Pniné Halakha

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05 – Allumage, extinction et électricité

01 – Allumer un feu

La mélakha de mav’ir (allumer ou attiser un feu) est permise par la Torah pour les besoins de l’alimentation (okhel néfech) (cf. ci-dessus, chap. 3 § 2). Mais les sages ont interdit d’allumer un feu nouveau pendant Yom tov (Michna Beitsa 33a), parce que la création d’une chose nouvelle ressemble à l’accomplissement d’un travail. Et bien que le feu soit nécessaire à la cuisson (à l’eau ou au four) des mets de la fête, les sages interdisent d’allumer un feu nouveau, le Yom tov, puisqu’il est possible d’allumer un feu la veille, et de s’en servir pendant Yom tov (Beitsa 33a-b, Maïmonide 4, 1, Rachba, Choul’han ‘Aroukh Harav 502, 1, Michna Beroura 1). L’interdit comprend le fait d’allumer un feu au moyen d’une allumette, et l’allumage d’une ampoule électrique (cf. ci-après, § 4).

Bien qu’il soit interdit d’allumer un feu nouveau, le Yom tov, il est permis d’augmenter, durant ce jour, un feu déjà existant, en ajoutant du bois. S’il s’agit d’un feu produit au moyen du gaz ou du fuel, il est permis d’augmenter la flamme en ajoutant du gaz ou du fuel. Et s’il est nécessaire d’allumer une flamme nouvelle pour les besoins de la cuisson d’aliments, il est permis d’allumer un bâtonnet de bois à partir du feu existant, puis d’allumer, par la flamme de ce bâtonnet, une flamme nouvelle. Un fer, une ampoule à fil incandescent, qui ont rougi en raison du fort degré de chaleur sont, eux aussi, considérés comme un feu, de même qu’une braise à moitié éteinte, et il est permis d’allumer une allumette à leur contact, car cela n’est point considéré comme le fait d’engendrer (molid) un feu nouveau.

Puisque l’interdit d’allumer un feu nouveau, le Yom tov, est de rang rabbinique et non toranique, il est permis, pour les besoins d’une mitsva ou pour quelque autre grand besoin, de demander à un non-Juif d’allumer pour nous un feu nouveau. Par exemple, quand les veilleuses se sont éteintes, que les membres de la maisonnée se retrouvent dans le noir, et qu’il n’y a pas de feu à partir duquel on pourrait allumer une autre veilleuse, afin d’éclairer le repas, il est permis de demander à un non-Juif d’allumer des veilleuses, ou une lampe électrique. De même, quand le froid est grand, il est permis de demander à un non-Juif d’allumer un chauffage électrique[1].


[1]. Au traité Beitsa 33b, il est expliqué que l’interdit d’allumer un feu, le Yom tov, a pour cause l’interdit de molid (« faire naître ») ; ce qui signifie que les sages ont interdit de créer, le Yom tov, une chose nouvelle (Rachi, Rabbi Yechaya A’haron zal, Rabbi Aaron Halévi, Méïri, Bartenora). Selon le Raavad et le Mikhtam (Rabbi David bar Lévi de Narbonne), en revanche, l’interdit vient du fait que la chose créée a le statut de mouqtsé. Enfin, pour Maïmonide 4, 1, c’est parce qu’il eût été possible d’allumer le feu à la veille de Yom tov. C’est aussi l’avis du Rachba, et il ressort de ses propos que, selon lui, l’interdit est rabbinique. D’autres expliquent que, aux yeux de Maïmonide, l’interdit est toranique, parce que le statut de la production de feu pendant Yom tov est semblable à celui des ustensiles d’alimentation (makhchiré okhel néfech) (cf. ci-dessus, chap. 3 § 9). De même, le Touré Zahav 502, 1, et ceux qui partagent son avis, tranchent dans le sens  d’un interdit toranique. Puisque, pour une nette majorité de décisionnaires, l’interdit d’allumer un feu nouveau est de rang rabbinique, et que l’interdit de demander à un non-Juif d’accomplir une mélakha est lui-même rabbinique, la demande faite à un non-Juif d’allumer un feu à Yom tov est un cas de chevout de-chevout (combinaison de deux abstentions rabbiniques), ce qui est permis pour les nécessités d’une mitsva ou pour quelque autre grande nécessité (Les Lois de Chabbat I 9, 11).

Certains estiment que, puisque l’interdit, selon Maïmonide, vient de ce qu’il eût été possible de préparer le feu à la veille de Yom tov, il est permis d’allumer un feu nouveau pendant Yom tov dans le cas où c’est à cause d’une contrainte que l’on n’a pas réussi à préparer ce feu la veille, ou bien encore dans le cas où on l’a préparé et où il s’est éteint ; cela, à la manière du statut des ustensiles d’alimentation (Birké Yossef 502, 1, Yaskil ‘Avdi IV 27, 2, ‘Hazon Ovadia p. 49). D’autres pensent que, même dans un cas de contrainte, il reste interdit de produire un feu nouveau, parce que faire naître un feu nouveau a même statut de la création d’un ustensile complet, cas dans lequel, dans le cas même d’un empêchement à la veille de Yom tov, il demeure interdit de créer cela pendant Yom tov, comme l’expliquent le Choul’han ‘Aroukh 509, 2 et le Cha’ar Hatsioun 11. De plus, même dans le cas d’ustensiles alimentaires que l’on n’a pas pu préparer la veille de Yom tov, on n’enseigne point une telle permission en public (Min’hat Yom Tov 98, 113, Min’hat Yits’haq IV 99). En cas de nécessité pressante, quand on ne peut pas apporter de flamme de chez ses voisins, on peut s’appuyer sur les décisionnaires indulgents ; mais il est juste, alors, d’apporter un changement dans le mode d’allumage car, de cette manière, les décisionnaires rigoureux eux-mêmes pourraient être indulgents.

S’agissant d’une ampoule électrique et d’appareils électriques, il semble que, en cas de nécessité pressante, on puisse être indulgent et permettre l’allumage en modifiant la manière habituelle, même dans le cas où l’on aurait pu faire cet allumage la veille de Yom tov. En effet, on peut associer aux autres motifs d’indulgence l’opinion de ceux pour qui, a priori, il est permis d’allumer à Yom tov (cf. ci-après, § 4, note 4).

Si, enfreignant la règle, on a allumé un feu nouveau pendant Yom tov, il est permis, a posteriori, d’en profiter (Michna Beroura 502, 4 ; cf. ci-après, chap. 8, note 6, au sujet du ma’assé Yom tov, chose créée pendant Yom tov).

02 – Extinction

Pour les besoins de l’alimentation (okhel néfech), il est permis d’éteindre un feu, le Yom tov. Mais si ce n’est pas pour les besoins de l’alimentation, c’est interdit. Même si l’on a des biens en proie aux flammes, il est interdit d’éteindre le feu, tant qu’il n’y a pas de danger pour les personnes. Il est même interdit d’atténuer un feu, si ce n’est pour une nécessité alimentaire, car toute atténuation de feu provoque l’extinction d’une partie de celui-ci (Beitsa 22a, Choul’han ‘Aroukh 514, 1-2, Les Lois de Chabbat II 16, 6-7).

