Pniné Halakha

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Chapitre 02 – Règles de l’union conjugale

11. Difficultés à accomplir la mitsva, du côté de l’homme

Tout ce que nous avons vu, quant à l’obligation d’avoir des relations périodiques, concerne des individus en bonne santé : en un tel cas, tout homme qui réduit le nombre des unions à lui prescrite enfreint un interdit toranique. Et s’il persiste, à cet égard, c’est une cause majeure de demande de divorce. En un tel cas, le mari doit dédommager son épouse, en lui versant la totalité de sa ketouba. Par contre, l’homme qui aurait des difficultés à accomplir les unions qui lui sont prescrites, parce qu’il n’est pas en bonne santé, n’a l’obligation de faire que ce que les médecins estiment à sa portée (Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 76, 3). Et dans la mesure où, dans de nombreux cas, les problèmes proviennent d’un certain manque hormonal, ou de quelque autre maladie, le mari a l’obligation de consulter les médecins, car la majorité de ces pathologies peuvent, de nos jours, être soignées par un traitement médicamenteux. Parfois, les problèmes sont d’ordre émotionnel ou psychologique ; et ce sont des problèmes de cette nature qui conduisent l’homme à annuler certaines unions intimes, ou à ne point réjouir sa femme convenablement pendant l’union. Là encore, c’est une obligation pour l’homme que de traiter les problèmes de cet ordre. Quand le problème est léger, en général, prendre conseil auprès d’un rabbin sera utile. Si le problème est difficile, il faut être aidé par un soignant qui craigne Dieu, et qui soit spécialiste en ce domaine. Si le mari est négligent, et ne traite pas son problème comme il convient, il annule une mitsva toranique ; et puisqu’il n’accomplit pas l’union conformément à la halakha, sa femme est autorisée à demander le divorce. Le mari devra la dédommager en lui versant la totalité de sa ketouba.

Si le mari a recouru aux médecins et aux soignants, respectant leurs prescriptions au maximum de ses possibilités, et que, malgré cela, il ne parvienne toujours pas à accomplir les unions régulières en leur temps, mais qu’il réussisse à tout le moins à s’unir à son épouse une fois tous les six mois, l’épouse ne peut exiger le divorce ni le montant de sa ketouba. En effet, le mari accomplit tout de même la mitsvat ‘ona selon la mesure minimale, celle à laquelle s’obligent les marins (cf. ci-dessus § 7). Mais s’il ne peut même pas accomplir cette union-là, la décision est entre les mains de l’épouse. Si elle est d’accord pour vivre avec lui de cette façon, elle y est autorisée. Si elle veut divorcer, l’homme a l’obligation d’en divorcer et de lui verser sa ketouba (Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 76, 11). Il va de soi que, même si le mari ne peut accomplir la mitsvat ‘ona en s’unissant pleinement à sa femme, c’est une mitsva pour lui que de lui complaire et de la réjouir par des baisers, des étreintes et des caresses, jusqu’à ce qu’il la mène ainsi au sommet de son plaisir. En général, s’il se conduit ainsi, bien qu’il n’ait pas le mérite d’accomplir l’union proprement dite, sa femme ne souhaitera pas divorcer de lui[10].

Quand la femme accepte de renoncer, d’un cœur entier, à ce que son mari accomplisse son devoir conjugal, cette renonciation est halakhiquement valide. Cela, à condition que l’homme ait déjà accompli la mitsva de procréer. Mais s’il ne l’a pas encore accomplie, il a l’obligation d’accomplir toutes les unions au cours desquelles il y a une chance que sa femme tombe enceinte. Et s’il ne réussit pas à accomplir ces unions, il a l’obligation d’écouter les prescriptions des médecins, afin d’accomplir sa mitsva (Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ézer 76, 6).

Quand bien même le mari aurait déjà accompli la mitsva de procréer, et sa femme aurait consenti à renoncer aux relations auxquelles elle a droit, il ne conviendrait pas d’annuler cette mitsva. Il consultera donc les médecins, afin d’accomplir la mitsva comme il convient, car telle est la bonne et saine pratique entre époux. De la même façon qu’il convient que chacun s’efforce d’accomplir toutes les mitsvot, même quand on n’en a point la complète obligation – par exemple la mitsva de la bienfaisance (gmilout ‘hassadim) ou des tsitsit –, de même doit-on s’efforcer d’accomplir la précieuse et sainte mitsva qu’est la mitsvat ‘ona, car, par elle, la Présence divine repose sur les époux et sur le monde[11].


[10]. L’un des dix décrets que prit Ezra le scribe était que les époux mangeassent de l’ail le soir de Chabbat, pour aider à la mitsvat ‘ona, car la consommation d’ail éveille l’amour et rend abondante la semence (Baba Qama 82a). Le Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 76, 3 écrit : « Mais celui qui n’est pas en bonne santé ne s’oblige qu’à la mesure de ce qu’on l’estime capable d’accomplir. » Or cette estimation est confiée à ceux qui connaissent la question, c’est-à-dire les médecins. De nos jours, avec l’aide de Dieu, des traitements ont été découverts pour la majorité des problèmes. Par exemple, il arrive que l’époux n’ait pas envie de s’unir à sa femme, parce que son corps souffre d’un manque de testostérone. Un examen simple suffit à diagnostiquer cela. En ce cas, ce sera une obligation pour l’époux que de prendre cette hormone, afin d’accomplir la mitsva. D’autres fois, la difficulté provient d’un problème de circulation du sang ; cela aussi se traite par des médicaments. Par conséquent, c’est une obligation pour celui qui ne peut accomplir convenablement son devoir conjugal que de consulter un médecin, afin de trouver un remède à son mal. S’il ne le fait pas, il annule l’accomplissement d’une mitsva de la Torah, de même que celui qui ne récite pas le Chéma Israël ou qui ne met pas ses téphilines. La règle est la même pour une femme qui sent qu’elle ne peut accomplir la mitsva avec la jouissance voulue.

Si l’homme ne peut même pas accomplir la mitsva une fois par six mois, la femme est autorisée à demander le divorce, avec le versement de toutes les sommes prévues par la ketouba. Cela, même quand il se peut que, après quelques années, on trouve un traitement au mal de son mari (comme il ressort des propos de Maïmonide, du Choul’han ‘Aroukh et de la majorité des décisionnaires). Certains disent que, si les médecins estiment qu’il y a des chances raisonnables que le mari guérisse dans les années proches, la femme ne peut demander le divorce (Rabbi Yehochoua A’haron zal, ‘Helqat Me’hoqeq 76, 18, Beit Chemouel 17).

Si les époux sont des personnes âgées, ou même simplement d’un certain âge, et que, pendant de nombreuses années, les relations entre eux aient été bonnes, le tribunal rabbinique essaie de convaincre la femme de ne pas abandonner son mari, même quand il n’y a pas de chances de guérison. Mais si elle s’entête à vouloir divorcer, le mari a l’obligation de lui remettre l’acte de divorce (responsa de Morénou Harav Lévi ben ‘Haviv 23-30).

Certains demandent s’il est permis d’utiliser un appareil électrique pour amener la femme au sommet de son plaisir, quand les époux n’y parviennent pas par les moyens habituels. Réponse : quand la situation permanente est telle que, malgré les efforts des époux, l’homme ne parvient pas à mener sa femme au sommet de sa jouissance, il semble que ce soit une mitsva que de la réjouir au moyen d’un tel appareil ; car tant que c’est lui qui réjouit son épouse, quoiqu’il s’aide d’un appareil, l’homme accomplit, ce faisant, la mitsva de la Torah. Même quand les époux sont capables d’atteindre le sommet du plaisir sans s’aider de cet appareil, il leur est permis de s’en servir à volonté : plus l’homme réjouit sa compagne, plus grande est la mitsva qu’il accomplit. Mais quand l’homme ou la femme se stimule seul, manuellement ou à l’aide de divers appareils, il y a là un interdit. En effet, ce plaisir est réservé à l’amour entre époux : dans ce cadre, il est une mitsva ; mais s’il satisfait un désir seulement individuel, il est une transgression (‘avéra) (comme nous le verrons ci-après, chap. 4 § 1 et § 10, note 15).

Un homme sensible, dont la semence s’échappe parfois à la suite des étreintes précédant l’union, n’est pas considéré comme émettant sa semence en vain. En effet, nous verrons que plusieurs Richonim autorisent l’union anale, et, selon eux, sont également autorisés les rapports dits dérekh évarim (litt. « par le biais des membres »), c’est-à-dire les relations au cours desquelles la semence s’écoule par l’effet d’étreintes et de contacts physiques entre l’homme et la femme. C’est l’opinion du Or’hot ‘Haïm (Hilkhot ketoubot 7), de Rabbénou Yona (Sanhédrin 58b), du Tour sur Even Ha’ezer 25, 2 et du Rama ad loc. De l’avis même de ceux qui interdisent cela, il n’y a pas d’interdit lorsque l’homme n’a point l’intention d’émettre ainsi sa semence. Cela peut se comparer aux travaux de Chabbat (cf. Pniné Halakha, Les Lois de Chabbat 9, 5) : quand on n’a point l’intention d’accomplir une mélakha (travail), et quand il n’est pas non plus certain que cette mélakha s’accomplira, l’interdit n’est pas constitué (Rabbi Yehouda Aszod, vol. I Yoré Dé’a 238 ; Imré Bina IV sur Even Ha’ezer 8 ; Imré Ech, Yoré Dé’a 69). Toutefois, il est fréquent que ceux qui ont cette tendance ne parviennent pas à satisfaire leur épouse comme il convient ; il leur faut alors prendre conseil auprès d’un spécialiste craignant Dieu, sur les moyens d’éviter cela.

