Pniné Halakha

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03 – Dépôt de l’érouv tavchilin ; son efficacité

Voici comment on réserve[d] l’érouv tavchilin : on prend un mets cuit et un pain, et l’on récite la bénédiction : Baroukh Ata, Ado-naï, Élo-hénou, Mélekh ha’olam, acher qidechanou bémitsvotav, vétsivanou ‘al mitsvat ‘érouv (« Béni sois-Tu, Éternel, notre Dieu, Roi de l’univers, qui nous as sanctifiés par tes commandements et nous a prescrit la mitsva de l’érouv »). On dira alors ce texte : Bedein ‘érouva, yehé charé lana léafouyé oulvachoulé oul-adlouqé charga, oulmé’bad kol tsarkhana, mi-Yom tov lé-Chabbat (« Par cet érouv, qu’il nous soit permis de cuire au four, de cuisiner, d’allumer des veilleuses et de faire tout ce dont nous avons besoin, du Yom tov pour le Chabbat »). On peut aussi le dire en hébreu : « Bezé ha’érouv, yehé moutar lanou lé-éfot oulvachel oulhadliq ner, véla’assot kol tsorkénou mi-Yom tov lé-Chabbat. »

Si l’on a l’intention d’abattre une bête, le Yom tov, pour la consommer Chabbat, ou de trier des aliments en vue de Chabbat, ou encore de piler des épices : a priori, il est bon de mentionner, au moment où l’on réserve l’érouv, les mélakhot que l’on a l’intention d’accomplir. Cependant, en pratique, même si on ne les a pas mentionnées, toute mélakha qu’il est permis d’accomplir le Yom tov pourra aussi être exécutée, ce jour-là, pour les besoins de Chabbat. En effet, dans la déclaration que l’on prononce au moment du dépôt de l’érouv, on dit bien : « Par cet érouv, qu’il nous soit permis… de faire tout ce dont nous avons besoin, du Yom tov pour le Chabbat[2]. »

Même si l’on n’a pas l’intention de cuisiner le Yom tov pour le Chabbat, on réservera un érouv tavchilin et l’on prononcera la bénédiction sur ce dépôt ; en effet, le propos essentiel de l’érouv est de donner la possibilité de cuisiner pendant Yom tov en vue du Chabbat, même si, en pratique, on ne cuisinera pas. De plus, grâce à l’érouv, on se souvient du Chabbat, et l’on se soucie de préparer des plats pour s’en délecter au trois repas sabbatiques. En outre, selon la majorité des décisionnaires, l’érouv autorise à allumer, le Yom tov, les veilleuses de Chabbat[3].

Grâce à l’érouv déposé par le maître ou la maîtresse de maison, tous les membres de leur maisonnée, ainsi que les invités qui dorment chez eux, sont autorisés à se joindre aux apprêts de la cuisine et de la pâtisserie en l’honneur du Chabbat. Le maître ou la maîtresse de maison est aussi autorisé(e) à nommer un des membres de sa maisonnée, ou l’un des invités, pour que celui-ci procède au dépôt de l’érouv pour le compte de tous. De même, pour ceux qui séjournent dans un hôtel cachère : puisqu’ils mangent la nourriture fournie par la cuisine de l’hôtel, l’érouv de l’hôtel est efficace à leur endroit, et tous les pensionnaires sont autorisés à allumer, le Yom tov, les veilleuses en l’honneur du Chabbat. De même, à la yéchiva : l’érouv de la yéchiva est efficace pour tous les étudiants présents, et pour ses invités[4].

On réserve l’érouv à la veille de Yom tov, et il est préférable qu’il consiste en un mets cuit la veille de Yom tov en l’honneur du saint Chabbat : par le biais d’un tel dépôt, on se souvient qu’il est interdit de cuisiner le Yom tov pour un jour profane, et l’on se souvient qu’il faut garder de belles portions pour le Chabbat. Mais si l’on réservait l’érouv avant la veille de Yom tov, le souvenir de ces choses s’estomperait. Toutefois, a posteriori, même si on l’a réservé longtemps avant la fête, l’érouv est valable, puisque l’on avait l’intention de faire de ce mets un érouv pour la fête. Même si l’on a formé l’intention de déposer un érouv pour plusieurs fêtes à la fois, cet érouv est efficace a posteriori, tant qu’il existe (Choul’han ‘Aroukh 527, 14).


[d]. Mani’him : littéralement on « dépose » l’érouv tavchilin.