Mais il est permis d’éteindre pour une nécessité alimentaire ; par conséquent, on peut disposer de la viande crue sur des braises, bien que du jus s’échappe de la viande, ce qui, au début, aura pour effet d’éteindre une partie des braises (Chabbat 134b, Choul’han ‘Aroukh 507, 4). De même, il est permis de répandre diverses épices sur les braises, afin de donner une bonne odeur aux fruits ou aux légumes et de leur donner du goût, bien qu’au début les épices concourent à éteindre une partie des braises (Beitsa 23a, Choul’han ‘Aroukh 511, 4). De même, il est permis d’atténuer la flamme qui se trouve sous une casserole, quand cette flamme est trop forte et risque de brûler le mets. Cependant, quand on dispose d’une autre flamme, plus faible, on déposera sur elle la casserole, et on ne l’éteindra pas sans motif[2].

Les décisionnaires sont partagés quant au fait de savoir s’il est permis d’éteindre un feu qui est sur le point de brûler la maison où l’on a l’intention de manger, ou les ustensiles qui servent au repas de Yom tov. Certains l’interdisent, car l’extinction du feu n’a pas d’utilité pour les aliments eux-mêmes (Rif, Maïmonide, Choul’han ‘Aroukh 514, 1). D’autres l’autorisent puisque la permission d’exécuter une mélakha pour les besoins de l’alimentation inclut également la permission de veiller à l’intégrité du lieu dans lequel on mange, et des ustensiles avec lesquels on mange. Par conséquent, si l’on ne dispose pas d’un autre lieu où il serait agréable de manger, il est permis d’éteindre le feu qui est sur le point de brûler la maison. Et si l’on ne peut se procurer d’autres ustensiles pour manger, il est permis d’éteindre le feu qui s’apprête à brûler les ustensiles (Mordekhi, Rabbénou Nissim, Rama 514, 1, Michna Beroura 8). Puisque la controverse porte sur un interdit rabbinique, on peut, en cas de nécessité, s’appuyer sur les auteurs indulgents.


[2]. Nous trouvons qu’il est permis d’éteindre pour les besoins de l’alimentation, comme l’expliquent les traités Chabbat 134b et Beitsa 23a, 32b, 34a. En revanche, nous apprenons en Beitsa 22a que les ‘Hakhamim (la communauté des sages) controversent avec Rabbi Yehouda quant au fait de savoir s’il est permis d’éteindre une branche qui est près d’incendier une maison ou une casserole. La Guémara suit l’opinion des ‘Hakhamim, selon lesquels l’extinction est interdite. Or cela semble difficile à comprendre : pourquoi les sages auraient-ils interdit d’éteindre le feu qui est sous une casserole, alors qu’il s’agit d’une nécessité liée à l’alimentation ?

Certains disent que, pour les ‘Hakhamim,  l’interdit consiste à éteindre le feu pour les besoins du sauvetage d’une maison, mais que, s’il s’agissait de sauver une casserole, ce serait permis, même de leur point de vue (Rav Cherira Gaon, Rid, Raavia, Mordekhi, Yam Chel Chelomo et de nombreux autres auteurs). D’autres expliquent qu’il est interdit d’éteindre le feu pour sauver une casserole vide, mais que, s’il s’agit de préserver un mets, l’extinction est permise (Tossephot et Na’hmanide ; c’est aussi en ce sens que le ‘Erekh Hachoul’han et le Chté Halé’hem expliquent les propos du Rif, de Maïmonide et du Choul’han ‘Aroukh 514, 1).

D’autres pensent que l’extinction n’est permise que si elle se produit à l’occasion de la cuisson, comme dans le cas où l’on pose de la viande sur des braises ; mais que, lorsque l’extinction est destinée à préserver le mets d’un dommage, elle n’est plus considérée comme une mélakha faite pour les besoins de l’alimentation, de sorte qu’elle est interdite (Rabbi Aaron Halévi ; c’est aussi en ce sens que plusieurs A’haronim, parmi lesquels le Michna Beroura 514, 4, expliquent les propos du Rif, de Maïmonide et du Choul’han ‘Aroukh).

En pratique, quand le but de l’extinction est que le plat ne soit pas brûlé, c’est permis, car telle est l’opinion de tous les Richonim, et c’est aussi en ce sens que plusieurs A’haronim expliquent l’opinion du Rif, de Maïmonide et du Choul’han ‘Aroukh. De l’avis même de ceux qui l’interdisent, l’interdit est rabbinique, puisque l’on n’a pas l’intention d’utiliser le bois éteint pour en faire des braises (cf. Les Lois de Chabbat I 9, 6).

Quand le feu est sur le point de brûler le plat, et qu’il y a un autre feu, plus faible, on transfèrera le plat vers ce dernier, afin de ne pas éteindre sans motif (Roch, Rama 514, 1). S’il n’y a pas de feu plus faible, certains disent qu’il est préférable d’allumer un nouveau feu, plutôt que d’affaiblir le feu existant (Maguen Avraham 514, 3, Michna Beroura 6). D’autres pensent qu’il est préférable d’affaiblir le feu existant (Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm IV 103, Yabia’ Omer I 31, 12). C’est ce qui nous semble vraisemblable en pratique, puisque cette extinction répond aux besoins de l’alimentation, et que, en particulier, il s’agit d’un cas de doute portant sur une norme rabbinique, cas dans lequel la halakha est conforme à l’opinion indulgente. Cf. Har’havot.

03 – Transmission d’une flamme à des fins de chauffage, d’éclairage ou d’honneur

De même qu’il est permis d’utiliser un feu pour les besoins de la cuisson, de même est-ce permis pour les besoins du chauffage de la maison quand il fait froid : si un fourneau à bois brûle à petit feu et ne chauffe pas correctement la maison, il est permis d’ajouter du bois pour rehausser sa chaleur. Si le fourneau est au fuel ou au gaz, il est permis d’y conduire davantage de fuel ou de gaz afin d’augmenter sa chaleur (Choul’han ‘Aroukh 511, 1). Bien que le chauffage domestique ne soit pas lié aux nécessités de l’alimentation, nous avons pour principe que « dès lors que la Torah a autorisé l’allumage[a] pour les besoins de l’alimentation, elle l’a également autorisé pour d’autres besoins », à condition que lesdits besoins soient communs à la majorité des gens, et que la nécessité de chauffer la maison quand il fait froid soit égale chez la majorité des gens[3].

