Pniné Halakha

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Soukot

07.Hauteur des parois et règle du lavoud

Comme nous l’avons vu (§ 1), la hauteur des parois doit être d’au moins dix téfa’h (environ 80 cm). Il faut les dresser près du sol, et s’il se crée un espace de trois téfa’h (environ 22 cm) entre le sol et les parois, celles-ci ne sont pas valides. En revanche, il n’y a aucune limitation s’agissant de l’espace séparant la paroi et le sekhakh, car la paroi est considérée comme si elle se prolongeait verticalement jusqu’au sekhakh (Choul’han ‘Aroukh 630, 9)[10].

Il est permis de faire des parois en dressant des barres ou en tendant des fils solides, de telle sorte que ces barres ou ces fils soient distants de moins de trois téfa’h l’un de l’autre : de cette façon, le statut de lavoud s’y applique. En d’autres termes, dès lors que moins de trois téfa’h (environ 22 cm) séparent une barre ou un fil de l’autre, tout l’espace inclus entre eux est considéré halakhiquement comme joint. Et bien que le vent et le soleil y pénètrent, les barres ou les fils sont considérés comme formant cloison. Peu importe que les barres ou fils soient placés verticalement ou horizontalement : tant qu’il y a moins de trois téfa’h entre eux, ils sont considérés comme joints. Toutefois, certains auteurs pensent que, puisqu’il s’agit là d’une cloison médiocre, elle doit entourer toute la souka, en ses quatre parois (Maguen Avraham ; bien entendu, la porte n’invalide pas la souka). Si la cloison est construite sur le mode « de la chaîne et de la trame », comme l’est une barrière grillagée dont on entoure les cours, cela n’est pas considéré comme une cloison médiocre, et il suffit donc d’en entourer deux parois et un téfa’h (comme nous l’avons vu au paragraphe précédent). Quoi qu’il en soit, il faut que la souka convienne pour manger et dormir sans désagrément, comme nous le verrons ci-après (§ 14).


[10]. Quand le sekhakh est circonscrit dans l’espace délimité par les parois de la souka : si la distance horizontale séparant la ligne verticale prolongeant l’extrémité supérieure de la paroi, d’une part, et le sekhakh d’autre part, est inférieure à trois téfa’h (environ 22 cm), le sekhakh est encore considéré comme juxtaposé à la paroi. Mais si, entre la ligne prolongeant l’extrémité supérieure de la paroi et le sekhakh, il y a un espace vide de trois téfa’h, la souka n’est pas valide, car il n’y a pas de jonction entre le sekhakh et les parois (Choul’han ‘Aroukh 630, 9). Même quand la paroi est penchée, on prolonge son extrémité par une ligne verticale, et non selon l’angle déterminé par l’inclinaison de la paroi ; de là, on mesure la distance séparant la cloison du sekhakh (cf. ‘Hazon Ich, ‘Erouvin 71, 6).

Si le sekhakh se prolonge au-delà de l’espace délimité par les parois, la souka est valide.

Paroi courbe : nous tenons comme halakha lé-Moché mi-Sinaï que, s’il y a du sekhakh non valide d’un côté de la souka, sur une longueur inférieure à quatre amot, ce sekhakh invalide est regardé comme la continuation de la paroi, de sorte que l’on considère la paroi comme « courbe » (dofen ‘aqouma). Si le sekhakh invalide s’étend sur plus de quatre amot (environ 1,80 m), la paroi est invalidée, car on ne la considère plus comme courbe à partir de quatre amot, et le sekhakh invalide fait écran entre la paroi et le sekhakh. Par conséquent, si l’on a retiré une partie du toit d’une maison, que l’on ait installé du sekhakh à l’endroit de l’ouverture, et qu’il reste du plafond alentour moins de quatre amot, les murs de la maison seront considérés comme les parois de la souka. Mais s’il reste du plafond alentour quatre amot ou davantage, les murs ne sont pas considérés comme des parois courbes, et il faut installer des parois qui entoureront l’emplacement du sekhakh (Souka 17a, Choul’han ‘Aroukh 632, 1).

Il n’est pas nécessaire que la paroi arrive jusqu’au sekhakh : dès lors qu’elle mesure dix téfa’h au moins, elle est valide, et l’on considère qu’elle monte en droite ligne jusqu’au sekhakh. Ce principe est appelé goud assiq me’hitsata [litt. « tire et monte les cloisons ! »]. Les décisionnaires sont partagés quant au cas où la paroi ne parvient pas jusqu’au sekhakh, et où, de plus, il y a là du sekhakh invalide dans une mesure inférieure à quatre amot. Doit-on, dans ce cas, cumuler les deux principes, « tire et monte les cloisons » et « paroi courbée » ? (Michna Beroura 632, 4).

08.Souka dont les parois sont des tentures de tissu (« souka perpétuelle »)

Dans les dernières générations, on a commencé à produire des soukot lanétsa’h (« perpétuelles »), c’est-à-dire des soukot dont le cadre est métallique et dont les parois consistent en tentures de toile épaisse (bâche en plastique). Ces soukot sont répandues parce qu’il n’est pas coûteux de les produire et de les commercialiser, qu’il est facile de les monter et de les démonter, et qu’il est commode de les entreposer. Toutefois, certains décisionnaires de notre temps ont émis des doutes sur leur validité, car à leur avis les parois de la souka doivent être stables ; mais quand le vent les fait bouger de-ci de-là, elles ne sont pas valides.

Néanmoins, en pratique, ces soukot sont cachères ; car toute la mise en garde des Richonim consiste à dire que, si les parois sont des tentures, elles doivent obligatoirement être fixées par en bas, faute de quoi, lorsque le vent soufflerait sur elles, elles se soulèveraient à trois téfa’h au-dessus du sol, et ne pourraient plus, dès lors, servir valablement de parois. Il serait même à craindre que le vent ne les détachât entièrement de l’endroit où elles sont fixées. Mais s’agissant des soukot nétsa’h, il n’y a pas lieu d’avoir cette crainte, puisque les tentures sont bien attachées de tout côté. Aussi ces soukot sont-elles cachères, et l’on peut réciter la bénédiction en y prenant place. Si l’on veut apporter à sa pratique un supplément de perfection, on y ajoutera des barres afin de créer une paroi par l’effet d’un lavoud [11].


