Mo’adim

02 – Pour quels besoins il est permis de porter, le Yom tov

Comme nous l’avons vu, il est permis, même en un endroit dépourvu d’érouv, de porter des objets, d’un domaine à l’autre, pour les besoins alimentaires (okhel néfech) ; et dès lors que porter a été autorisé pour les besoins de l’alimentation, ce l’est aussi pour les autres nécessités dont l’homme tire jouissance le Yom tov. Par conséquent, il est permis de porter dans sa poche une montre, afin d’y consulter l’heure. De même, il est permis de sortir avec des lunettes de soleil dans sa poche, pour le cas où l’on en aurait besoin. Il est également permis à une femme de porter ses bijoux, afin de les montrer à ses amies dans le domaine public.

Il est également permis de porter pour les besoins d’une jouissance spirituelle. Par conséquent, il est permis de porter un loulav afin d’accomplir la mitsva de la fête. Il est également permis de porter un objet pour les besoins d’un supplément de perfection apporté à une mitsva (hidour mitsva) ; aussi, celui-là même qui a déjà fait la mitsva du loulav avant l’office sera autorisé à porter le loulav, afin d’en faire le balancement pendant la récitation du Hallel. Il est de même permis de porter un chofar à Roch hachana, ou un loulav à Soukot, pour les besoins des femmes (Choul’han ‘Aroukh Harav 589, 2, Chemirat Chabbat Kehilkhata 20, note 5, contrairement à l’opinion du Chaagat Aryé 106-107).

Si l’on emmène un bébé en promenade, on est autorisé à le conduire dans sa poussette, et à prendre pour lui un biberon, une tétine, un jeu auquel il a l’habitude de jouer. De même, il est permis de sortir, à son intention, un vêtement dont il aura peut-être besoin, tel qu’un pull, pour le cas où il ferait froid, ou des vêtements de rechange pour le cas où ses vêtements se saliraient.

Une personne adulte est, elle aussi, autorisée à prendre un vêtement dont elle aura peut-être besoin par la suite, par exemple un pull. Mais il lui est interdit de prendre un vêtement dont elle n’aura pas besoin. Il est également permis de prendre en sa poche des mouchoirs dont on aura peut-être besoin.

Si l’on a besoin de prendre une clef réunie dans le même trousseau avec des clefs dont on n’a pas besoin pendant Yom tov : certains disent que l’on doit séparer la clef dont on a besoin, car ce n’est qu’elle que l’on est autorisé à porter ; d’autres disent qu’il est permis de la porter avec tout le trousseau. Puisque cette controverse porte sur une norme rabbinique, la halakha est conforme à l’opinion indulgente[2].


[2]. Le Michna Beroura 518, 10 nous apprend que, lorsqu’il y une chance pour que l’on ait besoin d’un objet pendant Yom tov, il est permis de le porter ; mais quand il n’y a aucune chance pour cela, c’est interdit. C’est aussi l’avis du Chemirat Chabbat Kehilkhata 19, 2. De la règle autorisant à prévoir des quantités plus grandes que celles dont on a initialement besoin (ribouï chi’ourim), nous apprenons qu’il est permis d’ajouter de l’eau à une marmite avant de la mettre sur le feu (cf. ci-dessus, chap. 3 § 4). De la même façon, si l’on a besoin de trois mouchoirs, on est autorisé à ajouter d’autres mouchoirs dans la même poche.

Mais si l’on veut porter une clef qui se trouve dans un trousseau où sont aussi des clefs qui ne sont nullement nécessaires au Yom tov, certains estiment qu’il n’est pas permis de porter tout le trousseau : on prendra la seule clef qui est nécessaire, car ce qui est autorisé, dans le cadre du ribouï chi’ourim, c’est seulement d’ajouter une chose dont on pourrait se servir le Yom tov, comme de l’eau chaude, et non une chose dont on ne servira assurément pas pendant Yom tov (Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm V 35, Hilkhot Hamo’adim 5, 9). D’autres pensent que l’interdit ne consisterait qu’à ajouter au trousseau une clef qui n’est pas nécessaire, de même qu’il est interdit d’ajouter de l’eau dans une marmite après que celle-ci a été posée sur le feu. Mais si telle clef se trouvait déjà dans le trousseau, il est permis de porter le trousseau sans en extraire la clef superflue (Chemirat Chabbat Kehilkhata 20, note 14, et c’est ce que l’on rapporte au nom du Rav Chelomo Zalman Auerbach et du Rav Yossef Chalom Elyachiv).

La halakha suit les tenants de l’opinion indulgente, car leur théorie est satisfaisante, et la controverse porte sur une norme rabbinique. En effet, le port de cette clef est une mélakha ché-einah tsrikha légoufah (mélakha dont la nécessité ne réside pas en elle-même), ce qui, selon la majorité des décisionnaires, est un cas d’interdiction rabbinique. De plus, selon Rachi et les décisionnaires qui partagent son opinion, porter une chose sans nécessité n’est pas un interdit, ou, si c’en est un, celui-ci est rabbinique. En outre, selon de nombreux auteurs, il n’y a pas, de nos jours, de domaine public tel que la Torah le conçoit ; et, dans la majorité des localités [d’Israël], il y a un érouv, de sorte que, de l’avis même des auteurs rigoureux, l’interdit ne serait que rabbinique (cf. Les Lois de Chabbat II 21, 9, note 9). Cf. Har’havot 6, 2, 2-3. Les clefs d’une voiture sont mouqtsé, et il n’est permis de les porter, de l’avis des auteurs indulgents, que lorsque les autres clefs sont plus importantes.

Si l’on a besoin de sortir avec un sac contenant des affaires nécessaires à un bébé, mais aussi des objets mouqtsé, et que les choses qui ne sont pas mouqtsé soient plus importantes, il sera permis, de l’avis des auteurs indulgents, de porter le sac et, à cette occasion, les objets mouqtsé. Puisqu’on ne les a pas placés dans le sac pendant Yom tov, le cas est semblable à celui où l’on ajoute à la quantité initialement prévue, ce qui est permis.

03 – Clefs de la maison, d’un coffre-fort

Si l’on va se promener, le Yom tov, dans le domaine public, et que l’on craigne que, en laissant son domicile ouvert, des voleurs ne viennent et ne volent des mets que l’on a préparés pour les repas de Yom tov, on sera autorisé à fermer à clef la maison où se trouvent lesdits mets et les ustensiles nécessaires aux repas de Yom tov, et à prendre avec soi les clefs ; en effet, le port de ces clefs répond à un besoin de Yom tov. De même, il est permis de porter la clef de chambre où se trouvent des vêtements ou des bijoux que l’on pourrait utiliser le Yom tov.

Mais les décisionnaires sont partagés quant au fait de savoir si, en sortant de chez soi, on est autorisé à porter la clef de son coffre-fort, de crainte que, pendant qu’on se trouvera dehors, des malfrats ne volent son argent. Certains disent que c’est interdit, parce que la permission de porter ne s’applique que pour les besoins de la jouissance de Yom tov, et non pour empêcher une perte financière (Roch, Maharil). D’autres estiment qu’ôter une inquiétude du cœur doit être aussi considéré comme un besoin du Yom tov, et qu’il est donc permis de porter également la clef d’un coffre-fort (notes du Séfer Mitsvot Qatan, Rama 518, 1). En pratique, si l’on veut être indulgent, on a sur qui s’appuyer. Mais a priori, il est bon de laisser les clefs chez des voisins. Si l’on veut porter la clef, il est juste de le faire d’une manière inhabituelle, par exemple en la plaçant au bord de sa chaussette ou dans son chapeau[3].