De même, il est permis d’allumer des veilleuses (ou bougies) pour éclairer le repas ; et quoique l’on puisse se contenter de la lumière électrique déjà allumée, il est permis d’y ajouter des veilleuses, puisque celles-ci augmentent la joie de la fête et l’honneur qui lui est dû. Mais il est interdit d’allumer plus que ce qui est usuel pour ce supplément de joie. Il est permis à celui qui a peur de dormir dans l’obscurité de s’allumer une veilleuse. Or nous avons vu qu’il est interdit, le Yom tov, d’allumer une flamme nouvelle ; par conséquent, il faut allumer les veilleuses en transmettant une flamme provenant d’un feu déjà allumé. Quand il est difficile d’approcher les veilleuses que l’on désire allumer de la flamme déjà existante, on peut allumer, à partir de cette dernière, un bâtonnet de bois ou une allumette, à l’aide de laquelle on allumera les veilleuses supplémentaires. Après avoir allumé celles-ci, on n’éteindra pas l’allumette, car une extinction non nécessaire à l’alimentation est interdite, le Yom tov ; on déposera donc l’allumette et on la laissera s’éteindre d’elle-même.

Il est permis d’allumer des veilleuses à la synagogue, en l’honneur de la Présence divine (Chékhina) qui y réside, en vertu du même principe : dès lors que l’allumage a été autorisé pour les besoins de l’alimentation, il l’a été également pour d’autres besoins, parmi lesquels les nécessités d’une mitsva. Même après l’office de Min’ha, il est permis d’allumer des veilleuses à la synagogue ; il est vrai qu’elles brûleront surtout après l’expiration du Yom tov, mais cela n’est pas considéré comme la préparation du jour profane, car, dès le moment de leur allumage, pendant Yom tov, on honore par elles la Chékhina (Choul’han ‘Aroukh 514, 5).

Si l’on veut allumer une veilleuse en souvenir de ses parents (ner néchama), il faut l’allumer avant l’entrée du Yom tov : puisque ce n’est pas une mitsva que d’allumer un ner néchama, et qu’une telle veilleuse n’a pas non plus d’utilité pour le Yom tov, il est juste de ne pas l’allumer pendant la fête. Si l’on a oublié de l’allumer à la veille du Yom tov, on l’allumera à un endroit où elle présente une utilité pour le repas de fête, ou à un endroit de la synagogue où elle apportera un supplément de lumière. En cas de nécessité pressante, quand il n’y a pas de possibilité de l’allumer en un endroit où elle serait utile au repas, ou en tel autre où elle contribuerait à honorer la synagogue, et que la chose soit susceptible d’entraîner de l’affliction chez l’enfant des défunts, on pourra être indulgent, et allumer le ner néchama en quelque autre endroit, car cet allumage répond en quelque manière à une mitsva : celle d’honorer la mémoire de ses parents (Béour Halakha 514, 5, passage commençant par Ner).


[a]. Dans les conditions énoncées ci-dessus (§ 1).

[3]. Quand un réservoir de gaz est vidé, il est permis de le fermer et d’ouvrir le second. Mais a priori, il ne faut pas brancher un nouveau réservoir, car c’est une action caractéristique des jours profanes (‘ovdin de’hol) ; il faut demander cela à un non-Juif. En cas de nécessité pressante, il est cependant permis à un Juif de faire ce branchement (Rav Chelomo Zalman Auerbach cité par Chemirat Chabbat Kehilkhata 13, 11, note 60. Le Hilkhot Hamo’adim 13, 4 dit au nom du Rav Yossef Chalom Elyachiv que c’est seulement dans le cas où l’on ne savait pas que le réservoir se viderait, et où aucun non-Juif n’est présent, qu’il sera permis au Juif de le remplacer.)

04 – Électricité

Au titre de l’interdit rabbinique de créer un feu nouveau, le Yom tov, il est également interdit d’allumer une ampoule électrique ou un radiateur électrique. De même, il est interdit d’actionner un appareil électrique, même quand il n’est pas doté d’un filament incandescent[4].

De même qu’il est permis d’augmenter un feu pour les besoins de l’éclairage ou du chauffage, le Yom tov, de même est-il permis d’intensifier la lumière d’une ampoule électrique, ou la chaleur d’un fourneau électrique. Cela, à la condition que l’intensification de la lumière ou de la chaleur se produise par l’effet de l’ajout de courant dans le même fil incandescent. Mais il est interdit d’augmenter la lumière ou la chaleur par l’allumage d’un fil supplémentaire, puisque ce serait allumer un feu nouveau.

Il est interdit, le Yom tov, de parler dans un microphone, un téléphone ou un interphone, car les sages ont frappé d’interdit les appareils d’amplification sonore (cf. Beitsa 36b). De plus, la chose paraîtrait être une activité profane, et il y aurait là une déconsidération de la fête. Mais il est permis à une personne malentendante d’utiliser, le Chabbat et le Yom tov, l’appareil auditif électrique fixé à son oreille, puisque celui qui parle n’intensifie qu’indirectement le courant électrique présent dans l’appareil ; par contre, il est interdit d’éteindre l’appareil ou de l’allumer (Les Lois de Chabbat II 17 § 3 et § 13). Le Chabbat, il est interdit d’augmenter ou de baisser le volume sonore de l’appareil auditif ; mais le Yom tov, la chose est permise, de même qu’il est permis, pour les besoins de la cuisine, d’augmenter ou de diminuer le feu[5].

De même qu’il est interdit, le Chabbat, d’ouvrir un réfrigérateur quand l’ouverture provoque l’allumage d’une ampoule, de même est-ce interdit le Yom tov. À cet égard, tous les conseils qui ont été formulés à propos du Chabbat sont également valables le Yom tov (Les Lois de Chabbat II 17, 9).


[4]. Certains décisionnaires autorisent à allumer une ampoule électrique, le Yom tov, parce que la puissance du feu existe déjà dans les fils, et que l’allumage ne consiste qu’en un ajout de feu (‘Aroukh Hachoul’han, Even Yeqara III 168, Michpeté Ouziel, Ora’h ‘Haïm I 19, Maïm ‘Haïm 94). Un autre auteur a voulu l’autoriser, parce que l’acte d’allumage électrique est « indirect » (grama) (Rav Frank). Mais l’avis de la nette majorité des décisionnaires est que l’allumage d’une ampoule à filament est celui d’un feu nouveau (Ora’h Michpat 71, A’hiézer III 60, Tsafnat Pa’néa’h I 273, ‘Helqat Ya’aqov I 51, Yaskil ‘Avdi IV 27, Tsits Eliézer I 20, Ye’havé Da’at I 32, et de nombreux autres auteurs).

S’agissant des appareils électriques qui ne contiennent pas de filament à incandescence, les décisionnaires sont partagés, même à l’égard du Chabbat : certains disent que l’interdit de les allumer procède de celui de la mélakha de mav’ir (allumer un feu) ; dès lors, c’est toraniquement interdit le Chabbat (notre maître le Rav Kook, Ora’h Michpat 71). D’autres estiment que l’interdit est toranique, mais au titre de boné (construire) (‘Hazon Ich). Selon de nombreux auteurs, l’interdit est rabbinique, et provient de la défense de molid (faire naître une chose nouvelle) (Beit Yits’haq) ou de celle de ‘ovdin de’hol (acte spécifique de la semaine) (Rav Henkin). C’est aussi l’avis du Rav Chelomo Zalman Auerbach, du Yabia’ Omer I 20 et du Tsits Eliézer XIX 15 (comme nous le voyons dans Les Lois de Chabbat II 17, 2 et dans les Har’havot sur ce passage). Quoi qu’il en soit, en matière de Yom tov, où l’allumage même d’un feu n’est interdit que rabbiniquement, toute mise en marche d’appareil électrique, doté ou non d’un fil à incandescence, est interdite rabbiniquement.