[11]. En Souka 24b, il est expliqué que des parois faites de branchages et qui bougent au vent sont invalides ; aussi faut-il les renforcer afin qu’elles ne bougent pas. C’est ce que rapportent Maïmonide 4, 5 et le Choul’han ‘Aroukh 630, 10. Certains auteurs ont voulu conclure de cela que le mouvement de la paroi invalide celle-ci (Michkenot Ya’aqov, Ora’h ‘Haïm 123, Ye’havé Da’at III 46). Cependant leurs propos paraissent très difficiles à soutenir, car il n’est pas vraisemblable que l’on renforce des branchages au point qu’ils ne bougent plus du tout. C’est aussi ce que laissent entendre tous les Richonim qui commentent ce passage talmudique, et qui expliquent que la souka n’est invalidée que lorsqu’un vent habituel crée une brèche de trois téfa’h entre la paroi et le sol, disqualifiant ainsi la paroi. En ce cas, la paroi n’est pas valide, même quand il n’y a pas de vent. Mais s’il s’agit d’un simple mouvement qui n’entraîne pas d’ouverture, la paroi n’est pas invalidée. Cf. Har’havot, où l’on voit que c’est ce qui ressort des propos de Rabbi Saadia Gaon, du Méïri, du Rachba, du Hagahot Acheri et de Rabbi Yits’haq de Lunel. C’est aussi ce qui ressort explicitement des propos de Rabbénou Pérets – rapportés par le Tour et le Choul’han ‘Aroukh 630, 10 –, d’après qui ce n’est que lorsqu’il est à craindre que les tentures se détachent entièrement qu’il est juste de ne pas en faire des parois de souka. C’est aussi ce qu’écrivent le Mabit, Tosséphet Chabbat, Peri Mégadim, ‘Hazon Ich (Ora’h ‘Haïm 77, 6), Méloumdé Mil’hama 96.

Si l’on veut tenir compte de l’opinion rigoureuse, on fixera dans ces soukot des barres à une distance inférieure à trois téfa’h l’une de l’autre (22,8 cm), jusqu’à une hauteur de dix téfa’h (environ 80 cm), puisque tout intervalle de moins de trois téfa’h est considéré comme lavoud (joint). De cette manière, on disposera d’une paroi, indépendamment même des tentures.

Cependant, nombre de personnes se trompent en se fondant sur l’estimation de Rabbi Haïm Naeh, selon lequel trois téfa’h font 24 cm, alors qu’en réalité il s’agit de 22,8 cm ; or si l’intervalle est plus grand, il ne s’agit plus d’un lavoud (comme nous le voyons ci-dessus, note 1). Mais quoi qu’il en soit, leur souka reste cachère sans aucun doute, puisque la halakha est ici conforme à l’opinion indulgente.

 

09.La souka doit être établie sous la voûte céleste

La souka doit se tenir sous la voûte céleste, afin que ce soit le sekhakh qui abrite celui qui est assis dans la souka, et non quelque autre chose. Par conséquent, si l’on établit sa souka sous le plafond d’une maison, ou sous un arbre, elle n’est pas valide (Soukot 9b).

Mais il est permis de faire une souka près d’un immeuble élevé, qui empêche les rayons du soleil de pénétrer dans la souka. En effet, ce n’est que si un plafond ou des branches font écran entre le sekhakh et le ciel que la souka est invalidée ; mais tout ce qui n’est pas strictement au-dessus de la souka n’invalide pas celle-ci.

Si les branches d’arbre qui sont au-dessus du sekhakh sont très clairsemées, et que le sekhakh de la souka soit dense, au point que, même si l’on enlevait la partie du sekhakh qui se trouve sous les branches de l’arbre, l’ombre du sekhakh restant demeurerait majoritaire par rapport au soleil, la souka est cachère (Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 626, 1)[12].

Il est permis de construire une souka sous des cordes à linge, ou des fils électriques : puisque les fils en question sont fins, que leur ombre est très minoritaire, et que leur but n’est pas de produire de l’ombre, ils n’invalident pas le sekhakh qui se trouve au-dessous d’eux.


[12]. Selon Tossephot et le Roch, tant que l’ombre de la souka est valide en tant que telle, même sans le concours de l’ombre provenant de l’arbre, et que l’ombre fournie par l’arbre est minoritaire par rapport au soleil pénétrant à cet endroit, la souka est valide. Selon le Raavia et le Ran, il faut déduire tout le sekhakh se trouvant sous les branches d’arbre ; alors, si l’ombre apportée par le sekhakh restant demeure majoritaire par rapport au soleil pénétrant dans la souka, le sekhakh est valide. Le Choul’han ‘Aroukh 626, 1 mentionne les deux opinions, en introduisant chacune par la formule yech omrim (« certains disent ») ; or, d’après les principes décisionnels du Choul’han ‘Aroukh, la halakha est ici conforme à la seconde opinion, l’opinion rigoureuse. C’est ce qu’écrit le Béour Halakha ד »ה ויש אומרים, qui ajoute cependant, en se fondant sur les A’haronim, que l’on peut, en cas de nécessité pressante, s’appuyer sur les auteurs indulgents (Elya Rabba 626, 5, Peri Mégadim, Echel Avraham 4, Choul’han ‘Aroukh Harav 10).

Quand une souka est établie près de branches d’arbre, de sorte que, lorsqu’il souffle, le vent amène ces branches au-dessus de la souka, le sekhakh, si l’on s’en tient à la stricte règle, n’est pas invalidé pour autant. En effet, bien qu’à ce moment l’ombre portée par ces branches soit majoritaire, leur présence au-dessus de la souka n’est pas permanente (Maharcham en Da’at Torah 626, 3). Le Rav Tsvi Pessa’h Frank, en Miqraé Qodech I 23, émet des doutes à cet égard ; aussi, a priori, est-il préférable de couper lesdites branches. Cf. Har’havot.

Quand un hélicoptère ou une montgolfière passe au-dessus de la souka, celle-ci est, à ce moment précis, invalidée, puisque ces corps ne se balancent pas accidentellement par l’effet du vent, mais sont placés par l’homme (Da’at Torah du Maharcham, chap. 626). Quand ces appareils poursuivent leur vol, la souka redevient valide – à l’instar de ce qu’écrit le Rama 626, 3.

 

10.S’asseoir à l’ombre du sekhakh; ornements et voile intermédiaire

La mitsva de la souka consiste à s’asseoir à l’ombre d’un sekhakh valide. Par conséquent, si l’on étend un voile sous le sekhakh afin d’augmenter l’ombre dans la souka, on invalide celle-ci (Choul’han ‘Aroukh 629, 19). Mais il est permis de s’asseoir dans la souka en portant un grand chapeau sur la tête, car le chapeau est accessoire au corps et ne fait donc pas écran entre l’homme et le sekhakh.

