Pniné Halakha

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09 – Second jour de Yom tov en diaspora

01 – Date des fêtes et fondement de la coutume en diaspora

Selon la Torah, chacun des six jours de Yom tov doit être observé un jour seulement. Et tel est l’usage en terre d’Israël (Erets Israël). Mais pour la diaspora, les sages ont prescrit d’ajouter un jour, et donc de célébrer deux jours de Yom tov au lieu d’un. Ce second jour de fête est appelé Yom tov chéni chel galouyot (« second jour de Yom tov des pays d’exil »).

Pour expliquer le fondement de cette halakha, il faut d’abord préciser que toutes les fêtes sont fixées d’après le calendrier hébraïque : le premier jour de Pessa’h a lieu le 15 nissan, le septième jour de Pessa’h le 21 nissan, la fête de Chavou’ot à l’expiration du compte de l’omer, qui commence le 16 nissan, Roch hachana le 1er tichri, le premier jour de Soukot le 15 tichri, Chemini ‘Atséret le 22 tichri. Et puisque le mois hébraïque est fixé d’après le cycle lunaire, et que la durée de ce cycle est d’un peu plus de vingt-neuf jours et demi, il existe des mois pleins de trente jours et d’autres mois défectifs, de vingt-neuf jours. La mitsva veut que des gens qui ont vu la nouvelle lune à sa « naissance » (molad) dans la nuit du trentième jour du mois, viennent témoigner de cela au beth-din. Sur la base de leur témoignage, les juges rabbiniques consacrent le mois. C’est à ce propos qu’il est dit : « Ce mois sera pour vous… » (lakhem[a]) (Ex 12, 2) ; les sages expliquent que le Saint béni soit-Il montra à Moïse notre maître la forme de la lune à son renouvellement, et lui dit : « Ce témoignage sera remis entre vos mains » (lakhem) (Roch Hachana 22a). Lakhem (littéralement pour vous, à vous) désigne ici les juges ordonnés, qui ont reçu l’ordination de maître à disciple depuis Moïse notre maître (cf. Zemanim – Fêtes et célébrations juives vol. I 1, 1-2).

Après la sanctification du mois, des émissaires partaient aux quatre coins du pays, pour annoncer à quel moment le mois avait été consacré, et quels jours tombaient les fêtes (Roch Hachana 21b). Mais quant aux Juifs qui se trouvaient en diaspora, les émissaires n’arrivaient pas à les atteindre à temps avant la fête. Les premiers prophètes fondèrent donc à leur intention la coutume consistant à célébrer chaque fête deux jours durant, en raison du doute. Et c’est ainsi qu’agirent Ezéchiel et Daniel. Il se peut que, dès l’époque de Josué, fils de Noun, on ait eu coutume, en dehors de la terre d’Israël, de marquer deux jours de Yom tov en raison du doute (responsum de Rav Haï Gaon, Otsar Haguéonim, Yom tov 4, 2)[1].


[a]. Le verset dit : החודש הזה לכם ראש חדשים… (« Ce mois sera pour vous le premier des mois »). La dracha talmudique isole l’expression החודש הזה לכם (« Ce mois sera pour vous ») afin de faire sentir que la fixation des néoménies est confiée à Israël : le mois sera à vous.

[1]. On fêtait Roch hachana pendant deux jours, même sur la terre d’Israël, car Roch hachana tombe le jour même de la néoménie (Roch ‘hodech) ; et puisqu’on ne savait quand le beth-din consacrerait le mois, on prit pour usage constant de célébrer deux jours afin de sortir du doute. Ce n’est qu’à Jérusalem que l’on célébrait un seul jour de Roch hachana, si des témoins étaient venus le premier jour et que le beth-din ait eu le temps de consacrer le mois. Mais dans le cas où les juges n’avaient pas consacré le nouveau mois au premier jour, on continuait de célébrer Yom tov, le deuxième jour compris.

02 – Coutume observée à l’époque du second Temple

À l’époque du second Temple, une grande communauté juive demeura dans l’exil babylonien. Au début, on informait ses membres par des feux (produits à l’aide de grandes torches) du moment où le mois se renouvelait. Ainsi procédait-on : la nuit qui suivait le premier jour où l’on pouvait consacrer le mois, on postait des sentinelles au sommet des collines, de la terre d’Israël à la Babylonie ; et si le beit-din consacrait le mois, on montait au sommet du mont des Oliviers, où l’on allumait des feux, et où l’on attendait de voir que les sentinelles postées au sommet de l’Alexandrion eussent, elles aussi, allumé de tels feux. Ceux qui étaient au sommet de l’Alexandrion attendaient, quant à eux, que les sentinelles postées sur le troisième mont eussent allumé leurs feux ; et c’est ainsi que l’information passait, en une nuit, de montagne en colline, jusqu’à Babylone. Un jour, les Samaritains – qui reniaient l’autorité du beit-din – se mirent à allumer des bûchers afin d’induire en erreur les habitants de la diaspora. C’est ainsi que la coutume d’allumer des feux tomba en désuétude. Depuis lors, c’est par le biais d’émissaires que l’on fit savoir aux habitants de la diaspora le moment où le nouveau mois était consacré (Michna Roch Hachana 22b).

En tout endroit où les émissaires parvenaient avant la fête de Soukot, on fêtait un seul jour de Yom tov ; en tout endroit où les émissaires n’étaient point arrivés, on célébrait, pour toutes les fêtes, deux jours. Il faut savoir que, depuis Roch ‘hodech de tichri jusqu’à la fête de Soukot, les émissaires pouvaient marcher pendant dix jours ; car ils ne voyageaient pas à Roch hachana, ni le jour de Kipour, ni les jours de Chabbat. Tandis que, avant la fête de Pessa’h, ils pouvaient marcher douze jours, car ce n’est qu’aux jours de Chabbat qu’ils s’abstenaient de voyager. Par conséquent, il y avait certains lieux où les émissaires avaient le temps d’arriver avant la fête de Pessa’h, mais non avant la fête de Soukot. Or les sages décidèrent que, en tout endroit où les émissaires de tichri ne parvenaient pas avant Soukot, on marquerait deux jours de Yom tov, même à Pessa’h ; cela, afin de ne pas faire de différence entre les fêtes. Bien plus, ils décrétèrent que le septième jour de Pessa’h et Chemini ‘Atséret seraient, eux aussi, fêtés deux jours, bien que les émissaires fussent, entre-temps, parvenus en des lieux plus éloignés. Il a même été décrété que la fête de Chavou’ot, qui a lieu cinquante jours après le 16 nissan, serait célébrée deux jours en ces endroits. Le principe est donc le suivant : en tout endroit où les émissaires ne pouvaient parvenir avant le premier jour de la fête de Soukot, on célébrait deux jours pour toutes les fêtes (Roch Hachana 21a).

Cependant, le jour de Kipour n’était célébré qu’un jour, le premier des deux jours possibles ; en d’autres termes, le jour déterminé par le calcul selon lequel le mois d’éloul était défectif. Cela parce que, dans la très grande majorité des cas, les mois d’éloul et d’adar étaient défectifs ; or selon la Torah, on va d’après la majorité, de sorte que, fondamentalement, on n’a l’obligation de célébrer les fêtes que le premier jour, et ce sont les sages qui ont institué un deuxième jour pour chaque fête. Et puisqu’il est très difficile de jeûner deux jours de suite, les sages sont allés, quant au jour de Kipour, selon l’obligation fondamentale (‘iqar hadin), si bien que l’on ne célèbre Kipour qu’un jour[2].