Mais il est interdit, dans le domaine public, de porter un objet pour un non-Juif. Même si celui-ci promet au Juif que, en échange de ce service, il lui apportera de la nourriture, il reste interdit de porter des objets à son intention, puisqu’il n’y a pas de lien entre le fait même de porter et la préparation de la nourriture. Même si le non-Juif menace le Juif, en lui disant que, s’il ne lui apporte pas tel ustensile par le biais du domaine public, il lui volera des choses nécessaires à son repas, on ne profanera pas pour autant le Yom tov. Car tout ce qui a été autorisé, le Yom tov, c’est d’accomplir une mélakha par laquelle on prépare des mets, ou bien par laquelle on contribue de manière directe à la jouissance du Yom tov ; mais une mélakha qui, sans aucun lien direct, entraîne le fait que de la nourriture soit accessible ou se conserve, est interdite (Rav Chelomo Zalman Auerbach, Chemirat Chabbat Kehilkhata 19, note 17).


[3]. La permission de porter la clef d’un coffre-fort, en cas de nécessité, se fonde sur le fait que, de nos jours, selon de nombreux auteurs, il n’existe plus de domaine public tel que la Torah le conçoit (cf. Les Lois de Chabbat II 21, 8-9). Dès lors, le doute porte sur une norme rabbinique ; or, en cas de doute à l’égard d’une norme rabbinique, la halakha suit l’opinion indulgente. De plus, il faut ajouter à cela l’opinion de Rachi, du Rif et de Maïmonide, qui estiment qu’il n’est pas interdit de porter une chose sans nécessité (tout au plus, l’interdit serait rabbinique seulement ; cf. ci-dessus, chap. 3, note 2). Et quand il y a un érouv, les auteurs qui sont rigoureux en matière de Chabbat et interdisent de se fier à l’érouv, parce qu’ils tiennent comptent de l’opinion d’après laquelle une voie large de 16 ama est un domaine public toranique, peuvent être indulgents ici, car on se trouve dans un cas de double doute (sfeq sfeqa) : 1) peut-être la halakha va-t-elle d’après l’opinion selon laquelle il ne s’agit pas d’un domaine public toranique, et l’érouv est efficace ; 2) peut-être la halakha est-elle conforme à l’avis selon lequel il est permis de porter, le Yom tov, même sans nécessité. De plus, si l’on porte cette clef de manière inhabituelle, il s’agira d’un cas de sfeq sfeqa en matière rabbinique.

04 – Périmètres sabbatiques

L’interdit de sortir de son périmètre (te’houm) s’applique aussi bien à la fête qu’au Chabbat, car le propos des jours sanctifiés est qu’Israël s’y repose de tout effort ou inquiétude, et soit disponible pour étudier la Torah et s’adonner à la joie de la mitsva. Par conséquent, les sages ont défendu de sortir du périmètre de sa résidence, qui consiste dans le lieu où l’on séjourne, additionné de deux mille ama (environ 912 mètres) dans chaque direction. Si une personne passe le Chabbat dans la nature, le lieu de sa résidence consistera dans les quatre amot[c] qui l’entourent, additionnées de deux mille ama dans chaque direction. Si l’on passe le Chabbat en ville, ou dans un village, tout le territoire habité de façon continue, ou entouré d’un érouv, est considéré comme « le lieu de sa résidence » ; au-delà de ce lieu, on dispose encore de deux mille ama dans chaque direction. Ces règles sont exposées dans Les Lois de Chabbat II chapitre 30.

Bien qu’il soit permis de faire, les jours de fête, des mélakhot pour les besoins alimentaires, il est interdit de sortir du périmètre sabbatique pour les besoins de son repas. En effet, tout ce qui été permis, le Yom tov, pour les besoins alimentaires, vise les aliments qui se trouvent déjà dans le domaine de l’homme. Et de même qu’il est interdit de moissonner des céréales ou de chasser du gibier, de même est-il interdit de sortir du te’houm sabbatique afin d’en rapporter des aliments, car ceux-là ne sont point dans son domaine (Na’hmanide, Mil’hemot Hachem sur Beitsa 23b ; Rachba, ‘Avodat Haqodech 1, 1). De plus, l’interdit de sortir de sa zone d’habitation sabbatique ne fait pas partie des trente-neuf travaux interdits, de sorte qu’il n’est pas inclus dans l’autorisation d’accomplir une mélakha pour les besoins alimentaires (‘Hatam Sofer, Ora’h ‘Haïm 149)[4].

Quand un non-Juif a apporté des fruits d’au-delà du périmètre sabbatique : s’il les apportés pour lui-même, ou pour un autre non-Juif, il sera permis à tout Juif d’en manger. Simplement, nos sages appliquent également la loi des périmètres aux biens appartenant à des non-Juifs (Choul’han ‘Aroukh 401, 1) ; et puisque les fruits que le non-Juif a apportés sont sortis de leur périmètre, il est interdit de les porter au-delà de quatre amot. Si le non-Juif les a apportés jusqu’à l’intérieur d’une maison, ou d’un lieu entouré d’une clôture ou d’un érouv, il sera permis de les déplacer dans tout le territoire entouré.

Si le non-Juif a apporté ces fruits à l’intention d’un Juif, les sages ont interdit à ce Juif et aux membres de sa maisonnée d’en profiter, jusqu’à l’issue du Yom tov, à quoi l’on ajoute le temps qui eût été nécessaire pour les apporter. Mais aux autres Juifs, qui ne sont pas membres de la maisonnée, il est permis de profiter de ces fruits, à condition de ne pas les sortir de leur lieu (Choul’han ‘Aroukh 325, 8)[5].

Quand un Juif a apporté des aliments d’au-delà du périmètre sabbatique, et qu’il savait que la chose est interdite, il est interdit à tout Juif de profiter pendant Yom tov des aliments qu’il a apportés[6].


[c]. Ama, plur. amot : coudée. Les petits nombres prennent le pluriel (quatre amot), mais non les grands nombres (deux mille ama).

[4]. Selon Maïmonide et le Séfer Mitsvot Gadol, l’interdit de sortir de son te’houm possède un fondement toranique ; mais l’interdit toranique porte sur le fait de dépasser le lieu de sa résidence de 12 milles (24 000 ama), ce qui fait près de 11 kilomètres (10 944 mètres), mesure correspondant à la taille du camp d’Israël au désert, comme il est dit : « Que chacun demeure où il est, que personne ne sorte de son endroit le septième jour » (Ex 16, 29). Mais selon Na’hmanide, le Roch et le Rachba, ce verset concerne l’interdit de porter un objet dans le domaine public, tandis que, s’agissant de dépasser le périmètre sabbatique, l’interdit n’est que rabbinique, même au-delà de douze milles.