Il est permis de suspendre au sekhakh des fruits et des ornements de papier, car ces ornements sont accessoires au sekhakh et ne constituent pas une séparation entre le sekhakh et ceux qui séjournent dans la souka. Cela, à condition que les ornements se trouvent dans les quatre téfa’h contigus au sekhakh (environ 30 cm). Même si les ornements occupent l’espace de tout le sekhakh, ils lui restent accessoires et ne l’invalident pas, du moment qu’ils se trouvent dans ses quatre téfa’h. Si, par erreur, on a suspendu quelque ornement qui descend en dessous de quatre téfa’h en partant du sekhakh, il n’invalide pas celui-ci, tant que sa largeur est inférieure à quatre téfa’h ; mais s’il est large de trois téfa’h, il est préférable de ne pas s’asseoir en dessous de lui. Si sa largeur est inférieure à trois téfa’h (environ 22 cm), il est permis de s’asseoir en dessous (Michna Beroura 632, 3) ; simplement, a priori, il faut rehausser tous les ornements à l’intérieur des quatre téfa’h du sekhakh</em[13].

Si, au-dessus d’un lit, un voile (ciel ou baldaquin) est fixé de façon permanente, celui qui y dort n’accomplit pas la mitsva de la souka. Si le voile n’est pas permanent et que sa hauteur soit inférieure à dix téfa’h, il n’a pas d’importance, et est considéré comme annulé face à la souka, de sorte que celui qui y dort accomplit la mitsva de la souka. Mais si la hauteur du voile est supérieure à dix téfa’h, il a une importance, et celui qui y dort n’accomplit point la mitsva.

La règle est la même pour celui qui dort sous un lit ou sous une table qui se trouvent dans la souka : puisque l’espace en dessous de ce meuble est accessoire à celui-ci, cet espace est considéré comme incident ; dès lors, si cet espace est inférieur à dix téfa’h (76 cm), celui qui dort là accomplit la mitsva ; mais si l’espace est de plus de dix téfa’h, celui qui y dort n’accomplit pas la mitsva[14].

La règle est la même s’agissant d’un lit à étage : si l’espace compris entre le lit inférieur et le lit supérieur est de dix téfa’h (76 cm), celui qui dort dans le lit inférieur n’accomplit pas la mitsva de la souka. Si l’espace est inférieur à dix téfa’h, celui qui dort dans le lit inférieur accomplit la mitsva de la souka[15].


[13]. Nous apprenons en Souka 10b que, si les ornements s’écartent du sekhakh de quatre téfa’h, la majorité des Amoraïm estiment qu’ils constituent une séparation. C’est en ce sens que tranche le Choul’han ‘Aroukh 629, 19 et 627, 4. Simplement, les Richonim sont partagés quant au motif de cette invalidation : selon le Maor, le Raavia et le Méïri, c’est parce que l’ornement est alors semblable à une tente sous une autre, ou à un sekhakh sous un autre. D’après cela, ce n’est que si les ornements sont larges de sept téfa’h et si leur ombre est majoritaire par rapport au soleil [à leur emplacement] qu’ils sont considérés comme une tente ou comme un sekhakh interne, et qu’ils sont facteur d’invalidation. En revanche, Na’hmanide, le Raavad et le Roch expliquent que l’invalidation causée par des ornements est semblable à la question du sekhakh invalide, qui, dès qu’il atteint quatre téfa’h, rend invalide ce qui se trouve sous lui. Or les Richonim sont partagés quant à cette opinion même : selon le Ran, même si l’ombre des ornements n’est pas majoritaire par rapport au soleil, ils sont cause d’invalidation, dès lors qu’ils s’écartent du sekhakh de quatre téfa’h. Selon Rabbi Aaron Halévi, ce n’est que si leur ombre est supérieure au soleil qu’ils sont facteur d’invalidation (cf. Michna Beroura 627, 11, Bérour Halakha, Souka 10b).

D’après cela, dès lors que la largeur de l’ornement est inférieure à quatre téfa’h, il est évident qu’il n’invalide pas la souka, et si l’on s’en tient à la stricte règle, cet ornement n’est pas interdit, comme l’explique le Michna Beroura 627, 15. Cependant, a priori, on ne s’assiéra pas en dessous. S’il est inférieur à trois téfa’h, il sera permis a priori de s’asseoir en dessous (Michna Beroura 632, 3). Mais il y a lieu, a priori, de rehausser tous les ornements à l’intérieur de quatre téfa’h à partir du sekhakh (Rama 627, 4). Cf. Har’havot 10, 4-5.

[14]. Cf. Choul’han ‘Aroukh 627, 1-3 et Michna Beroura 7. En résumé : trois éléments définissent la notion de « tente » (ohel), telle que celui qui s’asseoit en dessous n’est pas considéré comme assis dans une souka : a) la permanence ; b) une hauteur supérieure à dix téfa’h ; c) un toit large d’au moins un téfa’h (cet élément est presque toujours présent car, dès lors que, dans les trois premiers téfa’h supérieurs, le voile atteint la largeur d’un téfa’h, ce voile a le statut d’un toit large d’un téfa’h).

Toute tente rassemblant deux de ces trois traits fait écran à la souka. Par exemple, si l’on dort sous un lit [hypothèse d’école, dans laquelle la place manque dans la souka, et où la personne tient à faire la mitsva], l’espace qui se trouve en dessous du lit est considéré comme accidentel (ar’aï), puisque le lit n’a pas été construit en vue de cet espace. Par conséquent, si l’espace est d’une hauteur de dix téfa’h, deux caractéristiques sont réunies : un toit d’un téfa’h et une hauteur de dix téfa’h, de sorte qu’il constitue une séparation. S’il n’est pas haut de dix téfa’h, une seule de ces caractéristiques reste présente – un toit d’un téfa’h – et il est permis de dormir sous ce lit.

[15]. On mesure dix téfa’h depuis le terrain où est dressée la tente ; si donc on a dressé la tente sur le sol – quoiqu’on y ait introduit un lit –, et qu’entre ce lit et la tente il y ait moins de dix téfa’h, celui qui y dort n’accomplit pas la mitsva (cf. Michna Beroura 627, 5, Cha’ar Hatsioun 11). Si l’on dort sous une table, même si l’on a disposé un matelas, on effectue la mesure depuis le sol jusqu’à la base de la table, car le matelas n’est pas considéré comme le sol de la souka.