[2]. Selon de nombreux auteurs, on va, si l’on s’en tient à la seule Torah, d’après la majorité ; il suffit donc de célébrer les fêtes au premier jour puisque, la majorité des années, les mois d’éloul et d’adar sont défectifs ; et ce sont les sages qui ont décrété la célébration de deux jours, pour tenir compte de la minorité. Mais quant au jeûne de Kipour, il est difficile de l’accomplir deux jours durant ; aussi, à cet égard, les sages sont-ils revenus à la stricte obligation (‘iqar hadin), de sorte qu’on ne le célèbre que le premier jour (Rabbi Yecha’ya A’haron zal, Ritva, Touré Even sur Roch Hachana 18a, Noda’ Biyehouda sur Yoré Dé’a I 57).

Il y a lieu d’expliquer que, pour toutes les fêtes, les sages ont été rigoureux, tenant compte de la minorité, car, les jours s’écoulant, la vérité apparaît, de sorte qu’il risquait d’apparaître que l’on avait fait le séder de Pessa’h un jour trop tôt, et que l’on avait recommencé à manger du ‘hamets le septième jour de Pessa’h. Cette réalité risquait d’anéantir le lien des communautés de diaspora avec la sainteté des fêtes (le cas ressemble à l’obligation de vérifier les adhérences des poumons avant de commencer à consommer la viande d’une bête, Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 39, 1). Et comme les sages savaient que, dans toute la diaspora, on ne jeûnerait que le premier jour, ils firent tous les efforts possibles pour que le mois d’éloul fût défectif (par exemple, ils avaient soin que le mois d’av fût plein, comme l’explique le ‘Hatam Sofer, deuxième édition, Beitsa 6a) ; au point que l’on put témoigner en pratique, que depuis l’époque d’Ezra le scribe jusqu’à la fin de la période tannaïtique, il n’y eut aucun cas dans lequel le mois d’éloul fût plein (Roch Hachana 19b). Cependant, à l’époque des Amoraïm, il y eut environ trois cas dans lesquels éloul fut plein (Roch Hachana 21a). Certains disent que l’on ne célébra pas pour autant Kipour deux jours, en raison de la crainte de porter atteinte à la vie de certaines personnes (Chéïltot, Raavia, Méïri). Il se peut que, de leur point de vue, il faudrait fondamentalement marquer deux jours, puisque chaque année est distincte de l’autre, et qu’il n’y a pas ici, comme dans le cas d’un mélange, de notion de majorité et de minorité. Ce serait la raison pour laquelle on a eu besoin d’expliquer que, si l’on ne célèbre pas Yom Kipour deux jours de suite, c’est en raison de la crainte que l’on a de porter atteinte à la vie de certains (cf. Encyclopédie Talmudique, entrée Yom tov chéni chel galouyot 22-39).

03 – Obligation de célébrer, par-delà les générations, deux jours en diaspora

Après la destruction du deuxième Temple, la présence juive en terre d’Israël alla en diminuant ; à l’inverse, la grande communauté juive de Babylonie alla en se renforçant. Malgré cela, l’autorité des sages d’Erets Israël en matière de sanctification des mois et de fixation des années embolismiques se maintenait. Ce n’est qu’en de rares circonstances – comme pendant la grande révolte –, lorsque la situation en terre d’Israël était terrible, au point que l’on ne pouvait plus consacrer les mois, que des juges (dayanim) ordonnés en terre d’Israël quittaient le pays, pour gagner un lieu où l’on n’avait pas promulgué de décrets funestes contre le peuple juif ; là, ces juges consacraient les mois et décidaient que telle année serait embolismique.

Avec le temps, les décrets romains s’accrurent ; dans de nombreux cas, ils visaient directement les sages d’Israël et la mitsva de sanctifier le mois ; jusqu’à ce que, vers la fin de l’époque des Amoraïm, à la fin de la vie d’Abayé et de Rava, le second Hillel parvînt à la conclusion que l’on ne pouvait plus continuer à ordonner des sages et à consacrer les mois par le biais du grand beth-din siégeant en Erets Israël. Et puisque cette autorité était placée entre ses mains – il avait en effet hérité la présidence du beth-din, en ligne directe, depuis Rabbi Yehouda Hanassi – il décida, avec son beth-din, de calculer d’avance les mois et les années, et ils les consacrèrent jusqu’à la fin des générations. Ainsi, en l’an 4119, suivant notre calendrier (359 selon le calendrier civil), le peuple juif commença à compter les mois suivant le calendrier hébraïque tel que le prince Hillel l’avait calculé et institué (cf. Zemanim – Fêtes et Solennités juives I, chap. 1 § 3, note 3).

À cette même époque, la question suivante se posa : puisque le calendrier annuel était à présent répandu parmi toutes les communautés juives dispersées en diaspora, il n’était plus à craindre qu’ils en vinssent à se tromper ; peut-être donc était-il possible de ne plus observer, en diaspora, qu’un seul jour de Yom tov, comme on le faisait en Erets Israël ? Mais les sages d’Erets Israël envoyèrent leur instruction aux juifs de Babylonie : prenez soin de continuer à observer la coutume de vos pères, de crainte que le pouvoir ne prenne contre vous de durs décrets et que les comptes ne se brouillent ; tandis que, en maintenant la coutume du second jour de Yom tov, vous ne pourrez faire erreur (Beitsa 4b). Les sages ont donc donné pour directive explicite de continuer à appliquer la coutume du second jour de fête de diaspora (Maïmonide, Qidouch ha’hodech 5, 5). Rav Haï Gaon a expliqué que, en plus de la crainte d’un décret hostile du royaume, la raison essentielle était que telle était la directive des prophètes que de toujours faire, en diaspora, deux jours de Yom tov. Or aucun beth-din ne peut annuler leurs paroles, parce que l’on ne connaît pas tous les motifs de leur directive. De plus, seul un beth-din supérieur – en nombre et en sagesse – à celui qui prit cette décision aurait autorité pour annuler celle-ci (Otsar Haguéonim, Yom tov 4, 2).

Comme dans toute la Torah, à l’aspect juridique correspond un aspect spirituel. En effet, en Erets Israël la sainteté se révèle davantage. Aussi, les fêtes peuvent-elles s’y manifester durant un seul jour, comme le prescrit la Torah. Mais ceux qui se trouvent en diaspora sont plus éloignés du dévoilement de la sainteté ; et pour intégrer la lumière spirituelle que portent les fêtes, ils ont besoin de deux jours, conformément à la directive des sages. Parabole d’une lampe-torche : lorsqu’elle éclaire un endroit proche, sa lumière est forte, et focalisée sur un petit périmètre ; tandis que, lorsqu’elle éclaire un endroit éloigné, sa lumière est faible et se disperse en une grande superficie. Ainsi de la lumière des fêtes : elle se révèle en terre d’Israël en un jour unique et concentré, tandis que, en diaspora, elle est plus faible et s’étend sur une durée de deux jours (Dérekh Mitsvotékha 114, 1).

04 – Où faut-il observer deux jours de Yom tov ?

Selon Maïmonide, la règle du second jour de Yom tov en diaspora ne dépend pas de la proximité du lieu avec Jérusalem : tout dépend de la coutume d’Israël, à l’époque où les émissaires partaient faire connaître la date de la sanctification du mois. En tout lieu où les émissaires arrivaient avant le premier jour de Soukot, même s’il se trouvait en dehors de la terre d’Israël, on continue d’observer un seul jour. En tout lieu où ils n’y parvenaient pas, même si ce lieu fait partie de la terre d’Israël, on continue de marquer deux jours. Dans le cas même où, du point de vue de la distance, les émissaires eussent pu arriver à temps, mais où, en pratique, ils ne s’y rendaient pas, parce qu’il ne s’y trouvait pas de communauté juive, ou en raison de l’endommagement des routes, il faut continuer d’observer deux jours, puisque, en fait, ceux qui se trouvaient là devaient marquer deux jours de Yom tov (Maïmonide, Qidouch ha’hodech 5, 9-12).

