Pniné Halakha

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11 – Directives pratiques en matière d’heure limite du Chéma et de la ‘Amida

Le temps prévu pour la lecture du Chéma s’étend jusqu’à la fin de la troisième heure du jour car, jusqu’à ce moment, certaines personnes continuent de se lever. De cette façon, on accomplit la mitsva de dire le Chéma « en se levant » (ouvqoumékha), c’est-à-dire lorsque les gens se lèvent. Il est vrai que la majorité des décisionnaires penchent pour l’opinion du Gaon de Vilna (selon lequel les heures du jour se calculent du lever au coucher du soleil, voir ci-dessus § 10). Mais en matière de lecture du Chéma, dont l’horaire est de rang toranique, il est bon d’être rigoureux et de se conformer à l’opinion du Maguen Avraham (pour lequel la journée s’étend de l’aube à la nuit), suivant le principe : « En cas de doute sur une obligation de rang toranique, nous allons dans le sens de la rigueur » (sfeqa de-oraïtha lé’houmra). Toutefois, certains ont l’usage a priori d’adopter l’horaire du Gaon de Vilna, et il n’y a pas lieu de s’y opposer.

Bien que la lecture du Chéma soit prévue jusqu’à la fin de la troisième heure, si cette heure est passée sans qu’on ait lu le Chéma, on le lira avec ses bénédictions durant la quatrième heure, et l’on sera récompensé pour cette lecture, comme si l’on se livrait à une simple lecture de la Torah (Choul’han ‘Aroukh 58, 6).

Le temps prévu pour la lecture de la ‘Amida et des bénédictions du Chéma s’étend jusqu’à la fin de la quatrième heure, car les sages ont fixé leur temps en fonction de l’offrande journalière, qui était présentée au Temple de Jérusalem jusqu’à la fin de la quatrième heure. Puisque ces obligations sont d’ordre rabbinique, leur régime juridique est conforme à l’opinion indulgente ; on peut donc adopter l’horaire le plus tardif et s’appuyer sur l’opinion du Gaon de Vilna. Malgré cela, les hommes diligents se hâtent d’accomplir les mitsvot ; il est donc bienvenu de prier aussi tôt que le prescrit le Maguen Avraham (Michna Beroura 58, 4)[15].

Si quatre heures sont passées sans qu’on ait dit les bénédictions du Chéma ni récité la ‘Amida, il est convenu de dire que la ‘Amida pourra se réciter jusqu’au midi solaire. Il est vrai que la halakha, en cette matière, est conforme à l’opinion de Rabbi Yehouda, selon lequel la ‘Amida de Cha’harit doit se dire avant la fin de la quatrième heure, et non à celle des sages, selon lesquels on peut aller jusqu’à midi. Mais quoi qu’il en soit, Rabbi Yehouda lui-même reconnaît que, dans le cas où l’on n’aurait pas prié avant la fin de la quatrième heure, on pourrait a posteriori réciter sa prière jusqu’à midi. Et bien que l’on ne recueille pas, en cela, la rétribution de la prière dite en son temps, on recueille néanmoins la rétribution de la prière en tant que telle. En revanche, on ne peut plus dire la ‘Amida de Cha’harit après midi (Berakhot 27a ; Choul’han ‘Aroukh, Ora’h  ‘Haïm 89, 1)[16].

En ce qui concerne les bénédictions du Chéma, les décisionnaires sont partagés. D’après le Choul’han ‘Aroukh (58, 6) et la majorité des décisionnaires, ce n’est qu’à l’égard de la prière proprement dite, c’est-à-dire la ‘Amida, que l’on a été indulgent en permettant a posteriori d’en rattraper la récitation jusqu’à midi. En effet, on est en principe autorisé à réciter une ‘Amida en tout temps à titre de nédava (« offrande », prière volontaire) ; par conséquent, dans toute situation de doute, on peut dire la ‘Amida. En revanche, on ne saurait dire les bénédictions du Chéma à titre de nédava ; aussi, celui qui s’est mis en retard et ne les a pas récitées avant la fin de la quatrième heure, ne peut les rattraper. Mais, selon le Michna Beroura, si c’est en raison d’un empêchement qu’on a manqué de les dire avant la fin de la quatrième heure, on est autorisé à en rattraper la lecture jusqu’à midi (Béour Halakha, ad loc.)[17].