[5]. De même qu’il est interdit de sortir de son te’houm sabbatique pour de la nourriture, de même est-il interdit d’en sortir pour les nécessités d’une mitsva, telle que le loulav ou le chofar. Mais il est permis de demander à un non-Juif d’apporter ces objets afin de pouvoir accomplir la mitsva. Nous avons vu, en effet, que les sages ont autorisé les cas de chevout de-chevout (association de deux limitations rabbiniques) pour les nécessités d’une mitsva, ou pour une grande nécessité ; or, selon la majorité des Richonim, l’interdit lié aux zones d’habitation est de rang rabbinique. Certes, les sages ont interdit de jouir d’une chose qu’un non-Juif a apportée d’au-delà du te’houm ; mais nous avons pour principe que « ce n’est pas pour la jouissance que les mitsvot ont été données » [de sorte que, si un non-Juif a apporté d’au-delà du te’houm un objet nécessaire à l’accomplissement d’une mitsva, on accomplira celle-ci, car ce que l’on considère est l’obligation qu’on a de l’accomplir, et non la jouissance qu’on en tire] (Choul’han ‘Aroukh 655, 1, Michna Beroura 3, Les Lois de Chabbat I 9, 11).

[6]. Cf. Les Lois de Chabbat II 26, 2, où l’on voit que, si un Juif a apporté des fruits en sachant que c’était interdit, il est défendu d’en profiter, même quand l’interdit était rabbinique. Si c’est sans intention fautive que ce Juif a apporté des aliments, et que l’interdit fût toranique – par exemple s’il les a apportés en voiture – il est interdit d’en profiter, de l’avis de la majorité des décisionnaires (Choul’han ‘Aroukh 318, 1) ; mais certains estiment que, en cas de nécessité pressante, il est permis d’en profiter (Michna Beroura 318, 7). Si le Juif a apporté ces aliments sans intention fautive, et sans enfreindre d’interdit toranique – par exemple, s’il les a apportés à pied, d’au-delà du te’houm –, il est permis d’en profiter (Béour Halakha 318, 1 ד »ה המבשל, Les Lois de Chabbat II 26, 3).

05 – Mouqtsé

Les sages ont interdit de déplacer, le Chabbat et le Yom tov, des choses qui ne conviennent pas à l’usage de ces jours, et que l’homme met à part (maqtsé) de son esprit. Il y a deux raisons principales à cet interdit : a) la nécessité de préserver le caractère des jours saints en tant que jours chômés, destinés à la sainteté et au repos ; à ce titre, les mains elles-mêmes doivent cesser de déplacer des choses qui ne sont pas liées au Chabbat ou au Yom tov, et de s’en occuper. Car s’il était permis de déplacer toutes les choses qui ne sont pas nécessaires à l’homme aux jours consacrés, les gens risqueraient de se donner de la peine toute la journée durant, en rangeant leur maison, leurs objets et leurs biens, et d’annuler ainsi la mitsva du chômage et du repos. L’interdit de mouqtsé crée donc une concordance entre la pensée et les mains ; toute chose qu’il ne convient pas d’utiliser pendant Chabbat, les mains non plus ne les manipulent pas. b) Dresser une haie devant l’interdit d’exécuter des mélakhot ; car si l’on déplaçait un objet qui ne convient pas à la fête, il serait à craindre d’en venir à l’utiliser pour faire un travail pendant Yom tov, ou le faire passer d’un domaine à l’autre ; or nous avons vu que quiconque transfère, sans nécessité, une chose de son domaine enfreint un interdit de la Torah (suivant la majorité des décisionnaires ; cf. ci-dessus, chap. 3, note 2).

Généralement, l’interdit de mouqtsé est égal pour le Chabbat et pour le Yom tov. Aussi n’est-il pas nécessaire de revenir ici sur des règles qui ont déjà été exposées dans Les Lois de Chabbat II (chap. 23). Mais à trois égards, le Yom tov diffère du Chabbat : dans deux cas, la règle est plus légère, dans un cas elle est plus rigoureuse.

La première différence va donc dans le sens de l’indulgence : le Chabbat, il y a des produits alimentaires qui sont mouqtsé parce qu’ils ne sont pas propres à la consommation ; c’est le cas de la farine, d’une poule vivante, de la viande crue, des pommes de terre crues (Les Lois de Chabbat II 23, 3). Mais le Yom tov, où il est permis d’exécuter des mélakhot pour rendre propres à la consommation ces aliments, ceux-ci ne sont pas mouqtsé. De même, il y a des ustensiles qui, le Chabbat, sont mouqtsé parce qu’ils servent à accomplir des mélakhot, pour les besoins de la préparation des aliments ; ainsi d’un réchaud à gaz ou d’une marmite (ibid. 23, 7-8). Le Yom tov, en revanche, où il est permis de cuisiner, ils ne sont pas mouqtsé. De même, une lampe de chevet, et tout appareil électrique doté d’un fil incandescent, sont considérés, le Chabbat, comme mouqtsé par nature (mouqtsé mé’hamat goufo), puisqu’ils sont porteurs de feu, et que toute combustion est interdite le Chabbat (ibid. 23, 7). En revanche, le Yom tov, où il est permis de transmettre une flamme, ces appareils ne sont pas mouqtsé (Chemirat Chabbat Kehilkhata 13, 46).

La deuxième différence va également dans le sens de l’indulgence : il est permis de déplacer, le Yom tov, toutes sortes de mouqtsé pour un besoin alimentaire. Par exemple, si du plâtre est tombé dans un four, et quoique le plâtre soit mouqtsé, il est permis de l’enlever afin que le plat au four ou à la broche que l’on veut y préparer pour le repas de Yom tov ne roussisse pas (Choul’han ‘Aroukh 507, 4, Rama 509, 7 ; 518, 3). De même, si des pierres sont posées sur des fruits : le Chabbat, puisque les pierres sont mouqtsé, il est défendu de les soulever pour prendre les fruits (cependant il est permis de déplacer les pierres avec « son corps[d] », par exemple du pied) ; mais le Yom tov, de même que les sages ont autorisé à accomplir une mélakha pour les besoins alimentaires, de même ont-ils permis de retirer des pierres mouqtsé de dessus les fruits afin de pouvoir les manger (Michna Beroura 509, 31, 518, 23). Si la clef d’un placard à nourriture se trouve dans un porte-monnaie, il est interdit de l’en sortir le Chabbat, puisque le porte-monnaie est mouqtsé ; le Yom tov, il est permis d’ouvrir le porte-monnaie et d’en sortir la clef, car c’est pour les besoins de l’alimentation qu’est alors déplacé le porte-monnaie (Michna Beroura 518, 24). Toutefois, quand il est possible d’apporter facilement une clef d’un autre endroit, sans déplacer de mouqtsé, il ne faut pas déplacer le porte-monnaie.

Toute cette autorisation n’a cours que dans le cas où il s’agit de déplacer du mouqtsé afin de parvenir aux denrées alimentaires ; mais il est interdit de manger ou d’utiliser des choses qui sont elles-mêmes mouqtsé. Par exemple, des fruits qu’un non-Juif a cueillis pendant Yom tov sont interdits à la consommation, de même que des poissons qu’un non-Juif a pêchés pendant Yom tov, ou des oiseaux qu’un non-Juif a chassés pendant Yom tov : ceux-là ont été mis à l’écart de la pensée du Juif puisqu’il est interdit à un Juif de cueillir, pêcher ou chasser pendant Yom tov (Choul’han ‘Aroukh 515, 1, Michna Beroura 5). De même, il est interdit de brûler pour les besoins alimentaires de la fête du bois cher, destiné à la construction, puisque ce bois est mouqtsé par valeur (mouqtsé mé’hamat ‘hesron kis) (Choul’han ‘Aroukh 502, 3)[7][e].


