Pniné Halakha

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11. Suite des règles de la boisson

On s’acquitte de l’obligation de boire, à Pourim, par toute espèce de boisson alcoolisée. Simplement, il est préférable de boire du vin, car le miracle de Pourim s’est produit par le biais du vin. Celui qui se réjouit davantage avec d’autres boissons prévoira de boire principalement les boissons qu’il aime, car le but essentiel de la mitsva est de se réjouir ; et si boire du vin le réjouit aussi quelque peu, il sera bon qu’il commence par boire du vin, en souvenir du miracle[12].

Les femmes, elles aussi, ont la mitsva de boire une bonne quantité de vin, car celui-ci réjouit ; simplement, il leur faut prendre garde de s’enivrer, car l’ébriété est déshonorante pour les femmes, plus que pour les hommes, et elle porte atteinte à la mitsva de la pudeur (tsni’out), qui est la gloire des femmes[13].

Si l’on sait, en son for intérieur, qu’à chaque fois que l’on boit beaucoup on commence à pleurer et à se désoler, ou que l’on a mal à la tête, il sera préférable de ne boire qu’un peu plus qu’à l’ordinaire. De cette manière, on accomplira la mitsva. En effet, la mitsva consiste essentiellement à se réjouir ; et si la boisson devait avoir pour effet que l’on s’attriste, on aurait perdu le bénéfice de la mitsva. Ce n’est que dans le cas où ces pleurs eux-mêmes s’accompagnent de joie – par exemple si l’on est heureux de pleurer pour des choses importantes, comme la situation du peuple juif et la reconstruction du Temple, ou sa situation spirituelle, du fait que l’on n’a pas encore eu le mérite d’accomplir un grand repentir – que l’on pourra accomplir la mitsva de la boisson « jusqu’à ne plus pouvoir distinguer entre maudit soit Haman et béni soit Mordekhaï ».

Si l’on sait, en son for intérieur, que, en s’enivrant, on deviendra turbulent, qu’on vexera d’autres personnes, ou que l’on en viendra à se vautrer dans son vomi et à se déconsidérer auprès des autres, on ne s’enivrera pas. On accomplira la mitsva de la boisson en buvant un peu plus qu’à son habitude. On ne s’en affligera pas. Il est vrai que nos sages ont dit : « Quand le vin entre, le secret sort » (nikhnas yayin, yatsa sod) (‘Erouvin 65a)[b], et l’on pourrait s’affliger en pensant, de prime abord, que l’on porte au fond de soi un côté tendant à la violence et à l’animalité. Mais nos sages disent aussi : « Selon l’effort, le salaire » (Maximes des Pères 5, 23) ; or, puisqu’on réussit, en pratique, à freiner dans son quotidien ces pulsions négatives, c’est bien le signe que l’on réalise un grand amendement moral (tiqoun)[14].

Pour accomplir la mitsva comme il convient, on doit savoir que l’alcool arrive à son influence maximale environ vingt minutes après qu’on a bu. Certains se méprennent : ils boivent un verre de vin ou d’un autre alcool, et comme dans les cinq minutes suivantes ils ne sentent pas de changement significatif, ils pensent qu’il leur faut prendre un verre de plus ; puis, comme ils ne sentent toujours pas qu’ils ont accompli la mitsva de la boisson, ils boivent un verre encore et, pour plus de sûreté, un autre encore. Alors, subitement, le premier verre commence à produire son effet, puis, immédiatement après, le deuxième, le troisième et le quatrième, et en un instant ils deviennent extrêmement gris, se conduisent bestialement, vomissent, et grandes sont la honte et la fureur. Aussi faut-il savoir comment boire pour se réjouir : attendre, entre une prise d’alcool et la suivante, au moins une demi-heure, et accompagner la boisson de nourriture. De cette façon, on pourra se réjouir convenablement durant toute la fête de Pourim.


[12]. Cf. Miqraé Qodech du Rav Tsvi Pessah Frank, chap. 44, qui cite différentes sources prescrivant de boire, précisément, du vin. Cependant, il semble que, halakhiquement parlant, cette directive ne soit qu’a priori ; car la mitsva mentionnée par le verset d’Esther, telle que la conçoivent la majorité des Richonim, est de boire jusqu’à « ne plus savoir », sans qu’il soit en rien précisé que l’on doit boire du vin. Le principal est de se réjouir en buvant. Cf. Pisqé Techouvot 695, 3.

[13]. Cf. Ketoubot 65a, où il est dit que le vin et l’ébriété sont pour la femme, plus que pour l’homme, un sujet d’opprobre. C’est peut-être pour cela que nos maîtres disent, en Pessa’him 109a, que, pour éveiller la joie durant les fêtes de pèlerinage, chacun utilisera ce qui lui convient : le vin pour les hommes, de beaux vêtements pour les femmes. Car les femmes ne sauraient parvenir à la joie par le biais du vin, puisque l’ébriété leur est un déshonneur. Cf. Pniné Halakha, Lois de Pessa’h 16, 7, note 3, au sujet des quatre coupes du séder. Quoi qu’il en soit, c’est une mitsva pour elles de boire quelque peu, sans se soûler.

[b]. Cet adage talmudique signifie que, lorsque l’on boit du vin, la désinhibition qui s’ensuit tend à révéler aux autres sa vraie nature, tenue jusque-là secrète.

[14]. Le Baït ‘Hadach, cité par le Béour Halakha 665, 2 ד »ה עד, précise que l’on doit prendre garde d’arriver à la faute à cause de l’ébriété. Certes, nous citerons ci-après la thèse du Rav Kook, selon qui, à celui qui est contraint de renoncer à la prière parce qu’il est trop gris, s’applique le principe : « Qui se livre à l’accomplissement d’une mitsva est dispensé d’en accomplir une autre. » Toutefois, tout le monde s’accorde à dire qu’il est interdit de s’induire soi-même à la faute. Il est vrai que le Rav Kook, dans Mitsvat Reïya, Hachmatot 695, écrit que se livrer à l’accomplissement d’une mitsva protège ; et l’auteur cite une preuve tirée du Rachba. Mais il semble que tous les avis concordent pour dire que, si l’on sait, d’expérience, que l’on en vient à fauter ou à se conduire de manière très indigne sous l’effet de l’ébriété, on s’abstiendra de s’enivrer, car ce jour doit rester un jour « de festin et de joie ».

Si, en revanche, on a tendance à pleurer pour de bons motifs, et que l’on éprouve, par cela, un sentiment délectable, ce sera permis, et participera même d’une mitsva. On en trouve une preuve dans le Chibolé Haléqet 93, qui cite une agada (récit de l’époque talmudique) où il est dit que Rabbi Aqiba pleurait le Chabbat, et disait que cela lui était un délice. Ce fait est cité par le Beit Yossef, le Rama, Ora’h ‘Haïm 288, 2 et le Michna Beroura 4.

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