[5]. Dans le cas où, en raison de quelque contrainte, l’appareil auditif se trouve éteint, certains décisionnaires autorisent à l’allumer, le Yom tov, à l’instar de ce que nous expliquions en note 1 au sujet du feu. De plus, certains auteurs autorisent l’usage de l’électricité, le Yom tov, comme nous l’avons vu dans la note précédente. Parmi les décisionnaires qui l’interdisent eux-mêmes, et qui constituent la majorité, certains estiment que l’activation d’un appareil électrique non pourvu d’un fil incandescent, le Chabbat comme le Yom tov, est un interdit rabbinique seulement. Quoi qu’il en soit, il sera bon de modifier la manière habituelle d’allumage de l’appareil auditif, car alors, de l’avis des auteurs rigoureux eux-mêmes, on pourra être indulgent.

05 – Procédé indirect, et moyen d’éteindre les feux d’une cuisinière à gaz

Nos sages apprennent du verset de l’Exode (20, 9) : « Tu n’accompliras aucun travail » que c’est précisément l’accomplissement (‘assia) d’un travail (mélakha) qu’a interdit la Torah, tandis qu’un travail qui s’accomplit de soi-même – quoique l’homme ait entraîné son accomplissement – se nomme grama (travail indirect), ce qui n’est frappé d’aucun interdit toranique. En cas de grande nécessité, les sages autorisent l’accomplissement indirect d’une mélakha, le Chabbat. Par exemple, si un incendie se déclare, il est permis de placer, autour du lieu de l’incendie, des récipients remplis d’eau, afin que, lorsque le feu parviendra à leur emplacement, ceux-ci se fendent, et que l’eau qui y était se répande, éteignant le feu (Chabbat 120b, Choul’han ‘Aroukh 334, 22). De même, la halakha permet, en pratique, d’utiliser un moyen indirect, le Chabbat, afin de prévenir une perte, ou pour les besoins d’une mitsva, ou pour quelque autre grande nécessité ; mais en l’absence de grande nécessité, il est interdit de faire en sorte que la mélakha s’accomplisse d’elle-même (Rama 334, 22).

S’agissant de Yom tov, en revanche, les décisionnaires sont partagés. Certains disent que le statut de Yom tov est semblable, à cet égard, à celui de Chabbat ; d’autres estiment que, le Yom tov, produire une mélakha de manière indirecte est chose permise a priori, en particulier quand il s’agit de la mélakha d’allumer ou de celle d’éteindre, dont l’interdiction, le Yom tov, est seulement rabbinique. En pratique, on peut être indulgent et autoriser de causer la production d’une mélakha de manière indirecte, même quand il n’y a pas à cela de grande nécessité. Mais en l’absence de toute nécessité, il est juste d’être rigoureux[6].

Autrefois, quand on voulait cuisiner le Yom tov, on prenait la quantité de bois suffisante pour faire cuire la marmite, on plaçait ce bois dans le four, et on allumait celui-ci par le biais d’un feu préparé depuis la veille de Yom tov. Après l’achèvement de la cuisson, le feu s’éteignait lentement de lui-même, car, dès l’abord, on prenait la quantité de bois qui suffisait à la cuisson, et pas davantage. Mais de nos jours, où l’on cuisine au gaz, un problème surgit : comment éteindre le feu ?

L’une de manières que l’on peut conseiller est de l’éteindre indirectement ; c’est-à-dire de placer sur le feu, une fois la cuisson achevée, une bouilloire pleine d’eau, et d’y cuire l’eau jusqu’à ce qu’elle déborde et éteigne le feu ; ensuite, on ferme le bouton du gaz. Il faut avoir soin d’utiliser cette eau pour boire le thé ou pour laver de la vaisselle, afin que sa cuisson ne soit pas vaine[7].

Une façon plus aisée et meilleure d’éteindre le feu, c’est d’utiliser un appareil nommé ‘Hagaz, qui est particulièrement conçu pour les besoins de la cuisine de Yom tov. Il s’agit d’une minuterie à ressort qui, tant qu’elle est en marche, permet d’alimenter la flamme par le gaz, et qui, lorsque expire le temps qui lui a été fixé, interrompt l’alimentation en gaz et cause l’extinction de la flamme. Avant de commencer à cuisiner, on règle la minuterie d’après le nombre de minutes que l’on souhaite donner à la flamme, on prend du feu d’une bougie allumée la veille du Yom tov et l’on allume la flamme de la cuisinière ; puis, quand a expiré le temps alloué dès l’abord à la flamme, la minuterie coupe l’alimentation de celle-ci en gaz[8].


[6]. Certains disent que, le Chabbat également, il est permis a priori de causer une mélakha de manière indirecte (grama) (Touré Zahav 514, 10, Gaon de Vilna 314, 1, Chémech Oumaguen III 5). D’autres estiment que, le Chabbat, on n’est indulgent que pour éviter une perte, ou d’autres cas semblables, tandis que, le Yom tov, on est entièrement indulgent (Tossephot sur Beitsa 22a ד »ה והמסתפק, Rama 514, 3, Maamar Mordekhaï, Cha’ar Hatsioun 31). D’autres encore ne sont indulgents que, spécialement, en matière d’allumage et d’extinction le Yom tov (A’hiézer III 60, ‘Helqat Ya’aqov I 60). D’autres enfin sont rigoureux le Yom tov comme le Chabbat (Maguen Avraham 514, 10, Choul’han ‘Aroukh Harav 9, ‘Hayé Adam 95, 5). Puisque toute la question de l’allumage et de l’extinction, le Yom tov, est d’ordre rabbinique, nous écrivons ci-dessus que l’on peut être indulgent en tout cas de nécessité. Mais quand il n’y a pas de nécessité, il est juste de tenir compte de l’opinion rigoureuse.

[7]. Certains pensent qu’il ne faut pas utiliser le mode de grama de façon régulière (dérekh qéva’) ; selon cela, on ne pourra utiliser la méthode décrite ci-dessus que de manière occasionnelle (dérekh ar’aï) (Chemirat Chabbat Kehilkhata 13, 3). Mais l’opinion principale, en halakha, est celle d’après laquelle grama, en cas de nécessité, est permis le Yom tov. Aussi est-il permis de causer l’extinction du gaz en faisant déborder l’eau (Dvar Yehochoua’ II 84, Or lé-Tsion III 20, 11, Yabia’ Omer III 30). Le Nétser Mata’aï 9 autorise à fermer le robinet du ballon de gaz, qui se trouve à l’extérieur ; de cette façon, on éteint le feu de manière indirecte. Selon le Sia’h Na’houm 27, 3, il est même permis de fermer le robinet principal de gaz, qui est dans la cuisine, à condition que l’extinction se produise quelques secondes plus tard ; car selon lui, l’interruption d’un gaz éloigné de la flamme est semblable au cas des bûches que l’on extrait du foyer tandis qu’elles sont sur le point de prendre feu, et non à celui des bûches qui ont déjà commencé à brûler par un côté.