[d]. C’est-à-dire sans se servir de ses mains.

[7]. Un œuf pondu pendant Yom tov est mouqtsé. En effet, tout œuf pondu aujourd’hui a achevé de se constituer hier dans les entrailles de la poule ; si donc Yom tov tombait après Chabbat, il se trouverait que l’œuf a été préparé pour le Yom tov pendant Chabbat ; or la halakha veut que nous ne préparions les choses nécessaires au Yom tov que les jours ouvrables, et non le Chabbat. Puisque l’œuf a été préparé pendant Chabbat, il est toraniquement interdit pendant Yom tov. Et afin d’éviter des erreurs, les sages ont décrété que l’œuf pondu un Yom tov qui suit un jour de semaine serait également mouqtsé (Beitsa 2b, conformément à l’avis de Rabba ; Choul’han ‘Aroukh 513, 1). Cependant, quand on a égorgé une poule le Yom tov, et que l’on a trouvé des œufs dans son ventre, les œufs sont permis à la consommation : puisqu’ils n’ont pas été pondus, on constate que la préparation d’hier n’était pas encore parvenue à sa pleine maturité (Choul’han ‘Aroukh 513, 7, Michna Beroura 35).

[e]. Le troisième cas dans lequel la règle du Yom tov diffère de celle du Chabbat, en matière de mouqtsé, sera exposé au paragraphe suivant immédiatement.

06 – Mouqtsé le Yom tov : cas de plus grande rigueur

En certaines matières relatives aux lois de mouqtsé, les sages ont été plus sévères à l’égard du Yom tov qu’à l’égard du Chabbat, parce qu’ils ont craint que, en raison de la permission de faire des mélakhot pour les besoins alimentaires du Yom tov, les gens n’en viennent à s’autoriser des indulgences à l’égard de mélakhot qui sont, elles, interdites pendant Yom tov. Quand les gens verront donc que l’on est plus rigoureux en matière de mouqtsé, ils prendront soin de vérifier, en tout domaine de la loi, ce qui est permis le Yom tov et ce qui est interdit.

Il est admis, en halakha, que lorsque le mouqtsé est une chose « née » (nolad) pendant Chabbat, son statut est plus rigoureux. En d’autres termes, quand une chose est une pure création sabbatique, comme de la cendre de bûches qui ont brûlé pendant Chabbat, cette chose est mouqtsé, à l’égard du Chabbat comme du Yom tov (Choul’han ‘Aroukh 498, 15, Michna Beroura 77). Mais quand la chose « née » ne peut être considérée comme entièrement nouvelle, cette chose n’est pas mouqtsé le Chabbat ; ainsi, par exemple, d’os qui restent après que l’on a consommé de la viande, puisqu’ils conviennent encore à l’alimentation d’animaux. Le Yom tov, par contre, ces os seront mouqtsé, puisque, d’un certain point de vue, ils sont une création du jour. En effet, auparavant, la viande était préparée pour l’alimentation humaine, les os étant inclus en elle et lui étant accessoires ; tandis que, après que la viande a été mangée, une chose nouvelle est apparue : des os convenant à l’alimentation d’animaux (Michna Beroura 495, 17). Par conséquent, il est permis, le Chabbat, de déplacer les os restants après la consommation de la viande, et tel est l’usage de nombreuses personnes que de déplacer ces os afin de les donner aux chiens ou aux chats. Mais le Yom tov, ces os sont mouqtsé ; il est dès lors interdit de les déplacer et de les donner aux animaux. Toutefois, il est permis de les ôter de la table, de même qu’il est permis d’ôter des épluchures, ou toute chose qui dérange l’homme[8].

Mais les Richonim sont partagés quant au fait de savoir à quel point on est plus rigoureux le Yom tov. Certains disent que ce n’est qu’à l’égard d’un mouqtsé « né » pendant Yom tov que l’on est rigoureux (Roch, Rama). D’autres estiment que la rigueur de Yom tov inclut toutes les choses que, d’un côté, l’homme n’a pas exclues entièrement de sa pensée, et que, de l’autre, il n’avait pas prévu d’utiliser. Le Chabbat, elles ne sont pas mouqtsé, puisqu’on ne les a pas mises à l’écart de sa pensée ; mais le Yom tov, où l’on est plus sévère, elles sont mouqtsé, puisqu’on n’y avait pas pensé spécialement (Rif, Maïmonide, Choul’han ‘Aroukh 495, 4).

Par exemple si l’on a une vache destinée à la traite, ou une poule qu’on élève pour ses œufs, et que, le Yom tov, on change d’avis et l’on souhaite les abattre : selon l’avis indulgent, elles ne sont pas mouqtsé, puisqu’on ne les a pas exclues spécialement de sa pensée ; selon les auteurs rigoureux, elles sont mouqtsé, puisqu’on n’a pas pensé, avant Yom tov, qu’on les destinait à l’abattage (Chabbat 19b, Michna Beroura 495, 15). Mais si la vache est devenue gravement malade, de sorte que, si on ne l’abattait pas, elle mourrait, et l’on en perdrait la viande, ceux-là même qui ont coutume d’être rigoureux sont autorisés, en raison de la pressante nécessité, à s’appuyer sur l’opinion des décisionnaires indulgents et à l’abattre pendant Yom tov (‘Hazon ‘Ovadia p. 19).

De même, un grossiste qui a dans son entrepôt des produits alimentaires, dont il n’a pas l’intention de faire usage les jours de Chabbat et de Yom tov : si, un Chabbat, se fait sentir la nécessité de prendre des aliments de l’entrepôt, ces aliments ne sont pas mouqtsé, puisque le grossiste ne les a pas explicitement mis à l’écart de son esprit. Selon les décisionnaires indulgents, la règle sera la même le Yom tov ; mais selon les décisionnaires rigoureux, dans la mesure où le grossiste n’a pas pensé s’en servir, les aliments sont mouqtsé pendant Yom tov. En revanche, s’agissant d’un patron d’épicerie qui a l’usage de prendre des produits de son magasin, de temps en temps, le Chabbat, tout le monde s’accorde à dire que, même le Yom tov, les aliments qui sont dans son magasin ne seront pas mouqtsé (Michna Beroura 495, 15, Béour Halakha ad loc., passage commençant par Sagué, Choul’han ‘Aroukh 517, 1)[9].


[8]. La permission de les ôter de la table dérive du statut du pot de chambre [qu’il est permis d’éloigner en raison du dégoût qu’il inspire]. Et puisque aussi bien on les ôte de la table, il est permis de les donner aux animaux (Les Lois de Chabbat II 23, 12). Toutefois, si des déchets d’autres sortes sont mêlés aux os, il est interdit de saisir ceux-ci pour les séparer : il faut tout jeter à la poubelle, ou tout mettre dans la cour.

