Pniné Halakha

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Chapitre 05 – Les dix jours de pénitence

11. Annulation des vœux (hatarat nédarim)

Les Juifs ont coutume de procéder à l’annulation des vœux la veille de Roch hachana, afin d’entrer en ce jour lavés de cette grave faute, que sont les vœux (Chné Lou’hot Habrit, Yoma 2-3, ‘Hayé Adam 138, 8). Certains ont coutume d’annuler également leurs vœux à la veille de Kipour. En plus de cela, la récitation du Kol Nidré, à l’entrée du jour de Kipour, répond à ce même but.

Cette annulation est utile pour les vœux que l’on a oublié avoir fait. Elle est aussi utile à l’égard des bonnes coutumes que l’on aurait observées trois fois sans avoir précisé qu’on les observait sans s’y engager à l’avenir (bli néder). Enfin, elle est utile pour les actes dont la pratique participe d’une mitsva, et que l’on aurait décidé d’accomplir sans préciser que cette décision n’était pas un vœu (bli néder).

Mais un vœu que l’on se rappelle avoir formulé, on ne peut le faire annuler sans en citer le détail devant trois personnes faisant office de juges, qui l’annuleront après avoir recherché un motif d’annulation (péta’h) et en faisant exprimer au demandeur son regret de l’avoir formulé (‘harata) (Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 228, 14)[5].

Afin d’annuler un vœu, il faut se présenter devant trois hommes et leur demander de bien vouloir procéder à l’annulation. Trois juges simples (hédiotim, non spécialisés) suffisent pour y procéder, à condition d’être capables de comprendre des paroles de Torah, et de comprendre le sens de l’annulation du vœu (cf. Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 228, 1).

L’annulation consiste, pour le juges, à dire trois fois : moutar lekha, ou charouï lekha (« cela t’est permis »), ou ma’houl lekha (« cela t’est pardonné »). Dans les rituels de prière, on trouve un texte bien ordonné, comprenant la demande d’annulation et l’annulation elle-même.

Puisque l’annulation n’est pas considérée comme un jugement proprement dit, on peut y procéder la nuit ; et il est permis que les trois juges soient parents l’un de l’autre, ou proches de celui qui demande à être délié. Par conséquent, trois frères peuvent défaire le vœu d’un quatrième frère (Choul’han ‘Aroukh 228, 3). Toutefois, quand une femme demande l’annulation d’un vœu, son mari ne peut pas être l’un des trois juges (Choul’han ‘Aroukh 234, 57).

Il est de coutume que celui qui demande l’annulation d’un vœu se tienne debout, tandis que les trois juges sont assis, comme siège un tribunal rabbinique. Des personnes nombreuses peuvent se tenir devant les trois hommes : elles demanderont ensemble l’annulation de leurs vœux, tandis que les trois hommes faisant office de juges les délieront tous en même temps. Certains, cependant, ajoutent à la pratique un supplément de perfection en annulant les vœux de chacun séparément (Maté Ephraïm 581, 49).

Certains disent que, si quelqu’un a formulé un vœu au cours d’un rêve, il lui faut s’en délier ; d’autres estiment même que le vœu fait en rêve requiert, pour être annulé, dix juges. Bien que, de l’avis de la majorité des décisionnaires, un vœu fait en rêve ne requière point d’annulation – puisqu’un tel vœu n’est rien – on tient compte, a priori, de l’opinion rigoureuse (Choul’han ‘Aroukh 210, 2). Si l’on ne peut facilement trouver dix juges, on procédera à l’annulation devant trois seulement, comme pour un vœu ordinaire (Rama ad loc.). Certes, si l’on n’a pas souvenance d’avoir jamais exprimé un vœu en rêve, il n’est pas nécessaire d’annuler, à la veille de Roch hachana, ses vœux devant dix personnes. Malgré cela, certains apportent à leur pratique ce supplément de perfection : ils annulent leurs vœux, à la veille de Roch hachana, devant dix personnes, de crainte d’avoir formulé quelque vœu en rêve, puis de l’avoir oublié (Da’at Torah 619, 1).