Mais nombreux sont les décisionnaires qui interdisent d’éteindre le feu en fermant le robinet de gaz, aussi bien intérieur qu’extérieur. Parmi eux : Tsits Eliézer VI 8-9, Yabia’ Omer III 30, Chemirat Chabbat Kehilkhata 13, 12 au nom du Rav Frank. La raison en est que l’extinction se fait par la matière même de l’allumage, ce qui est semblable au fait de couper une partie de la veilleuse après qu’elle a été allumée, chose interdite selon le Roch et le Choul’han ‘Aroukh 514, 3. De plus, c’est en général tout de suite après la fermeture du robinet que le feu s’éteint, ou tout au moins s’affaiblit, de sorte que, de l’avis même de Tossephot, cela est interdit, et il n’y a pas là de caractère indirect. À notre humble avis, si l’extinction se prolonge pendant une dizaine de secondes, et que le lieu où l’on ferme le robinet soit éloigné, le fait doit être considéré comme indirect. Mais il sera bon de faire cela en y apportant un changement : alors, on sera dans un cas de chevout de-chevout.

Selon le Rama 514, 3, quand le vent ne souffle pas constamment, il est permis de placer les veilleuses en un lieu où parfois le vent souffle, de façon que, lorsqu’il soufflera, il les éteindra : cette extinction est considérée comme indirecte. Pour le Maguen Avraham 10 et le Béour Halakha, c’est interdit, car il est à craindre que le vent ne souffle immédiatement, de sorte que l’on aura directement éteint les veilleuses.

[8]. Cet appareil ne relève pas à proprement parler du procédé de grama : le cas est plus léger encore, puisque, dès avant le commencement de l’allumage, il est alloué au gaz une certaine durée pendant laquelle il peut s’écouler. A posteriori, si l’on a oublié d’actionner la minuterie avant d’allumer la flamme, il est permis de l’actionner après cela : puisque l’extinction, en pratique, se fera après un temps déterminé, il s’agit d’une extinction par grama, ce qui, en cas de nécessité, est permis le Yom tov.

[D’autre part, et suivant le même principe] selon le Choul’han ‘Aroukh 514, 3, si l’on veut que la bougie que l’on allume ne brûle pas jusqu’au bout, on peut, avant de l’allumer, en faire pénétrer la moitié dans du sable meuble ; ainsi, au moment où la bougie, se raccourcissant, arrivera au niveau du sable, elle s’éteindra. Mais il est interdit de la faire entrer dans le sable après son allumage. Selon le Rama et la majorité des décisionnaires (Michna Beroura 20), il est permis de la faire entrer dans le sable, même après l’avoir allumée. En cas de nécessité, on peut s’appuyer sur ces autorités.

06 – Appareils à action indirecte ; alarmes

Certains décisionnaires autorisent la création, pour Chabbat, d’appareils dont le fonctionnement ne laisse percevoir presque aucune différence (chinouï) avec un appareil ordinaire, mais dont le mécanisme interne est doté d’une particularité telle qu’on puisse considérer leur fonctionnement comme appartenant au mode de grama. Il existe trois façons d’intégrer un tel chinouï dans le mode de fonctionnement interne à l’appareil : a) le « retrait de l’obstacle » ; b) la mise en marche par balayage (scannage) ; c) la perpétuation d’une situation présente (cf. Les Lois de Chabbat II 17, 18).

En pratique, il semble que, si l’action humaine cause la mise en marche de l’appareil électrique en un temps court – comme il est habituel de l’actionner dans la semaine –, il sera interdit d’utiliser l’appareil le Chabbat, même si l’on a conçu l’appareil de façon telle que son activation se réalise d’une manière qui ressemble au mode de grama. Car ce qui se produit à l’intérieur de l’appareil importe peu : tant qu’il fonctionne d’une manière habituelle, sa mise en marche ne relève pas du statut de grama. Aussi ne peut-on mettre en marche des ascenseurs et des portes électriques sur le mode indirect : puisque l’on souhaite que ces machines commencent à fonctionner très peu de temps après qu’on les a activées, elles n’ont pas le statut de grama. De même, il est interdit de voyager en scooter pour personne à mobilité réduite, dès lors que ce véhicule se déplace d’une façon similaire à celle des jours de semaine.

En revanche, quand l’acte de l’homme n’entraîne l’activité de l’appareil qu’après un temps significatif, et à condition que le mécanisme qui le déclenche agisse sur le mode indirect, alors l’appareil a le statut de grama, et il est permis, en cas de nécessité pressante, de s’en servir pendant Chabbat, et, en cas de simple nécessité, le Yom tov. Tel est l’usage en matière de mise sous tension d’une alarme : si la rotation de la clef entraîne le fonctionnement du système de manière indirecte, et qu’en pratique l’alarme ne soit mise sous tension qu’environ cinq minutes après la rotation de la clef, le statut de grama s’applique, et en cas de grande nécessité il sera permis de le faire.

La règle applicable au Yom tov est semblable à celle du Chabbat ; aussi est-il interdit d’entrer dans une chambre où est installé un mécanisme électrique allumant la lumière ou la climatisation quand on entre. Et il est interdit d’en sortir quand cette sortie provoque l’extinction. Cet allumage, cette extinction, ne sont pas considérés comme des cas de grama, mais ont même statut que l’activation d’appareils au moyen d’une télécommande : puisque c’est ainsi qu’il est d’usage de les mettre en marche, il n’y a pas de différence à faire, qu’ils soient activés par une pression sur un bouton, ou en entrant ou sortant d’une chambre (cf. Les Lois de Chabbat II 17, 12 au sujet des cas de nécessité pressante).

07 – Minuterie sabbatique, le Chabbat et le Yom tov

Il est permis d’allumer, avant l’entrée de Chabbat, les lumières de la maison, et de programmer une minuterie sabbatique de manière qu’elle les éteigne et les rallume aux heures voulues. De même, il est permis d’installer une minuterie sabbatique sur une prise, d’y brancher un radiateur électrique ou un ventilateur, et de régler la minuterie de telle façon qu’elle allumera et éteindra l’appareil aux heures désirées.

Si, en plein Chabbat, la nécessité se fait sentir de changer le moment de l’allumage ou de l’extinction, on peut s’appuyer sur l’opinion des auteurs indulgents, qui autorisent à proroger la situation présente, mais non à l’abréger. En d’autres termes, quand la lumière est allumée, il est permis de modifier la programmation de la minuterie, pour que la lumière soit allumée plus longtemps, mais non pour qu’elle s’éteigne plus tôt. Et quand la lumière est éteinte, il est permis de modifier la programmation de la minuterie pour que la lumière reste éteinte plus longtemps, mais non pour qu’elle s’allume plus tôt. En cas de nécessité pressante, pour les besoins d’un malade ou pour quelque autre chose du même ordre, il est permis de hâter le changement d’état, puisque cette anticipation est un acte indirect, qu’il est permis d’accomplir le Chabbat en cas de nécessité pressante seulement (Les Lois de Chabbat II 17, 6, note 7).