[11]. Selon le Choul’han ‘Aroukh Harav, Ora’h ‘Haïm 280, 2, si la femme est prête à renoncer à l’union de la nuit de Chabbat, il est permis de l’annuler ; « malgré cela, il est bon de la maintenir. » Au traité Chabbat 152a, Rabbi Yehouda Hanassi demande à Rabbi Chimon ben ‘Halafta : « Pourquoi ne nous as-tu pas rendu visite pendant la fête ? » Rabbi Chimon ben ‘Halafta lui répond douloureusement qu’il a vieilli prématurément : « Les rochers sont devenus élevés, ce qui est proche est devenu lointain [un court chemin est devenu difficile à parcourir, comme un chemin vers une destination lointaine], les deux sont devenus trois [au lieu d’aller sur ses deux jambes, il lui fallait à présent une canne, en guise de troisième jambe], et ce qui établit la paix du foyer ne sert plus. » Rachi explique : « l’expression ce qui établit la paix du foyer désigne le membre viril. » Selon Rav Nissim Gaon, cette expression désigne « le désir, qui fait régner la paix entre l’homme et son épouse. » Cf. ci-dessus, chap. 1 § 4-6. S’agissant d’un homme âgé, que sa femme excuse de ne pas avoir de relations charnelles avec elle, il ressort des propos du Rav Kook (Mitsvot Reïya, Even Ha’ezer 1) que, de toute façon, l’homme n’est pas autorisé à annuler l’obligation minimale – celle des « marins » – : une fois par six mois.

12. Difficultés à accomplir la mitsva, du côté de la femme

Comme nous l’avons vu (ci-dessus, § 1), l’essentiel de la mitsva consiste dans le fait que l’homme donne du plaisir à sa femme, et la réjouisse autant qu’il lui est possible, jusqu’à ce qu’elle atteigne le sommet de son plaisir. Cependant, cela ne dépend pas exclusivement de l’homme. En effet, il arrive que, même s’il s’y efforce grandement, la femme ne parvienne pas au sommet de son plaisir. Il peut y avoir à cela différentes raisons : nous avons vu (§ 2) que les domaines de l’esprit, de l’émotion et du corps sont liés chez la femme, plus que chez l’homme ; quand la femme ne comprend pas la valeur de la mitsva, ou qu’un certain facteur la dérange, ou qu’elle est fatiguée, il se peut que, malgré tous les efforts, elle ne parvienne pas au sommet de son plaisir. Au contraire, tenter d’y parvenir risque de la laisser frustrée et attristée. En effet, lorsque le plaisir augmente et se rapproche du sommet, un grand désir se forme dans le corps et l’esprit de parvenir au sommet, et à la sensation de détente qui l’accompagne ; or, quand cela se dérobe, subsiste une profonde frustration. Quand une femme fait l’expérience de cette frustration à de nombreuses reprises, il se peut qu’elle préfère renoncer à l’essai de parvenir au sommet, afin d’éviter la dépression qui suit l’échec.

Aussi, quand une femme sait qu’il lui sera difficile d’atteindre le sommet de sa jouissance, elle peut renoncer à tenter d’y parvenir, et accomplir l’union de manière agréable, dans la joie qui accompagne le fait même d’être unis. À cette fin, l’homme doit donner quelque plaisir à son épouse ; elle aussi doit répondre à ses avances, et l’accueillir avec amour. De cette manière, ils accompliront la mitsva à un niveau dit « a posteriori[h] ». Si, en général, les époux ont la chance d’accomplir la mitsva « a priori », de façon telle que la femme atteint le sommet de sa jouissance, et que ce ne soit que de temps en temps qu’ils se contentent du degré « a posteriori », il n’y a là rien que de naturel et admis ; les époux n’ont pas à s’en affecter du tout. Mais il faut faire en sorte que cela n’arrive pas souvent.

Quand la situation est moins bonne, et que, dans la majorité des cas, la femme ne parvient pas au sommet de sa jouissance, c’est aux membres du couple de trouver la raison et la solution à cela. Parfois, le problème provient de la fatigue ou de la tension ; alors, ils doivent ordonner leur vie de façon plus équilibrée, diminuer la tension, ajouter des heures de sommeil, ou, à tout le moins, s’efforcer de dormir à l’approche de la mitsva. Quelquefois, cela arrive dans la première période de la vie matrimoniale, quand les époux n’ont pas encore appris par quel moyen parvenir à cette jouissance. Il leur faut alors apprendre comment accomplir la mitsva comme il convient. Ils ne seront pas négligents, à cet égard, car cette mitsva n’est pas moins sainte que les autres mitsvot. Bien sûr, si la femme sait que telle ou telle chose lui apportera davantage de plaisir, elle ne devra pas avoir honte de le dire à son mari.

Si, malgré toutes les tentatives, l’homme ne réussit pas à contenter son épouse jusqu’à ce qu’elle parvienne au sommet de sa jouissance, c’est une mitsva pour lui que de prendre conseil auprès d’un rabbin, ou d’un spécialiste, ou, pour l’épouse, de prendre conseil auprès d’une rabbanite ou d’une spécialiste. Parfois, un simple conseil peut résoudre le problème ; en un tel cas, un rabbin ou une rabbanite peuvent y aider. D’autres fois, il faut comprendre plus profondément quels sont les freins intérieurs qui se dressent entre époux ; parfois, le frein provient d’un problème médical, et il faut alors prendre conseil auprès d’un médecin spécialiste. En tout état de cause, il est obligatoire de traiter le problème, afin d’accomplir la mitsva conformément à la halakha.

Dans l’intervalle, les époux doivent avoir soin d’accomplir les unions selon la périodicité prescrite. Si la femme tire du plaisir de l’union, ou des caresses et étreintes qui l’accompagnent, les époux sont considérés comme accomplissant la mitsva, bien qu’à un niveau a posteriori. Si la femme n’éprouve pas même un tel plaisir, la situation est plus difficile. Quoi qu’il en soit, les époux ont l’obligation d’accomplir l’union suivant la périodicité prescrite ; par cela, ils maintiendront l’alliance matrimoniale. La mitsva s’accomplit alors à un degré qualifié de cha’at had’haq (nécessité pressante, force majeure). Mais, comme nous l’avons vu, il leur est interdit de se contenter de cela : ils ont l’obligation de prendre courage, et de se tourner vers un conseiller, afin de parvenir à accomplir la mitsva selon le degré « a priori ». Car la situation dans laquelle la femme n’éprouve pas de jouissance durant la mitsva la laisse dans un terrible manque ; cela nuit beaucoup à l’homme lui-même, et l’empêche de parvenir à la joie la plus profonde. Au lieu que son désir de s’unir à son épouse soit accueilli avec joie, et que leur union soit complète et magnifiée, l’homme reste seul avec son affront ; son désir lui paraît être une basse appétence, qui le contraint à posséder son épouse pour satisfaire son penchant, afin de ne pas commettre de péché par ailleurs. Quoi qu’il en soit, si les époux, malgré leurs efforts, n’ont pas réussi à trouver un remède à leur problème, ils veilleront à accomplir l’union selon la périodicité prescrite, même si ce n’est qu’au niveau de cha’at had’haq ; ils auront pitié et grande miséricorde l’un pour l’autre, et leur alliance sera sanctifiée par l’accomplissement de leur devoir moral l’un envers l’autre, conformément à la mitsva de la Torah[12].


[h]. La relation conjugale couronnée par l’orgasme est ce qui est appelé mitsva lekhat’hila (mitsva accomplie au degré souhaitable a priori). Quand ce couronnement manque, la mitsva est réalisée, mais à un degré moindre, appelé bedi’avad, « a posteriori ». Cf. ci-après, note 12.

[12]. Il y a trois degrés d’accomplissement de la mitsva : a) L’accomplissement essentiel de la mitsva consiste dans le fait de réjouir son épouse, jusqu’à ce qu’elle atteigne le sommet de sa jouissance ; b) a posteriori, lorsque la femme a du plaisir pendant l’union, mais sans plus de jouissance ; si l’on se réfère aux usages de sainteté observés par ceux qui pratiquent une certaine abstinence, cela même est considéré comme degré d’accomplissement « a priori », à condition que cela soit pleinement admis par la femme (cf. ci-après chap. 3 § 12) ; c) en cas de nécessité pressante, quand la femme n’a pas de plaisir, mais que les époux accomplissent l’union afin de maintenir l’alliance matrimoniale qui les lie, et pour éviter à l’homme de pécher ; c’est le degré d’intentionnalité le plus bas dans l’accomplissement de la mitsva (cf. chap. 3 § 3) ; quoi qu’il en soit, même une telle union se caractérise par la sainteté (cf. chap. 3 § 5).

Tant qu’ils sont mariés, il est interdit aux époux d’annuler l’une quelconque de leurs unions sans le plein consentement de chacun d’eux ; car les relations conjugales sont l’expression même de l’union matrimoniale qui existe entre eux. Nous l’avons vu (chap. 1 § 2), l’annulation de l’union charnelle est la première cause de divorce, car c’est en vue de telles relations que se scelle le mariage. Ce n’est que lorsque la femme a un très fort motif qu’il lui est permis, en se fondant sur les instructions d’un sage, d’annuler quelqu’une des unions dotées d’une périodicité régulière (note 6). La grossesse, l’allaitement et autres circonstances proches ne sont pas considérées comme un motif fort, en dehors de cas où une prescription médicale particulière est donnée.