Mais selon le Ritva, depuis que fut annulée la procédure de consécration du mois au beth-din, la règle ne dépend plus des émissaires, mais des frontières d’Erets Israël. En effet, puisque la majorité des communautés de diaspora pratiquaient deux jours, et que la majorité des lieux inscrits à l’intérieur des frontières d’Erets Israël pratiquaient un seul jour, le beth-din du prince Hillel décida, au moment où il consacra les mois et les années d’avance pour toutes les générations, que l’on observerait systématiquement deux jours de Yom tov en diaspora, et que l’on observerait dans tous les cas un seul jour dans l’ensemble d’Erets Israël (Ritva sur Roch Hachana 18a, Souka 43a).

Bien que, au long des générations, il se trouva différents lieux d’Erets Israël qui eussent pour coutume d’observer deux jours de Yom tov, conformément à l’opinion de Maïmonide, la coutume qui fut adoptée, en halakha, est conforme à l’avis du Ritva ; et c’est aussi ce qui ressort des propos d’autres Richonim[3].


[3]. Selon le Ritva, en tout endroit de la terre d’Israël, on célèbre un seul jour, même si les émissaires ne s’y rendaient pas avant le premier jour de Soukot ; tandis que, en diaspora, on marque partout deux jours. C’est aussi ce qui ressort des propos de Rav Haï Gaon, de Rabbénou ‘Hananel, de Rabbi Zera’hia Halévi, du Ma’hzor de Vitry et d’autres sources encore. C’est aussi ce qu’écrivent, en pratique, Avné Nézer, Ora’h Haïm 392, 9, Tsits Haqodech 42, le ‘Hazon Ich, Ora’h ‘Haïm 132, 2, le Yaskil ‘Avdi VI Ora’h ‘Haïm 2. Des propos du Ritva, il apparaît que, à l’intérieur de l’ensemble des frontières de la terre d’Israël, jusqu’à l’Euphrate, on célèbre un seul jour. C’est aussi l’avis du ‘Ir Haqodech Véhamiqdach 3, 19, du Rav Goren dans Michnat Hamedina p. 161, du Tsits Eliézer III 23. À Alep, en Syrie (Aram Tsova), on a coutume de célébrer deux jours ; cf. Pniné Halakha, Ha’am Véhaarets [à paraître en français] 3, 16, où il est dit que, selon la majorité des Richonim, Alep ne fait pas partie des frontières d’Erets Israël. En revanche, tous les décisionnaires s’accordent à dire que le sud du Liban, jusqu’à Beyrouth, fait partie des frontières de la terre d’Israël.

S’agissant de la ville d’Eilat, un doute est apparu quant au fait de savoir si elle fait partie des frontières de la terre d’Israël, car, selon quelques commentateurs, ce que la Bible appelle Na’hal Mitsraïm (torrent d’Égypte) s’identifie avec le cours d’eau d’El-Arich, de sorte qu’Eilat se trouve au sud de sa partie principale. Mais en pratique, la halakha a été tranchée : Eilat fait partie des frontières d’Erets Israël, et l’on y fait un seul jour de Yom tov ; en effet, de l’avis même de ceux qui estiment que le Na’hal Mitsraïm est le cours d’eau d’El-Arich, il est vraisemblable qu’Eilat s’inscrive encore dans les frontières d’Erets Israël ; à plus forte raison la règle sera telle pour la majorité des commentateurs, qui pensent que le Na’hal Mitsraïm se situe au niveau du golfe de Suez (cf. Pniné Halakha – Ha’am Véhaarets 3, 15). C’est ce qu’écrivent en pratique le Rav Herzog dans Hékhal Yits’haq, Ora’h ‘Haïm 55, le Rav Frank en Miqraé Qodech, Pessa’h 2, 58, le Michpeté ‘Ouziel VIII 47, le Tsits Eliézer III 23.

05 – Lois du second jour

Le second jour (Yom tov chéni) est égal au premier (Yom tov richon) en toutes ses lois ; car toutes les directives que les sages ont prescrites, c’est à la manière même dont la Torah a légiféré qu’ils les ont prescrites. Par conséquent, tous les interdits qui pèsent sur le premier jour de Yom tov – ce qui inclut les interdits rabbiniques – pèsent également sur le second jour. De même, toutes les prières du second jour sont identiques à celles du premier jour. On y fait aussi le Qidouch sur le vin, et l’on prononce la bénédiction Chéhé’héyanou comme au premier jour (Choul’han ‘Aroukh 661, 1). À Pessa’h, on marque deux fois la soirée du séder, avec toutes ses mitsvot et bénédictions. Certes, de prime abord, on pourrait soutenir que, puisque c’est en raison du doute que l’on célèbre un second jour de Yom tov, on devrait s’abstenir pour tout ce qui concerne les bénédictions ; en effet, nous tenons que, en cas de doute portant sur une bénédiction, on s’abstient de la prononcer. Mais les sages ont prescrit de prononcer ces bénédictions, parce que, si l’on ne les récitait pas comme on les récite le premier jour, les gens en viendraient à mépriser le second jour (Chabbat 23a)[4].

Il faut se garder de préparer les choses nécessaires au repas festif, ou de dresser la table, du premier jour pour le second (Choul’han ‘Aroukh 503, 1 ; cf. ci-dessus, chap. 2 § 12). De même, il est juste d’allumer les veilleuses du second jour après la tombée de la nuit (tset hakokhavim), afin de ne pas préparer, pendant le premier Yom tov, de choses nécessaires au second. Celle qui allume avant le crépuscule (bein hachmachot) a cependant sur qui s’appuyer, puisque, dès ce moment, on tire quelque jouissance de la lumière que diffusent les veilleuses[5]. (Pour l’honneur dû à un mort, les sages ont été indulgents, en permettant de l’enterrer par le biais d’un Juif, comme nous l’avons vu plus haut, chap. 7 § 5.)


[4]. À Chemini ‘Atséret, en diaspora, on réside dans la souka, car ce jour est considéré comme sfeq chevi’i (« peut-être septième ») ; mais on ne dit pas la bénédiction sur la mitsva d’y résider, puisque l’on y observe les coutumes de Yom tov de Chemini ‘Atséret ; si donc on disait cette bénédiction, il y aurait contradiction entre coutumes (Souka 47a, Choul’han ‘Aroukh 668, 1), et peut-être en viendrait-on à mépriser les interdits de Yom tov (Ran). Certains ont pris l’usage de ne pas prendre tout le repas de Yom tov dans la souka, mais seulement le début. En matière de sommeil également, les décisionnaires sont partagés ; la coutume est de n’y pas dormir (Michna Beroura 668, 6). On ne fait pas la mitsva du loulav, à Chemini ‘Atséret, car dans son fondement, faire cette mitsva au-delà du premier jour est une règle rabbinique ; par conséquent, les sages n’ont point prescrit de prendre le loulav à Chemini ‘Atséret (Ran ; cf. Yom Tov Chéni Kehilkhato 1, 91 et note 280).

Un œuf pondu un premier jour de Yom tov, il est interdit de le manger tout au long de ce jour ; mais il est permis de le manger le second jour de Yom tov. Nous avons vu, en effet, que le fondement halakhique de l’institution du second jour, c’est le doute quant au jour où tombe la fête. Dès lors, si le premier jour est saint, le second est profane, et il n’y a pas d’interdit à manger cet œuf ; et si le premier jour est profane, il ne pèse aucun interdit sur l’œuf qui y a été pondu. À Roch hachana, les deux jours sont considérés comme un seul et long jour ; aussi, l’œuf apparu le premier est aussi interdit le second (Beitsa 4b, Choul’han ‘Aroukh 513, 5).

