Pniné Halakha

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07. Médicaments à Pessa’h

La question des médicaments à Pessa’h est de celles qui se posent le plus fréquemment. Il est à craindre, par exemple, que les comprimés, pilules ou autres gélules, ne contiennent un mélange de ‘hamets : l’amidon, qui peut être produit à partir de blé. Le rôle de l’amidon est de durcir et d’amalgamer le comprimé. Quand il est produit à base de pomme de terre ou de légumineuses, il est clair qu’il n’y a aucun problème, et les Ashkénazes eux-mêmes, qui ont coutume de ne pas manger de légumineuses à Pessa’h, peuvent, à des fins de médication, avaler des comprimés où sont mêlées des légumineuses. La question qui se pose est celle de la règle applicable lorsque l’amidon est fait à partir de l’une des cinq céréales dont la forme fermentée est interdite. Il faut ici souligner que, lorsqu’il s’agit d’un malade dont l’état est dangereux, et que son traitement consiste en ‘hamets, c’est une mitsva pour lui que de manger ce ‘hamets, car le sauvetage d’une vie a priorité sur cet interdit alimentaire. Mais quand le malade n’est pas en danger, la question se pose.

La réponse dépend du goût du médicament. Si celui-ci a un bon goût, comme dans le cas d’un sirop, ou de pastilles à sucer, il est obligatoire de vérifier s’il est cachère pour Pessa’h ou non ; tant que l’on ne sait pas s’il est cachère pour Pessa’h, il est interdit de le consommer.

Mais si le goût du médicament est amer, ou qu’il n’ait pas de goût, au point qu’il ne soit pas digne d’être consommé, on pourra l’avaler à Pessa’h. En effet, même si l’amidon est fait à partir de blé, cet amidon n’est plus digne d’être mangé et n’a plus le statut de ‘hamets, dès lors que l’on y a mélangé différents produits, notamment amers. Nous avons vu en effet que tout ‘hamets rendu impropre à être consommé par un chien, avant Pessa’h, n’a plus le statut de ‘hamets, et qu’il est permis de le garder à Pessa’h. Il n’y a pas lieu de dire que, du fait même que l’on souhaite avaler le médicament, on montre que le ‘hamets qu’il contient a de l’importance à ses yeux. En effet, ce n’est pas le ‘hamets qui importe aux yeux du malade, mais bien le médicament, qui est lui-même amer et impropre à être mangé. Aussi, le ‘hamets qui s’y trouve est annulé, et n’est donc pas interdit (‘Hazon Ich, Mo’ed 116, 8 ; Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm II 92).

Il y a cependant des personnes pointilleuses, qui s’efforcent de ne point ingérer de médicaments, même amers, où du ‘hamets est mêlé, car elles tiennent compte de l’opinion de certains décisionnaires isolés, selon lesquels, dès lors que le médicament est important à nos yeux, on ne saurait le considérer comme indigne de la consommation d’un chien, et il est donc rabbiniquement interdit de l’ingérer. Certains décisionnaires, parmi les rigoureux, ont néanmoins permis aux malades obligés de s’aliter, ou dont tout le corps est souffrant, de prendre un médicament amer contenant de l’amidon à base de ‘hamets ; mais ils restent rigoureux quand le malade souffre de douleurs ou d’indispositions légères : en ce cas, ils interdisent de prendre un tel médicament.

Mais la majorité des décisionnaires estiment qu’il est permis de prendre un médicament amer contenant de l’amidon à base de ‘hamets, ce pour les besoins de tout malade, même s’il ne s’agit que d’atténuer de légères douleurs ou de prévenir des maladies, ou encore de renforcer le corps.

En pratique, si l’on est dans un cas de doute quant au fait qu’un médicament amer ou insipide contienne ou non de l’amidon de blé, on pourra le prendre, et l’on n’aura pas besoin de vérifier s’il en contient ou non. Nous avons vu, en effet, que, pour la majorité des décisionnaires, même dans le cas où l’on sait qu’il s’y trouve un composant ‘hamets, on peut l’ingérer, puisqu’il est devenu, avant Pessa’h, impropre à la consommation d’un chien. Même si l’on veut tenir compte de l’opinion rigoureuse, dès lors qu’il est douteux que le médicament contienne un composant ‘hamets, il n’est pas besoin d’en tenir compte. C’est particulièrement vrai de nos jours, où l’on sait que, dans la majorité des médicaments, il n’y a point d’amidon de blé, mais de l’amidon de pomme de terre ou de légumineuses. Aussi, en pratique, on pourra prendre, à Pessa’h, des médicaments amers ou dépourvus de goût, conçus pour être avalés, sans vérifier d’abord s’ils comportent un composant ‘hamets. Si l’on sait qu’il s’y trouve de l’amidon de ‘hamets, chacun pourra choisir comment se comporter : selon la majorité des décisionnaires, qui sont indulgents, ou comme la minorité rigoureuse[9].


