La Prière juive au féminin

08. Quand on se trompe dans la mention des pluies ou dans la prière les concernant

Quand l’erreur a consisté à mentionner la pluie en été : puisque, à pareille époque, cela ne constitue pas une louange, on doit revenir en arrière et rectifier son erreur. Si l’on n’a pas encore terminé la bénédiction, on retourne au début de celle-ci et l’on dit Morid hatal (« Tu fais venir la rosée »), suivant le rituel de l’été. Si l’on a déjà terminé la récitation de la bénédiction, celle-ci n’aura pas été valablement dite ; et puisque les trois premières bénédictions de la ‘Amida sont considérées comme un seul et même bloc, il faut recommencer la ‘Amida afin de la réciter comme il convient (Choul’han ‘Aroukh 114, 4).

Quand l’erreur a consisté à ne pas mentionner la pluie en hiver : si l’on a mentionné la rosée, comme on le fait en été (Morid hatal), on ne doit pas revenir en arrière, puisque l’on aura dit une certaine louange liée au don de l’eau. Mais si l’on n’a pas non plus mentionné la rosée, on revient en arrière, puisqu’on aura manqué de prononcer une louange aussi importante (Choul’han ‘Aroukh 114, 5).

Si l’erreur a consisté à demander la pluie en été : puisque la requête n’est pas d’actualité, on aura désorganisé le contenu de la bénédiction des années, et l’on devra donc revenir en arrière pour corriger son erreur. Par conséquent, si l’on n’a pas encore terminé la ‘Amida, on revient au début de la bénédiction des années (Barkhénou), et on la prononce comme il faut. De là, on poursuit la récitation de l’ensemble des bénédictions qui suivent, jusqu’à la fin de la ‘Amida. Si l’on a déjà terminé la ‘Amida, on reprend au début de celle-ci en priant comme il convient (Choul’han ‘Aroukh 117, 3).

Quand l’erreur a consisté à ne pas demander la pluie en hiver : si l’on a déjà achevé la bénédiction des années et que l’on ne soit pas encore arrivée à la bénédiction Choméa’ téphila (« qui écoutes la prière »), on continue la récitation de la ‘Amida, et lorsqu’on arrive à la bénédiction Choméa’ téphila, au sein de laquelle il est permis de présenter des requêtes additionnelles, on prie alors pour la pluie (en intercalant les mots Véten tal oumatar livrakha : « Envoie la rosée et la pluie bienfaisantes », avant le mot Oumiléfanékha ou avant les mots Ki Ata chomé’a, selon le rite) ; de cette façon, on rectifie son erreur. En revanche, si l’on a déjà dépassé la bénédiction Choméa’ téphila, on a manqué l’endroit où il était encore possible de se reprendre et, de ce fait, la récitation de toutes les bénédictions dites après celle des années se trouve invalidée. Dans un tel cas, il faut revenir au début de la bénédiction des années, la dire comme il convient et, de là, poursuivre sa prière dans l’ordre, en redisant l’ensemble des bénédictions suivantes. Mais dans le cas où l’on a déjà terminé sa ‘Amida, et où l’on a déjà formé l’intention de reculer de trois pas, cette prière est défectueuse, puisque l’on a oublié de prier pour la pluie. Il faut alors reprendre sa ‘Amida depuis le début, selon les règles (Choul’han ‘Aroukh 117, 4-5).

09. Conseil pour éviter de se tromper

L’erreur la plus fréquente, dans la ‘Amida, est celle qui touche à la mention des pluies et à la demande de la pluie. En effet, tous les six mois, le texte change : dans la mesure où l’on s’est habitué à un texte déterminé durant six mois, on a tendance à répéter ce texte habituel. Or, comme nous l’avons vu, trois des quatre erreurs possibles en la matière obligent à se reprendre : pour toutes les erreurs touchant à la demande de la pluie, on se reprend, ainsi que pour l’une des erreurs touchant à la mention des pluies. On se reprend donc dans les cas suivants : 1) si l’on a demandé la pluie en été ; 2) si l’on n’a pas demandé la pluie en hiver ; 3) si l’on a mentionné la pluie en été. On ne se reprend pas si l’on a oublié de mentionner la pluie en hiver, pour peu que l’on ait mentionné la rosée.