Mais le Yom tov, la règle est plus indulgente, par deux côtés : a) le Chabbat, l’extinction est interdite par la Torah elle-même, tandis que, le Yom tov, l’interdit est rabbinique (ci-dessus, § 1) ; b) pour la majorité des décisionnaires, provoquer un travail par grama n’est permis, le Chabbat, qu’en cas de nécessité pressante (cha’at had’haq), tandis que, le Yom tov, c’est permis pour répondre à toute nécessité. Par conséquent, tant qu’il y a à cela une nécessité, il est permis de rapprocher le moment d’intervention de la minuterie : si la lumière est allumée, il sera permis de hâter le moment de son extinction, et si elle est éteinte, il sera permis de hâter le moment de son allumage. De même, il est permis d’allumer un four de cuisson de manière indirecte, c’est-à-dire de l’allumer par le biais d’une minuterie sabbatique qui sursoira à l’allumage pendant cinq minutes ou davantage. Car tant qu’un appareil extérieur est présent, qui repousse l’activation de l’allumage, ce dernier s’accomplit sur le mode de grama (Tsits Eliézer I 20, 5 ; cf. Chemirat Chabbat Kehilkhata 13, 31)[9].


[9]. Mise en marche d’un lave-vaisselle par le biais d’une minuterie de Chabbat : cf. Les Lois de Chabbat II 17, 10, où l’on voit que, le Chabbat, il est interdit d’activer une machine à laver la vaisselle par le biais d’une minuterie sabbatique, parce que, si l’on ne fermait pas la porte de la machine, la minuterie ne pourrait en faire démarrer le fonctionnement ; par conséquent, celui qui ferme la porte du lave-vaisselle après y avoir introduit la vaisselle sale, provoque sa mise en marche (Chemirat Chabbat Kehilkhata 12, 37). Toutefois, en cas de nécessité pressante, la chose est permise le Chabbat, au titre de grama (responsa Méroch Tsourim 30). Mais le Yom tov, en cas de nécessité simple, la chose est permise, conformément à la règle de grama à l’égard du Yom tov (cf. ci-dessus, § 5 ; Chemirat Chabbat Kehilkhata 12, 37). Tout cela, à condition que ce soit pour les besoins du Yom tov même que la vaisselle est lavée.

08 – Thermostat

Si l’on met en marche, avant l’entrée de Chabbat, un radiateur pour réchauffer sa maison, en lui donnant une chaleur moyenne, et que, au cours du Chabbat, on s’aperçoive que la température est plus chaude qu’on ne le prévoyait, et que l’on préfère que le radiateur chauffe moins, on attendra que le thermostat  interrompe l’activité du radiateur ; alors, on pourra tourner le bouton de réglage à un niveau moins élevé. De cette façon, l’interruption du chauffage se prolongera plus longtemps, et ensuite les éléments chauffants fonctionneront moins longtemps. Par contre, il est interdit de baisser le niveau de chauffage tant que le radiateur fonctionne, puisqu’un tel abaissement ne prolonge par la situation présente, mais précipite le changement : de l’état où le radiateur fonctionne et chauffe à celui où il ne chauffe point.

Le Yom tov également, il est juste d’abaisser l’intensité de chauffage au moment où le thermostat ne fonctionne pas. Certes, une action par grama est permise le Yom tov, en cas de nécessité ; mais il y a un risque sérieux que, au moment même où l’on abaisse la chaleur, on provoque l’interruption immédiate du chauffage, de sorte que l’on éteindrait directement, et non par grama.

Si, au cours de Chabbat, on veut que le radiateur chauffe davantage, on attendra le moment où les éléments chauffants du radiateur fonctionneront, et où la chaleur atteindra la mesure de yad solédet bo (au moins 71 degrés Celsius) ; alors on pourra régler le bouton à une chaleur plus élevée, afin que le radiateur continue de chauffer plus longtemps. Mais il est interdit de faire cela quand la chaleur est inférieure à la mesure de yad solédet bo, en vertu de l’interdit de cuire. Même lorsque la température du radiateur est supérieure à celle de yad solédet bo, il est interdit de faire cela quand l’appareil n’est pas en cours de fonctionnement, car ce serait causer son activité ; il est même à craindre qu’on n’entraîne sa mise en marche immédiate (cf. Les Lois de Chabbat I 10, 3 ; 17, 7).

Mais le Yom tov, où il n’y a pas d’interdit d’allumage ni de cuisson pour les besoins du chauffage domestique, il est permis de porter le bouton à un niveau supérieur, même quand la chaleur du radiateur est inférieure à la mesure de yad solédet bo. Simplement, il faut faire cela quand le radiateur est en cours de fonctionnement et qu’il chauffe, faute de quoi il serait à craindre que son activité ne mette immédiatement en marche le chauffage, de sorte qu’on l’allumerait directement[10].

S’agissant d’un climatiseur ou d’un réfrigérateur dotés d’un bouton de réglage de la température, la règle est la même le Yom tov que le Chabbat. Quand la réfrigération ou la climatisation est en activée, il est permis de porter le bouton de réglage à une température inférieure, car, par cela, l’activité réfrigérante se prolongera davantage. Quand le moteur interrompt la réfrigération ou la climatisation, il est permis de porter le bouton de réglage à une température plus élevée : de cette façon, le moteur réfrigérant verra son action suspendue davantage (Min’hat Chelomo 10, Chemirat Chabbat Kehilkhata 23, 24).

Tout cela vaut à condition que le changement thermostatique ne s’inscrive pas sur un écran. Quand le changement thermostatique produit l’inscription des degrés de chaleur sur un écran électronique, comme c’est le cas dans de nombreux climatiseurs, la chose est interdite au titre de la mélakha d’écrire (kotev), et parce que chaque pression d’un bouton entraîne immédiatement une activité électrique.


[10]. C’est ce qu’enseigne le Chemirat Chabbat Kehilkhata 23, 24. Or de prime abord, il semble s’agir d’un cas de davar ché-eino mitkaven (chose sur laquelle ne porte pas l’intention), puisqu’il n’est pas certain qu’un rehaussement modéré du niveau de chaleur entraîne l’allumage immédiat du chauffage. Dès lors, il ne semble pas y avoir ici d’interdit. On peut répondre cependant que l’on parle de davar ché-eino mitkaven lorsque l’intention est d’accomplir une autre action ; alors, bien qu’il soit bénéfique que cette mélakha s’accomplisse, il n’y a pas là d’interdit, puisqu’il n’est pas certain qu’elle s’accomplira. Tandis que, dans notre cas, l’intention porte essentiellement sur l’intensification du chauffage ; par conséquent, s’il advient que le radiateur se met en marche immédiatement, on considérera que l’allumage a été fait intentionnellement, et non comme une « chose sur laquelle ne portait pas l’intention ».