[2]. Lorsqu’on récite le texte accompagnant le dépôt de l’érouv, on s’autorise par-là à faire, pour les besoins du Chabbat, toutes les mélakhot autorisées le Yom tov. C’est ce qui ressort du Choul’han ‘Aroukh 527, 12. Certains sont rigoureux : si l’on n’a pas mentionné explicitement telle mélakha que l’on a l’intention de faire, par exemple d’abattre un animal, il sera interdit de l’exécuter (Or Zaroua’, Rama 527, 20). D’autres pensent en revanche que, a posteriori, même si l’on a mis de côté l’érouv sans rien dire, l’érouv est efficace pour toutes les mélakhot (Yam Chel Chelomo, Touré Zahav). En pratique, a priori, si l’on projette de faire une mélakha qui n’est pas mentionnée dans le texte, on la mentionnera explicitement, et l’on ne se contentera pas de la formule oulmé’bad kol tsarkhana (« de faire tout ce dont nous avons besoin ») ; mais si l’on n’a pas fait cette mention, on s’appuiera sur les décisionnaires indulgents (Michna Beroura 63).

Selon certains, l’érouv tavchilin autorise seulement à préparer ce qui est nécessaire aux repas de Chabbat ; mais les autres préparatifs du Chabbat sont interdits ; et c’est, selon ces auteurs, la raison pour laquelle le Choul’han ‘Aroukh 528, 2 décide que, même si l’on a mis de côté un érouv tavchilin, il est interdit d’établir, pendant Yom tov, un érouv ‘hatsérot [jonction des cours, cf. Les Lois de Chabbat II chap. 29], ou un érouv te’houmin [jonction des zones d’habitation sabbatique], en vue du Chabbat (Maguen Avraham 2, Yam Chel Chelomo).

D’autres pensent, en revanche, que l’érouv tavchilin autorise l’accomplissement, pendant Yom tov et en vue de Chabbat, de tout ce qu’il est permis de faire le Yom tov pour le Yom tov lui-même. Or, puisqu’il est interdit d’installer, le Yom tov, un érouv ‘hatsérot ou un érouv te’houmin pour le Yom tov lui-même, il est également interdit de le faire pour Chabbat (Rabbi Aqiba Eiger, et c’est en ce sens qu’incline le Yechou’ot Ya’aqov 528, 1). Selon ces auteurs, il est permis à celui qui a mis de côté un érouv tavchilin de faire réchauffer de l’eau pour un bain rituel où l’on prévoit de s’immerger le Chabbat ; de même, il est permis de plier son talith ou d’enrouler un séfer-Torah, le Yom tov pour le Chabbat. Puisqu’il s’agit d’une controverse portant sur une norme rabbinique – si l’on s’en tient à la théorie du « puisque » (ho’il, cf. note 2 ci-dessus) –, le doute joue dans le sens de l’indulgence. C’est ce que pensent le ‘Héchev Haéfod II 65, le Or lé-Tsion III 22, fin du paragraphe 6, et le ‘Hazon ‘Ovadia p. 302.

[3]. Selon le Hagahot Guedolot, le Or Zaroua’, le Roch, le Rachba et le Ran, il est interdit d’allumer les veilleuses de Chabbat sans érouv tavchilin. Le Beit Yossef apprend des termes du Rif et de Maïmonide qu’il est permis d’allumer les veilleuses, même si l’on n’a pas d’érouv. Il est juste de tenir compte de l’opinion rigoureuse (Michna Beroura 527, 55, Kaf Ha’haïm 112). Cependant, au paragraphe 5 ci-après, nous apprendrons qu’a posteriori, si l’on n’a pas préparé d’érouv, les sages autorisent à allumer une veilleuse unique. Pour le Maamar Mordekhaï 527, 18 et le Kaf Ha’haïm 113, celui qui n’a pas l’intention de cuisiner le Yom tov pour Chabbat ne prononcera pas la bénédiction du dépôt de l’érouv ; en effet, nous avons vu que, pour les besoins de l’allumage des veilleuses, certains disent qu’il n’est pas nécessaire de disposer d’un érouv. Cependant, en pratique, on a coutume de dire la bénédiction, car c’est pour se donner la possibilité de cuisiner que l’on dépose un érouv (comme l’écrit le ‘Hout Chani p. 150). De plus, certains estiment que l’on tient compte de l’opinion de Rava, selon qui la raison d’être de l’érouv est de se souvenir du Chabbat (Touré Zahav 13, et c’est aussi ce qui ressort de plusieurs Richonim).

[4]. L’érouv du maître de maison exempte ceux qui « s’appuient à sa table » [qui dépendent de lui pour se sustenter pendant cette fête et ce Chabbat] (Yam Chel Chelomo, Michna Beroura 527, 56). Cela inclut aussi les enfants mariés qui viennent passer ces jours chez leur père (Echel Avraham du Rav Botchatch, ‘Hazon ‘Ovadia p. 277, note 8). La règle est la même pour toute famille invitée (Maamar Mordekhaï, Mo’adim p. 127). Même chose pour ceux qui séjournent à l’hôtel et pour les élèves de yéchiva, comme l’écrit le ‘Hout Chani p. 155. Sur toutes ces règles, on trouve des opinions contraires, que nous citons en Har’havot 8, 3, 5-7, mais leur théorie ne nous semble pas convaincante. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’un cas de doute portant sur une norme rabbinique, cas dans lequel on est indulgent.

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