Il faut encore insister sur un point : on doit se garder d’aller voir des médecins qui déconsidèrent la mitsvat ‘ona, et prescrivent, de manière irresponsable, de s’abstenir de rapports conjugaux, ou qui, lorsque la femme souffre d’hémorragies qui la rendent impures pour son mari, ne s’efforcent pas d’y trouver remède. Nos sages disent du roi David que, dans sa piété, il renonçait aux honneurs de l’étiquette royale, et se souillait les mains avec le chorion et le placenta de femmes qui le consultaient, afin de les déclarer pures et de les autoriser à leur mari (Berakhot 4a), tandis qu’eux, dont c’est le travail, recommandent inconsidérément la séparation d’une femme d’avec son mari. Aussi, même après une prescription médicale de s’abstenir de l’accomplissement d’un rapport conjugal, il faut encore interroger un sage sur la conduite à tenir ; il arrive en effet qu’il faille changer de médecin, tandis que, d’autres fois, quand le médecin craint Dieu et que l’on peut se fier à lui, il faut se demander s’il serait recommandé d’accomplir l’union par voie anale (cf. Rama sur Even Ha’ezer 25, 2). Cf. ci-après, chap. 3 § 7, note 4, où l’on apprendra que, souvent, les tromperies et les péchés d’union interdite commencent dans des périodes où les époux n’accomplissent pas les unions à périodicité fixe ; par exemple, quand la femme est enceinte ou allaite.

Certaines femmes souffrent de peur et de douleurs vulvaires, au point de n’être pas capables d’avoir des relations conjugales (vaginisme et vestibulodynie). D’autres admettent le rapport, mais celui-ci leur est douloureux, à différents degrés. Ce problème est devenu plus fréquent dans la dernière génération (près de 10% des femmes), et provient également, à ce qu’il semble, de la confusion entre permissivité et pudeur naturelle, cependant qu’une expérience traumatique risque d’amplifier le symptôme. Du point de vue halakhique, quand, en pratique, la femme ne permet pas de pratiquer les rapports conjugaux, c’est une cause de divorce ; en ce cas, le mari est exempté de lui verser sa ketouba, ainsi que les ajouts auxquels il s’était engagé, car le fondement du mariage ne s’est pas maintenu (cf. Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 117, 2, Pisqé Din Rabaniim IV, p. 325). Si la femme peut se prêter aux relations conjugales périodiquement fixées, tout en en souffrant, l’homme a le droit de divorcer, puisqu’il ne peut se réjouir avec son épouse comme il est d’usage et comme il convient ; mais il doit alors lui verser sa ketouba (cf. Beit Chemouel, Even Ha’ezer 117, 9).

Certes, il n’est pas nécessaire, en principe, d’en arriver au divorce, car il est presque toujours possible de résoudre le problème, de façon telle que la femme puisse ensuite parvenir au sommet de la jouissance, comme il est d’usage. Mais en pratique, parmi les femmes qui souffrent de telles affections, nombreuses sont celles qui ne comprennent pas la gravité du problème. Il semble que, à la difficulté physique, se joigne un blocage psychique, qui leur fait estimer que l’union corporelle n’est pas si importante, et que, si le mari souffre de la situation, « c’est à lui qu’il revient de surmonter son penchant, et de ne pas importuner sa femme ». Elles ne comprennent pas que, si leur promis avait su cela dès le début, il est vraisemblable qu’il aurait annulé les noces. Elles ne sont pas non plus conscientes du fait que, si le problème devait se poursuivre, il y aurait une majorité de chances pour que, tôt ou tard, on en vînt au divorce. Dans les cas les plus faciles, la reconnaissance de la valeur de la mitsva, et la conscience de ce que ce problème rend difficile, au plus haut point, la consolidation de la vie matrimoniale, permettent à la femme de surmonter son problème, sans aucune aide extérieure. Dans les cas difficiles, cette conscience permet de comprendre l’importance des soins à engager, et donne la force de suivre les instructions des médecins et des soignants, jusqu’à ce que soit trouvée la cause du problème et que, par suite, vienne sa résolution.

13. Défauts affectant l’union – les neuf cas d’influence néfaste sur l’âme de l’enfant à naître

Nos sages rendent hommage à celui qui se sanctifie au moment de l’union conjugale, assurant qu’il méritera d’avoir de bons enfants (Chevou’ot 18b). La sanctification consiste dans le fait que les époux s’isolent pour s’aimer d’un cœur entier. Plus leur amour est grand, accompagné de l’intention d’engendrer des enfants justes et bons, plus leur intimité est sainte, et plus les époux méritent effectivement d’engendrer de tels enfants, bons (tovim) et justes (tsadiqim) (cf. ci-dessus chap. 1 § 4 ; au présent chapitre, § 5-6 ; et ci-après, chap. 3 § 3).

Par contre, moins les époux s’aiment et sont attachés l’un à l’autre, plus l’union est altérée ; et les enfants qui en naissent risquent d’être affligés de défauts. Or voici les neuf vices (midot ra’ot, litt. « mauvaises mesures », défauts moraux) tels que le traité Nédarim 20b les définit :

Les enfants de la peur (eima) et les enfants de la femme violée (anoussa) ; les enfants de la femme haïe (senoua) ; les enfants du bannissement (nidouï) ; les enfants de la permutation (temoura) ; les enfants de la dispute (meriva) ; les enfants de l’ivresse (chikhrout) ; les enfants de la divorcée de cœur (guerouchat halev) ; les enfants de la confusion (irbouvia) ; les enfants de l’effrontée (‘hatsoufa)[13].

Explication : 1) Enfants de la peur et enfants de la femme violée : quand l’homme menace sa femme ou la force à un rapport ; ou quand la femme oblige son mari à s’unir à elle, par la force ou par la menace. 2) Enfants de la femme haïe : quand l’homme hait sa femme, et la possède dans le seul but de satisfaire sa concupiscence ; ou que la femme hait son mari, mais s’unit à lui pour satisfaire le désir qu’elle-même éprouve ; 3) Enfants du bannissement : quand les époux s’unissent alors que l’un d’eux est frappé de bannissement (nidouï). Certes, du strict point de vue halakhique, il n’est pas interdit à la personne bannie d’avoir des relations conjugales (Sifté Cohen, Yoré Dé’a 334, 12) ; mais puisque le reste du peuple doit se séparer de la personne bannie, jusqu’à ce qu’elle répare ses actes, les relations conjugales avec elle ne se font pas avec l’attachement et la joie qui conviennent. 4) Enfants de la permutation : quand l’homme possède sa femme tout en pensant à une autre ; ou quand la femme pense à un autre homme. 5) Enfants de la dispute : quand les époux se trouvent en conflit, et ont un rapport intime sans s’être d’abord réconciliés. Certes, la dispute n’autorise aucun des époux à annuler l’union prescrite ; mais les époux ont l’obligation de se réconcilier avant l’union. 6) Enfants de l’ivresse : quand les époux s’unissent alors que l’un d’eux est soûl ; une telle union ne s’accompagne pas d’une entière intentionnalité d’amour et d’unité. 7) Enfants de la divorcée de cœur : quand l’un des époux a l’intention de divorcer ; même s’il y a encore de l’amour entre eux, leur union n’a pas la complétude requise. 8) Enfants de la confusion : quand une femme est divorcée, et, avant que ne se soient écoulés trois mois, s’est mariée à un autre. 9) Enfants de l’effrontée : quand la femme réclame à son mari, de manière insolente, grossière, et en des termes obscènes, d’avoir un rapport intime. Une telle union est exempte d’amour, mais vise seulement à satisfaire sa concupiscence. De même, quand l’homme réclame une relation à sa femme sur ce mode.

Le traité Kala (1, 16) ajoute une dixième catégorie : les enfants de l’endormie, lorsque l’homme possède sa femme alors qu’elle dort. Un tel rapport est exempt d’amour réciproque.

Les sages disent des enfants issus des neuf unions ainsi viciées que, puisque leur âme est descendue en ce monde par le biais d’un rapport exempt d’amour et d’unité, ils sont affectés d’un défaut ; qu’il leur est difficile de se relier aux domaines de la sainteté, et que leur penchant au mal a tendance à prendre le dessus sur eux. Au-delà de cela, quand il n’y a pas d’amour ni de compréhension entre les parents, la sensation de désintérêt et de distance entre eux exerce une mauvaise influence sur les enfants. Pour grandir dans le respect de la halakha, les enfants ont en effet besoin d’une ambiance où règnent l’amour et l’amitié, la chaleur affective et la stabilité psychique.

Certes, il est évident que les enfants issus d’une union viciée par un de ces neuf défauts ont, eux aussi, leur libre arbitre. S’ils choisissent le bien, ils mériteront une récompense plus grande encore que celle qu’ils eussent obtenue s’ils étaient issus d’une union sans défaut. En effet, ils auront réussi à surmonter leur penchant au mal, et l’exemple négatif qui leur avait été donné chez eux. Cependant, s’ils ne s’efforcent pas de se corriger, c’est leur tendance au mal qui l’emportera.

Lorsque il est porté atteinte à la paix entre mari et femme, parmi le peuple juif, et que de nombreux enfants naissent d’unions ainsi défectueuses, le défaut a pour effet la séparation entre le Saint béni soit-Il et le peuple d’Israël ; en conséquence, Israël est exilé de sa terre. Cela, afin que les épreuves de l’exil écartent du peuple Juif les pécheurs et les rebelles, nés des unions défectueuses. Ainsi, la foi peut recommencer de se révéler, et Israël accède à la Délivrance, ainsi qu’il est dit : « Je trierai d’entre vous les rebelles et ceux qui pèchent contre moi ; du pays qu’ils habitent Je les ferai sortir, sur la terre d’Israël ils ne viendront plus, et vous saurez que Je suis l’Éternel » (Ez 20, 38 ; cf. ibid. 20, 40-44).