[15]. Certains ont avancé que la coutume ashkénaze suivait le Gaon de Vilna et que la coutume séfarade suivait le Maguen Avraham. Effectivement, le ‘Hida écrit que, dans le monde séfarade, la coutume était conforme à l’avis du Maguen Avraham ; de son côté, le Igrot Moché du Rav Moché Feinstein (Ora’h ‘Haïm 1, 24) indique qu’en Lituanie, la coutume était semblable à l’avis du Gaon de Vilna, y compris en matière de lecture du Chéma. Toutefois, le Yalqout Yossef (I p. 98) précise que l’usage séfarade n’est pas nécessairement conforme à l’avis du Maguen Avraham. Par ailleurs, en Allemagne, de nombreuses personnes étaient a priori rigoureuses en matière de lecture du Chéma, conformément à l’avis du Maguen Avraham (Michna Beroura 58, 4 ; Téphila Kehilkhata).

[16]. L’explication selon laquelle le temps prévu pour la ‘Amida de Cha’harit s’étend, a posteriori, jusqu’à midi, est présentée par le Beit Yossef, et telle est l’opinion de la majorité des décisionnaires. Cependant, certains auteurs pensent que Rabbi Yehouda ne s’accorde en rien, à cet égard, avec l’opinion des sages, et qu’après quatre heures, l’heure de Cha’harit est close ; commence alors la période dite de Tachloumin (littéralement « remboursement », cf. chap. 18 § 8-10). D’après cela, celui qui, intentionnellement, n’a pas prié avant quatre heures, ne peut plus prier à titre de Tachloumin. Telle est l’opinion du Raavan, du Peri ‘Hadach et du Gaon de Vilna. Le Michna Beroura 89, 6 tient compte de cette opinion. Aussi écrit-il que si l’on a, intentionnellement, manqué de dire la ‘Amida avant la fin de la quatrième heure, on priera avant midi à titre de nédava [littéralement « offrande », prière volontaire, non obligatoire]. (Le Rachba est plus rigoureux, et écrit dans ses responsa qu’après quatre heures on ne peut du tout réciter la ‘Amida). Cf. Bérour Halakha sur Berakhot

En ce qui concerne la demi-heure qui suit midi, voir Bérour Halakha sur Berakhot, début du chap. 4. Conformément aux propos du Beit Yossef et du Rama 89, 1, il ne faut pas dire la ‘Amida de Cha’harit durant cette demi-heure. Toutefois, si l’on a dit la ‘Amida par erreur durant cette demi-heure, on ne dira pas de seconde ‘Amida après Min’ha à titre de Tachloumin, puisque, selon certains avis, il est encore possible de dire la ‘Amida une demi-heure après midi (Michna Beroura 89, 7).

[17]. Le Choul’han ‘Aroukh tranche comme le Roch et le Tour: le temps de lecture de ces bénédictions s’étend seulement jusqu’à quatre heures. C’est aussi ce qu’écrivent le Ben Ich ‘Haï (Vaéra 5), le Rav Mordekhaï Elyahou dans son sidour, et le Yalqout Yossef I p.107. Le Michna Beroura quant à lui, base son propos, d’une part, sur l’opinion du Maïmonide et du Peri ‘Hadach, lesquels pensent que le temps des bénédictions du Chéma se prolonge toute la journée, et d’autre part, sur l’opinion du Michkenot Yaaqov, selon lequel le régime juridique de ces bénédictions est semblable à celui de la ‘Amida, si bien qu’on peut les dire a posteriori jusqu’à midi. Le Maharil écrit que telle est la coutume ashkénaze. Le Béour Halakha conclut que, dans le cas où l’on n’aurait pas dit ces bénédictions en raison d’un empêchement, on peut les dire jusqu’à midi. Certes, de nombreux décisionnaires ashkénazes – tels le Gaon Rabbi Chnéour Zalman et le ‘Hayé Adam – sont rigoureux, comme l’est le Choul’han ‘Aroukh ; mais de nombreux Ashkénazes s’appuient de toutes façons sur le Michna Beroura. C’est dans ce sens que s’expriment le Halikhot Chelomo et le Iché Israël.

Selon le Yalqout Yossef I p. 109, même en ce qui concerne les bénédictions du Chéma, il est possible d’adopter l’usage du Gaon de Vilna [qui considère que la journée s’étend du lever au coucher du soleil]. Il est vrai qu’il s’agit d’une situation de doute liée à des bénédictions et que, à première vue, il conviendrait de s’abstenir de dire des bénédictions à un moment qui est sujet à controverse, suivant le principe : « en cas de doute sur la nécessité de dire une bénédiction, on s’abstient ». Mais quoi qu’il en soit, puisque certains auteurs sont d’avis que le temps des bénédictions du Chéma se prolonge toute la journée, et que d’autres encore le fixent jusqu’à midi, on peut à tout le moins être indulgent en en fixant la limite à la fin de la quatrième heure d’après la méthode du Gaon de Vilna.

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