Lits superposés : s’il y a moins de dix téfa’h entre le lit inférieur et le lit supérieur, celui qui dort en dessous accomplit la mitsva ; et la personne qui dort au-dessus elle-même ne fait pas écran (Rav Elyahou, Chévet Halévi VII 36, X 87, 2, Pisqé Techouvot 627, 3, 6, contrairement au Qinyan Torah 5, 1). Faut-il mesurer dix téfa’h à partir du matelas, ou bien de la planche sur laquelle le matelas est posé ? La chose mérite approfondissement. Mais il semble satisfaisant de dire que l’on mesure depuis le matelas, puisque c’est de manière permanente qu’il est posé là. Un auteur (le Rav Chelomo Zalman Auerbach) s’est demandé s’il ne faudrait pas mesurer à partir du sol, mais cela serait étonnant : les pieds du lit supérieur s’appuient sur le lit inférieur, et ne tiennent pas à eux seuls sur le sol. Quoi qu’il en soit, ceux qui autorisent à dormir dans le lit inférieur ne mesurent pas depuis le sol, puisqu’il y a évidemment plus de dix téfa’h entre le sol et le lit supérieur.

 

11.Éléments invalides du sekhakh, espaces vides : s’asseoir sous eux<

S’il se trouve au milieu du sekhakh valide des éléments invalides, tels que du plastique, ou s’il y a au-dessus du sekhakh valide une poutre de béton qui invalide le sekhakh en dessous d’elle, et que l’endroit invalidé soit large de quatre téfa’h (environ 30 cm), il est interdit de s’asseoir à cet endroit de la souka. Si l’endroit invalidé n’atteint pas quatre téfa’h, mais dépasse trois téfa’h (environ 22 cm), il ne faut pas, a priori, s’asseoir ni dormir  à cet endroit ; mais en cas de nécessité, c’est permis (Michna Beroura 632, 3). Si l’endroit invalidé n’atteint pas trois téfa’h, il est a priori permis de s’asseoir et de dormir en dessous, puisqu’il est regardé comme annulé face à l’ensemble de la souka.

Si un espace vide se trouve parmi le sekhakh, la règle est plus sévère, parce que le vide est davantage perceptible que le sekhakh invalide. Si la largeur du vide est de trois téfa’h (environ 22 cm), l’endroit qui est en dessous est invalidé, et il est interdit de s’y asseoir. S’il est inférieur à trois téfa’h, il est considéré comme nul face à l’ensemble de la souka, et il est permis de s’asseoir et de dormir en dessous (Choul’han ‘Aroukh 632, 2) ; à condition que l’on n’ait pas la majorité de sa tête ou la majorité de son corps sous la partie vide[16].

Certaines personnes ont une grande terrasse majoritairement couverte, et dont la partie à ciel ouvert n’est large que de cinq téfa’h. De prime abord, puisque la largeur minimale d’une souka valide est de sept téfa’h, il n’est pas possible de construire une souka sur cette terrasse. Cependant, d’après ce que nous avons vu – selon quoi un sekhakh invalide dont la largeur est inférieure à trois téfa’h s’adjoint à la souka, de sorte qu’il est permis de s’y asseoir –, on peut bâtir une souka sur une telle terrasse. On procédera ainsi : on dressera une souka large de sept téfa’h à l’extrémité de la terrasse, et puisque cinq téfa’h du sekhakh se trouvent sous la voûte céleste et sont valides, et que moins de trois téfa’h sont sous le toit de la terrasse et sont source d’invalidité, ces deux téfa’h s’adjoindront à la souka, et il sera dès lors permis de s’asseoir et de dormir sous eux. Cela, à condition que l’on fasse une cloison entre les deux téfa’h qui s’adjoignent à la souka et le reste de la terrasse, afin de distinguer entre ces deux téfa’h, qui font partie de la souka, et le reste de la terrasse couverte. Cette cloison doit être longue de sept téfa’h ; il est bon qu’elle atteigne jusqu’au sekhakh ; et dans la continuité de la ligne séparant la souka de la terrasse, on ménagera une forme de portique (tsourat péta’h) (cf. ‘Hazon Ovadia p. 12, Min’hat Yits’haq VI 60, 20, Chévet Halévi X 99).


[16]. Selon Rabbénou ‘Hananel, Rabbi Yits’haq ibn Ghiat, Tossephot et Rabbi Aaron Halévi, il est permis a priori de s’asseoir sous un vide, quand celui-ci est inférieur à trois téfa’h. Selon le Ritva et le Ran, il est interdit d’avoir la majorité de sa tête ou de son corps sous le vide en question. Pour le Roch et Rabbénou Yerou’ham, l’interdit s’applique seulement au cas où le vide s’étend sur toute la longueur de la souka ; c’est aussi ce qu’écrivent en pratique le Beit Zevoul 3, 14 et le ‘Hazon Ovadia p. 68. Dans le corps de texte, nous  retenons l’opinion rigoureuse, mais ceux qui veulent adopter l’indulgence du Roch y sont autorisés. Cf. Har’havot.

Si un vide d’une largeur de trois téfa’h, ou du sekhakh non valide d’une largeur de quatre téfa’h traverse la souka, ce n’est plus une, mais deux soukot qui sont présentes, et il  faut vérifier si, de chaque côté, il y a au moins trois parois (Rama 632, 2).

 

Quand nous disons que du sekhakh invalide a pour effet de transmettre son invalidité à partir de quatre téfa’h, cela vaut dans une grande souka ; mais dans une souka de moins de dix téfa’h de côté, du sekhakh non conforme est cause d’invalidité dès qu’il atteint trois téfa’h ; pour moins de trois téfa’h, il n’est pas cause d’invalidité (Choul’han ‘Aroukh 632, 1, Michna Beroura 8).

12.Intention requise quand on construit la souka

C’est une mitsva que de s’occuper de la préparation de la souka ; selon les sages du Talmud de Jérusalem, on récite même une bénédiction sur sa construction : Baroukh… acher qidechanou bémitsvotav vétsivanou la’assot souka (« Béni sois-Tu… qui nous as sanctifiés par tes commandements et nous as prescrit de faire une cabane ») (Berakhot 9, 3, Souka 1, 2). Mais en pratique, le Talmud de Babylone décide que l’on récite une bénédiction sur la mitsva au moment même de son accomplissement, c’est-à-dire quand on s’asseoit dans la souka (Mena’hot 42a, Choul’han ‘Aroukh 641, 1).