Les femmes s’acquittent de l’annulation de leurs vœux durant la prière de Kol nidré, qui se récite le soir de Kipour. Aussi les femmes ont-elles coutume de venir ponctuellement à la synagogue pour Kol nidré, le soir de Kipour. Une femme mariée peut nommer son mari comme mandataire (chalia’h), en lui demandant d’annuler aussi ses vœux à elle quand il annulera les siens propres ; car sa femme et lui forment une entité unitaire – la femme est considérée comme une partie intégrante de l’homme (ichto ké-goufo) –, de sorte que, lorsqu’il se trouve devant les trois juges, elle aussi se trouve là. Par contre, une femme non mariée ne peut pas mandater une autre femme ni un autre homme pour la délier de ses vœux (Choul’han ‘Aroukh 234, 56, Touré Zahav 46, Rav Pe’alim IV Ora’h ‘Haïm 34).


[5]. Si l’on s’en tient à la norme toranique, on peut délier quelqu’un de son vœu sans qu’il soit besoin d’en donner le détail. Mais les sages ont ordonné que, pour se délier d’un vœu, il faut en donner le détail, de peur que l’on n’annule un vœu qu’il est interdit d’annuler ; c’est le cas, par exemple, d’un vœu dont le but était de prévenir la commission d’une chose interdite. Si donc on n’a pas indiqué le détail du vœu à l’un des juges chargés de l’annuler, ceux-ci ne peuvent en prononcer l’annulation (Guitin 35b, Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 228, 14). Par conséquent, le texte général d’annulation que l’on récite à la veille de Roch hachana n’est efficace que pour les vœux que l’on a oubliés ; ceux dont on se souvient, en revanche, ne sont pas annulés par-là (Tossephot Rid sur Nédarim 23b ; Chibolé Haléqet 317 ; Dérekh Ha’haïm ; Elef Hamaguen sur Maté Ephraïm 581, 101).

Certains disent cependant que l’annulation générale vaut aussi pour les vœux dont on a le souvenir, puisque l’on dit, dans le texte d’annulation, que l’on ne demande pas que soit annulé ce qui ne doit pas l’être ; dès lors, il n’est pas à craindre d’annuler un vœu dont l’annulation est interdite (Rabbi Chelomo Kluger dans ses responsa sur Choul’han ‘Aroukh 228, 14 ; Sfat Emet ad loc. ; le Rav Chelomo Zalman Auerbach incline en ce sens ; cf. Kol Nidré 79, 1). Rabbi Chelomo Kluger écrit que l’annulation est efficace au titre du regret (‘harata) ; et bien que, généralement, un motif d’annulation (péta’h) soit également exigé, le regret seul suffit, puisque l’on a déjà annoncé, lors de l’annulation des vœux faite l’année précédente, que l’on annulait d’avance ses vœux à venir. Selon le Ma’hané Ephraïm (Nédarim, chap. 16), l’annulation est également efficace au titre du péta’h : si l’on avait su que l’on regretterait son vœu, on ne l’aurait pas formulé (Kol Nidré 78, 7).

12. Annulation des vœux pour l’avenir

Nos sages disent : « Celui qui souhaite que ses vœux n’aient pas de validité, toute l’année à venir, se tiendra [devant trois juges] à Roch hachana et déclarera : “Que tout vœu que je dirais dans l’avenir soit considéré comme nul” » (Nédarim 23b). Une telle déclaration est appelée, dans la langue de la halakha, messirat moda’a (« transmission d’annonce » ou déclaration publique). En récitant Kol nidré, à l’entrée de Yom Kipour, en plus d’annuler les vœux prononcés par le passé, on accomplit également une messirat moda’a ; on dit en effet : « … de ce Yom Kipour-ci au prochain Yom Kipour, puissions-nous y parvenir dans le bien ». Malgré cela, on a coutume de faire également une messirat moda’a à la veille de Roch hachana, à l’occasion de l’annulation de ses vœux passés. Cela, pour trois raisons : parce que les personnes zélées s’empressent d’accomplir les mitsvot ; pour que ceux qui arriveraient en retard à la récitation de Kol nidré puissent déjà voir leurs vœux défaits ; et pour ceux qui ne comprendraient pas le sens de la déclaration préalable faite dans Kol nidré[6].