[13]. Au traité Kala 1, 16, il est écrit que ces enfants sont comparables à des mamzerim (enfants illégitimes) sans être des mamzerim.

Nous voyons donc que les enfants conçus dans une de ces neuf circonstances sont considérés comme issus d’une sorte d’adultère de la pensée. Les pensées de la femme, elles aussi, peuvent déterminer des défauts, au même titre que les pensées de l’homme, comme l’explique le Midrach Tan’houma, Nasso 7 : « Quand la femme s’isole avec son mari, qu’il s’unit à elle, et que le cœur de celle-ci est avec un autre homme, qu’elle a vu sur son chemin, il n’y a pas plus grand adultère que cela. »

L’essentiel est donc de s’unir en un parfait amour, comme l’écrit Maïmonide : « Avec la pleine volonté de chacun d’eux, et avec joie » (Dé’ot 5, 4). De même, les autres Richonim écrivent que le manque d’amour est, lui aussi, un défaut ressortissant des neufs vices (Raavad, Cha’ar Haqedoucha ; Tour, Even Ha’ezer 25, 1). Le Gaon de Vilna, dans son commentaire sur Tiqouné Zohar, fin du Tiqoun 53, écrit, au sujet de la recommandation de se sanctifier au moment de l’union : « [Cette prescription] vise essentiellement les enfants nés d’unions affectées [d’un] des neuf vices, au sujet desquels il est dit : “Je trierai d’entre vous les révoltés et les pécheurs” (Ez 20, 38) ; eux émanent du côté de la tourbe nombreuse (‘erev rav) et de l’arbre de la connaissance (‘ets hada’at). » De même, Rabbénou Ba’hyé, dans son commentaire sur Gn 30, 38, écrit : « Cette sainteté tient à la pureté de la pensée : ne point penser à une autre femme, ni à d’autres choses, mais uniquement à sa femme. » La question de la sainteté de l’union, dans ses deux degrés, sera expliquée plus loin, chap. 3 § 3.

14. Moments qui ne conviennent pas à l’union

Il est interdit d’avoir des relations conjugales quand une grande souffrance frappe le pays, par exemple une grande famine, ou une guerre générale. Seul celui qui n’a pas encore accompli la mitsva de procréer a l’autorisation d’avoir des relations conjugales pendant de telles périodes (Ta’anit 11a, Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 240, 12, Michna Beroura 47). Le soir où la femme se rend au miqvé, bien que le monde soit ainsi dans la peine, il est permis à tout homme, de l’avis de nombreux décisionnaires, d’avoir des relations conjugales (Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 574, 4). D’autres décisionnaires sont rigoureux, s’agissant même de la nuit du miqvé (Maguen Avraham). Mais si l’homme sent que son penchant le domine, et qu’il risque d’en venir à commettre une faute, les relations conjugales lui seront autorisées, même si le monde est plongé dans la peine (Michna Beroura 240, 46).

Le jour de Kipour, ainsi que le 9 av (Tich’a bé-av), les relations conjugales sont interdites, car elles sont l’une des cinq choses défendues en ces jours de jeûne. Afin de s’éloigner de toute transgression de l’interdit, les époux doivent se conduire, ces jours-là, comme durant les périodes d’isolement (c’est-à-dire les périodes où la femme est nida) : ne point se toucher, et ne pas dormir dans le même lit (Choul’han ‘Aroukh 615, 1, Michna Beroura 1). Certes, s’agissant du 9 av, dont le statut est plus léger que celui de Kipour, il leur est permis, durant la journée, d’être plus indulgent et de ne pas éviter le contact physique, puisqu’il n’est pas tellement à craindre qu’ils en viennent ainsi à s’unir charnellement. Toutefois, même durant la journée du 9 av, il est interdit de se toucher de manière affectueuse ; de même est-il interdit de dormir dans le même lit (Pniné Halakha, Zemanim – Fêtes et solennités juives I 10, 9 ; Pniné Halakha, Les Jours redoutables 8, 7).

Il est interdit à l’endeuillé d’avoir des relations conjugales, car cette mitsva doit s’accomplir dans la joie, or l’endeuillé se trouve dans la peine (Mor Ouqtsi’a 15, 2, Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 383, 1). Cependant, l’endeuillé n’a pas besoin de tenir compte des autres mesures d’éloignement (har’haqot) instituées par les sages pour la période de nida. Par conséquent, il est permis aux époux de se toucher, et la femme peut faire le lit de son époux en sa présence. En revanche, les étreintes et baisers exprimant du désir sont interdits (Rama 383, 1, Nehar Mitsraïm 113, Choul’han Gavoha 342, 14). Si l’endeuillé doit dormir dans son lit, les époux doivent séparer leurs lits, afin de ne pas en venir à l’union charnelle (Choul’han ‘Aroukh, ibid.). Il semble que le fait de prendre son conjoint dans ses bras pour le consoler, ou de l’embrasser par politesse, tant qu’il ne s’y mêle pas de désir, soit permis. Après l’achèvement de la période des sept jours de deuil, il faut revenir à l’accomplissement de la mitsvat ‘ona de la façon la plus complète ; c’est même une mitsva, pour la femme, que de mettre des bijoux à cette fin, bien qu’elle se trouve encore dans la période des trente premiers jours de deuil (Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 381, 6)[14].


[14]. Certains, rigoureux, s’abstenaient de relations charnelles, ne se baignaient pas ni ne s’oignaient, pendant la nuit des jeûnes courts [jeûnes autres que ceux de Kipour et du 9 av]. Cependant cet usage avait cours dans des périodes où sévissaient de durs décrets. Certains auteurs pensent, en effet, qu’il faut a priori respecter, pendant tous les jeûnes, les mêmes règles que le 9 av. Mais de nos jours, il n’y a pas lieu d’être rigoureux à cet égard, comme nous l’expliquons dans Zemanim – Fêtes et solennités juives I 7, note 2. Le Maguen Avraham 240, 3 écrit, se fondant sur Rabbi Isaac Louria, qu’il est bon de s’abstenir de relations conjugales les nuits de Roch Hachana, du séder de Pessa’h, de Chavou’ot et de Chemini ‘Atséret (et, à plus forte raison, de s’en abstenir durant la journée de ces dates). Mais la nuit du miqvé, c’est une mitsva que de s’unir, même si cela tombe à l’une de ces dates (Chné Lou’hot Habrit). D’autres A’haronim reprennent les mêmes termes. Le ‘Hokhmat Adam 128, 19 écrit que cette coutume convient spécialement à l’homme qui est empli de crainte divine, et qui ne risque pas de tomber dans des pensées fautives ; mais si l’on ne se situe pas à un tel niveau, il est préférable de s’unir à sa femme et de ne point pécher. C’est ce qu’écrit le Michna Beroura 240, 7 ; le Darké Tahara 22, 24 ajoute que, lorsqu’il y a une mitsva toranique de s’unir charnellement – par exemple, quand la femme en a le désir –, c’est une mitsva de le faire, même durant ces nuits-là.

15. Pudeur (tsni’out)

La pudeur (tsni’out) est l’une des expressions de la sainteté de la mitsva. Rachi explique ainsi les paroles de nos sages prescrivant à l’homme de se sanctifier : « en accomplissant son devoir conjugal avec pudeur » (Nida 71a). Cette précieuse mitsva doit traduire l’intimité complète entre l’homme et sa femme. Aussi est-il interdit de dévoiler cela à d’autres ; et il est interdit aux autres d’en parler. Il faut comprendre que chaque couple possède une intimité qui lui est propre, et que le monde et ce qu’il renferme en dépendent. Tel est bien ce que ressentent les époux qui ont le mérite de s’aimer pleinement : leur amour particulier est unique, rien, dans tout l’univers, ne lui est commun. C’est aussi ce qu’explique la sagesse kabbalistique : depuis ce moment de pleine intimité, s’épand la lumière et la bénédiction dans tous les mondes. Or, puisque la question de l’intimité entre époux est si profonde, cette intimité doit être préservée, en tant que secret, entre eux.

Par conséquent, les époux doivent accomplir l’union à l’intérieur d’une maison, ou dans un endroit fermé et caché ; il leur est interdit de l’accomplir en public, ou dans un lieu public, même s’il n’y a personne pour les voir. Ceux qui agiraient ainsi sembleraient forniquer de façon débauchée, et s’habitueraient à la transgression. Il convient de les punir pour cela (Sanhédrin 46a, Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 25, 4).

Il est interdit de s’unir charnellement en un lieu où se trouve un tiers. Même quand ce dernier dort, cela reste interdit, car il est à craindre qu’il ne se réveille. Si l’on s’en tient à la stricte règle halakhique, il est permis d’avoir des relations conjugales en présence d’un bébé qui ne sait pas encore parler ; mais il ne convient pas d’agir ainsi. Quand il n’y a pas d’autre choix, on peut avoir de telles relations quand ce bébé dort. S’il se réveille en plein milieu de l’union, il sera permis de continuer. A priori, il convient qu’il n’y ait pas, dans la chambre, d’animal tel qu’un chien ou un chat.

On a coutume de recouvrir son corps pendant l’union, même s’il n’y a pas de lumière (cf. Darké Tahara 22, 39).