Quoi qu’il en soit, il est certain que, pendant la construction de la souka aussi, on accomplit une certaine mitsva. Les hommes pieux, les gens de mérite, s’empressent de commencer la construction de leur souka à l’issue de Yom Kipour, afin d’amorcer une mitsva dès l’achèvement d’une autre. On s’efforce d’achever la construction d’ici au lendemain, car, lorsqu’une mitsva se présente à soi, on doit faire attention de ne pas la laisser traîner (Maharil, Rama 624, 5 ; 625, 1).

Selon la maison d’étude de Chamaï, il faut construire la souka en formant l’intention d’y accomplir la mitsva de la fête, comme il est dit : « Tu feras une fête des cabanes, sept jours durant » (Dt 16, 13). Et si l’on n’a point formé cette intention, la souka est invalide. Mais la halakha suit la maison d’étude de Hillel, d’après laquelle il n’est pas obligatoire de dresser la souka pour la mitsva de la fête : dès lors qu’on l’a construite pour profiter de son ombre, elle est cachère. Par conséquent, la souka qu’auraient construite des bergers ou des gardes afin de se protéger du soleil est valide. De même, une souka bâtie par un non-Juif pour son ombre est valide (Souka 8a-b, Choul’han ‘Aroukh 635, 1). Toutefois, nos sages enseignent que, si l’on n’a pas construit la souka en vue de la mitsva de la fête, on devra, a priori, y introduire quelque nouveauté (‘hidouch) à l’approche de Soukot, par exemple en y ajoutant du sekhakh dans la mesure d’un téfa’h sur un téfa’h, ou bien en ajoutant un fin roseau sur toute sa longueur (Talmud de Jérusalem, Michna Beroura 636, 4). La règle est la même pour une souka ancienne (souka yéchana), c’est-à-dire une souka qui est restée de l’année précédente : si l’on s’en tient à la stricte règle de halakha, elle est cachère ; mais puisqu’elle a été bâtie pour la fête de Soukot de l’année passée, elle n’est pas considérée comme une souka bâtie en vue de la mitsva de l’an présent ; a priori, on devra donc lui ajouter du sekhakh dans la mesure d’un téfa’h carré, ou un fin roseau sur toute sa longueur (Choul’han ‘Aroukh 636, 1, Michna Beroura 7)[17].

Si l’on a construit une souka pour y entreposer des choses, elle n’est pas valide, puisqu’elle n’a pas été faite dans le but d’apporter de l’ombre. De même, une souka construite pour servir de maison permanente, et quoique le sekhakh soit fait de branchages valides, est invalide pour la fête, puisqu’elle n’est pas une habitation temporaire. Si l’on veut rendre valides de telles soukot, on devra en retirer tout le sekhakh, et le remettre dans le dessein de préparer une souka pour la fête.


[17]. Selon le Talmud de Jérusalem, c’est une mitsva que de construire une souka, puisque, selon cette source, il faut réciter une bénédiction : « Béni soi-Tu… qui nous as sanctifiés par tes commandements et nous a ordonné de faire une souka ». C’est en ce sens que s’exprime le Chéïltot, Vézot haberakha, chéïlta 189 (comme l’explique le Ha’émeq Chééla ad loc.). Toutefois, de nombreux auteurs estiment que la construction de la souka n’est qu’un acte permettant l’accomplissement d’une mitsva (hekhcher mitsva) ; et c’est ce qui ressort du Talmud de Babylone, qui estime qu’on ne récite pas de bénédiction pour la construction de la souka ; c’est aussi ce qui ressort des propos de la maison d’étude d’Hillel, selon qui on ne requiert pas d’intention particulière pendant sa construction (cf. Béour Halakha 656, fin du ד »ה אפילו, Rachbach 334). 

Le Talmud de Jérusalem explique encore que, si l’on n’a pas érigé la souka dans l’intention d’accomplir une mitsva, c’est une mitsva que d’y ajouter quelque chose. Selon le Binyan Chelomo I 43, le motif sur lequel s’appuie le Talmud de Jérusalem est le suivant : c’est une mitsva que de construire la souka, or en y ajoutant quelque élément, on s’associe à cette mitsva. C’est en ce sens qu’est tranchée la halakha, comme nous le notons dans le corps de texte ; par conséquent, tout le monde s’accorde à dire que le fait de bâtir la souka présente un caractère de mitsva [quoique tout le monde ne dise pas qu’il s’agit d’une ‘hova (obligation)].

 

Selon certains auteurs, bien qu’une souka construite par un non-Juif soit valide, de même qu’une souka construite par une femme (Souka 8a-b, Choul’han ‘Aroukh 14, 1 ; 635, 1), il est juste, a priori, que ce soit un Juif mâle et majeur qui construise la souka, ce qui constitue un supplément de perfection apporté à la mitsva. Cela, afin de tenir compte de l’avis de Rabbénou Tam, qui invalide, à cet égard, ceux qui n’ont point d’obligation à l’égard de la mitsva de souka. C’est ce qu’écrivent le Maguen Avraham 14, 3, Bikouré Ya’aqov 635, 2, Binyan Chelomo I 43. Cependant, l’opinion la plus courante est que la souka construite par un non-Juif ou par une femme est valide a priori.

 

13.« Tu feras… » – non d’une chose déjà faite ; souka volée ou empruntée

Si l’on creuse dans une meule de foin ou de blé afin d’y faire une souka, et quoique les gerbes de paille soient cachères comme sekhakh, la souka n’est pas valide. Nous avons en effet ce principe : ta’assé, vé-lo min ha’assouï (« “tu feras[f]”, mais non d’une chose déjà faite »). En d’autres termes, il faut faire la souka en déposant le sekhakh, et non qu’elle se fasse d’elle-même par le biais du déblaiement d’une partie de la récolte.

De même, il faut respecter attentivement l’ordre de construction de la souka : d’abord, dresser les parois, ensuite y poser le sekhakh. Si l’on a inversé l’ordre, en installant d’abord le sekhakh [g], de nombreux décisionnaires estiment que la souka est invalide. En effet, ce qui fait la souka est le dépôt du sekhakh ; or si on installe d’abord le sekhakh, la souka ne sera constituée que par le biais de la construction des parois[18].

Il est permis d’installer un auvent au-dessus de la souka, afin qu’on puisse l’étendre sur la souka quand il pleut, et l’enlever après la fin de la pluie ; de cette façon, on pourra entrer dans la souka lorsque celle-ci est sèche. Quand l’auvent est étendu au-dessus d’elle, la souka n’est pas valide, puisque l’auvent fait écran entre le sekhakh et le ciel. Après que l’on a ôté l’auvent, la souka redevient valide. Mais si l’on a construit la souka alors que l’auvent était étendu au-dessus d’elle, de nombreux décisionnaires estiment que la souka n’est pas valide, puisque la validité de la souka doit se constituer par l’installation du sekhakh, et non par le retrait de l’auvent (Baït ‘Hadach, Michna Beroura 626, 18 ; mais le Rama 626, 3 est indulgent).