Selon la majorité des décisionnaires, cette déclaration préalable vaut seulement dans le cas où, en formulant son vœu, on oublie que l’on avait déclaré, préalablement, annuler ses vœux. Mais si, au moment de formuler un vœu, on se souvient avoir déclaré l’annulation de ses vœux par avance, le vœu est valide ; en effet, le fait même d’avoir décidé de faire un vœu dans un tel cas vaut annulation de la déclaration préalable (Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 211, 2).

En pratique, si l’on a fait un vœu et que l’on souhaite l’annuler, on ne se contentera pas de la simple déclaration préalable que l’on avait faite. Si l’on ne veut pas le maintenir, on se rendra devant trois personnes faisant fonction de juges, qui procèderont à l’annulation. Cela, pour deux raisons : a) certains décisionnaires estiment que la déclaration préalable ne vaut que dans le cas particulier où l’on s’en souvient, au moment même où l’on prononce le vœu, et où l’on forme l’intention que la déclaration préalable annule effectivement le vœu ; tandis que, si l’on ne se souvient pas, au moment où l’on prononce le vœu, avoir fait cette déclaration, le vœu est valide ; or, en pratique il y a lieu de tenir compte de cette opinion (Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 211, 2) ; b) de l’avis même de ceux qui estiment que la déclaration préalable annule efficacement le vœu, on a l’usage de l’annuler a posteriori, afin que l’on n’en vienne pas à se conduire légèrement à l’égard des vœux prononcés alors que l’on se souvenait de ladite déclaration ; ces vœux sont en effet pleinement valides (Mahari Weil, Rama 211, 1). Il faut encore signaler que, d’après toutes les opinions, la déclaration préalable n’a pas d’efficacité à l’égard d’un vœu que l’on prononcerait pour son prochain, car un tel vœu ne dépend pas de la seule volonté de celui pour qui on l’a formulé (Choul’han ‘Aroukh 211, 4).

La déclaration préalable est utile en ce que les bons usages que l’on observera par trois fois ne seront pas considérés pour autant comme un vœu de s’y obliger désormais. Sans cette déclaration, en effet, l’usage répété trois fois consécutivement serait considéré comme un vœu, à moins de préciser explicitement que l’on fait cela bli néder (« sans qu’il s’agisse d’un vœu »). De même, la déclaration préalable est utile à celui qui aurait pris sur lui de faire un don de tsédaqa, ou d’accomplir quelque autre mitsva, sans préciser bli néder. En effet, sans cette déclaration d’annulation préalable, n’avoir pas précisé bli néder a pour effet que la décision sera considérée comme un vœu (Da’at Torah 211, 2).

Bien que, si l’on s’en tient à la seule règle de halakha, il suffise de prononcer cette déclaration à part soi, en en articulant les mots, pour qu’elle soit considérée comme une messirat moda’a, efficace pour annuler ses vœux par avance, il est juste de la prononcer face à trois hommes faisant office de juges, comme le veut la coutume consistant à la réciter la veille de Roch hachana, à l’occasion de l’annulation des vœux passés (Ritva, Nédarim 23b ; Kol Nidré 81, 10).

Les femmes qui participent au Kol nidré, et qui comprennent le sens de la déclaration préalable, s’acquittent de cette manière. Pour celles qui n’y auront point participé, il conviendra qu’elles récitent la déclaration à part soi ; celle-ci sera efficace, pour autant que les mots en soient articulés effectivement, et non simplement médités en son esprit.


[6]. Dans le texte détaillé de messirat moda’a, on a soin de signaler que cette déclaration n’inclut pas les vœux portant sur des jeûnes individuels volontaires, vœux prononcés la veille du jeûne, à l’heure de Min’ha. En effet, si l’on ne faisait pas cette précision, la déclaration annulerait d’avance toute décision individuelle de jeûner ; et même si l’on jeûnait en fait, cela ne serait pas considéré comme un jeûne au sens rituel du terme. En revanche, dans le texte du Kol nidré, on ne spécifie pas cela. On peut expliquer que la déclaration préalable est alors conforme à ce qui est admis par la communauté et par les rabbins, lesquels s’accordent à dire que les vœux prononcés à l’heure de Min’ha, portant sur un jeûne individuel à faire le lendemain, ne sont pas inclus dans l’annulation.

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