[9]. Un ‘hamets devenu, avant Pessa’h, impropre à la consommation d’un chien a perdu le statut de ‘hamets. Selon le Maor, le Ran et d’autres Richonim, il est même permis de le manger à Pessa’h. Selon eux, il sera évidemment permis de prendre, à Pessa’h, des médicaments amers. Face à eux, le Roch, Rabbénou Yerou’ham et d’autres Richonim estiment qu’il est rabbiniquement interdit de manger du ‘hamets devenu, avant Pessa’h, impropre à la consommation d’un chien ; car, en le mangeant, on le considérerait comme de la nourriture, et l’on montrerait que, à ses yeux, il n’est pas devenu impropre à la consommation d’un chien. C’est en ce dernier sens que tranche le Choul’han ‘Aroukh 442, 9, commenté par le Michna Beroura 43, où l’on voit qu’il est permis de garder chez soi un ‘hamets devenu incomestible par un chien, puisqu’il a perdu le statut de ‘hamets, mais qu’il est interdit de le manger.

Cependant, de leur point de vue même, il n’est pas certain qu’il soit interdit de prendre des médicaments amers mêlés de ‘hamets. En effet, les A’haronim sont partagés quant au fait de savoir si, en prenant, en tant que médication, du ‘hamets rendu impropre à la consommation d’un chien, on l’élève au rang de nourriture. Selon le Chaagat Aryé 75, c’est en effet le considérer comme nourriture ; selon le Ktav Sofer, Ora’h ‘Haïm 111, ce n’est pas le considérer comme nourriture. Et si le ‘hamets n’est pas l’élément principal du médicament, mais est seulement mêlé à sa composition, la majorité des A’haronim estiment que le Roch et ceux qui partagent son avis reconnaîtraient eux-mêmes qu’avaler un tel médicament amer ne revient pas à considérer le ‘hamets qu’il contient comme un aliment. C’est notamment la position des responsa ‘Havalim Bane’imim 5, 4, du ‘Hazon Ich, Mo’ed 116, 8, du Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm II 92, du Ye’havé Da’at II 60, du Chemirat Chabbat Kehilkhata 40, 74 et de nombreux autres auteurs.

Toutefois, si l’on se rapporte au Choul’han ‘Aroukh Harav 442, 22, se fondant sur le cas de la triaqa, spécialité contenant une quantité minime de ‘hamets, il semble que, même en un tel cas, le Roch interdirait de prendre le médicament. Mais selon la majorité des décisionnaires indulgents, il faut distinguer la triaqa, qui est destinée à l’alimentation de malades, du médicament, qui n’est en rien destiné à l’alimentation, mais que l’on avale. De plus, même quand l’amidon est à base de farine de blé, cette farine, en général, n’a pas eu le temps de lever ; tout au plus appartient-elle à la catégorie de ‘hamets nouqché (altéré), dont le processus de fermentation a été interrompu, et qui n’est interdit que rabbiniquement. Quand un tel ‘hamets a été mélangé dans un médicament amer, il n’y a pas lieu d’être rigoureux. Malgré cela, certains ont tendance à la rigueur (‘Arougat Habossem 99, ‘Atsé Halevanon 19).

Certains auteurs estiment que cela est certes permis si l’on s’en tient à la stricte obligation, mais que le peuple d’Israël est saint, et qu’il a coutume d’être rigoureux, même à l’égard des médicaments amers, en veillant à ce qu’ils ne soient pas mêlés de ‘hamets. C’est ce qu’écrit le Tsits Eliézer X 25, 20. Toutefois, le Nichmat Avraham, Ora’h ‘Haïm I 466, 1 fait valoir que, en pratique, la majorité des médicaments ne contiennent pas du tout de ‘hamets. Il dit encore que, s’il est vrai qu’aux yeux du Rav Ovadia Yossef, dans Ye’havé Da’at II 60, ce n’est que si l’on est vraiment malade que l’on peut être indulgent, le même Rav Ovadia Yossef reconnaît par ailleurs que, si l’on a un doute sur la présence ou non de ‘hamets dans le médicament, il n’est pas nécessaire de le vérifier. Mais comme nous l’avons vu, une nette majorité de décisionnaires estiment qu’il n’y a aucun interdit à avaler un médicament amer ; et même en cas de simple indisposition, la majorité des décisionnaires sont d’avis que l’on peut prendre un médicament amer où est mêlé du ‘hamets devenu, avant Pessa’h, impropre à la consommation d’un chien.

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