Plusieurs A’haronim écrivent qu’il faut avoir soin de ne pas mettre les os dans une assiette, car cela annulerait la destination de celle-ci, à moins que l’on n’y mette une chose plus importante : par ce biais, on pourra la déplacer également après cela (Hilkhot Mo’adim 6, 21, ‘Hazon ‘Ovadia p. 27). Mais leurs paroles sont difficiles à comprendre, car nous avons vu qu’il est permis [le Yom tov] de déplacer du mouqtsé pour les besoins de l’alimentation [cf. § 5, second cas d’indulgence] : si donc on est amené à avoir besoin de cette assiette, on sera autorisé à en enlever les os ; par conséquent, on n’aura point fait obstacle à la disponibilité de l’ustensile. Comme l’écrit le Téhila lé-David 266, 7 en matière de Chabbat, il est permis de mettre un ustensile mouqtsé par destination (keli ché-mélakhto lé-issour) sur un ustensile autorisé, car le premier ne fait pas obstacle, par cela, à la disponibilité du second.

[9]. Rabbi Yehouda et Rabbi Chimon controversent en matière de mouqtsé. Selon Rabbi Yehouda, c’est seulement les choses dont on pensait vouloir se servir pendant Chabbat qu’il sera permis de déplacer, tandis que les choses auxquelles on ne pensait pas sont mouqtsé, bien qu’on ne les ait pas spécialement exclues en pensée. Selon Rabbi Chimon, en revanche, seules les choses que l’on a exclues en sa pensée, en formant l’intention de ne pas s’en servir, sont mouqtsé, tandis que les choses non spécifiées, dont on ne pensait simplement pas vouloir se servir pendant Chabbat, ne sont pas mouqtsé.

Le Chabbat, il est admis de trancher suivant l’opinion de Rabbi Chimon. Aussi, les produits alimentaires destinés au commerce ne sont point mouqtsé puisqu’on ne les a pas spécialement exclus de sa pensée (Choul’han ‘Aroukh 310, 2). Mais s’agissant de Yom tov, les sages de la maison d’Hillel disent, dans la Michna (Beitsa 2a) : « Un œuf pondu pendant Yom tov ne sera pas mangé » ; et la Guémara cite plusieurs explications à cela. L’opinion de Rav Na’hman est que la chose est interdite au titre de mouqtsé ; certes, le Chabbat, on est indulgent, conformément à l’opinion de Rabbi Chimon, mais c’est parce que le Chabbat a un statut plus rigoureux, de sorte qu’il n’est pas à craindre qu’on le prenne à la légère ; tandis qu’il est à craindre que le Yom tov, dont le statut est plus léger, soit pris à la légère, puisqu’il est permis d’y faire des mélakhot pour les besoins de l’alimentation. C’est pourquoi les sages ont été plus rigoureux en matière de mouqtsé, conformément à l’avis de Rabbi Yehouda (Beitsa 2b). La Guémara apporte d’autres explications à l’opinion de la maison d’Hillel.

En pratique, selon le Rif, Maïmonide, Na’hmanide, le Rachba, Rabbi Aaron Halévi et le Choul’han ‘Aroukh 495, 4, la halakha, le Yom tov, est conforme à l’avis de Rabbi Yehouda, qui est rigoureux en matière de mouqtsé. Selon le Halakhot Guedolot, Rabbénou Yits’haq, Rabbénou Tam, le Roch et le Rama, la halakha suit, le Yom tov également, Rabbi Chimon qui est indulgent. Cependant, le Rama estime que, en tout état de cause, on est rigoureux en matière de choses « nées » (nolad) pendant Yom tov, plus qu’on ne l’est le Chabbat, comme l’écrivent Rabbénou ‘Hananel et le Roch (Beitsa 5, 14). C’est ce qui est admis parmi ceux des A’haronim qui suivent l’opinion du Rama.

01 – Malades

Puisque, dans la majorité des cas, le statut du malade est identique pendant Chabbat et pendant Yom tov, nous réviserons brièvement les règles relatives au malade, le Chabbat ; à partir de là, nous expliquerons les règles particulières au Yom tov. Il existe trois types de malades :

1) le malade dont l’état est dangereux ; 2) le malade ordinaire, dont l’affection touche l’ensemble du corps, mais dont la vie n’est pas en danger ; 3) le malade dont l’affection frappe une partie du corps seulement, ou celui qu’une indisposition corporelle fait souffrir. Donnons quelques indications sur les règles applicables.

Premier cas : le malade dont l’état est dangereux. La règle est connue : la préservation de la vie humaine a priorité sur le Chabbat et sur le Yom tov. On fait donc, pour un tel malade, tout ce que l’on a l’habitude de faire les jours de semaine, car tous les interdits sabbatiques sont suspendus afin de sauver sa vie.

Deuxième cas : le malade ordinaire, c’est-à-dire le malade qui est alité, mais dont la vie n’est pas en danger. On ne profane pas pour lui le Chabbat dans ses interdits toraniques, mais il est permis de passer outre aux interdits rabbiniques, pour les besoins de sa guérison.

S’agissant de Yom tov, les décisionnaires sont partagés quant au fait de savoir si les mélakhot autorisées pour les besoins de l’alimentation (okhel néfech) le sont aussi pour les besoins d’un malade. Certains disent que, de même que ces mélakhot ont été autorisées pour les besoins des repas de Yom tov et pour les autres nécessités de la fête, de même est-il permis de les exécuter pour les besoins d’un malade. D’autres estiment qu’il est toraniquement interdit de les exécuter pour les besoins d’un malade dont l’état n’est pas dangereux, car toutes les mélakhot qui ont été autorisées le Yom tov ne l’ont été que pour des besoins « égaux pour tous » (chavé lekhol néfech) ; or les besoins du malade ne sont pas égaux à ceux de tous (cf. ci-dessus, chap. 3 § 6).

En pratique, puisqu’il s’agit d’une controverse touchant à un interdit toranique, la halakha est conforme à l’opinion rigoureuse : toutes les mélakhot qui sont toraniquement interdites le Chabbat, il sera interdit de les accomplir pour les besoins d’un malade le Yom tov (comme nous l’expliquons dans Les Lois de Chabbat II chap. 28). Par conséquent, il est interdit de cuire un remède pour un malade. De même, il est interdit d’allumer un feu pour désinfecter une aiguille de ses microbes. Dans le même sens, il est interdit de pratiquer une piqûre ou une transfusion intraveineuse, puisque du sang s’écoule à cette occasion, ce qui est interdit au titre de la mélakha de cho’het (« égorger », c’est-à-dire ici blesser). En revanche, les actes interdits rabbiniquement pourront être accomplis pour le malade dont l’état n’est pas dangereux[1].


[1]. Ceux qui l’autorisent sont : Rabbi Chelomo Kluger (Séfer Ha’haïm 328), les responsa ‘Avodat Hachem (Ora’h ‘Haïm 4), le ‘Hazon ‘Ovadia p. 23. Ceux qui l’interdisent sont : Na’hmanide, ‘Helqat Yoav, Ora’h ‘Haïm 26, Cha’ar Hatsioun 511, 9, Or’hot ‘Haïm 511, 1, Chemirat Chabbat Kehilkhata 33, 25-26. C’est aussi l’opinion de la majorité des décisionnaires, comme nous le rapportons dans les Har’havot.