[5]. Le fils du Méïrat ‘Einaïm (Rav Yehochoua Falk) écrit au nom de sa mère qu’il est juste d’allumer les bougies après l’apparition des étoiles, afin de ne pas faire, pendant le premier Yom tov, de préparatifs en vue du second, comme nous le rapportons en Har’havot sur chap. 2, 2, 2. Et tel est l’usage, comme il apparaît en Michnat Ya’avets, Ora’h ‘Haïm 34, Pisqé Techouva 514, 19, Yom tov chéni kehilkhato 1, 14. Néanmoins, de nombreux auteurs ont écrit qu’il est permis d’allumer avant le crépuscule même ; ainsi de : Chné Lou’hot Habrit, Elya Rabba, Michna Beroura 514, 33. Il n’y a pas là de préparatifs, selon eux, puisque, dès le moment de l’allumage, on tire profit des veilleuses.

Cf. ci-dessus, chap. 2 § 12, où il est dit que, lorsque le Yom tov coïncide avec l’issue de Chabbat, il ne faut pas, a priori, prendre la sé’ouda chelichit (troisième repas) au cours des trois dernières heures du Chabbat. Si l’on a omis de prendre ce repas auparavant, on pourra le prendre après ; simplement, on s’efforcera de limiter sa consommation. Le premier Yom tov, il n’est en revanche pas nécessaire de mesurer sa consommation à l’approche du second Yom tov, car le second ne saurait faire échec à la mitsva du premier, comme l’explique le Hit’orerout Techouva II 53. C’est ce qu’écrit le Béour Halakha 529, 1 ד »ה בערב, contrairement à l’avis du Maguen Avraham 529, 1 et de ceux qui partagent son opinion, lesquels sont rigoureux en la matière.

06 – Quand on séjourne en diaspora

Nos sages enseignent que, si l’on quitte la terre d’Israël pour voyager à l’étranger, et que son intention soit de s’établir en diaspora, on a, dès l’instant où l’on arrive en un lieu où habitent des Juifs, le statut de Juif de la diaspora ; on doit alors observer le second jour de fête de diaspora (Pessa’him 51a, Choul’han ‘Aroukh 496, 3).

Si son intention est de revenir, son statut fondamental est celui de Juif d’Erets Israël ; dès lors, si l’on séjourne, le Yom tov, en dehors du périmètre sabbatique (te’houm Chabbat) qui circonscrit la communauté juive, on n’observe point le second jour de Yom tov, propre à la diaspora, et l’on est autorisé à faire des travaux ce jour-là (Choul’han ‘Aroukh 496, 3).

Mais lorsqu’on se trouve au sein d’une communauté juive, ou à l’intérieur du périmètre sabbatique de celle-ci, on doit se conduire comme ses membres, afin de ne pas paraître contredire leur coutume (Pessa’him 50a, Choul’han ‘Aroukh 496, 3). Par conséquent, il sera interdit d’accomplir quelque travail, durant le second jour de Yom tov que cette communauté observe. Il est vrai que certains auteurs estiment qu’il est permis d’accomplir des travaux, à condition que cela soit discrètement (Avqat Rokhel 26, Yam Chel Chelomo). Mais en pratique, la majorité des décisionnaires estiment que, quand bien même on reste discret, on doit se conduire suivant la coutume locale pour tout ce qui ressortit aux interdits de la fête ; en effet, si l’on était indulgent en la matière, cela finirait par se savoir, de sorte que l’on contredirait l’usage local et porterait atteinte au Yom tov de ladite communauté (Tossephot et Rabbi Zera’hia Halévi, Michna Beroura 496, 9)[6].

Puisque l’on a le statut de Juif d’Israël, on doit faire la Havdala à l’issue du premier jour de Yom tov, ce discrètement ; et le lendemain (jour appelé Isrou ‘hag), on aura l’obligation de mettre les téphilines, discrètement encore. Afin de ne pas paraître contredire la coutume locale, on aura soin de porter des vêtements de Yom tov et d’allumer des veilleuses en l’honneur du second jour, mais sans prononcer de bénédiction. S’agissant des prières, il semblerait préférable, de prime abord, de prier chez soi, individuellement, afin de ne pas se trouver au sein des autres fidèles tout en ayant à prononcer un autre texte qu’eux ; en effet, tandis qu’eux réciteraient la prière de Yom tov, on aurait à réciter le rituel de ‘Hol hamo’ed ou celui d’un jour profane (Ora’h Michpat 129). Mais si l’on peut venir à une partie de l’office, sans qu’il soit visible que l’on récite un autre texte, il est préférable de venir à la synagogue afin d’y écouter le Qadich et la Qedoucha. Si c’est possible, il sera même préférable de dire la ‘Amida au sein de la communauté, tout en cachant le fait que l’on récite un autre texte qu’elle[7].

Le soir du séder, si l’on dispose d’un appartement indépendant, on n’aura pas l’obligation de se joindre aux gens habitant en diaspora. Mais si l’on est invité à séjourner au domicile de gens de diaspora, on participera à leur séder ; simplement, on ne prononcera pas les bénédictions portant sur les mitsvot : on répondra seulement amen après elles (‘Hayé Adam 103, 4)[8].


[6]. Selon Avqat Rokhel 26, le Mabit III 149 et le Yam Chel Chelomo sur Beitsa 1, 8, l’obligation de se conduire selon la coutume locale ne vaut qu’en public ; mais en secret, on peut être indulgent, conformément à sa propre coutume. De même, nous voyons qu’il est convenu de ne pas obliger les personnes habitant en Israël à déposer un érouv tavchilin, du second jour de Yom tov pour le Chabbat ; en effet, quand ils cuisineront, ceux qui les verront penseront que, selon toute vraisemblance, ils ont prévu un érouv tavchilin (Michna Beroura 496, 13). Cependant, en pratique, la grande majorité des décisionnaires estiment interdit d’exécuter des mélakhot, fût-ce discrètement, car, si l’on était indulgent en cela, l’exécution de ces travaux finirait par se savoir (Radbaz IV 1145, Mahari Castro, Peri ‘Hadach 468, Maguen Avraham 496, 4, Elya Rabba 5, Birké Yossef 3, Choul’han ‘Aroukh Harav 7, Michna Beroura 9, Ora’h Michpat 129).

Les A’haronim contemporains ont traité de la question du mouqtsé : certains ont voulu se montrer indulgents (Chévet Halévi VII 65), d’autres sont partiellement indulgents (Yom Tov Chéni Kehilkhato 16). Il semble qu’il n’y ait pas de différence à faire entre les cas : à l’égard de tous les interdits, il y a lieu d’être rigoureux, même quand on n’est pas visible des autres. Toutefois, en cas de nécessité pressante, l’habitant d’Israël peut être indulgent lorsqu’il est certain qu’aucun habitant de diaspora ne le verra, ou que, si on le voit, on pourra supposer que la chose a été faite de façon permise ; par exemple, si des gens de diaspora voient de la lumière chez leur coreligionnaire d’Israël, ils pourront penser que la lumière a été allumée par le biais d’une minuterie sabbatique (Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm IV 104). La raison en est que tout le fondement de l’interdit des travaux au second jour de Yom tov, est rabbinique ; de sorte que, en cas de nécessité pressante, on peut s’appuyer sur les décisionnaires indulgents ; et toute la raison pour laquelle on est rigoureux, même quand on agit discrètement, c’est que, si l’on devait se conduire avec indulgence dans tous les cas, cela finirait par se savoir ; tandis que, lorsqu’il est question des seuls cas de nécessité pressante, il  n’est pas tellement à craindre que la chose se sache.