Si l’on doute d’avoir dit le texte qui convient, et tant qu’on est encore dans les trente jours qui suivent le changement de texte – au début de l’été ou de l’hiver –, il faut considérer que l’on s’est probablement trompé, car l’habitude est encore rivée au texte de la période précédente. Si donc il s’agit de l’une des trois erreurs obligeant à se reprendre, il faut se reprendre et prier comme il convient. Mais si trente jours sont déjà passés, on présume que la bouche s’est déjà habituée au changement de texte et que l’on a probablement prié correctement ; aussi ne doit-on pas reprendre sa prière.

Afin de lever ce type de doute, en raison duquel on doit souvent répéter sa ‘Amida, il est bon que chacune s’habitue au nouveau texte, le jour du changement, en le répétant quatre-vingt-dix fois[m], afin que ce nouveau texte soit courant dans sa bouche et que l’on ne se trompe pas. De cette façon, même si l’on doute, par la suite, d’avoir dit le texte adéquat lors d’une ‘Amida, on présumera que cela a bien été le cas, dans la mesure où l’on avait déjà habitué sa langue à dire ce texte quatre-vingt-dix fois ; on n’aura pas, par conséquent, à reprendre sa prière (Choul’han ‘Aroukh 114, 8-9 ; La Prière d’Israël 18, note 4).

Aussi, selon la coutume séfarade, où tout le texte de la bénédiction des années est renouvelé, quand arrive la nuit du 7 ‘hechvan on s’habitue à entamer la bénédiction comme il convient, en répétant quatre-vingt-dix fois l’enchaînement entre la bénédiction précédente (celle de la guérison) et celle des années : rofé ‘holé ‘amo Israël / Barekh alénou (« qui guéris les malades de Ton peuple Israël / Bénis, en notre faveur »). Selon la coutume ashkénaze, on dira : vé-et kol miné tévouatah létova, véten tal oumatar livrakha (« … et toutes sortes de récolte, pour le bien ; et amène la rosée et la pluie, pour la bénédiction »). À l’approche de l’office de Moussaf du premier jour de Pessa’h, on dira quatre-vingt-dix fois : mé’hayé métim Ata, rav léhochia’, morid hatal (« Tu ressuscites les morts, Ton secours et grand, Tu envoies la rosée »). À la sortie du jour de Yom tov, avant ‘Arvit de ‘Hol hamo’ed, on dira selon l’usage séfarade : rofé ‘holé ‘amo Israël / Barkhénou (« qui guéris les malades de Ton peuple Israël / Bénis-nous ») ; selon l’usage ashkénaze, on dira : vé-et kol miné tévouatah létova, véten berakha (« et toutes sortes de récolte, pour le bien ; et amène la bénédiction ») (Michna Beroura 114, 40 ; Kaf Ha’haïm 60). Ainsi, on habituera sa bouche au nouveau libellé, et si par la suite on n’est pas certain d’avoir dit le bon texte, on n’aura pas besoin de se reprendre[4].


[m]. Nombre correspondant aux trois offices quotidiens multiplié par le nombre de jours nécessaires pour prendre un nouvel automatisme. Cet exercice se fait en-dehors des offices.

[4]. Mais quand il s’agit du passage de l’été à l’hiver, à Chemini ‘atseret, pour la mention des pluies, on ne doit pas se reprendre dans le cas où l’on s’est trompé. En effet, en cas d’erreur, on aura dit Morid hatal (« Tu fais tomber la rosée »), comme on a l’habitude de le dire en été. Or nous avons déjà vu que, si l’on mentionne la rosée en été, on est quitte a posteriori. (Le Rama 114, 3 écrit certes que l’on ne dit pas Morid hatal en été, mais la coutume ashkénaze en terre d’Israël est de le dire).

10. Règle applicable en diaspora

Nos sages ont repoussé le début de la prière pour la pluie, dans les communautés babyloniennes, au soixantième jour de l’équinoxe d’automne (ce qui correspond au 4 ou au 5 décembre). Cela en raison du fait que l’eau y abonde, en provenance du Tigre et de l’Euphrate, et qu’il n’est donc pas besoin, dans ces régions, de multiplier les prières pour la pluie dès le début de l’hiver. Toutes les autres communautés en-dehors d’Israël sont rattachées à la règle régissant la Babylonie, et l’on y prie pour la pluie à partir du soixantième jour de l’équinoxe (Choul’han ‘Aroukh 117, 1)[5].