Mais l’interdit rabbinique de demander à un non-Juif d’accomplir pour nous une mélakha (amira légoï) est levé par les sages, le Chabbat, pour les besoins d’un malade (Chabbat 129a). Selon le Ran, c’est précisément le fait de demander une mélakha à un non-Juif qui est autorisé, mais il demeure interdit au Juif d’enfreindre lui-même un interdit rabbinique pour un malade [dont l’état n’est pas dangereux]. Selon le Rachba, il est permis à un Juif de passer outre à un interdit rabbinique pour un malade. A priori, on est rigoureux ; a posteriori, quand c’est possible, on procède en apportant un changement (chinouï) à la manière habituelle, afin que le cas soit celui d’un chevout de-chevout (association de deux défenses de rang rabbinique). Faute de choix, on s’appuie sur l’opinion du Rachba (cf. Les Lois de Chabbat II 28, 2, note 2).

Cependant, le Yom tov, il semble que l’on puisse s’appuyer a priori sur les décisionnaires indulgents, en levant pour les besoins du malade les interdits rabbiniques ; en effet, le statut du Yom tov est généralement plus léger, puisque les interdits toraniques ont le rang de mitsvot lo ta’assé (commandements de ne pas faire), qui ne sont point passible de mort. À plus forte raison, quand il est question d’interdits rabbiniques auxquels on passe outre pour les besoins alimentaires – puisque, nous l’avons vu, certains décisionnaires permettent de faire, pour le malade, les mélakhot qui ont été autorisées pour les besoins de l’alimentation.

02 – Malades dont l’affection frappe une partie du corps seulement

Troisième cas de malade : celui dont la maladie ne touche qu’une partie du corps. Celui-là va et vient comme un bien portant, mais pâtit d’une certaine maladie ou d’une indisposition. Tous les interdits rabbiniques s’appliquent à cette personne, comme au bien portant, et les interdits rabbiniques légers eux-mêmes, appelés chevout de-chevout, ne sont pas levés pour elle. Toutefois, si la personne s’afflige de la souffrance qu’elle éprouve, on pourra accomplir pour elle des actes interdits au titre de chevout de-chevout, c’est-à-dire des actes rabbiniquement interdits, et que l’on fait exécuter par un non-Juif, ou que l’on exécute soi-même en y apportant un changement. Dans ces matières, le Yom tov a même règle que le Chabbat (Choul’han ‘Aroukh 307, 5, Michna Beroura 328, 3, Les Lois de Chabbat I 9, 11 ; 28, 3).

Cependant, concernant la prise de médicaments, la chose est différente. En effet, la question de l’interdit de prendre des médicaments dépend elle-même de la controverse mentionnée au paragraphe précédent. Les sages ont en effet décrété de ne pas prendre de médicaments, le Chabbat, de crainte qu’on en vienne à piler des plantes, et que l’on transgresse ainsi l’interdit de to’hen (« moudre »). Dès lors, selon les auteurs indulgents, puisqu’il est permis le Yom tov de broyer du poivre pour les besoins de l’alimentation, il est également permis de broyer des plantes pour des besoins médicinaux ; par là même, il est permis de prendre des médicaments. Selon les auteurs rigoureux, la permission d’accomplir certaines mélakhot, le Yom tov, ne vaut que pour les besoins des bien portants, et non pour ceux des malades, car les besoins des malades n’appartiennent pas à la catégorie des besoins « égaux pour tous » ; par conséquent, il est rabbiniquement interdit de prendre des médicaments, de crainte de broyer des plantes. Quoi qu’il en soit, puisque l’interdit de prendre des médicaments est de rang rabbinique, le doute portant sur une telle norme doit être tranché dans le sens de l’indulgence. La halakha suit donc les auteurs indulgents, et il est permis de prendre des médicaments, le Yom tov, sans limitation, que ce soit en les avalant ou en les buvant. De même, il est permis de s’oindre le corps d’un liquide médicinal[2].


[2]. L’interdit de prendre des médicaments est expliqué dans Les Lois de Chabbat II 28, 4-5. De nombreux auteurs sont également rigoureux, à cet égard, en matière de Yom tov. En effet, nous voyons en Beitsa 22a qu’il est interdit de se farder les yeux le Yom tov. Telle est l’opinion de : Maguen Avraham 532, 2, Peri Mégadim, Echel Avraham 2, ‘Hayé Adam 103, 1, Michna Beroura 532, 5, Qitsour Choul’han ‘Aroukh 98, 32, Chemirat Chabbat Kehilkhata 34, 1. D’autres le permettent, et ce sont ceux-là même qui se prononcent pour l’indulgence au début de notre note précédente. Le Ritva (sur Beitsa 22b) se joint à eux, et son raisonnement consiste à dire que, puisque tout l’interdit de prendre des médicaments, le Chabbat, repose sur la crainte d’en venir à piler des plantes et de transgresser ainsi l’interdit de moudre, il ne convient pas de décréter cela le Yom tov ; en effet, il est permis, le Yom tov, de broyer du poivre. Quant à l’interdit de se farder les yeux, il s’explique par le fait qu’il n’est pas certain que cet acte ait un effet médical. C’est aussi en ce sens que se prononcent plusieurs A’haronim (cf. Har’havot).

Puisqu’il s’agit d’un doute portant sur une norme rabbinique, la halakha va dans le sens de l’indulgence. De plus, même en matière de Chabbat, certains disent qu’il est permis de prendre des médicaments fabriqués en usine, car il n’est pas à craindre d’en venir à piler des plantes pour les faire. Certes, le Chabbat, nous n’avons été indulgent – en raison de ce raisonnement – que dans les cas de douleur (Les Lois de Chabbat II 28, 5, note 3), ou dans les cas de traitement que l’on doit prendre un certain nombre de jours (28, 6). Mais le Yom tov, où il y a d’autres motifs d’indulgence encore, on peut prendre des médicaments sans limitation.

De même, s’agissant des mélakhot qui ont été autorisées pour des besoins alimentaires : si on les fait exécuter par un non-Juif, ou qu’on les exécute en y imprimant un changement, il s’agit d’interdits rabbinique ; or puisque les décisionnaires sont partagés quant au fait de savoir si ce qui a été autorisé pour l’alimentation l’a été aussi pour les besoins d’un malade, la halakha, quand l’interdit est rabbinique, est conforme à l’avis indulgent.

03 – Interdits rabbiniques

Le Chabbat et le Yom tov sont régis par les mêmes règles, hormis les choses nécessaires à l’alimentation (okhel néfech), qui sont interdites le Chabbat et permises le Yom tov. Même en matière d’interdits rabbiniques, le Yom tov est semblable au Chabbat. Certes, le statut du Chabbat est plus sévère que celui du Yom tov, car celui qui, le Chabbat, accomplit une mélakha intentionnellement est passible de lapidation[a], et si c’est de manière non intentionnelle, il doit apporter un sacrifice expiatoire (‘hatat) ; tandis que, le Yom tov, la transgression intentionnelle est punissable de flagellation, et la transgression non intentionnelle est dispensée de sacrifice expiatoire. Cependant, à l’inverse, il y a lieu d’être plus rigoureux le Yom tov car, puisqu’il est permis d’y accomplir des mélakhot pour les besoins alimentaires, il est à craindre d’en venir à y faire des mélakhot interdites. Aussi convient-il d’être plus sévère le Yom tov, à l’exemple des sages qui ont été plus rigoureux en matière de mouqtsé (cf. ci-dessus, chap. 6 § 6). Et puisqu’il y a un côté de plus grande rigueur dans le Chabbat et un côté de plus grande rigueur dans le Yom tov aussi, la règle du Yom tov sera présumée semblable à celle du Chabbat tant qu’il ne sera pas dit explicitement qu’il y a une différence (cf. Beitsa 35b, 36a, 37a ; cf. Har’havot 6, 6, 7).