Nous écrivons plus haut que l’obligation de se conduire selon la coutume de diaspora s’impose dans les limites du périmètre sabbatique de la communauté juive, et telle est la position des décisionnaires cités par le Michna Beroura 496, 10. Cela laisse entendre que l’on ne tient pas compte des Juifs isolés. Il semble qu’il n’y ait pas non plus à tenir compte des Juifs non pratiquants, même s’ils sont en nombre supérieur à dix, tant qu’ils ne sont pas organisés en communauté juive.

[7]. Le Rav Kook écrit, en Ora’h Michpat 129, que le Juif d’Erets Israël séjournant à l’étranger fera mieux de ne pas aller à la synagogue, le Yom tov, quand il est à craindre qu’on l’appelle à la Torah. Selon le Rav Chelomo Zalman Auerbach, même s’il peut cacher qu’il récite un autre texte, il n’a pas l’obligation d’aller à la synagogue, car on ne saurait lui imposer de rester présent à une si longue prière. Il semble que tous les décisionnaires s’accorderaient avec cela ; simplement, la question est de savoir s’il est bon, a priori, que ce Juif vienne à la synagogue. Il est bien entendu que, lorsqu’il lui est difficile de prier selon une version autre que celle de la communauté sans que cela soit perceptible, il vaut mieux ne pas s’y rendre. Mais si l’on peut prier, de manière discrète, suivant son propre texte, de nombreux auteurs estiment qu’il est préférable de se rendre à la synagogue, afin de prier au sein d’un minyan et de répondre au Qaddich et à la Qedoucha (cf. Or lé-Tsion III 23, 1, Sia’h Na’houm 28, Yom Tov Cheni Kehilkhato 3, 17). Selon le Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm III 92, dans le cas où l’on prie régulièrement au sein de cette communauté, et où les fidèles s’apercevraient que l’on n’est point venu, on devra prier au sein de son minyan régulier, en récitant le texte des jours profanes ; mais on sera discret à cet égard. On s’efforcera de ne pas être appelé à la Torah ; mais si l’on est appelé, on montera. Quand un cohen d’Erets Israël vient à la synagogue à Isrou ‘hag, et que les fidèles du lieu récitent la prière de Moussaf, le cohen montera à l’estrade, selon le Maharam ben ‘Haviv, afin de bénir l’assemblée ; en effet, le cohen est autorisé à bénir la communauté de nombreuses fois le même jour. Selon le Guinat Vradim (Ora’h ‘Haïm I 13), il ne montera pas, puisqu’il ne récite pas lui-même la prière de Moussaf. Pour le Rav Kook, le cohen montera, mais il ne prononcera pas le nom divin (Ora’h Michpat 129) ; cependant, s’il est le seul cohen, il pourra monter et prononcer normalement la bénédiction (Or lé-Tsion III 23, 2).

Si dix Juifs d’Erets Israël sont présents dans la ville, il leur est interdit d’organiser leur propre minyan, même discrètement. Il est vrai que les Juifs de diaspora, quand ils se rendent en Israël, ont coutume d’organiser un minyan de second jour de Yom tov, comme nous le verrons ci-après (§ 9) ; mais cela s’explique par le fait que les rabbins d’Erets Israël ont autorisé la tenue de tels offices. Mais en diaspora, cela n’est pas l’usage. C’est ce qu’écrivent le Har Tsvi II 78, le Or lé-Tsion III 23, 1, le Rav Chelomo Zalman Auerbach et le Rav Yossef Chalom Elyachiv (Yom Tov Cheni Kehilkhato 3, note 76). Nous avons entendu que, en certaines contrées, il est d’usage d’organiser de tels offices avec l’autorisation des rabbins locaux, qui s’appuient, à cet égard, sur l’usage des Juifs de diaspora séjournant en Israël.

[8]. Certains auteurs, cependant, disent que, même si l’on ne dispose pas d’appartement séparé, mais que l’on puisse s’esquiver, il sera préférable de ne pas prendre part au second séder (Rav Auerbach et Rav Elyachiv, cités par Yom Tov Cheni Kehilkhato 3, note 84). Or lé-Tsion III 23, 1 écrit que, suivant la coutume séfarade, on ne participe pas au second séder. On sera donc fondé à choisir quoi faire.

Puisqu’il a été décidé que, même discrètement, on ne ferait pas de travaux ce jour-là, il est évident que l’on ne devra pas non plus manger de ‘hamets au huitième jour de Pessa’h, qui est un second jour de Yom tov propre à la diaspora (‘Aroukh Hachoul’han 496, 5).

07 – Si l’on quitte Israël pour une longue période, avec l’intention d’y revenir

Un grand doute se présente, dans le cas d’un Juif qui quitte la terre d’Israël pour une longue période, mais qui a l’intention d’y revenir. D’un côté, puisqu’il a l’intention de revenir, il a de prime abord le statut de Juif d’Erets Israël ; de l’autre, il se peut que, par l’expression « dans l’intention de revenir », les sages aient visé le cas où l’on revient en terre d’Israël après un court séjour à l’étranger ; mais que, si l’on y reste longtemps, on doive être considéré, pendant toute cette période, comme un Juif de diaspora. De plus, il est à craindre que cette personne décide finalement de s’installer durablement en diaspora.

Deux thèses principales ont été exprimées dans un tel cas : certains disent que, si celui qui quitte la terre d’Israël prévoit de rester en diaspora un an ou davantage, il sera, pendant cette période, considéré comme un habitant de diaspora, et devra donc observer le second jour de diaspora. De nombreux rabbins de diaspora ont coutume de donner cette directive.

D’autres pensent que, même si l’on a l’intention de rester en diaspora plusieurs années, tant qu’il est parfaitement certain que l’on reviendra, le séjour à l’étranger est encore considéré comme temporaire, de sorte que l’on a le statut de Juif d’Erets Israël. Néanmoins, il est clair qu’il y a à cela une limite, et qu’il ne se peut pas qu’une personne ayant l’intention de rester en diaspora de nombreuses années continue à observer la coutume d’Erets Israël. Par conséquent, il semble que, tant que l’on a l’intention de revenir avant l’expiration des quatre années prochaines, on soit encore considéré comme un habitant temporaire ; en effet, nous voyons que les missions les plus longues, effectuées par des Israéliens à l’étranger, durent près de quatre ans. Mais si l’on a l’intention de s’installer en diaspora quatre ans ou davantage, quoiqu’on ait clairement l’intention de revenir en Erets Israël, on devra observer un second jour de Yom tov, pendant toutes les fêtes où l’on se trouvera en diaspora.

Il semble en pratique que, lorsqu’une personne quitte Israël dans un but qui n’est pas assorti d’un temps déterminé, il lui faille adopter le premier système ; même quand sa claire intention est de revenir en Israël, tant que l’on quitte le pays pour une période d’un an, on a, pendant la durée de ce séjour, le statut d’un habitant de diaspora. Si l’on a une famille, on n’est, durant cette année, considéré comme habitant de diaspora que dans le cas où sa famille a quitté Israël avec soi.

Mais si l’on part en diaspora dans un but clairement assorti d’un temps déterminé, on devra adopter le second système. Par conséquent, si l’on part en mission éducative, ou en mission commerciale pour une société israélienne, ou pour les besoins de ses études, ou pour quelque autre besoin défini, on sera, tant que l’on a l’intention de revenir en Israël dans les quatre ans, considéré encore comme un habitant de la terre d’Israël. Si l’on part pour quatre ans ou plus, on devra observer le second jour de Yom tov de diaspora. En ces matières, il y a de nombreux cas intermédiaires, dans lesquels il faut consulter un rabbin.

Il faut ajouter que, lorsqu’une personne appartient à une communauté ayant à sa tête un rabbin qui en est l’enseignant attitré, et que celui-ci donne publiquement pour directive de suivre le premier système, on devra se conformer à son enseignement, tout le temps qu’on se trouvera dans sa communauté[9].