09 – Encens domestique ; cigarette

Il est interdit de faire brûler des parfums (de l’encens domestique) afin de répandre une bonne odeur dans la maison, ou pour parfumer des vêtements. En effet, l’allumage n’a été autorisé que pour des besoins communs à toute personne (chavé lekhol néfech), tandis que parfumer son intérieur ou ses vêtements est une chose dont seules les personnes particulièrement raffinées ont l’usage. Mais il est permis de placer des épices sur des braises pour donner un bon parfum aux aliments qui y grillent. Et quoique, même sans ces épices, les aliments soient bons à la consommation, tout ce qui est utile aux mets est inclus dans l’autorisation. En effet, les pauvres eux-mêmes épiçaient leurs aliments, quand ils disposaient d’épices. En revanche, la majorité des gens ne parfument pas leur maison ni leurs vêtements de cette façon, car ce serait à leurs yeux une délicatesse superflue (Beitsa 22b, Choul’han ‘Aroukh 511, 4 ; cf. ci-dessus, chap. 3 § 6, note 4).

Une partie des décisionnaires eurent d’abord tendance à interdire de fumer du tabac, le Yom tov, parce que fumer nécessite un allumage ; or, puisqu’il n’était pas fréquent de fumer, dans la majorité des communautés, cela n’appartenait pas à la catégorie de davar hachavé lékhol néfech (« chose également partagée par tous »), pour laquelle il eût été permis de procéder à un allumage (Maguen Avraham 514, 4, Qorban Nethanel, Beitsa, chap. 2, 22, 10). D’autres étaient indulgents, car ils pensaient que fumer doit être considéré comme une chose « égale pour tous » (Darké No’am, Ora’h ‘Haïm 9). Au fil du temps, le fait de fumer devint plus fréquent, et les médecins eux-mêmes prétendaient, en ces temps-là, que le tabac est utile à la santé et favorise la digestion. Aussi, la majorité des décisionnaires eurent-ils tendance à autoriser de fumer des cigarettes le Yom tov (Pné Yehochoua’, Rabbi Jonathan Eybeschutz, Peri Mégadim 511, Michbetsot Zahav 2, Ktav Sofer, Ora’h ‘Haïm 66, Béour Halakha 511, 4).

Dans les dernières générations, il est apparu que le tabagisme nuit gravement à la santé, et il fut halakhiquement tranché qu’il est interdit de fumer, et que ceux qui sont déjà dépendants à l’égard du tabac doivent s’efforcer grandement de s’en sevrer. En pratique, le pourcentage des fumeurs diminue, au point que, en Israël, il est passé en dessous de 25%. Puisque, de l’avis de nombreux décisionnaires, la permission de fumer le Yom tov s’appuyait sur l’usage de la majorité de la population masculine, certains disent que, de nos jours, où la majorité des hommes ne fument plus, il est interdit de fumer le Yom tov ; en effet, il n’y a plus ici de nécessité « égale pour tous ». D’autres l’autorisent à ceux qui souffrent quand ils ne fument pas : puisque ce n’est point pour « se dorloter » qu’ils fument, cela doit être considéré comme une chose « égale pour tous », dans le sens où tout homme fait tout ce qu’il peut pour s’éviter une souffrance. De plus, la notion de chavé lekhol néfech (chose « égale pour tous ») ne signifie pas que la majorité des gens ont tel usage ; il suffit qu’un pourcentage significatif d’entre eux en ait l’usage. Et quoiqu’il soit certain que les fumeurs doivent s’efforcer de se sevrer du tabac, qui est nuisible, il n’est pas nécessaire, tant qu’ils n’y ont pas réussi, qu’ils s’affligent précisément pendant Yom tov (Tsits Eliézer XVII 21, Hilkhot Hamo’adim 16, note 1). En pratique : a priori, ceux-là même qui ont l’habitude de fumer doivent s’efforcer de n’en rien faire pendant Yom tov ; mais ceux à qui cette abstention cause une grande souffrance sont autorisés à s’appuyer sur les décisionnaires indulgents.

Puisqu’il est interdit d’éteindre sans nécessité liée à l’alimentation, les fumeurs doivent avoir soin de ne pas éteindre leur cigarette, quand elle est près de s’éteindre ; on la posera en un endroit sûr, où on la laissera s’éteindre d’elle-même. On fera aussi attention de ne pas secouer la cendre qui s’accumule au bout de la cigarette, car il se peut que du feu s’y trouve, que le secouement éteindrait ; on laissera la cendre tomber d’elle-même[11].


[11]. Certains auteurs estiment que, si des lettres sont inscrites sur le papier de la cigarette, il est interdit de la fumer, afin de ne pas brûler les lettres ni de les effacer. Mais halakhiquement il n’y a pas là d’interdit, puisque, lorsque le papier brûle entièrement, cela n’est pas considéré comme un fait d’effacement. Même si l’on considérait la combustion comme un effacement, celui-ci aurait lieu de manière incidente (kil-a’har yad), ce qui constitue un changement (chinouï) par rapport à un effacement ordinaire. De plus, le but n’est pas d’écrire à l’endroit où les lettres sont effacées (or en ce cas, l’effacement n’est interdit que rabbiniquement), de sorte que l’on a affaire à un psiq reicha dela ni’ha leh (conséquence certaine, mais qui n’apporte aucun bénéfice), dans un cas où deux éléments de défense rabbinique sont présents ; en une telle circonstance, de nombreux auteurs sont indulgents (cf. Les Lois de Chabbat I 9, note 2). C’est en ce sens que se prononcent le Da’at Torah 514, 1, le Maharchag II 41, le Rav Chelomo Zalman Auerbach cité par Chemirat Chabbat Kehilkhata 13, note 34.

10 – Se laver

En raison de différentes craintes liées au fait de se laver, de nombreuses personnes ont coutume de ne pas se laver le Yom tov. Mais en cas de nécessité, il est permis de se laver à l’eau chaude, chauffée la veille du Yom tov, ou bien avec une eau chauffée pendant Yom tov par le biais d’un chauffe-eau solaire ou d’une minuterie sabbatique. C’est ce qui différencie le Yom tov du Chabbat : le Chabbat, il est permis de se laver à l’eau tiède, mais non chaude, tandis que, le Yom tov, il est permis de se laver à l’eau chaude (cf. Les Lois de Chabbat I 14, 8).

Certains auteurs sont rigoureux, qui pensent que la règle applicable au Yom tov est semblable à celle du Chabbat : selon eux, il n’est pas permis de se laver, le Yom tov, à l’eau chaude, mais seulement à l’eau tiède. D’autres encore, rigoureux, estiment qu’il est rabbiniquement interdit de se laver, le Chabbat et le Yom tov, même à l’eau tiède ; et tel est l’usage d’une partie des communautés ashkénazes. Cependant, en pratique, la position principale, en halakha, suit la majorité des décisionnaires, qui autorisent, le Yom tov, à se laver à l’eau chaude. Quand s’en abstenir créerait du désagrément – par exemple à Roch hachana, qui s’étend sur deux jours, ou un Yom tov qui jouxte un Chabbat, il convient d’adopter la coutume des auteurs indulgents, afin d’honorer la fête et d’en faire un objet de délice.