Les interdits rabbiniques ont déjà été exposés dans Les Lois de Chabbat ; et puisqu’ils s’appliquent également au Yom tov (Beitsa 36b, Choul’han ‘Aroukh 524, 1), nous les rappellerons ici brièvement : on ne monte pas à un arbre (Les Lois de Chabbat II 19, 7), on ne chevauche pas une bête (ibid. 20, 1), on ne nage pas (ibid. 14 9), on ne joue pas d’un instrument de musique, de crainte d’en venir à le réparer ; on ne danse pas d’une manière telle que l’on veuille s’accompagner d’un instrument de musique, de crainte que celui-ci ne requière une réparation (ibid. 22, 17-18) ; on ne débat pas au tribunal, on ne se marie ni ne divorce, on n’exerce pas le lévirat, et l’on ne se désiste pas du lévirat (par la cérémonie du déchaussage, la ‘halitsa) ; on ne consacre pas une chose au Temple, on ne procède pas aux prélèvements ni aux dîmes (ibid. 22, 5). Mais celui qui, le Yom tov, cuit du pain ou de la pâtisserie, prélève la ‘hala de la pâte (cf. ci-dessus, chap. 4 § 3).

Le fait de demander à un non-Juif de faire pour nous une mélakha – défense ayant rang de chevout</em[b] – est interdit le Yom tov, comme le Chabbat. En d’autres termes, toute chose qu’il est interdit à un Juif de faire, même si cette défense n’est que rabbinique, il est interdit au Juif d’en demander l’exécution à un non-Juif. Mais de même que le Chabbat, quand il est question des nécessités d’une mitsva ou de quelque autre grande nécessité, ou en cas de souffrance, il est permis de demander à un non-Juif d’accomplir une chose qui est rabbiniquement interdite au Juif, de même est-ce permis le Yom tov ; en effet, par le fait que c’est un non-Juif qui l’accomplisse, l’acte descend du statut de chevout à celui de chevout de-chevout (ibid. 25, 4-5, 9, 11-12).

Mais pour les besoins de l’alimentation, de même que la Torah autorise l’accomplissement de pleines mélakhot, de même les sages lèvent leurs interdits. Par exemple, ils ont permis de déposer la peau de l’animal, après son abattage, en un lieu où les passants la fouleront aux pieds (Choul’han ‘Aroukh 499, 3 ; cf. ci-dessus, chap. 4 § 6). De même ont-ils permis de démonter la porte d’un entrepôt de commerçant, afin d’en extraire des aliments ; dans certaines conditions, ils permettent également de remonter la porte de manière provisoire, afin que les marchandises qui s’y trouvent ne soient point volées. Dans le même sens, les sages permettent de monter de manière provisoire une table, une chaise, pour les besoins du repas. Bien que ces choses soient interdites le Chabbat – de crainte qu’on n’en vienne à monter ces objets de façon permanente –, les sages ont été indulgents à l’égard du Yom tov, pour les besoins des repas (Choul’han ‘Aroukh 519, 1-2).

Certains auteurs estiment que, de même que les sages ont interdit de jouir d’une mélakha qu’une personne a accomplie le Chabbat de façon transgressive, de même est-il interdit de profiter d’une mélakha faite le Yom tov en infraction à la règle (Maïmonide). D’autres disent que, puisque le statut du Yom tov est plus léger, les sages n’ont pas interdit de profiter d’une mélakha accomplie le Yom tov par l’effet d’une transgression  (Rachba). Tout le monde reconnaît, en revanche, que si la mélakha accomplie de façon interdite était une des mélakhot qui ont été autorisées pour les besoins alimentaires, il n’est pas interdit d’en jouir[3].


[a]. À l’époque du Temple et du Sanhédrin, et dans des conditions de procédure définies par le Talmud. De même pour la peine de flagellation dont il sera ensuite question.

[b]. Comme les autres défenses rabbiniques. Chevout signifie repos, chômage, abstention (sur les notions de chevout et de chevout de-chevout, cf. Les Lois de Chabbat I 9, 11-12).

[3]. Si l’on n’a pas déposé d’érouv tavchilin [cf. chap. 8] et que l’on ait cuisiné à tort pendant Yom tov, ce de manière intentionnelle, il est néanmoins permis de manger, pendant Chabbat, ce que l’on aura cuisiné le Yom tov. En effet, il n’est pas à craindre que les gens soient induits par cela à agir ainsi, puisque tout le monde sait que le plat a été cuisiné en contradiction avec la halakha (Choul’han ‘Aroukh 527, 23). De prime abord, il y a lieu de s’interroger : les sages, nous l’avons vu, ont frappé d’interdit le ma’assé Chabbat (produit d’une mélakha faite pendant Chabbat ; cf. Les Lois de Chabbat II 26, 1-2). En d’autres termes, si un Juif a accompli intentionnellement une mélakha, qu’elle soit toraniquement ou rabbiniquement interdite, il lui sera pour toujours interdit d’en tirer profit ; quant aux autres personnes, il leur sera permis d’en tirer profit à l’issue de Chabbat (telle est l’opinion de la majorité des décisionnaires et du Choul’han ‘Aroukh). On trouve trois opinions, quant à l’interprétation de cette règle :

  1. a) Selon Maïmonide (Chabbat 23, 15, Yom tov 6, 10) tel que l’explique le Or Saméa’h (Yom tov 4, 17), sur l’ensemble des interdits où une même règle s’applique au Chabbat et au Yom tov, pèse l’interdit de ma’assé Chabbat et de ma’assé Yom tov [produit d’une mélakha exécutée à tort pendant Yom tov]. Mais quant aux mélakhot qui ont été autorisées le Yom tov pour les besoins de l’alimentation, telles que la cuisson, et même quand elles ont été commises en infraction à la halakha, l’interdit de ma’assé Yom tov ne s’applique pas. b) Selon le Rachba (Responsa V 8), les sages n’ont pas interdit le ma’assé Yom tov, car le Yom tov a un statut plus léger que le Chabbat ; suivant la formule talmudique, « l’interdit de Chabbat n’est pas du même ordre » (Beitsa 17b). C’est aussi l’opinion du Choul’han ‘Aroukh Harav 502, 1 et 503, 13, et c’est ce que l’on peut inférer du Choul’han ‘Aroukh 503, 1. c) Selon Rachi (Beitsa 17b), quand l’interdit est toranique (de-Oraïtha), il faut interdire de tirer jouissance du ma’assé Yom tov, mais quand l’interdit est rabbinique, ce n’est pas interdit ; or, puisque celui qui cuit un aliment intentionnellement n’enfreint pas, le Yom tov, un interdit toranique – attendu qu’il peut être servi aux invités –, il est permis de tirer profit de ce qui aura été cuit. C’est ce qu’écrivent le Peri Mégadim (introduction aux lois de Yom tov 2, 5) et le Chévet Halévi 6, 68.