Les époux doivent garder secret le moment de leur union. Quand ils ont des relations, ils doivent faire attention que leurs voix ne soient pas entendues par des tiers. De même, il est juste que la femme tienne secrète la nuit de son immersion au miqvé, afin que les tiers ne s’en aperçoivent pas (Rama, Yoré Dé’a 198, 48).

Afin que l’union s’accomplisse dans la pudeur et dans la joie, sans craindre que l’un des enfants, ou des invités, n’entre soudainement, on doit avoir grand soin de fermer la porte à clef. Et, afin que les tiers ne sachent pas quand ils accomplissent la mitsva, il convient que les époux aient soin de fermer leur chambre à clef chaque nuit, quand ils vont se coucher, et qu’ils ne permettent pas à un enfant de dormir avec eux dans la chambre.

Les époux doivent faire attention de ne pas raconter à des tiers la manière dont ils s’unissent et dont ils s’aiment. Ce n’est qu’en cas de nécessité, afin d’être conseillés et guidés, qu’il leur est permis d’en parler. De même, il est interdit aux époux de parler de leur union de manière obscène, à la façon de ceux qui racontent des plaisanteries grossières (Maïmonide, Dé’ot 5, 4).

Il est également interdit de parler, sans nécessité, des relations intimes d’autres personnes ; et tous ces propos grossiers sont qualifiés de niboul-pé (propos obscènes)[i], car ils transforment la parole vivante, destinée à répandre la bénédiction, en parole morte et méprisable, à l’exemple d’une charogne nauséabonde, interdite à la consommation. Nos sages enseignent : « Tout le monde sait pourquoi l’épousée (kala) entre sous le dais nuptial (‘houpa) ; mais quiconque en fait le sujet de propos obscènes, même si un décret de soixante-dix ans de bonheur avait été signé du Ciel à son profit, voit ce décret transformé pour son malheur » (Chabbat 33a).

Il est permis à un couple invité d’avoir des relations intimes, à condition qu’il dispose d’une chambre fermée, et qu’il ne soit pas à craindre que d’autres personnes s’en aperçoivent, ni qu’ils laissent des traces sur les draps.

Il est juste que, devant des tiers, les époux s’abstiennent d’actes exprimant leur désir (Rama, Even Ha’ezer 21, 5). Un enlacement de politesse, un baiser de salutation, parmi une société où ces choses sont admises, ne sont pas considérés comme contraires à la pudeur. Mais quand baiser ou enlacement expriment du désir, il y a là un manque de pudeur ; car l’amour liant les membres du couple est une chose profonde et très personnelle, et celui qui la dévoile devant des tiers la rend extérieure, et lui « coupe les ailes ». De plus, il faut craindre que cette manifestation d’amour n’éveille de la souffrance ou de la jalousie chez ceux qui n’ont pas ce bonheur[15].


[i]. Littéralement : souillure de bouche. Niboul est de même racine que névéla, charogne.

[15]. Dans des cas extrêmes, le manque de pudeur est une cause de divorce. Par exemple, la Michna enseigne : « Voici celles qui, lors de leur divorce, ne perçoivent pas leur ketouba : (…) ainsi que la bruyante (qolanit). (…) Qu’appelle-t-on bruyante ? C’est celle qui “parle” en sa maison et dont les voisins entendent la voix » (Ketoubot 72a). Maïmonide explique : on entend qu’elle réclame, à haute voix, le rapport conjugal. De même, dans le cas où le mari fait le vœu de ne plus s’unir à sa femme, à moins qu’elle ne raconte à des tiers des choses de leur vie intime, c’est le droit de l’épouse que de divorcer, et de recevoir le montant de sa ketouba (Ketoubot 72 a-b).

Les questions de pudeur dépendent de la coutume admise ; aussi, autrefois, quand les maisons étaient petites et que, souvent, toute la famille résidait dans une seule pièce, les sages autorisaient les parents à s’unir pendant que leurs enfants, et les autres personnes présentes dans la chambre, dormaient. De plus, autrefois, on dormait en général plus profondément, car on exécutait durant la journée des travaux physiques harassants. Mais de nos jours, où chaque maison a plusieurs chambres, la vertu de pudeur exige d’interdire les rapports conjugaux dans une pièce où dort un tiers. Cf. Har’havot 13, 5-6. Il convient d’ajouter que, en plus de permettre aux parents d’accomplir la mitsva dans une grande joie, la fermeture de la chambre parentale à clef a une valeur éducative : les enfants apprennent ainsi combien le lien entre leurs parents est profond et personnel, au point qu’il est interdit de le perturber. Ils tireront de cela un exemple personnel pour leur propre vie, grâce à quoi ils mériteront, eux aussi, de fonder de bonnes familles.

16. L’interdit de la lumière

Il est interdit d’avoir des relations conjugales dans la journée, car il est interdit d’accomplir l’union dans la lumière. Ce thème est lié à celui de la pudeur, qui est l’une des vertus d’Israël (Yevamot 79a). Nos sages disent ainsi : « Les Israélites sont un peuple saint, ils n’ont pas de relations conjugales de jour » (Nida 17a). De même, il est interdit d’avoir de telles relations la nuit dans un lieu où une lumière est allumée (Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 240, 11). Toutefois, l’intention n’est pas ici d’exiger l’obscurité intégrale ; même si la lumière de la lune pénètre dans la chambre, tant qu’elle n’éclaire pas véritablement les époux, l’union est permise. Certains sont rigoureux, quand cela est possible, et exigent de fermer le volet ou le rideau, même dans le cas d’une lumière de ce degré (cf. Michna Beroura 240, 39).

Cet interdit a seulement cours pendant l’union charnelle elle-même, car celle-ci doit être pudique et cachée, profonde et élevée, comme il convient à cette mitsva sainte. Il est également à craindre que, dans la lumière, l’homme ne prenne sa femme en dégoût ; car le fondement de l’amour entre époux est infini, dépassant de beaucoup la beauté extérieure. Or, lorsque l’union se fait à la lumière, elle devient limitée, dépendante de l’apparence extérieure ; l’amour infini ne s’y exprime plus, le secret et la beauté intérieure que porte l’union risquent de s’affaiblir, et l’amour entre époux de cesser. Dans le même ordre d’idées, nous voyons que la ‘Amida, en raison de sa suprême élévation et de toute sa profondeur, doit se réciter à voix basse, à la différence des autres prières et bénédictions, qui se disent à voix audible (cf. Tiqouné Zohar, Tiqoun 10, 25a, où l’union conjugale est comparée à la ‘Amida).

Dans une pièce obscure, il est permis de s’unir même de jour, puisque la luminosité du lieu est semblable à celle qui règne la nuit. Dans le cas où les époux peuvent accomplir l’union de jour dans une plus grande joie et un supplément d’amour – par exemple s’ils savent que, la nuit, ils seront fatigués –, il est préférable qu’ils s’unissent de jour, après avoir rendu leur chambre obscure. Le Talmud raconte que tel était l’usage au palais du roi Monobaze, ce que louent les sages, parce que le couple royal accomplissait la mitsvat ‘ona dans la joie (Nida 17a). De même, quand l’homme revient, en pleine journée, de l’armée ou d’un voyage lointain, les époux peuvent obscurcir la chambre et s’unir a priori de jour. Cependant, quand il n’y a pas de nécessité ni d’avantage dans le jour, il est juste d’attendre la nuit, qui est le temps discret et convenant à cela.

En cas de nécessité, quand il n’est pas possible d’obscurcir la chambre, il est permis à un disciple des sages d’accomplir l’union le jour, à condition que les époux rendent obscurs leurs corps et leurs têtes, par le biais d’une couverture. Les sages ne permettent pas cela aux autres personnes, même en cas de nécessité, de crainte qu’ils ne négligent ordinairement d’obscurcir la chambre (Rama, Ora’h ‘Haïm 240, 11). Mais en cas de nécessité pressante, quand l’homme voit que son penchant le domine et qu’il risque d’en venir à émettre de la semence en vain, il est permis de s’unir de jour, même si l’on n’est pas un disciple des sages, à condition de se couvrir, corps et tête, sous une couverture (‘Hokhmat Adam 128, 9, Cha’ar Hatsioun 240, 25).

La nuit, quand une bougie ou une ampoule est allumée dans la chambre, il est interdit de s’unir en s’abritant sous une couverture : il est obligatoire d’éteindre la lumière. Même la nuit de Chabbat, où il est interdit d’éteindre la lumière, il sera interdit d’accomplir l’union en se cachant sous une couverture. En effet, nos sages ont interdit de s’unir dans une chambre où brûle une lumière (Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 240, 11). Si la lumière provient d’une cour, la règle est la même que dans la journée : en cas de nécessité, un disciple des sages peut être indulgent, en s’abritant sous une couverture ; et en cas de nécessité pressante, tout homme peut être indulgent en cela (Michna Beroura 41)[16].


[16]. Selon la grande majorité des Richonim et des A’haronim, parmi lesquels le Rif, le Raavad, le Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 240, 11, le Maguen Avraham 26 et le ‘Aroukh Hachoul’han 16, il est permis, a priori, de s’unir de jour, dans une pièce obscure. Certains disent que cette permission ne vaut qu’en cas de nécessité, ou de nécessité pressante (Kaf Ha’haïm 240, 80, Darké Tahara 22, 13).

