du ‘hamets, ces produits corporels ont perdu le statut de ‘hamets, puisque, avant Pessa’h, ils sont devenus impropres à la consommation d’un chien ; il est donc permis d’en jouir et de s’en oindre le corps pendant Pessa’h.

Puisque nous sommes en présence d’une controverse portant sur une norme rabbinique, la halakha est conforme à l’opinion indulgente ; et les personnes soucieuses d’apporter à leur pratique un supplément de perfection sont rigoureuses. Il faut distinguer quatre degrés possibles de présence de ‘hamets dans le mélange ; ce n’est que dans les deux cas intermédiaires qu’il y a controverse.

1) Pour le dentifrice, on doit veiller strictement à ce que la cacheroute de Pessa’h soit garantie. Cette pâte a en effet du goût ; elle est donc comparable aux produits alimentaires, pour lesquels on a l’obligation de veiller attentivement à ce que la cacheroute spécifique à Pessa’h soit garantie.

2) Une crème absorbée par le corps, un baume pour lèvres sans goût, des parfums à base d’alcool : la halakha est conforme à l’opinion indulgente. Ces produits ne requièrent pas de surveillance garantissant la cacheroute, car ils ne sont pas comestibles. De plus, le fait est qu’en général il ne s’y trouve rien de ‘hamets. Toutefois, nombreux sont ceux qui ont l’usage d’être rigoureux, et de n’acheter que des crèmes ou parfums offrant une garantie rabbinique de cacheroute pour Pessa’h.

3) Le savon et le shampooing : puisqu’ils sont destinés au nettoyage, et non à être absorbés par le corps, il y a, plus encore, place à l’indulgence. Malgré cela, certains sont rigoureux.

4) Produits nettoyants, cirage pour chaussures, et autres produits du même genre : ils ne nécessitent aucune surveillance. Même les produits nettoyants pour vaisselle ne nécessitent pas de surveillance, car leur goût est altéré : même si le mélange contient du ‘hamets, le goût de celui-ci a été dénaturé avant Pessa’h, et il n’est plus du tout considéré comme ‘hamets[11].


[11]. Les Richonim sont partagés : certains disent que le principe d’après lequel l’onction est comparable à la boisson ne tient qu’à l’égard de Kippour et de l’huile prélevée au titre de la térouma ; d’autres estiment que ce principe s’applique à tous les interdits, mais reconnaissent qu’il est de rang rabbinique. La question se pose notamment au sujet du savon fait de graisse de porc : en pratique, de nombreux A’haronim ont tendance à être rigoureux lorsque le produit est destiné à la jouissance, et à être indulgent quand le produit a un but de médication (cf. Ye’havé Da’at IV 43). Si le goût de la graisse de porc est dénaturé, on a tendance à être indulgent, comme l’explique le ‘Aroukh Hachoul’han (Yoré Dé’a 117, 29). S’agissant de Pessa’h, il y a un motif de plus grande rigueur, car le ‘hamets est également interdit à la jouissance. À l’inverse, il y a un motif d’indulgence : dès lors que le ‘hamets est devenu, avant Pessa’h, impropre à la consommation d’un chien, il a perdu son statut de ‘hamets, si bien que son statut est à présent plus bénin que les autres produits interdits, qui l’étaient dès l’abord.

En pratique, selon les responsa Choël Ouméchiv, troisième édition II 146, il est permis de garder un savon contenant du ‘hamets, à Pessa’h, puisque son goût est détérioré. Mais il reste à savoir s’il est permis de l’utiliser. Les responsa Divré Malkiel IV 24, 43 interdisent l’usage de produits cosmétiques contenant de l’alcool ‘hamets, issu du blé, car c’est par le biais de cet alcool que leur odeur s’épand, ce qui confère une importance à cet alcool ; et l’on ne saurait soutenir que l’interdit s’annule parce que l’on pourrait séparer l’alcool des autres matières. Selon les responsa ‘Hazon Na’houm 46, on considère l’état présent du produit : si le goût du ‘hamets est altéré, il n’est pas interdit de l’utiliser. Le ‘Hazon Ich (Demaï 15, 1) propose un raisonnement selon lequel seul un produit propre à la consommation est frappé par l’interdit d’onction. Le Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm III 62 permet, pour un besoin médical, de s’appliquer une crème contenant du ‘hamets. L’auteur du Bediqat ‘Hamets Ouvi’ouro 2, 43 résume le sujet et adopte une position rigoureuse, mais, dans un cas où il est douteux qu’il y ait du ‘hamets dans le mélange, permet de s’appuyer sur les avis indulgents.

Il y a lieu, nous semble-t-il, de distinguer, en nous plaçant du point de vue même des décisionnaires rigoureux, entre le savon de suif et le savon de notre temps. Ce dernier se borne à nettoyer et à ôter les graisses, mais n’est pas absorbé par le corps ; le savon de suif, lui, est absorbé par le corps, si bien qu’il y a davantage de sens à comparer son emploi à un fait d’onction. C’est pourquoi nous avons distingué la crème, qui pénètre dans le corps, du savon et du shampooing (peut-être l’après-shampooing ressemble-t-il davantage à une crème). En pratique, nous avons entendu le Rav Rabinowitz enseigner que l’on peut être indulgent à l’égard de tout produit impropre à la consommation d’un chien ; c’est également ce qu’il tient de son maître, le Rav Pinhas Hirschprung, et c’est aussi ce qu’enseigne le Rav Dov Lior.

Dans les faits, la grande majorité des produits cosmétiques fabriqués en Israël ne comportent pas d’alcool de blé. Même dans la majorité des cosmétiques produits à l’étranger, il n’y a pas d’alcool de blé, car il est généralement plus cher que l’alcool de pomme de terre. Il est vrai que certains produits isolés contiennent de l’alcool de blé ; en ce cas, ceux qui se conforment à l’opinion rigoureuse s’abstiennent. Mais quand on ne sait si tel produit contient de l’alcool de blé, les tenants de l’opinion rigoureuse eux-mêmes sont autorisés à être indulgents, en se fondant sur une conjonction de doutes.

Certains auteurs ont encore émis des craintes quant aux produits contenant du germe de blé, riche en vitamine A. Toutefois, il n’est pas certain que les liquides extraits du blé soient considérés comme ‘hamets ; et comme l’a écrit le Rav Kook (Ora’h Michpat p. 129), dans le cas même où ces liquides sont interdits, ils se sont annulés au sein d’une quantité soixante fois supérieure d’autres produits, avant Pessa’h, et ne se réactivent pas à Pessa’h. Bien plus : de nombreux décisionnaires estiment que, même si ces liquides ont été considérés comme ‘hamets, ils en ont perdu le statut puisqu’ils ne sont plus comestibles.

Une autre question se pose encore : celle des émulsifiants utilisés en cosmétique. Cependant, même quand des émulsifiants sont fait à base d’amidon de blé, il n’est pas certain qu’ils soient ‘hamets, outre le fait qu’ils ne sont pas comestibles. Aussi, en pratique, on peut être indulgent pour tous les cosmétiques impropres à la consommation.

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