Il est permis d’accomplir la mitsva par le biais d’une souka empruntée, que son prochain a donné la permission d’utiliser (Souka 27b, Choul’han ‘Aroukh 637, 2). Si son ami, propriétaire de la souka, n’est pas présent, et qu’il n’y ait aucun moyen de demander son autorisation, il est permis d’y séjourner, car nos sages ont estimé qu’il est agréable à un Juif que l’on fasse une mitsva avec ses biens. Mais si l’on sait que cette personne veille à ce que l’on n’entre point dans sa souka, ou qu’il soit à craindre qu’elle ne revienne, et que, en découvrant que des étrangers y sont installés, elle n’ose pas y entrer elle-même, et qu’elle ne juge sévèrement le fait qu’on lui a « pris sa souka », il est interdit de l’utiliser sans son autorisation explicite (Touré Zahav 4, Bikouré Ya’aqov 4, Michna Beroura 9).

Il est interdit de bâtir sa souka sur un terrain privé sans autorisation, ou sur un terrain public, quand le public ou ses représentants s’y opposent. Si l’on a bâti sa souka en un tel lieu et qu’on s’y soit installé, on ne pourra en prononcer la bénédiction : ce ne serait pas bénir, mais faire injure à Dieu, puisque la construction de la souka s’est faite de manière interdite[19].


[f]. « Tu feras une fête des cabanes » (Dt 16, 13). 

[g]. Par exemple, en montant le cadre de la souka, consistant en barres de métal, puis en installant les planches qui soutiennent le sekhakh, puis en couvrant la souka de sekhakh, et seulement ensuite en entourant la souka de bâches de toile.

 

[18]. Si l’on a fait le sekhakh avant les parois, certains décisionnaires déclarent la souka invalide : Maharil, Rama 635, 1, Levouch, Michna Beroura 10, Ben Ich ‘Haï, Haazinou 2. D’autres estiment la souka valide : Baït ‘Hadach, Birké Yossef, Beit Hachoéva, ‘Aroukh Hachoul’han 5, ‘Hazon Ovadia p. 38. Dans le doute, il y a lieu d’être rigoureux. Si l’on a érigé d’abord une petite paroi, d’une hauteur d’un téfa’h, contigu à l’endroit désigné pour le sekhakh, suivant la mesure nécessaire à trois parois [sur une longueur de sept téfa’h], puis qu’on y ait déposé le sekhakh, la souka est valide, puisque le début de la construction des parois aura précédé la mise en place du sekhakh. La hauteur d’un téfa’h est la mesure minimale de constitution d’une tente (ohel) ; comme nous l’apprenons à l’égard d’un monceau de paille, au traité Souka 16a.

 

[19]. Celui qui bâtit sa souka sur le terrain de son prochain, ou dans le domaine public, en un endroit qui dérange les passants, de sorte qu’il est clair que le public et ses représentants interdisent de construire une souka en un tel endroit, sera quitte a posteriori de son obligation, puisque, en pratique, il n’a rien volé à proprement parler. En effet, le terrain reste la propriété de son prochain ou du public. Mais puisque la construction de la souka et le fait d’y résider procèdent d’un interdit, on ne pourra y prononcer la bénédiction (Choul’han ‘Aroukh 637, 3, Maguen Avraham 637, 1, Choul’han ‘Aroukh Harav 11). Aux entours du domaine public, en un endroit qui ne dérange presque pas les passants, il est permis de faire des soukot suivant l’habitude : tant qu’il n’y a pas de protestation, on peut inférer que les gens sont d’accord (Béour Halakha 637, 3, passage commençant par Vékhen).

 

Celui qui vole une souka qui avait été construite sur une charrette, et qui s’y est installé, n’est pas quitte de son obligation : puisqu’elle n’est pas attachée au sol, cette souka est susceptible de vol ; or on ne s’acquitte pas de son obligation par le biais d’une souka volée. Celui qui vole du bois et en fait une souka, quoiqu’il ait enfreint un interdit, peut y accomplir la mitsva et en réciter la bénédiction. En effet, les sages ont décidé, au titre de la Taqanat hachavim [« directive des repentants », qui, pour faciliter le repentir des voleurs, leur permet de rendre la contrepartie financière de l’objet volé, au lieu de l’objet volé lui-même, quand la restitution de celui-ci leur causerait une trop grande perte financière], que si un homme vole du bois et l’intègre à une structure qu’il a construite, le bois devient entièrement le sien, et il lui revient d’en payer la valeur. Or, puisque le bois est devenu le sien, sans plus de lien avec le propriétaire précédent, le voleur repentant peut accomplir la mitsva dans une telle souka, et en réciter la bénédiction (Souka 31a, Choul’han ‘Aroukh 637, 3, Michna Beroura 15).

14.À quel point il faut s’investir dans la construction de la structure de la souka

La souka est une habitation temporaire, et il est naturel qu’y habiter ne soit pas aussi confortable qu’habiter dans une maison. Or telle est la mitsva, habiter dans une demeure temporaire durant les sept jours de la fête de Soukot. Et puisque la souka est une demeure temporaire, il ne nous a pas été prescrit de lui faire des murs ni un sekhakh hermétiques et isolés afin de protéger ses habitants du froid, de la pluie et de la chaleur, comme dans une maison ordinaire. De sorte qu’il arrive que résider sous la souka entraîne quelque affliction. En ce cas, on est dispensé de la mitsva, car celui qui s’afflige est dispensé d’être sous la souka (ha-mitsta’er patour méha-souka) (cf. ci-après, chap. 3 § 8-10). Par exemple, s’il fait très chaud, ou par des nuits très froides, de même que lorsqu’il pleut, on est dispensé d’être dans la souka. Un malade que le fait d’être installé dans la souka ferait souffrir est dispensé de la souka, et il n’a pas d’obligation de se construire une souka spacieuse et protégée afin de pouvoir y résider avec agrément, comme dans une maison (Rabbi ‘Haïm ben Yits’haq Or Zaroua’ 194).