Le Darké Tahara 22, 30 écrit que, si l’on se couvre d’un talith, il faut que celui-ci couvre tout le corps, ainsi que la tête. C’est aussi ce qu’écrit le Ben Ich ‘Haï, seconde année, Vayéra 26. Des termes de Rabbénou Yehonatan, dans son commentaire sur le Rif, ‘Érouvin 33b, on peut inférer qu’il suffit de se couvrir la tête et la majorité du corps.

L’interdit pèse sur l’union charnelle dans une pièce éclairée. Mais avant la pénétration, il n’y a pas d’interdit. En effet, nous ne trouvons pas d’interdit fait aux époux de se regarder l’un l’autre, sans vêtements, à l’exception, selon une partie des décisionnaires, du siège de la nudité (Nédarim 20a-b). En revanche, les sages interdisent de s’unir charnellement (léchamech) dans une pièce éclairée, ce qui veut bien dire que l’interdit porte seulement sur la pleine union charnelle (tachmich). C’est ce qu’écrit le Michkan Israël II, p. 79. Cf. Darké Tahara 22, Téchouvot Vétossafot 6.

La nuit, quand une lampe brûle, et même si l’on se met à l’ombre d’une couverture, il est interdit de s’unir charnellement (Raavad, Séfer Mitsvot Qatan, Ritva, Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 240, 11, Even Ha’ezer 25, 5, Elya Rabba, Michna Beroura 240, 39). Et bien que certains décisionnaires, isolés, soient indulgents en la matière (‘Hida dans Peta’h ‘Einaïm sur Nida 17b, Kaf Ha’haïm), nous nous prononçons, ci-dessus, conformément à l’opinion des décisionnaires rigoureux.

17. Présence de livres saints

Bien que la sainteté de la mitsvat ‘ona soit extrêmement élevée, il faut distinguer entre les domaines : la mitsvat ‘ona s’accomplit dans une libération et une exultation corporelles qui rompent les entraves de l’être ; tandis que la Torah doit s’étudier dans la crainte, la révérence, le frisson et le tremblement. C’est avec ces mêmes sentiments que l’on considère le rouleau de la Torah (séfer-Tora) : avec gravité (comme nous le verrons ci-après, chap. 3 § 9). Par conséquent, il est interdit d’avoir des relations conjugales dans une chambre où se trouve un rouleau de la Torah écrit à l’encre sur parchemin, suivant la tradition d’écriture inaugurée au Sinaï. Si c’est possible, on devra faire sortir le rouleau de la chambre. Quand il est impossible de l’en faire sortir, il faut pratiquer une cloison entre le rouleau et le lit, de manière que le rouleau se trouve en un autre domaine, et qu’il ne soit pas non plus visible des époux. (La hauteur de la cloison doit être d’au moins 10 téfa’him, soit 76 cm, et sa largeur de quatre amot, soit 182 cm, comme l’indique le Darké Tahara 22, 41).

Il est interdit d’avoir des relations conjugales dans une chambre où se trouvent des téphilines, une mézouza ou quelque autre livre sacré[j]. Mais si l’on recouvre doublement ces objets sacrés, la chose est permise. Par exemple, dans le cas des téphilines, la première couverture peut être l’étui habituel dans lequel on les range ; ou, s’agissant du parchemin de la mézouza, son boîtier habituel. Quant au deuxième dessus, on le prévoira spécialement pour recouvrir le premier. Par exemple, on étendra une petite nappe sur l’étui des téphilines, ou l’on introduira cet étui dans un autre sac. Pour la mézouza, on a coutume de la recouvrir dès l’abord de façon double, un des couvercles, au moins, étant hermétique. De cette façon, il est permis d’avoir des relations conjugales dans la chambre, de même qu’il est permis, dans une telle chambre, de changer la couche d’un bébé, et toutes ces sortes de choses.

S’agissant de livres imprimés qui sont posés dans la chambre ou rangés sur une étagère, il est juste de prévoir, en sus de leur propre couverture, un second dessus, en étendant une toile ou du papier. En cas de nécessité pressante, quand il n’est pas possible de faire cela, on pourra néanmoins s’unir, à condition de veiller à s’abriter soi-même sous sa couverture, de façon à ne pas être nu en présence des livres[17].

Selon certains auteurs, il faut se laver les mains rituellement après les relations conjugales (Chné Lou’hot Habrit, Darké Tahara 24, 3). Toutefois, en pratique, il n’est pas obligatoire de suivre cet usage, et ceux qui veulent poursuivre la nuit en dormant y sont autorisés[18].


[j]. Séfer qodech : livre d’étude juive, ou de prière.

[17]. En ce qui concerne les livres imprimés, plusieurs doutes sont en présence. Premièrement, un livre de qodech (livre religieux, d’étude ou de prière) imprimé a-t-il la même sainteté qu’un livre manuscrit ? D’après la majorité des décisionnaires, son statut est identique à celui d’un manuscrit saint (c’est l’opinion du Massat Binyamin 99, du Touré Zahav, Yoré Dé’a 271, 8, du Michna Beroura 40, 2, et de la grande majorité des décisionnaires ; mais le ‘Havat Yaïr 287 et le Elya Rabba 40, 2 sont indulgents en cas de nécessité pressante). Deuxièmement, la couverture même du livre doit-elle considérée comme l’un des deux dessus devant recouvrir les objets saints ? Certains pensent que la couverture du livre est en effet considérée comme un des dessus nécessaires (Birké Yossef, ‘Hessed Laalafim) ; d’autres estiment qu’elle ne l’est pas (Maguen Avraham, Michna Beroura 40, 4). Mais si l’on ajoute ce doute au précédent, on peut être indulgent (Kaf Ha’haïm 40, 14, Darké Tahara 22, 49, Pisqé Techouvot 40, 3).

En cas de nécessité pressante, on peut considérer la couverture dont se couvrent les époux comme un des dessus. Alors, avec la reliure des livres, on considérera que les deux dessus nécessaires sont présents, en associant à cela l’opinion selon laquelle les livres imprimés n’ont pas le même degré de sainteté que les livres manuscrits (Kaf Ha’haïm 40, 17, Darké Tahara 22, 57).

A posteriori, il est permis d’avoir des rapports conjugaux en présence d’une mézouza qui n’est pas dotée d’un double dessus, conformément à l’opinion du Maamar Mordekhaï 40, 2, qui estime que l’exigence d’un double recouvrement s’applique aux téphilines, mais non à la mézouza, car tel est son emplacement ; de plus, elle se trouve à plus de 10 téfa’him de hauteur. C’est aussi l’opinion des responsa Ziv’hé Tsédeq, Ora’h ‘Haïm 40, et du Halakha Beroura 9, 40.

[18]. Les Richonim ne mentionnent pas la nécessité de se laver les mains, ni, dans leur majorité, les A’haronim. Toutefois, le Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 4, 18 écrit que, selon certains, il faut se laver rituellement les mains après les rapports conjugaux. Il se peut que l’auteur vise celui qui se lèverait, après cela, pour vaquer à ses occupations, mais que, si l’on continue sa nuit en dormant, l’ablution que l’on fera plus tard, le matin au réveil, suffise à s’acquitter. C’est en ce sens que se prononce le Taharat Moché 3, 17, et c’est aussi l’opinion du Rav Mazouz. Le Rav Yossef Messas (Mayim ‘Haïm II 1, 3) écrit, lui aussi, que l’on n’avait pas coutume [au Maroc] de se laver les mains après les relations conjugales.

18. Par une autre voie

L’union charnelle s’accomplit par l’endroit même d’où la femme peut être fécondée. Cependant, il y a des hommes qui désirent accomplir l’union par pénétration anale. Si la chose devait engendrer de la douleur chez la femme, ou si c’était contre la volonté de celle-ci, il est évident que cela serait interdit. La question qui se pose est de savoir quelle est la règle lorsque la femme y consent, ou même le souhaite. Le Talmud rapporte au traité Nédarim 20b l’enseignement des sages, selon lequel il n’y pas là d’interdit. Cependant, nous voyons par ailleurs que la faute d’Er et d’Onan consista dans le fait qu’ils s’unirent à Tamar par l’anus, et qu’ils détruisirent ainsi leur semence : la chose fut mauvaise aux yeux de l’Éternel, et Il les fit mourir (Yevamot 34b, Gn 38, 7).

La majorité des Richonim expliquent que, lorsque l’on fait cela dans l’intention d’éviter la conception, l’acte doit être considéré comme une destruction de semence, chose interdite ; mais quand on fait cela occasionnellement, il n’y a pas d’interdit. Certains Richonim expliquent que ce que les sages ont permis est à la condition que l’homme n’émette pas sa semence à cet endroit, mais qu’il s’unisse ensuite à sa femme par l’endroit habituel, où il déposera sa semence. Certains décisionnaires sont rigoureux à cet égard.

En pratique, un homme qui en ressent le besoin est autorisé à s’appuyer sur l’opinion de la majorité des décisionnaires, qui sont indulgents quand la chose est occasionnelle, à condition que la femme y consente[19].

Certains auteurs pensent que, même quand l’union se fait par l’endroit convenant à la conception, il est juste que l’homme soit placé au-dessus, la femme en dessous, et qu’ils soient face à face ; certains sont très pointilleux à cet égard. Bien qu’il y ait avantage à ce que l’union soit ainsi réalisée, toutes les positions possibles sont, si l’on s’en tient à la stricte obligation, permises, à condition que les deux époux y consentent. Lorsque, par l’effet du changement de position, l’un des époux a davantage de plaisir, un tel changement participe de la joie de l’union (sim’hat ‘ona). Cependant, quand l’autre conjoint ne souhaite pas adopter cette autre position, il sera préférable de s’en tenir à la position « la meilleure » (l’homme au-dessus, face à face). Même quand les époux trouvent plus de jouissance dans une autre position, il est préférable, lorsque l’on peut espérer que, de cette union, une grossesse s’ensuive, qu’ils s’accouplent selon la position « la meilleure[20] ».