Quand une habitante de la terre d’Israël se rend à l’étranger pour une période de plusieurs mois : d’après certains, elle doit prier pour la pluie conformément à l’usage d’Israël, puisque c’est là qu’elle est établie (Peri ‘Hadach). Selon d’autres, elle doit prier conformément à l’usage du lieu où elle se trouve présentement (Birké Yossef). Afin d’être quitte aux yeux de tous les décisionnaires, en tout cas de doute, on intercalera la prière pour la pluie à l’intérieur de la bénédiction Choméa’ téphila  et non dans la bénédiction des années (cf. La Prière d’Israël 18, note 6)[6].

Dans les contrées où l’on a besoin de pluie au printemps, on ne continue pas pour autant à prier pour la pluie dans le cadre de la bénédiction des années : la règle qui s’applique à ces lieux est semblable à celle qui régit les particuliers en voyage, et l’on doit prier pour la pluie dans le cadre de la bénédiction Choméa’ téphila (« qui écoutes la prière »), au sein de laquelle chacun peut ajouter des demandes particulières (Choul’han ‘Aroukh 117, 2 ; en cas d’erreur, voir La Prière d’Israël 18, note 7, où il est dit que, selon le Choul’han ‘Aroukh, on répète sa prière, en émettant intérieurement la condition qu’il s’agira d’une prière additionnelle volontaire si cette répétition n’est pas nécessaire ; mais que selon le Rama, a posteriori, on ne la répète pas).

Même dans les pays situés en-deçà de l’équateur, comme l’Argentine, le Brésil ou l’Australie, on prie pour la pluie quand c’est l’hiver en terre d’Israël. Et bien que, à pareille époque, ce soit l’été dans ces pays, on prie néanmoins pour la pluie selon l’hiver israélien, car la terre d’Israël est le pilier du monde, et le reste du monde y est rattaché. Quand on a besoin de demander la pluie pour le pays de sa résidence, on le fera dans la bénédiction Choméa’ téphila.

Mais dans les pays où la pluie cause des dommages en été, et bien qu’alors ce soit l’hiver en terre d’Israël, on ne peut demander la pluie dans le cadre de la bénédiction des années, car on ne saurait prier pour une chose susceptible de constituer une malédiction pour les habitants du pays. On dira toute l’année, dans de tels cas, le texte de l’été dans la bénédiction des années, et dans la bénédiction Choméa’ téphila, on demandera toute l’année la pluie : pendant l’hiver de ces contrées, on priera pour qu’il pleuve au lieu où l’on habite, et pendant l’hiver israélien, on priera pour qu’il pleuve en Israël.

Une habitante d’Israël ou de l’un des pays de l’hémisphère nord qui quitte le sol de son pays de résidence pour visiter un pays de l’hémisphère sud, continuera à prier pour la pluie selon les dates de l’hiver israélien, même si la pluie est source de dommage dans le pays où elle se trouve (puisque la voyageuse oriente sa pensée vers le pays où elle est établie de façon permanente) (Chi’ourim Hametsouyanim Bahalakha 19, 3).


[5]. Dans les pays proches de la terre d’Israël, dont le climat est aride et qui ont davantage besoin d’eau, on commence la prière pour la pluie en même temps que les habitants de la terre d’Israël, le soir du 7 ‘hechvan (Maïmonide, commentaire de la michna Taanit, chap. 1, Radbaz, Roua’h ‘Haïm de Rabbi ‘Haïm Falagi 117, 1).

[6]. Détails d’application :

Habitante de la terre d’Israël séjournant à l’étranger : 1) Si l’on a quitté Israël avant le 7 ‘hechvan, on inclura la prière pour la pluie (en disant Véten tal oumatar livrakha – « Donne une rosée et une pluie de bénédiction ») à l’intérieur de la bénédiction Choméa’ téphila, cela à partir du 7 ‘hechvan. 2) Si l’on a quitté Israël après le 7 ‘hechvan, puisqu’on a déjà commencé à prier pour la pluie, on continuera à le faire à l’intérieur de la bénédiction des années (Kaf Ha’haïm 13 au nom du Qécher Godel). 3) Si l’on a quitté Israël avec sa famille pour plus d’un an, on est considéré, durant cette période, comme résidant en-dehors de la terre d’Israël, et l’on adopte immédiatement l’usage local.