[9]. Jadis, quand les chemins étaient difficiles, il n’était pas simple de déménager, explique le Radbaz (4145) ; si l’on déménageait avec sa femme et ses enfants pour s’installer en diaspora, quand bien même on avait l’intention de revenir, on prenait le statut d’habitant de diaspora, dès lors qu’il y avait un risque d’y rester. Ses propos sont rapportés en tant que halakha : Maguen Avraham 496, 7, Knesset Haguedola, Peri ‘Hadach 468, Elya Rabba 496, 6, Michna Beroura 13. Mais si, selon ce que l’on a programmé, il n’y a pas de risque de rester en diaspora, plusieurs A’haronim écrivent que, de l’avis même du Radbaz, on garde le statut d’habitant de la terre d’Israël, bien que l’on soit parti avec sa famille (Chelamé Tsibour 234, Peqoudat El’azar, Ora’h ‘Haïm 496). De nos jours, où les voyages sont devenus plus faciles, de nombreux auteurs estiment que le critère n’est plus le voyage de la famille, mais l’intention de la personne : même si elle déménage avec sa famille, elle gardera le statut d’habitant d’Erets Israël, dès lors qu’elle a la claire intention de revenir. Toutefois, il est évident que, si la personne a l’intention de rester en diaspora de longues années, elle aura le statut d’habitant de diaspora, même quand il est parfaitement certain qu’elle reviendra en Israël ; car son séjour prolongé à l’étranger fait déjà d’elle un habitant du lieu. La question qui se pose est de savoir pendant quelle durée on peut encore être considéré comme résident de la terre d’Israël, dispensé du second jour de Yom tov. Parmi les livres des décisionnaires, nous avons trouvé de nombreuses réponses à cette question, et il semble, de prime abord, que chaque décisionnaire ait sa propre opinion. Cependant, ce qui les différencie tient essentiellement au fait qu’ils répondaient à différentes questions qui leur étaient soumises ; et si l’on examine profondément leur pensée, il apparaît en vérité qu’il existe deux thèses principales :

Première thèse : l’année est la période de temps déterminante. Nous voyons en effet (Baba Batra 7b) que, après un an, une personne est considérée comme résidente du lieu et s’oblige à tous les paiements d’impôts. Aussi, quand bien même elle aurait l’intention de revenir en terre d’Israël, le fait qu’elle soit partie en diaspora pour un an implique que, pendant cette période, elle est considérée comme habitante du lieu. C’est ce qu’écrivent Avné Nézer, Ora’h ‘Haïm 424, 28, le ‘Aroukh Hachoul’han 496, 5, le Tsits Eliézer IX 30, le ‘Hazon ‘Ovadia, Yom Tov p. 121. C’est aussi en ce sens qu’inclinent de nombreux rabbins de diaspora.

Seconde thèse : ceux qui tranchent selon elle ne spécifient pas un nombre d’années, mais parlent de « quelques années », expression qui, d’après le contexte, signifie deux ou trois ans, ou un peu plus. L’idée est que c’est seulement après un séjour de quelques années que, même si l’on a certainement l’intention de revenir, on est considéré comme un des Juifs locaux. C’est dans un sens proche que se prononce le Michné Halakhot 4, 83 ; telle est l’opinion du Rav Yossef Chalom Elyachiv, telle que la rapporte le Yom Tov Chéni Kehilkhato p. 162, et du Or lé-Tsion III 23, 5. Le Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm III 74 écrit aussi cela en réponse à la question de personnes s’installant en Erets Israël pour un an ou deux.

Bien que de nombreux rabbins de diaspora tranchent selon la première thèse (des propos du ‘Hakham Tsvi 167, il semble que, même si l’on a pour intention de revenir en terre d’Israël, on doive observer deux jours), nous avons retenu en pratique, s’agissant de ceux qui partent en mission définie, la seconde thèse, parce que l’obligation du second jour de Yom tov est une norme fondamentalement rabbinique, et qu’en cas de doute portant sur une norme rabbinique on est indulgent ; c’est aussi ce qui nous apparaît au regard de la logique.

Par conséquent, quand une personne quitte Israël dans un but qui n’est pas nettement défini, et quoiqu’elle ait l’intention de revenir, il existe un certain risque qu’elle décide de rester en diaspora. Aussi, dans le cas où elle est partie pour une durée d’un an, elle aura le statut d’un Juif de diaspora, conformément à la première thèse. Mais si cette personne a un objectif défini, assorti d’une durée précise, comme dans le cas d’une mission d’éducation, d’une mission d’affaires ou d’un cursus d’études supérieures, et bien qu’elle ait quitté Israël pour quelques années, sa position à l’étranger n’est que temporaire, aussi bien à ses propres yeux qu’à ceux de l’entourage. Simplement, on est contraint de déterminer un temps limite à cet égard, afin que la halakha ne soit pas sujette à approximation. Or puisque la durée d’un séjour assorti d’objectifs précis, qu’ils soient éducatifs ou commerciaux, n’excède généralement pas quatre ans, telle est la limite temporaire. C’est aussi de cette façon que les gens le considèrent : une personne qui séjourne à l’étranger pour quatre ans ou davantage ne peut prétendre n’être pas semblable aux Juifs locaux.

Si l’on est parti pour l’étranger dans une intention définie pour une période de deux ans, et que l’on décide ensuite d’y rester encore deux années supplémentaires, on devra, dès le moment où l’on a pris cette décision d’ajouter deux années à son séjour, adopter les usages des Juifs locaux. Même si l’on se rend en Israël chaque année, ou tous les six mois, dès lors que l’on a l’intention de résider quatre ans en diaspora, on aura, tout le temps que l’on sera en diaspora, le statut de Juif local. Simplement, durant ses visites en Israël, on reprendra temporairement le statut de Juif d’Erets Israël, puisque l’on a un lien profond avec la terre d’Israël, comme nous l’expliquons au paragraphe suivant, d’après le Maharitats 52.

Il se peut qu’un autre motif s’associe aux précédents, aux yeux des rabbins de diaspora, pour pencher en faveur des décisionnaires selon qui l’année est le temps limite. Ils se seront en effet aperçu que, lorsque des Juifs ayant quitté Israël et vivant parmi les membres de leur communauté pour une longue durée n’observent pas le second jour de Yom tov, ils heurtent et affaiblissent le reste de la communauté dans son observance de la fête, et peut-être même dans celle d’autres mitsvot. Autrefois, il n’existait pas de cas où un Juif résidant en diaspora un an avec sa famille gardait le statut d’habitant d’Erets Israël, comme nous l’avons appris du Radbaz ; et nous trouvons des cas où les sages déclarent qu’il est interdit de se conduire différemment de la communauté, même si l’on ne réside qu’un jour en diaspora, cela pour éviter la controverse (Pessa’him 50a, Choul’han ‘Aroukh 496, 3). On peut élargir la portée de leur propos en disant que, lorsqu’une personne a l’intention de rester un an en diaspora, il ne suffit plus qu’elle se conduise extérieurement comme les membres de la communauté locale ; puisque cette personne est mêlée aux membres de la communauté, ceux-ci sauront et sentiront certainement qu’elle n’observe pas le second jour ; aussi, afin de ne pas contredire la coutume de la diaspora, elle devra se conduire entièrement comme les autres, en toutes leurs règles. On voit, dans ce sens, que nos sages ont ordonné de pratiquer un second jour de Yom tov pour toutes les fêtes, même celles où les émissaires arrivaient à temps devant le beit-din, cela afin de ne pas faire de différence entre les fêtes (Roch Hachana 21a, cf. ci-dessus § 2). Nos sages ont aussi prescrit de réciter, le second jour de Yom tov, les bénédictions de la fête, parce que, si on ne les récitait pas, le second jour de Yom tov en viendrait à être annulé de fait (Chabbat 23a, cf. ci-dessus § 5). C’est pourquoi nous écrivons que, si l’on se trouve dans une communauté dotée d’un chef, qui soit son rabbin attitré, on devra se conduire selon ses prescriptions.