Mais celui qui a été négligent dans la construction de sa souka, de sorte que, même par temps normal, il y éprouve du désagrément, a manqué d’accomplir la mitsva. En effet, il apparaît rétrospectivement qu’il aura fauté en n’ayant point construit une souka convenant comme habitation temporaire, puisque, même en temps normal, il lui est désagréable de s’y trouver. Si l’on sait que l’on peut, sans désagrément, résider dans une souka petite et branlante, on peut construire une telle souka et y accomplir la mitsva. Cela, à condition de prendre sur soi de ne pas prétendre, en pleine fête de Soukot, que, puisque sa souka est petite ou branlante, on est affligé de s’y trouver (cf. Bikouré Ya’aqov 640, 13, Michna Beroura 640, 24).

Selon de nombreux auteurs, si l’on s’est construit une souka qui ne convient pas pour y dormir – par exemple si l’on se trouve à un endroit venteux et que l’on ait donné à la souka des parois grillagées, de sorte que le vent et le froid y pénètrent –, cette souka est invalide, même pour y manger. De même, si l’on a construit une souka en un lieu où fraient des voyous, de sorte qu’il est dangereux d’y dormir, la souka est invalide, même pour y manger. En effet, la mitsva qui nous incombe est de préparer une souka qui nous servira d’habitation temporaire, propre à y manger et à y dormir ; or, puisque ladite souka ne convient pas pour dormir, elle n’est pas considérée comme une habitation temporaire, de sorte que, même pour manger, elle n’est pas valide (Yeréïm, Rama 640, 4). Mais d’autres estiment que, même si la souka ne convient pas à ce qu’on y dorme, elle reste cachère pour y manger. Et bien que l’on ait fauté en ne se construisant pas une souka convenable pour y dormir, on peut y accomplir la mitsva de manger dans la souka, puisque celle-ci convient à ce qu’on y mange (‘Hakham Tsvi). Si l’on a construit une souka ordinaire, telle que, en Israël, on pourrait y dormir, mais que, parce qu’on habite dans un pays froid, on ne peut y dormir, la souka est valide selon tous les avis ; en effet, la Torah n’a pas obligé à l’édification d’une structure fixe comme souka (cf. Michna Beroura 640, 18).

Certaines personnes habitent en un lieu où, pour construire une souka, elles doivent investir de nombreux efforts, ou une forte somme d’argent. En un tel cas, on devra investir dans la préparation de la souka ce que l’on eût été prêt à investir pour se préparer un lieu d’habitation agréable pour une semaine. En d’autres termes, on se posera cette question : si je devais quitter ma maison pour une semaine, quels efforts serais-je prêt à consentir et quelle somme serais-je prêt à dépenser afin de m’aménager un lieu d’habitation agréable ? Ce sont ces efforts et cette somme que l’on a à investir afin de construire sa souka, ou pour séjourner, pendant la fête, en un lieu où l’on puisse construire une souka. Si l’on a l’habitude de partir en vacances de temps en temps, il faut investir dans la construction de la souka, ou dans la location d’un endroit où l’on puisse construire celle-ci, la somme que l’on est prêt à payer pour des vacances d’une semaine, chacun selon ses moyens.

Quand on s’apprête à acheter une maison, on doit veiller à ce qu’il s’y trouve un endroit où l’on puisse construire une souka ; et l’on doit investir à cette fin la somme que l’on serait prêt à dépenser, dans le cas où l’on devrait quitter sa maison une semaine chaque année, afin de pouvoir vivre confortablement pendant cette semaine, et cela chaque année. Une personne fortunée doit investir à la mesure de ce qu’elle serait prête à mettre dans une semaine annuelle de vacances, ce pendant de nombreuses années[20].


[20]. Le principe essentiel est téchevou ke’ein tadourou (« installez-vous [dans la souka] à la manière dont vous habiteriez [votre maison] ») [Souka 28b]. Dès lors, ce que l’homme est prêt à investir afin de vivre confortablement pendant une semaine, il a l’obligation de l’investir pour accomplir la mitsva de la souka. C’est en ce sens que s’expriment le Peri Mégadim, Echel Avraham 640, 15, le Bikouré Ya’aqov 640, 25, le Divré Malkiel III 32, le Kaf Ha’haïm 640, 77. 

15.Une belle souka

C’est une mitsva que de construire une jolie souka, décorée et agréable, comme il est dit : « C’est mon Dieu et je le glorifierai (anvéhou) » (Ex 15, 2), ce que les sages élaborent : « Pare-toi[h] de mitsvot devant Lui ; fais en son honneur une belle souka, un beau loulav… » (Chabbat 133b). Et ainsi pour toutes les mitsvot.

À l’époque talmudique, on avait coutume de décorer la souka avec des tentures colorées et des draps ornés de dessins, et en suspendant au sekhakh des fruits, tels que des noix, pêches, amandes, grenades, grappes de raisin, bouquets d’épis, et des ustensiles de verre emplis de vin, d’huile et de fine farine (Chabbat 22a). Il était interdit de les manger pendant toute la durée de la fête, puisqu’ils avaient été mis à part en vue de la mitsva de décorer la souka ; ce n’est que si l’on avait, avant la fête, émis la condition selon laquelle on pourrait les manger à volonté, que l’on était autorisé à les manger pendant la fête (comme nous le verrons au prochain paragraphe). De nos jours, on a moins l’usage de décorer la souka avec des aliments ; on a coutume de la décorer avec des guirlandes de papier ou de plastique, des fleurs de papier, de beaux tableaux et des ampoules électriques. De même, on dresse une belle nappe sur la table, et l’on dispose dans la souka de beaux ustensiles.

Les décisionnaires sont partagés quant au fait de savoir s’il est permis de décorer la souka de versets, tels que : « Dans des cabanes vous résiderez sept jours durant » (Lv 23, 42). Certains l’interdisent, car ce n’est que pour une grande nécessité, liée à l’étude, que les sages ont autorisé la reproduction de parties de la Torah (Touré Zahav, Michna Beroura 638, 24). D’autres l’autorisent, car il y a à cela un intérêt éducatif (Sifté Cohen, Bené Yona). En pratique, on peut être indulgent, à condition de ne pas écrire les versets dans des caractères qui seraient valides pour un rouleau de la Torah (selon Rabbénou Yerou’ham et le Tachbets).

Cela fait partie de l’embellissement de la mitsva que d’ériger une souka spacieuse, où l’on soit protégé du vent et du soleil, afin qu’il soit agréable d’y séjourner.

Il faut avoir soin de ne pas laisser dans la souka des ustensiles de table sales, et de ne pas y faire de choses qui ne soient honorables – comme la lessive, ou changer la couche d’un bébé (cf. ci-après, chap. 3 § 2).