Habitante de diaspora séjournant en Israël : il est préférable qu’elle se conforme à l’usage des habitants d’Israël. Aussi, si elle a l’intention de repartir à l’extérieur d’Israël après le soixantième jour de l’équinoxe, elle priera pour la pluie comme les habitants d’Israël. Si elle a l’intention de repartir avant le soixantième jour de l’équinoxe, elle devra, selon certains, inclure la prière pour la pluie à l’intérieur de la bénédiction Choméa’ téphila (cf. Iché Israël 23, 37). Selon d’autres, elle priera pour la pluie selon l’usage des habitants de la terre d’Israël ; et une fois revenue à l’extérieur d’Israël, elle ne sera pas obligée de continuer à prier pour la pluie, mais il sera bon de le faire à l’intérieur de la bénédiction Choméa’ téphila (Yalqout Yossef 117, 17).

En toutes ces matières, il semble que, si l’on s’est involontairement comporté suivant l’une des opinions en présence (au lieu de prier pour la pluie dans la bénédiction Choméa’ téphila), il ne soit pas nécessaire de se reprendre (cf. Iché Israël 23, note 149).

01. Quand est-il permis de s’interrompre durant la ‘Amida ?

Quand une personne se tient en prière devant son Créateur, il lui faut prendre grand soin de ne pas s’interrompre par d’autres paroles ; il est aussi interdit de s’interrompre en marchant ou en faisant des signes. La règle applicable à la ‘Amida diffère de celle qui s’applique aux Pessouqé dezimra et aux bénédictions du Chéma. En effet, quand on récite ces derniers, il est permis de marcher ou de faire des signes, et en cas de grande nécessité il est même permis de parler ; ainsi nos sages ont permis de dire bonjour à une personne qui, si on ne le faisait pas, serait susceptible de se vexer (comme nous le verrons plus loin, chap. 16 § 14, et comme nous l’expliquons dans La Prière d’Israël 14, 4 et 16, 5-6). En revanche, pendant la ‘Amida, il est interdit de s’interrompre, et les sages ne l’ont permis qu’en cas de danger pour la vie, ou pour les besoins de la prière elle-même. Cette règle peut s’apprendre par un raisonnement a fortiori : si devant un roi de chair et de sang on se tient tremblant et l’on n’a garde de s’interrompre par des paroles adventices, à combien plus forte raison celui qui se tient en prière devant le Roi des rois doit-il se garder de s’interrompre au milieu de sa prière par des paroles adventices.

Même si un roi d’Israël adresse son bonjour à une fidèle alors que celle-ci se trouve  au milieu de sa ‘Amida, il ne faut pas répondre. Toutefois, si un roi non-juif, qui risquerait de tuer la fidèle, s’adressait à celle-ci au milieu de sa prière, il faudrait s’interrompre, car la préservation de la vie a priorité sur la prière (Berakhot 30b).

Si l’on a un serpent non venimeux à son talon, on n’interrompt pas sa prière pour appeler à l’aide ; mais si l’on est mis en danger par un scorpion ou un serpent venimeux, on appelle à l’aide, car la préservation de la vie a priorité sur la prière (Berakhot 33a ; Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 104, 1-4).

Le fait de marcher n’est pas considéré comme une grande interruption. Aussi, dans le cas où l’on a commencé à dire la ‘Amida à une place où l’on a du mal à se concentrer, on peut se diriger vers une autre place. Par exemple, si un serpent non venimeux se rapproche de soi, et que cela perturbe la kavana, on est autorisé à se déplacer pour continuer à prier avec kavana à sa nouvelle place, bien qu’il ne s’agisse pas d’un cas de danger pour la vie (Michna Beroura 104, 10).

Si l’on est en train de dire la ‘Amida, et que l’on entende le Qaddich ou la Qédoucha, il est interdit d’y répondre. Mais on peut, tout en se taisant, porter son attention sur les paroles de l’officiant : on sera considéré comme si l’on avait répondu soi-même, car celui qui écoute est comparable à celui qui répond ; et tel est l’usage. Mais si le fait d’observer cette pause a pour effet de perturber la kavana, on est autorisé à poursuivre sa prière  (La Prière d’Israël 17, note 11).