[19]. Nédarim 20a : Rabbi Yo’hanan ben Dehavaï a enseigné : « Les anges de service m’ont dit : “Les boiteux, pourquoi naissent-ils ainsi ? Parce que l’on a renversé la table” » (les parents s’accouplaient par voie anale). Puis, en page 20b : Rabbi Yo’hanan enseigne : « Ce sont les paroles de Yo’hanan ben Dehavaï ; mais les sages ont dit : “La halakha ne suit pas l’enseignement de Yo’hanan ben Dehavaï ; tout ce qu’un homme veut faire à sa femme, il le lui fait.” »La Guémara rapporte aussi (ibid.) : « Il arriva qu’une femme se présenta à Rabbi Yehouda Hanassi, et lui dit : “Mon maître, j’ai préparé une table à mon mari, et celui-ci l’a retournée” (en d’autres termes : je me suis préparée à l’union suivant la voie normale, et mon mari m’a prise par l’anus ; y a-t-il là un interdit ?). Il lui répondit : “Ma fille, la Torah t’a rendue permise à ton mari ; quant à moi, que puis-je faire ?” » (Cela laisse entendre que cet acte n’agrée pas aux yeux de Rabbi Yehouda Hanassi, mais qu’il ne peut l’interdire, puisque la Torah a autorisé la femme à son époux. Peut-être s’agissait-il d’un cas où la femme n’avait pas de plaisir à la chose, mais y consentait cependant, à la condition que ce ne fût pas interdit.) La Guémara poursuit : « Une femme se présenta devant Rav et lui dit : “Mon maître, j’ai préparé une table à mon mari, et celui-ci l’a retournée” Il répondit : “En quoi cela diffère-t-il d’un poisson ? (Il voulut par-là se référer aux propos des sages, rapportés plus haut : ) Tout ce qu’un homme veut faire à sa femme, il le lui fait. Parabole d’une viande, qui vient de chez le boucher : si l’on veut la consommer salée, on la consomme ainsi ; grillée, on la consomme ainsi ; pochée, on la consomme ainsi ; bouillie, on la consomme ainsi ; de même le poisson qui vient de chez le pêcheur.” » Cela laisse entendre que, selon Rav, il n’y a là aucun interdit, de même que l’on est autorisé à manger du poisson quelle qu’en soit la recette.

De prime abord, cet enseignement semble difficile à comprendre, puisque l’on apprend, au traité Yevamot 34b, que la faute d’Er et d’Onan consista à « renverser leur table », de telle manière qu’ils détruisirent leur semence. Mais selon la majorité des décisionnaires, l’interdit ne se rapporte qu’à des relations constamment accomplies sur ce mode, dans le but d’empêcher que la femme conçoive ; en revanche, de manière occasionnelle, c’est permis. C’est l’opinion de : Tossephot (Sanhédrin 58b ד »ה מי), Tossephot Rid (Yevamot 12b ד »ה תני), Rabbi Yecha’ya A’haron zal (Qountras Hareayot sur Sanhédrin 58a), Roch (Yevamot 3, 9), Rabbénou Yerou’ham (Toldot Adam Vé-‘Hava 23, 1), Mordekhi (Chevou’ot, Hilkhot Nida 732), Hagahot Maïmoniot (Issouré Bia 21, 4), Ritva (dans la première réponse qu’il apporte, citée par Chita Meqoubétset, Nédarim 20b), Rabbénou Yona (Sanhédrin 58b). C’est aussi ce qui ressort de la version la plus précise de Maïmonide, Issouré Bia 21, 9. C’est aussi ce qu’écrivent le Yam Chel Chelomo (Yevamot 3, 18), le Levouch (240, 14), le Chtilé Zeitim (240, 20), ainsi que, dans leur commentaire du Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 25, 2, le Torot Emet, le Yechou’ot Ya’aqov et le ‘Erekh Chaï.

Certains auteurs sont rigoureux, et pensent que la permission n’a cours qu’à la condition de ne pas émettre sa semence dans l’anus. C’est l’opinion de : Rabbénou Avraham Min Hahar (Nédarim ad loc.), Or’hot ‘Haïm (Hilkhot Ketoubot 7), Rabbénou Yits’haq dans sa première réponse (Tossephot, Yevamot 34b ד »ה ולא), Beit Yossef (Even Ha’ezer 25, 2), ‘Aroukh Hachoul’han 25, 11. C’est aussi le sens que porte la version couramment imprimée de Maïmonide. D’autres, plus rigoureux encore, interdisent le rapport anal, même quand la semence n’est pas émise à cet endroit (Séfer ‘Harédim 64, Chné Lou’hot Habrit, Cha’ar Haotiot, Qedouchat Hazivoug 360-364). En effet, selon eux, ce que nos sages appellent « union par voie non usuelle » (chélo kedarkah) [et qu’ils permettent donc] signifie que la femme vient sur l’homme pendant l’union [laquelle sera par pénétration vaginale], ou bien encore que l’homme se place à l’arrière de la femme pendant l’union [également par voie vaginale]. Et s’agissant même de ces pratiques, pour ces auteurs, celui qui n’en a pas besoin sera appelé saint. Par contre, disent-ils, les sages n’ont pas du tout parlé de pénétration anale, car celle-ci est interdite. Toutefois, dans leur très grande majorité, les décisionnaires ne retiennent pas l’explication de ces auteurs. Le Rama, Even Ha’ezer 25, 2, mentionne les deux premières opinions et conclut : « Bien que tout cela soit permis, quiconque se sanctifie en ce qui lui est permis [en s’abstenant de certaines choses à lui permises] sera appelé saint. »

En pratique, la halakha est conforme à l’opinion indulgente, qui est majoritaire. De plus, pour la majorité des décisionnaires, le débat qui se tient ici concerne un interdit rabbinique (car il n’y a pas, dans cette pratique, de véritable interdit d’émission vaine de semence). D’un autre côté, si, par ce biais, l’homme est heureux, et que son esprit soit apaisé, il y a là un avantage, et cela participe d’une mitsva. À plus forte raison si les deux époux en tirent de la joie : de l’avis de la majorité des décisionnaires, l’acte ressortit à la mitsvat ‘ona. Le Rav Kook écrit en ce sens (‘Ezrat Cohen 35), dans son explication de l’opinion indulgente : « Même de cette façon, si c’est occasionnel, et puisque la Torah le permet selon cette opinion, cela participe quelque peu de la mitsva, en ce que l’esprit de l’homme sera apaisé de cette façon. Dès lors, cela n’est pas véritablement une émission séminale vaine. » Le même auteur, dans Chemona Qevatsim 6, 99, écrit que cette pratique est le conseil que, dans sa pitié, la Torah donne à celui dont l’esprit s’est perverti en désirant une relation avec un homme.

[20]. Il est enseigné, au traité Kala Rabbati 1, 23 : « Quand lui est en bas et elle en haut, c’est une manière effrontée. » Plusieurs Richonim reprennent cet avertissement (Raavad, Cha’ar Haqedoucha, Ohel Mo’ed, Echkol, Menorat Hamaor, Tour). C’est aussi ce qu’écrivent le Choul’han ‘Aroukh 240, 5 et de nombreux A’haronim. Le Séfer ‘Hassidim 489 écrit que cet avertissement concerne la nuit de l’immersion au miqvé, lorsque la femme peut tomber enceinte ; c’est aussi l’opinion du Birké Yossef 240, 7 et du Da’at Torah 240, 5.

Face à cela, la majorité des Richonim, et au premier chef Maïmonide, ne rapportent pas cette mise en garde. Rabbénou Yerou’ham (Toldot Ora’h ‘Haïm 23, 1) écrit ainsi : « Les propos rapportés par le traité Nédarim – “Je lui ai préparé une table, et il l’a renversée”, ce qui est permis – décrivent le cas où l’homme s’accouple à sa femme par la voie non usuelle [par voie anale]. Cela ne signifie pas que la femme se place au-dessus, et l’homme en dessous, car une telle chose est évidemment permise, et cette femme [venue consulter Rabbi Yehouda Hanassi, ou celle venue consulter Rav] n’en eût pas été ébranlée. » Des propos du Zohar (Peqoudé 259a), on peut inférer que l’avertissement de Kala Rabbati est relatif au fait de s’accoupler lorsque l’homme est sur le dos de sa femme : « Car il est dit : “Il s’attachera à sa femme” (Gn 2, 24) : c’est précisément à sa femme qu’il s’attachera, et non à l’arrière de sa femme. » Le Maamar Mordekhaï 240, 7 explique que le problème, dans ce que le traité Kala Rabbati appelle « manière effrontée » (dérekh ‘azout), est que la femme veuille dominer son mari. Cela laisse entendre que, si cette position est souhaitée par les deux époux, c’est permis.

En pratique, puisque, premièrement, de l’avis de la majorité des décisionnaires, ces positions alternatives à la position classique ne sont pas interdites, que, deuxièmement, de l’avis même des auteurs rigoureux, s’en abstenir est une coutume de piété particulière (minhag ‘hassidout), et que, troisièmement, certains auteurs expliquent que l’avertissement ne concerne que le cas où la position alternative n’est pas souhaitée par les deux époux, ceux qui, pour leur part, souhaitent adopter une position autre que l’ordinaire y sont autorisés. Et si cela les réjouit davantage, cela participe, à leur égard, d’une mitsva. Quoi qu’il en soit, la conduite de piété consiste, au moins pour ceux des rapports dont on espère une grossesse, à tenir compte de l’opinion des auteurs rigoureux, et à adopter la position classique.