Il est interdit de mettre, parmi le sekhakh, des plantes dont l’odeur est mauvaise, ou qui perdent leurs feuilles, de crainte que, à cause de la mauvaise odeur ou de la chute des feuilles, on n’en vienne à délaisser la souka et à rentrer à la maison (Souka 12). Cependant, a posteriori, si l’on a mis de telles plantes, la souka est valide. Mais si l’odeur est si mauvaise que les gens ne peuvent la supporter, la souka est toraniquement invalide, puisqu’elle ne convient pas à l’habitation humaine (Choul’han ‘Aroukh 629, 14, Michna Beroura 38).

Il faut prévenir les incendies dans la souka, en n’y laissant pas de bougies, ni d’installations électriques non sûres, et en éloignant les ampoules électriques du sekhakh (cf. Choul’han ‘Aroukh 639, 1, Michna Beroura 8).


[h]. Le jeu de mot midrachique repose sur le double sens de la racine נ.ו.ה, glorifier, mais aussi orner, parer. Comment « orner » Dieu ? En se parant soi-même de mitsvot accomplies de la plus belle façon.

16.Sainteté et ornementation de la souka

La souka est consacrée à la mitsva pour laquelle on l’a créée, comme il est dit : « La fête des cabanes, sept jours durant, en l’honneur de l’Éternel » (Lv 23, 34). Aussi, pendant toute la durée de la fête, est-il interdit de faire un autre usage de quelque partie de la souka, que ce soit du sekhakh ou des parois (Souka 9a). Les sages ont ajouté à cela l’interdit d’utiliser les éléments décoratifs destinés à embellir la souka : puisque ces ornements participent eux aussi de la mitsva, ils y sont réservés. Même si la souka est tombée, demeure l’interdit de se servir de ses morceaux et de ses ornements jusqu’à la fin de la fête. Et puisque l’interdit s’étend jusqu’à la fin du septième jour, ce qui inclut le crépuscule, par lequel commence aussi la fête de Chemini ‘Atséret, l’interdit se poursuit nécessairement jusqu’à la fin du huitième jour (Beitsa 30b, Choul’han ‘Aroukh 638, 1-2)[21].

Cependant, puisque la souka est un lieu d’habitation, il est possible de faire, des parois et du sekhakh, tout usage que l’on a l’habitude de faire des murs et du plafond de sa maison. Par conséquent, il est permis de s’appuyer sur les parois de la souka ou d’y suspendre des objets ; de même est-il permis de suspendre au sekhakh un habit pour le faire sécher (Souka 10b). Par conséquent, l’interdit consiste à prendre un élément de la souka et de s’en servir ; par exemple, de prendre une planche de la souka pour les besoins d’une construction, ou même de prélever un bâtonnet pour s’en servir de cure-dent (Rama 638, 1, Michna Beroura 4). De même, il est interdit d’enlever, pour quelque autre usage, les barres que l’on installe au-dessus des parois, ou les ornements et fruits que l’on suspend au sekhakh à titre décoratif. Il est également interdit de prendre un élément de la souka sans raison, car on abîmerait ainsi la souka et sa beauté. Même un tapis ou des dalles qui auraient été posés sur le sol ont un statut semblable à celui des ornements, qui sont consacrés à la mitsva de la souka (Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm I 181).

S’il se trouve, dans la souka ou dans ses ornements, une chose qui commence à être dérangeante – par exemple une planche devenue branlante et qui grince, ou un ornement qui s’est fané et qui enlaidit la souka, il est permis de l’enlever et de le jeter d’une manière honorable ; mais il est interdit de l’utiliser pour quelque autre besoin.

S’il a commencé de tomber une pluie telle qu’elle risque d’abîmer les ornements, il est permis d’ôter ceux-ci dans le dessein de les remettre par la suite. Si l’on s’est procuré de plus beaux ornements, il est permis de retirer les anciens ornements afin de suspendre à leur place ceux qui sont plus beaux ; cela, à condition de ne pas utiliser pour quelque autre besoin les ornements que l’on a retirés, puisqu’ils ont été consacrés à la mitsva.

Si l’on veut avoir la permission de se servir des ornements qu’on a suspendus dans la souka, on dira, avant le début de la fête : « J’émets la condition de pouvoir retirer les ornements (qichoutim) et en tirer profit quand je le voudrai. » Ainsi, ces objets ne seront pas empreints de sainteté. Mais quant à la souka elle-même, aucune condition ne saurait être utile (Beitsa 30b, Choul’han ‘Aroukh 638, 2).

Il est permis de démonter la souka afin de la reconstruire en un autre endroit, car le statut de mouqtsé interdit d’utiliser les planches de la souka pour un autre usage ; tandis que, pour construire une autre souka, la chose est permise.

Après la fête, la sainteté des parois, du sekhakh et des ornements de la souka expire, et il est permis d’en faire tout usage profane ; mais il est interdit d’en faire un usage avilissant – par exemple d’utiliser les papiers pour les toilettes, ou de marcher sur le bois de la souka de manière inconvenante (Choul’han ‘Aroukh 664, 8, Michna Beroura 638, 24).


[21]. L’interdit est toranique les sept jours de Soukot, rabbinique le huitième jour, car le statut de mouqtsé (objet « mis à part », dont l’usage est exclu) est fixé à partir du crépuscule (bein hachmachot) (Na’hmanide, Ran, Choul’han ‘Aroukh 638, 1). Même si une souka s’est effondrée, l’interdit demeure, mais il est de rang rabbinique (Tossephot, Roch, Rama 638, 1). 

Tout le monde s’accorde à dire que l’utilisation du sekhakh est toraniquement interdite. S’agissant des parois, le Roch estime qu’aucun interdit ne s’y applique ; mais la halakha suit l’opinion d’après laquelle l’utilisation est interdite. Selon le Ran, l’interdit est toranique ; quant à Maïmonide, ses commentateurs débattent si l’interdit portant sur les parois est, selon lui, toranique ou rabbinique. La souka et ses ornements deviennent mouqtsé, c’est-à-dire en l’occurrence consacrés à la mitsva pour laquelle ils sont conçus, dès le moment où l’on commence à utiliser la souka (Rama 638, 1). Cependant, en pratique, même si l’on ne s’est pas encore servi de la souka, il est interdit de la déplacer, elle et ses ornements, pendant Chabbat et Yom tov, au titre de la mélakha de soter (détruire) (Mor Ouqtsi’a, Béour Halakha ad loc. ד »ה לא).

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