Si, au milieu de sa prière, on éprouve un doute sur une question de halakha relative à la prière, question dont la réponse est susceptible d’invalider la ‘Amida en cours – par exemple si l’on a oublié de dire tel passage et que l’on ne sache quoi faire – on ira consulter un livre pour savoir quelle conduite adopter. Si l’on ne sait pas consulter le livre, on est même autorisé, selon certains, à s’interrompre par des paroles afin de vérifier la halakha. En cas de nécessité pressante, on pourra s’appuyer sur cette opinion (Michna Beroura 104, 2)[1].


[1]. Comme nous l’avons vu plus haut (chap. 13 § 2), si l’interruption a duré tout le temps ordinairement nécessaire à la fidèle pour réciter la ‘Amida du début à la fin, elle devra, selon l’usage séfarade, reprendre sa prière au début ; selon l’usage ashkénaze, si l’interruption était motivée par la contrainte – cas dans lequel, par exemple, elle se trouvait près d’un excrément, ou encore s’il existait un danger –, il lui faut reprendre sa prière au début ; si c’est volontairement qu’elle s’est interrompue, elle reprend à l’endroit où elle s’était arrêtée.

02. Interruption nécessitée par la kavana

Quand on a commencé sa ‘Amida, et qu’il se trouve autour de soi des gens ou des enfants qui parlent, au point que l’on ne puisse plus se concentrer ; si l’on peut leur faire signe de se taire, c’est préférable, car le signe allusif est considéré comme une interruption plus légère que le déplacement. Mais s’il est prévisible que ces personnes ne tiendront pas compte de l’allusion, on se rendra à une autre place où l’on poursuivra sa prière (Michna Beroura 104, 1).

De même, si l’on prie dans la partie féminine de la synagogue (‘ezrat nachim), et que, pendant que l’on récite la ‘Amida, son enfant commence à déranger au point que l’on ne puisse plus – soi-même ou les autres fidèles – se concentrer correctement, on fait signe à son enfant de sortir. Si l’enfant ne comprend pas, on le fait sortir de la synagogue sans parler, et l’on poursuit sa prière à l’extérieur.

Si une panne se produit pendant que l’on récite la ‘Amida, et que, sauf à le réparer immédiatement, l’objet tombé en panne risque de se détériorer et d’entraîner une perte financière, on ne s’interrompt pas pour autant (Michna Beroura 104, 2 ; Kaf Ha’haïm 6). En revanche, si la chose est perturbante au point que l’on ne puisse plus se concentrer, on est autorisé à aller réparer l’objet.

Si un sidour (livre de prières) est tombé à terre, et que l’on ne puisse se concentrer tant qu’on ne l’a pas ramassé, on conclut la bénédiction où l’on se trouve, et l’on va ramasser le livre. Si l’on a commencé à réciter la ‘Amida par cœur, que l’on se soit troublé et que l’on ne puisse continuer, on pourra aller chercher un sidour puis poursuivre sa ‘Amida (Michna Beroura 96, 7).

Si, au milieu de la ‘Amida, le téléphone sonne, on poursuit sa prière. Si l’on ne peut plus se concentrer à cause de cette sonnerie, on est autorisé à aller déconnecter le téléphone, puis à revenir à sa prière.

De même, dans le cas où l’on frappe à la porte : si la fidèle est capable de se dominer et de continuer de prier, elle poursuivra sa prière. Mais si elle ne peut se dominer, qu’elle craigne que, à moins d’ouvrir, celle qui se tient à la porte ne risque de partir, alors que cette personne vient peut-être pour un motif urgent, et que l’esprit de la fidèle en soit fort troublé, au point de ne plus pouvoir se concentrer convenablement, elle sera autorisée à ouvrir la porte et à faire signe à la visiteuse qu’elle ne peut lui répondre pour l’instant ; elle prendra grand soin de ne pas s’interrompre par des paroles (Tephila Kehilkhata 12, 86).

03. Ne pas s’asseoir dans les quatre amot de celui qui récite la ‘Amida

Etant données la grande importance et la grande sainteté de la ‘Amida, nos sages ont interdit de s’asseoir dans les quatre coudées (amot) d’une fidèle qui récite cette prière. En effet, celle qui se tient en prière, c’est devant la Présence divine qu’elle se tient ; et si l’on s’asseyait là sans raison valable, on paraîtrait ne pas accepter le joug de la royauté du Ciel et mépriser le lieu de la prière.