19. Autres questions

Le Talmud rapporte les propos de Rabbi Yo’hanan ben Dehavaï : « Les anges de service m’ont dit : “Les muets, pourquoi viennent-ils au monde ? Parce que l’on embrasse cet endroit (par lequel la femme tombe enceinte)… Les aveugles, pourquoi viennent-ils au monde ? Parce que l’on regarde cet endroit” » (Nédarim 20a). Toutefois, à la fin de la section, le Talmud précise qu’il s’agit là de l’opinion d’un seul maître, tandis que la communauté des sages (‘Hakhamim) estime que ces choses ne sont pas interdites (ibid. 20b).

Certains Richonim sont rigoureux, et estiment qu’il est interdit d’embrasser et de regarder cet endroit, mais que la chose n’est pas pour autant dangereuse (Raavad). D’autres Richonim pensent que cela est permis, mais que la vertu de piété veut que l’on craigne que ce ne soit dangereux (Séfer Mitsvot Qatan). Cependant, de l’avis d’une nette majorité de Richonim, l’opinion de Rabbi Yo’hanan ben Dehavaï n’a pas été retenue par la halakha, laquelle est conforme à l’opinion des ‘Hakhamim, pour qui la chose n’est ni interdite ni dangereuse. Bien plus, certains Richonim disent qu’il n’y a pas là non plus de manque de sainteté (Séfer Yereïm). De nombreux auteurs pensent toutefois que, même s’il n’y a là ni interdit ni danger, l’usage de pudeur et de sainteté est de ne point se conduire ainsi (Maïmonide, Séfer Mitsvot Qatan, Rama sur Even Ha’ezer 25, 2).

En pratique, puisque la majorité des Richonim le permettent, et que, de plus, pour ceux-là même qui l’interdisent, l’interdit n’est que rabbinique, il n’y a pas là d’interdit. Toutefois, puisque la majorité des Richonim estiment que, du point de vue de la pudeur et de la sainteté, il est préférable d’être rigoureux, il est juste de tenir compte de leur opinion (Rama, Even Ha’ezer 25, 2). Mais quand la chose réjouit beaucoup l’un des époux, et que, faute de cela, sa joie serait entamée, c’est la joie de la mitsvat ‘ona qui l’emporte, et il conviendra aux époux de se conduire conformément à ce que permettent la majorité des décisionnaires. S’ils souhaitent être quelque peu rigoureux, ils s’abstiendront au moins de cela lors de rapports pouvant donner lieu à une grossesse. Quand l’un des époux sent que cette pratique est repoussante pour lui, il est juste que le couple se conduise suivant l’opinion rigoureuse.

Aucune limitation n’est imposée à la femme, concernant le fait d’embrasser ou de voir le membre viril de son mari. Toutefois, il est juste de ne point faire une chose qui repousse le mari ou la femme. Si une certaine pratique réjouit particulièrement l’un d’eux, bien que l’autre n’y trouve pas tellement d’intérêt – et tant que cela ne le repousse pas –, cette pratique participe de la mitsva ; car tout ce qui ajoute à l’amour et à la joie de l’union entre époux participe de la mitsvat ‘ona, et de la mitsva « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (Lv 19, 18)[21].


[21]. Selon la majorité des Richonim, la halakha suit l’opinion des ‘Hakhamim, et il est donc permis à l’homme d’embrasser et de regarder cet endroit. Cela n’est pas non plus dangereux pour l’âme des enfants à naître, car l’opinion de Rabbi Yo’hanan ben Dehavaï n’a pas été adoptée, comme l’a dit Rabbi Yo’hanan (Nédarim 20b) : « Ce sont là les paroles de Yo’hanan ben Dehavaï ; mais les sages disent que la halakha ne suit pas l’avis de Yo’hanan ben Dehavaï ; et tout ce que l’homme veut faire à sa femme, il le lui fait. » Certes, nombre de décisionnaires pensent que, bien qu’il n’y ait là ni interdit ni danger, la vertu de pudeur et de sainteté est de ne point se conduire ainsi. Maïmonide s’exprime ainsi (Issouré Bia 21, 9, Commentaire de la Michna, Sanhédrin 7, 4), ainsi que le Méïri (Nédarim 20b), le Colbo (75) et le Tséda Ladérekh (III 4, 14). Dans le même ordre d’idées, selon le Séfer Mitsvot Qatan 285, la vertu de piété veut que l’on craigne le danger.

Certains estiment qu’il n’y a pas là de manque de sainteté. C’est l’opinion du Séfer Yereïm (cité par Chita Meqoubétset, Nédarim 20b). C’est aussi ce qu’il est donné de comprendre des termes du Ma’hzor de Vitry (528) et du Eshkol (Hilkhot tsni’out p. 34, 2), qui écrivent que la halakha est conforme à l’opinion des sages, sans mentionner quelque autre degré de pudeur ni de sainteté. (Certains Richonim s’étendent sur les règles et les coutumes afférentes à la mitsvat ‘ona, sans mentionner les mises en garde de Rabbi Yo’hanan ben Dehavaï. Ainsi de Na’hmanide, dans Iguéret Haqodech, et du Séfer Mitsvot Gadol, Lo ta’assé 126. Cela laisse entendre que, selon eux, il n’y a pas là d’interdit, ni d’atteinte à la sainteté.)

D’autres sont rigoureux, et pensent qu’il est interdit de regarder cet endroit, sans qu’il y ait pourtant un danger à cela. Quant au fait de baiser l’endroit, ils l’interdisent au titre de bal techaqetsou (« Vous ne souillerez pas vos personnes », Lv 11, 43). C’est ce qu’écrivent le Raavad (Cha’ar haqedoucha) et le Tour (Ora’h ‘Haïm 240, Even Ha’ezer 25). C’est aussi ce que l’on peut inférer des propos du Ohel Mo’ed (11, 2). Le Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 240, 4, statue lui aussi conformément à l’avis du Raavad, qui interdit cela. C’est encore l’avis de : Beit Chemouel 25, 1, ‘Hokhmat Adam 128, 3, ‘Od Yossef ‘Haï, Choftim 16, Igrot Moché, Yoré Dé’a II 75, Darké Tahara 22, 4.

Toutefois, selon le Beit Yossef, Even Ha’ezer 25, Maïmonide ne l’interdit pas, ce qui laisse entendre que telle est la position halakhique essentielle ; aussi le Choul’han ‘Aroukh, Even Ha’ezer 25 ne mentionne-t-il aucun interdit à cet égard. Le Rama ad loc. écrit : « Bien que tout cela soit permis, quiconque se sanctifie en ce qui lui est permis sera appelé saint. » D’illustres A’haronim expliquent ainsi que, selon le Rama, si l’on s’en tient à la stricte obligation, la chose est permise, ce qui laisse entendre qu’ils partagent son avis (‘Atsé Arazim, Torot Emet, ‘Ezer Miqodech, Yechou’ot Ya’aqov sur Rama ad loc. ; le Rav Kapah, Issouré Bia 21, 15 explique Maïmonide dans le même sens). C’est en ce sens que tranchent le Levouch 25, 2 et le ‘Aroukh Hachoul’han 11.

On doit donc expliquer que, si le Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm, se prononce pour l’interdiction, c’est du point de vue de la sainteté et de la pudeur, mais que, puisque du strict point de vue de la règle halakhique il n’y a point à cela d’interdit, cette pratique n’est pas mentionnée dans la partie Even Ha’ezer du Choul’han ‘Aroukh.

Certains décisionnaires pensent qu’il est permis d’embrasser et de regarder cet endroit, mais que cela présente un danger lorsque la chose se fait lors d’une union donnant lieu à une conception. Le traité Kala Rabbati, au sujet des propos de Rabbi Yo’hanan ben Dehavaï, est explicite en ce sens : « Tous ces interdits s’appliquent au seul cas où cette union donne lieu à une conception. » C’est aussi ce qui semble ressortir du Ménorat Hamaor Haqadmon, chap. 10.

Il faut ajouter qu’il se peut que, de l’avis même des auteurs rigoureux, l’interdit ne vise que le baiser porté sur le lieu même de l’union, c’est-à-dire dans l’ouverture elle-même, mais non à l’endroit d’où les femmes tirent généralement le plus grand plaisir. Il se peut aussi que, selon les auteurs rigoureux, l’interdit de regarder s’applique quand la femme a l’usage de raser les poils de l’endroit, car alors il y a un complet dévoilement. Il se peut encore que l’interdit de regarder vise seulement un regard nettement concentré, quand il y a de la lumière, mais qu’il n’y ait pas d’interdit quand le regard est superficiel, ou quand la lumière est très faible. C’est ce qu’écrit le ‘Ezer Miqodech, Even Ha’ezer 25, 1. Le Rav Yossef Messas (Mayim ‘Haïm I, p. 92) pense que, en matière de regard, la crainte est que le mari n’en vienne à prendre sa femme en dégoût ; aussi, de nos jours, où chaque maison comprend une salle de bain et où l’on a l’usage de se laver davantage, la chose n’est pas interdite. On peut expliquer que, puisque l’abstention du baiser est motivée par le principe bal techaqetsou, une telle crainte est absente dans le cas où l’on se lave beaucoup. Tous ces doutes s’associent à l’opinion de la majorité des Richonim, qui estiment qu’il n’y a là aucun interdit.

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