08 – Si l’on se rend en Israël pour une visite ou pour y séjourner

Certains disent qu’un habitant de diaspora qui est en visite en Israël a, tout le temps qu’il s’y trouve, le statut d’un habitant d’Israël (‘Hakham Tsvi 167). Mais de l’avis de la majorité des décisionnaires, puisque cette personne a pour lieu d’habitation un pays de diaspora, elle garde le statut d’habitant de la diaspora, même quand elle visite Israël ; et tel est l’usage en pratique (Birké Yossef 496, 7, Michna Beroura 13).

Toutefois, quand apparaît un doute supplémentaire, par exemple quand une personne a l’intention de rester longtemps en Israël, ou quand elle a le projet de faire son alya, ou encore quand ses enfants habitent Israël, on associe l’opinion des auteurs selon lesquels il lui faut toujours observer un seul jour au fait que, dans les dernières générations, les chances que les Juifs visitant Israël décident de s’y établir se sont accrues ; on dit alors à cette personne qu’il lui faut se conduire selon la coutume d’Erets Israël.

Par conséquent, si une personne s’installe en Israël pour une année d’étude, elle aura même statut que les habitants d’Israël. Quand bien même elle a pour claire intention de retourner s’établir en diaspora, que ses parents y résident, et qu’elle y voyage au cours de l’année pour leur rendre visite, le fait d’habiter de manière prolongée en Erets Israël la transforme en Juif de la terre d’Israël, pendant le temps qu’elle y séjourne. De plus, il existe toujours une chance quelconque pour que cette personne décide de faire son alya, car c’est une mitsva de la Torah que de s’établir en Erets Israël.

Mais celui qui vient en simple visite en Israël, même s’il vient pour six mois, garde, tant qu’il a pour projet de retourner vivre en diaspora, le statut d’habitant de la diaspora. Si l’on fait de fréquentes visites en Israël, au point que le cumul de ces visites est égal à un an, il s’avère que l’on est déjà, dans une certaine mesure, un habitant d’Israël ; de plus, il y a une certaine probabilité que l’on fasse son alya ; dès lors, pendant les fêtes où l’on sera en Israël, on observera un seul jour de Yom tov.

Si l’on vient en Israël pour une visite, et que l’on ait pour projet de faire son alya quand la chose sera possible, on se conduira, durant son séjour en Israël, comme un Juif d’Israël, même si la visite est courte en elle-même, et même si des années doivent encore passer avant qu’on ne puisse réaliser son projet.

Si la personne en visite en Israël a des enfants ou des parents installés dans le pays, et quoiqu’elle n’ait pas l’intention de faire son alya, elle aura, durant son séjour, même statut que les Juifs d’Israël, puisqu’elle a un lien familial profond avec Erets Israël, et que, dès lors, il y a une certaine chance qu’elle fasse son alya.

De même, si l’on a acheté un appartement en Israël afin d’y habiter pendant ses séjours, on aura même statut que les habitants d’Israël durant lesdits séjours.

Dans le même sens, celui qui a quitté Israël pour s’établir en diaspora, même s’il y réside des décennies durant, se conduira, pendant ses visites en Israël, comme un habitant d’Israël, tant qu’il existe une chance quelconque qu’il revienne s’établir en Israël, puisqu’il y a habité pendant des années.

Cependant, tous ceux-là, parce qu’ils n’ont pas encore, en pratique, fait leur alya, devront, quand ils se trouveront physiquement en diaspora, observer le second Yom tov de diaspora[10].


[10]. Le ‘Hakham Tsvi (167) écrit que, dans tous les cas, celui qui vient de diaspora en Israël doit faire un seul jour de Yom tov. En effet, l’obligation coutumière de continuer à observer les rigueurs de l’endroit d’où l’on vient (‘houmré maqom chéyatsa micham) ne vaut qu’à la condition que l’on poursuive perpétuellement dans cette rigueur. Mais en cette matière, celui qui fait son alya cessera d’observer deux jours de Yom tov, puisque la coutume du second jour ne vise que la diaspora ; aussi, tout le temps que l’on séjournera en Erets Israël, il sera interdit de faire un second jour de Yom tov. C’est aussi l’opinion du Choul’han ‘Aroukh Harav 496, 11. Cependant, pour la majorité des décisionnaires, un habitant de diaspora qui vient en Erets Israël doit observer deux jours. Telle est la position du Avqat Rokhel 26, du Guinat Vradim, du Birké Yossef 496, 7, du Cha’aré Techouva 5, du Michna Beroura 13 et de nombreux autres décisionnaires. Le Rav Chemouel Salant tendait à faire sienne l’opinion du ‘Hakham Tsvi, mais, parce qu’il ne voulait pas contrer l’usage, il donna pour consigne, s’agissant d’un cas de doute, d’observer la rigueur d’un « jour et demi », c’est-à-dire de s’abstenir des travaux interdits, mais, en revanche, de ne pas réciter les prières et les bénédictions qui ne se disent pas en Erets Israël (‘Ir Haqodech Véhamiqdach III p. 254). C’est aussi en ce sens qu’inclinait le Rav Kook.

De prime abord, suivant les principes de la halakha, nous devrions donner pour consigne de suivre le ‘Hakham Tsvi, puisque le second jour de Yom tov est une institution rabbinique, et que l’on est indulgent en cas de doute portant sur une norme rabbinique. De plus, en cas de doute portant sur une bénédiction, on a pour principe de s’abstenir, alors que, le second jour de Yom tov, on est rigoureux et l’on ajoute des bénédictions. Mais les habitants de la diaspora ont coutume de marquer le second jour de Yom tov y compris quand ils se trouvent en terre d’Israël ; or quand il existe une coutume, le principe d’après lequel on est indulgent en cas de doute portant sur une norme rabbinique ne s’applique pas, non plus que le principe selon lequel on s’abstient en cas de doute portant sur une bénédiction.

Cependant, quand un doute supplémentaire se joint au précédent, il se peut que les décisionnaires rigoureux eux-mêmes s’accorderaient à dire qu’il faut se conduire comme les habitants d’Erets Israël, comme en témoigna le ‘Hida dans ‘Haïm Chaal I 55 : les rabbins d’Erets Israël donnèrent aux élèves venus y étudier, dès lors qu’il y avait une chance quelconque qu’ils s’y établissent, le statut d’habitants d’Erets Israël pendant le temps de leur séjour. Or le ‘Hida fait partie de ceux qui font obligation aux visiteurs d’accomplir un second jour de Yom tov en terre d’Israël. Et même si l’on dit que, dans le cas même où il existerait un doute supplémentaire, la majorité des décisionnaires continueraient de penser qu’il faut observer deux jours (comme l’écrit le Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm III 74), il n’y a déjà plus de coutume contraignante à l’égard d’un tel cas ; par conséquent, on peut revenir alors aux principes généraux de la halakha : en cas de doute portant sur une norme rabbinique, on est indulgent, et il n’y a pas lieu d’obliger ceux qui séjournent en Erets Israël à marquer un second jour de Yom tov ; à plus forte raison n’y a-t-il pas lieu de prendre le risque que soient prononcées des bénédictions vaines.

Un autre élément important s’est ajouté à cela dans les dernières générations : le peuple d’Israël a commencé à se rassembler sur sa terre ; celle-ci donne ses récoltes, et il est beaucoup plus facile d’accomplir, de nos jours, la mitsva de l’alya (cf. Michna Beroura 496, 12, qui cite les propos de décisionnaires d’après lesquels l’un des critères centraux, en cette matière, est la chance que la personne décide de rester à l’endroit où elle s’est provisoirement établie). Aussi écrivons-nous que, si l’on a l’intention de faire son alya, bien que l’on ne sache pas quand ce sera, et que de nombreuses années puissent encore passer avant que l’on réussisse, concrètement, à accomplir ce rêve, on témoigne par ce projet même d’un lien significatif avec la terre d’Israël ; en ce cas, dès la première visite, on se conformera à la coutume de la terre d’Israël.