La mesure de quatre coudées équivaut à deux mètres. Plus précisément : une coudée (ama) équivaut à la longueur du bras d’un homme moyen, ce qui, selon la majorité des décisionnaires, est de l’ordre de 48 cm, si bien que quatre coudées font environ 192 cm. Toutefois, il n’est évidemment pas nécessaire de mesurer la distance qui vous sépare d’une fidèle en prière ; chacune doit plutôt agir selon l’estimation de ses yeux : s’il semble que deux mètres environ vous séparent de la fidèle en prière, vous pouvez vous asseoir.

Si l’on est soi-même occupé à réciter quelque autre partie de l’office, ou à étudier la Torah, il est permis de s’asseoir à côté de celle qui dit la ‘Amida : puisque l’on se livre soi-même à la prière ou à l’étude, on ne porte pas atteinte à l’honneur dû au Ciel (cf. La Prière d’Israël 17, 17).

Dans le cas où l’on était déjà assise avant que sa camarde ne commence à réciter la ‘Amida à son côté, on a le droit de rester assise là, même si l’on n’est pas en train de prier ou d’étudier. En effet, il n’y a pas en ce cas d’attitude méprisante à l’encontre de la prière : c’est celle qui a commencé la ‘Amida à cet endroit qui n’a pas respecté la règle, puisqu’elle a commencé à prier à l’intérieur des quatre amot de celle qui était assise. Malgré cela, c’est une attitude pieuse que de se lever, afin de faire honneur à la prière (Choul’han ‘Aroukh, Rama 102, 3).

À une personne faible, même si elle n’est pas en train de prier, il est permis de s’asseoir à l’intérieur des quatre amot d’une fidèle qui récite la ‘Amida. En effet, tout le monde sait que c’est en raison de sa faiblesse que cette personne a besoin de s’asseoir, et il n’y a là aucune atteinte à l’honneur dû au Ciel (Choul’han ‘Aroukh 102, 2). Le jour de Kippour, presque tout le monde est considéré comme faible en raison du jeûne ; il est donc permis de s’asseoir dans les quatre amot d’une fidèle récitant la ‘Amida (Beit Baroukh 26, 9).

On trouve une opinion plus rigoureuse, selon laquelle il est en tout état de cause interdit de s’asseoir face à celle qui dit la ‘Amida, même au-delà de quatre amot, car la fidèle qui récite la ‘Amida paraîtrait alors se prosterner devant son prochain. Par conséquent, même si celle qui est assise est en train de réciter le Chéma, et même si elle était déjà installée là avant que sa camarade ne commence à réciter la ‘Amida, elle devrait se lever. A priori, il est bon de tenir compte de cette opinion (Choul’han ‘Aroukh 102, 1, Michna Beroura 9 ; Kaf Ha’haïm 10).

04. L’interdit de passer devant des personnes qui récitent la ‘Amida

Il est interdit de passer devant une personne qui est en train de réciter la ‘Amida, jusqu’à une distance de quatre amot (coudées). En effet, le fait de passer devant elle risque de la déconcentrer dans sa prière. Certains disent que la raison de l’interdit est que la personne en prière se tient devant la Présence divine, et que celle qui passe devant elle attente à l’honneur dû à la Présence divine (La Prière d’Israël 17, note 16).

Les décisionnaires s’opposent sur la question du champ de l’interdit. Selon le Elya Rabba, l’interdit ne porte que sur le fait de passer véritablement en face de la personne, car ce n’est que dans ce cas qu’on la déconcentre dans sa prière. En d’autres termes : la largeur d’une personne est environ de la moitié d’un mètre ; il ne faut donc pas passer dans ce demi-mètre situé face à la personne, ce jusqu’à une distance de quatre amot (environ deux mètres) en avant. Selon le Maguen Avraham, en revanche, il est interdit de passer à quelque endroit que puisse voir la personne, dans un rayon de quatre amot ; en effet, si l’on passe là, on risque de détourner quelque peu l’attention de la personne en prière.

Les décisionnaires discutent encore un autre point : selon le Elya Rabba, il est permis de se déplacer latéralement et de venir se tenir devant la fidèle en prière (en lui tournant le dos). Ce n’est que si l’on traverse les quatre coudées qui s’étendent face à la fidèle que l’on dérange celle-ci dans sa prière ; mais si l’on vient de côté et que l’on reste devant elle, on ne la dérange pas tellement. D’après le Maguen Avraham, il est interdit d’entrer dans les quatre amot qui s’étendent devant la fidèle en prière.