Si l’on a un chauffe-eau solaire, on peut se laver avec l’eau qui y a chauffé durant la fête. Si l’on n’a pas de chauffe-eau solaire, on peut activer son cumulus électrique avant la fête, et, pour que de l’électricité ne se dépense pas en vain, brancher le cumulus sur minuterie sabbatique, de sorte qu’on le fera fonctionner pendant le temps nécessaire seulement[12].

Contrairement au Chabbat, il est permis, le Yom tov, d’ouvrir le robinet d’eau chaude, même quand l’eau qui se trouve dans le cumulus est brûlante, et même quand le système électrique chauffant est allumé, car il n’est pas interdit de cuire, le Yom tov. Mais il est interdit d’allumer, le Yom tov, le cumulus électrique, car cet allumage serait considéré comme celui d’un feu ; or nous avons vu qu’il est interdit, le Yom tov, d’allumer un feu nouveau[13].


[12]. S’agissant de Chabbat : les sages ont ordonné de ne point se laver le corps à l’eau chaude ayant chauffé la veille de Chabbat, afin de ne pas en venir à cuire de l’eau pendant Chabbat (Chabbat 40a, Choul’han ‘Aroukh 326, 1). Même lorsqu’on lave chaque membre séparément, il est interdit de se laver la majorité du corps à l’eau chaude : on peut se laver une minorité du corps à l’eau chaude ayant chauffé la veille de Chabbat. La Guémara explique que le décret portant sur les bains (gzérat mer’hats) s’applique également au Yom tov, et les Richonim sont partagés quant au motif de la chose : selon Tossephot (sur Beitsa 21b, ד »ה לא) et le Roch (Chabbat 3, 7), c’est parce que se laver la majorité du corps n’est pas une nécessité égale pour tous (chavé lekhol néfech) ; aussi est-il toraniquement interdit de réchauffer de l’eau à cette fin, le Yom tov. Selon le Rif (Beitsa, ibid.) et Maïmonide (Yom tov 1, 16), le décret portant sur les bains s’applique aussi au Yom tov ; et bien qu’il soit fondamentalement permis de réchauffer de l’eau le Yom tov, les sages ont fait peser leur décret sur le Yom tov, de crainte que l’on accomplisse d’autres mélakhot (Na’hmanide, Chabbat 40a).

Si l’eau a été chauffée la veille de Yom tov, le Rif et Maïmonide pensent qu’il est permis, à la maison, de l’utiliser pour se laver tout le corps, mais que, dans un bain public, il est interdit de se laver avec une telle eau en raison du décret portant sur les bains. Telle est l’opinion de la majorité des Richonim, parmi lesquels : Na’hmanide, Or Zaroua’, Hagahot Maïmoniot au nom de Terouma, Raavia, Chibolé Haléqet, Rabbi Yechaya A’haron zal, Maguid Michné, Choul’han ‘Aroukh 511, 2. Si l’eau a été chauffée pendant Yom tov dans un chauffe-eau solaire, ou par le biais d’une minuterie sabbatique, son statut est semblable à celui d’une eau chauffée à la veille de Yom tov, et il est permis de se laver avec elle le Yom tov (Chemirat Chabbat Kehilkhata 14, 3, ‘Hazon Ovadia, Yom tov p. 41).

Face à cela, Tossephot, le Roch, le Rid et le ‘Itour estiment que, lors même que l’on a chauffé l’eau la veille de Yom tov, il est interdit de l’utiliser, chez soi, pour se laver la majorité du corps, en raison du décret portant sur les bains. Bien que la majorité des Richonim soient indulgents, on a pris coutume, dans les pays germaniques, de se conformer à l’avis rigoureux (Rama 511, 2, Elya Rabba, Choul’han ‘Aroukh Harav, Michna Beroura 18). C’est en ce sens que se prononcent, en pratique, le Pisqé Techouvot 511, 7 et le Chemirat Yom Tov Kehilkhato 15, 5. D’après eux, tous ceux qui sont rigoureux en matière d’eau tiède le Chabbat le seront également le Yom tov (cf. Har’havot sur Pniné Halakha – Chabbat 14, 8, 1).

Cependant, nous avons vu que, selon Tossephot et le Roch, l’interdit de chauffer de l’eau, le Yom tov, pour se laver tout le corps, a pour motif le fait qu’il ne s’agit pas d’une nécessité égale pour tous. Dès lors, de nos jours où cette activité est devenue une source de jouissance égale pour tous – puisque la majorité des personnes ont l’habitude de se laver chaque jour, ou tous les deux jours –, il est permis de chauffer de l’eau, le Yom tov, pour se laver tout le corps, et le décret pesant sur les bains se maintient seulement pour le bain proprement dit, et non pour une douche domestique. Telle est l’opinion du Rav Chelomo Zalman Auerbach (Chemirat Chabbat Kehilkhata 14, note 21, Choul’han Chelomo p. 198, note 3). Le Rav Mordekhaï Elyahou est indulgent quant à une douche chaude, mais non quant à un bain pris dans sa baignoire (Maamar Mordekhaï p. 143). En pratique, nous retenons ci-dessus l’opinion indulgente, puisque c’est celle de la majorité des Richonim, et que, même si l’on se place du point de vue de la coutume ashkénaze, il est vraisemblable qu’il y ait lieu d’être indulgent ; de plus, il s’agit d’une controverse portant sur une norme rabbinique, cas dans lequel la halakha est conforme à l’opinion indulgente. Par contre, nous n’écrivons pas que l’usage de tous les Séfarades est d’être indulgent, car, selon le Or lé-Tsion III 21, 1, il n’est permis de se laver, le Yom tov, qu’avec de l’eau chauffée depuis la veille, et non avec de l’eau chauffée pendant Yom tov dans un chauffe-eau solaire ou un cumulus électrique.

[13]. Le Chabbat, il est interdit d’ouvrir le robinet d’eau chaude quand l’eau qui se trouve dans le chauffe-eau est brûlante, ou quand l’élément chauffant est activé et rend l’eau brûlante ; cela, en raison de l’interdit de cuire (Les Lois de Chabbat I 10, 23-24). Mais le Yom tov il est permis d’ouvrir le robinet d’eau chaude, même quand l’élément chauffant est en activité, et bien qu’il cuise, ce faisant, de l’eau supplémentaire, sans nécessité. En effet, dans la mesure où il est impossible d’obtenir de l’eau chaude sans que l’eau froide la remplace, il apparaît que ce fait est nécessaire au Yom tov. De plus, il se peut qu’il s’agisse d’un cas de grama, qui, dans son fondement, est permis (cf. ci-dessus, § 5, note 6). (En outre, il n’y a pas d’interdit à ce qu’une mélakha autorisée, le Yom tov, soit accomplie dans une mesure supérieure aux besoins mêmes du Yom tov ; Choul’han ‘Aroukh 503, 2, Chemirat Chabbat Kehilkhata 2, note 22, contrairement au Chevout Yits’haq VI p. 94). Quoi qu’il en soit, il n’y a pas là d’interdit toranique, puisque, si des invités se présentaient, ils pourraient utiliser cette eau chaude.

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