Il faut savoir qu’un même homme peut avoir une double appartenance : quand il se trouvera en Erets Israël, il observera un jour, tandis qu’en diaspora il fera deux jours, comme l’écrit le Maharitats dans ses responsa (52) au sujet d’un homme habitant un an en terre d’Israël et un an en diaspora : quand il se trouve sur la terre d’Israël, son statut est celui d’un habitant du pays, et quand il se trouve en diaspora, son statut est celui d’un habitant de la diaspora. C’est aussi ce qu’écrit le ‘Assé Lekha Rav 7, 33. Par conséquent, quiconque vient en Israël pour une simple visite devra observer deux jours. Mais si l’on vient pour une année d’étude, on sera quelque peu comparable à un habitant du pays, puisqu’on s’y trouvera pour une période prolongée. C’est ainsi que notre maître, le primat de Sion, Rav Mordekhaï Elyahou – que la mémoire du juste soit bénie – donnait pour instruction à des jeunes gens venus en Israël pour une période d’étude de se conduire comme des habitants d’Israël ; puis, quand ils voulaient repartir en diaspora, ils devaient venir demander si cela leur était permis. Cette position se fonde sur les propos du ‘Hida, cités plus haut. C’est aussi ce qu’écrit notre maître le Rav Goren dans la revue Tchumin n°24, p. 333.

Il semble que ceux-là même dont les séjours en Israël, cumulés, atteignent la durée d’un an, sont déjà considérés dans une certaine mesure comme des habitants du pays ; et il existe toujours une certaine chance qu’ils fassent leur alya, aussi se conduiront-ils comme des habitants du pays. De même, celui qui a des parents ou des enfants ayant fait leur alya, ainsi que celui qui acheté un appartement afin d’y habiter lors de ses séjours – avant même que ses séjours cumulés n’atteignent la durée d’un an – se conduiront, quand ils se trouveront en Israël, comme des habitants du pays.

09 – Coutume des habitants de diaspora qui séjournent en Israël

Comme nous l’avons vu, les habitants de diaspora qui se rendent en Israël pour y faire visite, et qui n’ont pas l’intention de faire leur alya, doivent observer le second jour de Yom tov de diaspora. En d’autres termes, ils devront s’abstenir des travaux interdits le Yom tov, réciter la prière de Yom tov, réciter le Qidouch sur une coupe de vin et prendre les repas (sé’oudot) de fête. De prime abord, il eût certes convenu de prier discrètement, car nos sages disent de celui qui arrive en un lieu où l’on suit un autre usage qu’il ne devra exciper publiquement en rien aux usages locaux, cela afin de n’avoir pas l’air de contredire lesdits usages. Mais les rabbins d’Erets Israël ont déjà exprimé leur accord pour que ceux qui viennent en visite organisent pour eux-mêmes un minyan afin d’y prier selon le rituel de la fête, le second jour de Yom tov ; dès lors, il n’y a pas là d’atteinte portée à la coutume d’Erets Israël (Avqat Rokhel 26, Kaf Ha’haïm 496, 38).

S’agissant de la mitsva de la souka : si la personne venue de diaspora est invitée chez un habitant d’Israël, elle ne mangera pas dans la souka à Chemini ‘atséret. Mais si elle dispose d’un appartement indépendant, ou si elle est à l’hôtel, elle mangera dans la souka à Chemini ‘atséret[11].

Pour les besoins d’une mitsva, ou pour quelque autre grande nécessité, il est permis à un habitant de diaspora de demander à des habitants d’Israël de faire, pour lui, une mélakha, puisqu’il s’agit d’un cas de chevout de-chevout[b]. En effet, la coutume du second jour de Yom tov est, dans son fondement, rabbinique, et le fait même de demander l’exécution d’une mélakha n’est interdit que rabbiniquement. Mais s’il n’y a pas à cela de nécessité pour une mitsva, ni d’autre grande nécessité, c’est interdit[12].


[11]. Selon le Michna Beroura 496, 13, on priera discrètement, conformément au principe de base selon lequel on ne doit pas se distinguer de l’usage local, afin de prévenir la controverse. Cependant, l’auteur du Avqat Rokhel (26) écrit que cette attention prêtée au fait de ne pas se distinguer pour éviter la controverse vise les actes que les gens du pays ont coutume de s’interdire ; en ce cas, si les invités sont indulgents, les gens du pays risquent de s’autoriser, sous leur influence, des indulgences. Aussi n’y a-t-il pas d’interdit à organiser ouvertement un minyan de fête, car il n’est pas à craindre que les gens de la ville apprennent de cela une quelconque indulgence. Tel est l’usage en pratique, comme l’expliquent le Kaf Ha’haïm 496, 38, le Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm V 37, 6, le Yom Tov Chéni Kehilkhato 2, 2.

S’agissant de la souka : certains estiment qu’un Juif de diaspora devra résider dans la souka à Chemini ‘atséret, même s’il est invité chez un habitant d’Israël (Or lé-Tsion III 23, 11, Yom Tov Chéni Kehilkhato 2, note 48 au nom du Rav Elyachiv et du Rav Wozner). D’autres pensent qu’on ne résidera pas dans la souka, car on paraîtrait contredire le fait que ce jour est Chemini ‘atséret [lequel suit les sept jours de Soukot]. De plus, il y aurait à cela quelque déconsidération envers la coutume d’Erets Israël (Rav Tikochinsky, Loua’h Erets Israël ; Min’hat Chelomo I 19, 1 ; Min’hat Yits’haq IX 54). Il semble que le visiteur invité chez un Juif d’Israël ne devra pas résider dans la souka ; mais que, s’il est indépendant, ou à l’hôtel, il sera préférable qu’il réside dans la souka. Toutefois, si cela lui est difficile, il sera autorisé à s’appuyer sur les opinions indulgentes. S’agissant du sommeil, on a coutume, même en diaspora, de ne pas dormir dans la souka à Chemini ‘atséret (Michna Beroura 668, 6).

[b]. Sur cette notion, cf. ci-dessus chap. 7 § 2, et Les Lois de Chabbat I 9, 11.

[12]. Selon le Cha’aré Techouva 496, 4, de même qu’il est interdit à un habitant de diaspora de faire une mélakha, de même lui est-il interdit de demander à un Juif d’Erets Israël de faire une mélakha pour lui, bien qu’il soit permis au Juif d’Erets Israël lui-même d’exécuter toutes les mélakhot. C’est aussi l’opinion du Peat Hachoul’han, Hilkhot Erets Israël 2, 15, du Min’hat Yits’haq VII 34 et du Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm IV 105. Le Min’hat Chelomo I 19, 3 tend à l’indulgence – de même qu’il est permis à une personne ayant pris sur elle la tosséfet Chabbat [sur cette notion, cf. Les Lois de Chabbat I 3, 2] de demander à une autre, qui ne l’a point prise sur elle encore, d’accomplir pour elle un travail (Choul’han ‘Aroukh 263, 17). En pratique, il y a lieu d’être rigoureux ; simplement, le statut d’un tel interdit est celui de chevout de-chevout, puisque l’observance d’un second jour de Yom tov est en soi de rang rabbinique, et que le fait de demander à un non-Juif ou à un Juif d’accomplir un travail est également un interdit rabbinique. Par conséquent, pour les besoins d’une mitsva ou quelque autre grande nécessité, c’est permis.

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