A priori, il faut être rigoureux, conformément à l’opinion du Maguen Avraham. En cas de besoin, on peut être indulgent et suivre l’avis du Elya Rabba : on peut alors passer à côté de la fidèle en prière, ainsi que se déplacer latéralement pour venir se tenir devant elle. Par conséquent, si l’on est en retard à l’office, il est permis de passer à côté d’une fidèle pour rejoindre sa place ; mais si l’on doit pour cela passer à côté de plusieurs fidèles, on s’en abstiendra, car il est presque certain que l’on dérangerait au moins l’une d’entre elles (La Prière d’Israël 17, 17).

Dans un cas de très grande nécessité, quand il n’y a pas d’autre choix, il est même permis de passer devant la fidèle qui récite sa ‘Amida : par exemple, si l’on doit donner un cours de Torah, il sera permis de passer devant la fidèle ; de même, si l’on est très pressé, par exemple si l’on craint de rater son bus ou autre moyen de transport, on pourra passer devant la fidèle en prière.

Si une fidèle, pour réciter la ‘Amida, se tient dans un lieu de passage, on n’est pas tenu de prendre en compte le fait qu’elle n’a pas achevé sa prière. Puisque cette fidèle a dérogé à la règle en se tenant à un endroit où elle dérange le passage de celles qui entrent et sortent, il est permis, en cas de besoin, de passer devant elle (op. cit. note 18).

05. Lorsqu’on termine sa ‘Amida

Si l’on termine la lecture de la ‘Amida, et que derrière soi se tienne une autre personne qui, elle, n’a pas achevé sa ‘Amida ; si cette autre personne se trouve à une distance de quatre amot additionnées de trois pas – de telle façon que, si l’on reculait de trois pas, on n’entrerait pas à l’intérieur de ses quatre amot –, on recule de trois pas. Mais si l’autre personne est plus proche, on ne recule pas avant qu’elle ait achevé sa ‘Amida. Même si la fidèle qui se trouve derrière soi a commencé à prier plus tard, et qu’elle prie lentement, il reste interdit de marcher dans ses quatre amot. Simplement, comme nous l’avons vu, les A’haronim divergent quant à l’étendue de l’interdit.

En effet, selon le Maguen Avraham, même si l’autre personne ne se tient pas juste derrière soi, il faut attendre que celle-ci achève sa prière, dès lors que les pas que l’on serait amené à faire s’inscrivent dans un rayon de quatre amot en avant de cette personne. Selon le Elya Rabba, ce n’est que si l’on se tient véritablement devant l’autre personne qu’il est interdit de reculer de trois pas devant elle. En revanche, si la fidèle qui se trouve derrière soi n’est pas véritablement placée sur la même ligne, il est permis de reculer de trois pas. A priori, il est bon d’adopter la conduite du Maguen Avraham, mais en cas de nécessité, on peut être indulgent et suivre l’avis du Elya Rabba (Michna Beroura 102, 18-19). En cas de nécessité impérieuse, même si une fidèle se trouve véritablement derrière soi, on peut reculer en diagonale. En effet, certains décisionnaires expliquent que, selon le Elya Rabba, reculer est chose permise tant que, ce faisant, on ne se rapproche pas de la personne en prière (selon le ‘Hazon Ich)[2].

Si, entre la fidèle en prière et soi-même, se tient une tierce personne qui a, elle, achevé sa ‘Amida, on est autorisé à reculer, car celle qui a achevé sa ‘Amida constitue une séparation entre la fidèle en prière et soi-même, bien que celle qui fait ainsi écran n’ait pas encore reculé elle-même de trois pas.

En cas de nécessité, on peut également être indulgent lorsque, entre la fidèle en prière et soi-même, se trouve une cloison haute d’au-moins dix tefa’him (80 cm), et large d’au moins quatre tefa’him (32 cm). Par suite, ceux qui veulent être indulgents peuvent considérer les grands sièges fixes que l’on trouve dans les synagogues comme une cloison, dans la mesure où leur hauteur est d’au moins dix tefa’him (La Prière d’Israël 17, note 19)[3].


[2]. Les propos du ‘Hazon Ich sont rapportés par l’ouvrage Arba’ Amot chel téphila, p. 50 et 363 ; cf. Iché Israël 29, 7 et 32 note 73. Quand on ne peut pas reculer, en raison de la présence d’une fidèle en prière derrière soi, on peut néanmoins répondre amen et baroukh Hou ouvaroukh Chémo aux bénédictions que l’on entend, et réciter toutes les autres parties de la prière, bien que l’on n’ait pas encore pris entièrement congé de sa ‘Amida. Si l’assemblée est arrivée à la partie des supplications (Ta’hanounim) qui se dit assis (Néfilat apayim), on peut s’asseoir pour la réciter, à condition de ne pas s’asseoir véritablement devant l’autre fidèle [sur le même axe, même en lui tournant le dos]. Après cela, on se relèvera, puis, quand l’autre fidèle aura terminé sa ‘Amida, on reculera de trois pas et l’on dira ‘Ossé chalom etc. (Michna Beroura 122, 4 ; cf. 104, 9).

[3]. D’après les estimations mises à jour, un téfa’h fait 7,6 cm ; nous écrivons ci-dessus des chiffres ronds. Selon le Michna Beroura 102, 2, une cloison d’une hauteur de 10 tefahim (76 cm) n’est pas efficace pour permettre de passer devant une personne en prière. En effet, celle-ci peut voir celle qui passe, si bien que le passage perturbe sa concentration. En cas de nécessité pressante, on peut s’appuyer sur le ‘Hayé Adam et le Echel Avraham de Rabbi Avraham Botchatch, selon lesquels, en présence d’une cloison, on peut passer devant la personne en prière.

S’agissant de s’asseoir dans les quatre coudées d’une personne en prière, le Michna Beroura 102, 2 estime qu’une cloison de 10 tefa’him est utile. Toutefois, à notre humble avis, il convient d’être rigoureux et de ne point s’asseoir véritablement devant la personne en prière [sur le même axe, même en lui tournant le dos], afin qu’elle ne paraisse pas se prosterner devant son prochain. Pour plus de détails, voir La Prière d’Israël 17, note 15.

06. Quelques règles supplémentaires

Comme nous l’avons vu, il convient a priori d’être rigoureux, conformément à l’opinion du Maguen Avraham, en ne reculant pas de trois pas à l’intérieur des quatre coudées qui s’étendent devant la fidèle située derrière soi, même si celle-ci n’est pas exactement située sur la même ligne.

Toutefois, la personne qui prolonge ainsi sa ‘Amida est parfois en proie au trouble, car elle ne veut pas empêcher celle qui se trouve devant elle de reculer de trois pas à la fin de sa prière. Quand celle qui attend s’aperçoit de cela, il est préférable qu’elle suive l’avis du Elya Rabba, selon lequel, dès lors que l’autre fidèle n’est pas véritablement dans le même axe que soi, on peut reculer de trois pas.

De même, si l’on a coutume de s’étendre dans sa ‘Amida, il est permis de demander aux fidèles situées devant soi de ne pas attendre que l’on ait terminé. Alors, il leur sera permis de reculer immédiatement après avoir terminé leur ‘Amida. Quant à celle qui prie vraiment devant soi, sur le même axe, elle reculera en diagonale, afin de ne pas reculer véritablement devant sa camarade (La Prière d’Israël 17, note 20).

En général, quand on sait que l’on prie lentement, il convient de ne pas prier derrière sa camarade, afin de ne pas bloquer celle-ci et la gêner ainsi.

Les A’haronim discutent de la question de savoir si la règle applicable à l’enfant en prière est semblable à celle qui s’applique à l’adulte : est-il interdit de reculer devant un enfant qui récite la ‘Amida et de s’asseoir dans ses quatre coudées ? (Cf. Arba’ amot chel téphila, p. 254-257) Puisque cette règle est rabbinique, la halakha est conforme à l’opinion indulgente ; mais ceux qui veulent apporter un supplément de perfection à leur pratique seront rigoureux.

Chapitre 15 – Qorbanot et Pessouqé dezimra

Jusqu’ici, nous avons étudié des règles applicables aussi bien aux hommes qu’aux femmes, comme l’ablution des mains, les bénédictions du matin, celles de la Torah, et la ‘Amida. Dans les chapitres suivants, nous étudierons des prières obligatoires pour les hommes mais dont les femmes sont dispensées ; toutefois, celles qui veulent apporter à leur prière un supplément de perfection ont l’usage de les réciter.

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