04 – Repos des animaux

En plus des trente-neuf travaux (mélakhot) interdits le Chabbat, la Torah nous a ordonné, par une mitsva « positive » (mitsvat ‘assé) et une mitsva « négative » (mitsvat lo ta’assé), de ne pas accomplir de mélakha par le biais d’un animal, et de ne pas lui faire porter de charge, comme il est dit : « Le septième jour, tu chômeras, afin que se reposent ton bœuf et ton âne » (Ex 23, 12). De même, il est dit : « Mais le septième jour est le Chabbat en l’honneur de l’Éternel ton Dieu ; tu ne feras aucun travail, toi, ton fils ni ta fille, ton serviteur ni ta servante, ni ton animal » (Ex 20, 10). Il est même interdit à un Juif de prêter ou de louer sa bête à un non-Juif, sans que celui-ci s’engage à ce qu’elle chôme le Chabbat (Les Lois de Chabbat II 20a).

Toutefois, s’agissant de Yom tov, les auteurs sont partagés : certains pensent qu’il n’y a pas, le Yom tov, de mitsva de faire chômer son animal ; aussi est-il permis, avant Yom tov, de le louer à un non-Juif, bien que celui-ci ait l’intention de la faire labourer pendant Yom tov. De même, il est permis à un Juif de charger le dos de sa bête d’aliments pour les besoins de Yom tov, à condition de ne pas paraître la charger comme on le fait les jours ouvrables (Rama 246, 3, Tossephot Yom Tov, Peri ‘Hadach).

Mais la majorité des décisionnaires estiment que, de même qu’il est obligatoire de faire chômer l’animal le Chabbat, de même est-ce obligatoire le Yom tov ; car toutes les lois du Yom tov sont semblables à celles du Chabbat, sauf ce qui est relatif aux mélakhot nécessaires à l’alimentation, mélakhot explicitement spécifiées. Aussi est-il interdit de confier une bête à un non-Juif pour que celui-ci la fasse travailler le Yom tov ; de même, il est interdit de placer sur le dos de l’animal des aliments pour les besoins alimentaires de Yom tov. Et quoiqu’il soit permis à l’homme lui-même de déplacer des choses pour les besoins de Yom tov, il est interdit de le faire sur le dos d’un animal (Choul’han ‘Aroukh 495, 3, Maharchal, Gaon de Vilna, Michna Beroura 495, 14)[4].


[4]. Selon Rabbi Ya’aqov de Castro (le Maharicas, Ohalé Ya’aqov 89), il est interdit, le Yom tov, d’accomplir par le biais d’une bête une mélakha, telle que le labour ; mais il est permis de lui faire porter des objets d’un domaine à l’autre, car il n’est pas vraisemblable qu’il soit permis à l’homme de porter des objets, tandis que ce serait interdit sur le dos de l’animal. C’est aussi l’avis d’autres décisionnaires, comme le rapporte le ‘Hazon ‘Ovadia p. 6. Cependant, la majorité des décisionnaires estiment que faire porter un objet à un animal est aussi interdit ; et le Rav Chelomo Zalman Auerbach ajoute (Chemirat Chabbat Kehilkhata 19, notes 17-18) que, selon les décisionnaires rigoureux, il est interdit de faire porter à une bête des aliments d’un domaine à l’autre, même pour ses propres besoins. Toutefois, s’il est à craindre que la bête ne meure, il sera permis au Juif de lui faire porter de la nourriture, en se fondant sur l’opinion selon laquelle il est permis de porter la clef d’un coffre-fort (cf. ci-dessus, chap. 6 § 3) ; un tel transport, en effet, a pour but d’éviter une perte, qui affligerait le Juif pendant Yom tov.

05 – S’occuper d’un mort

Si quelqu’un meurt le Chabbat ou au jour de Kipour, on ne s’occupe pas du tout de son enterrement. On ne déplace pas non plus le défunt, car il a le statut de mouqtsé. Mais s’il est à craindre que le fait de le laisser à l’endroit qu’il occupe ne soit outrageant, on placera sur lui un vêtement ou quelque objet qui n’est pas mouqtsé ; de cette façon, on pourra le déplacer vers un lieu où son corps sera gardé honorablement (Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 311, 1-4). On ne demande pas non plus à un non-Juif de s’occuper de son enterrement, car quiconque demande à un non-Juif de faire une chose qui est toraniquement interdite à un Juif enfreint un interdit rabbinique ; or ce n’est pas faire honneur au mort que de profaner pour lui le Chabbat ou le jour de Kipour (Choul’han ‘Aroukh 526, 3).

Mais le Yom tov, les sages ont permis de demander à un non-Juif de s’occuper de l’enterrement du mort. Puisque la Torah s’est montrée indulgente quant aux lois de Yom tov, en nous permettant de préparer tout ce qui est nécessaire à l’alimentation, les sages, eux aussi, ont annulé leur propre interdit, et ont permis de demander à un non-Juif d’accomplir toutes les mélakhot nécessaires à l’enterrement du mort, comme de coudre les vêtements mortuaires, de préparer le cercueil ou de creuser la tombe. Les Juifs eux-mêmes sont autorisés à faire, pour le défunt, tous les préparatifs qui n’occasionnent pas la transgression d’interdits toraniques ; il est ainsi permis de le laver, de porter sa bière, de lui faire escorte à l’intérieur du te’houm (périmètre sabbatique) et de le déposer dans la tombe. Puis des non-Juifs recouvrent la tombe de terre (Beitsa 6a, Choul’han ‘Aroukh 526, 1).

Le second jour de Yom tov, en diaspora, et le second jour de Roch hachana, les sages ont permis aux Juifs de procéder à l’enterrement du mort. Car les sages ont rendu le second jour de Yom tov semblable à un jour ouvrable pour tout ce qui est nécessaire aux soins à donner au mort. En effet, puisque ce sont les sages qui ont décrété que soit fêté un second jour de Yom tov (comme nous le verrons au chap. 9 § 2-3), ils ont autorité pour y permettre l’accomplissement de mélakhot afin d’empêcher qu’il soit fait outrage au défunt. Par conséquent, il est permis à un Juif de coudre les vêtements mortuaires pour le défunt, de creuser pour lui la tombe, et même de cueillir des myrtes pour les déposer sur sa bière, à l’endroit où il est de coutume de faire cela en son honneur (Beitsa 6a, Choul’han ‘Aroukh 526, 4). Certains pensent que, lorsque c’est possible, il faut demander à un non-Juif d’exécuter toutes les mélakhot interdites toraniquement, et ne pas les faire par le biais d’un Juif (Rama ad loc.).

Tout ce qu’il est interdit de faire à ‘Hol hamo’ed pour les besoins du défunt, il est également interdit de le faire un second jour de Yom tov. Il est donc interdit de faire pour lui, publiquement, des mélakhot dont les observateurs ignoreront qu’elles sont faites pour le défunt, comme le fait de tailler de pierres pour la tombe, ou d’abattre des arbres pour en faire un cercueil (Choul’han ‘Aroukh 547, 10, Michna Beroura 526, 24).

Si le cimetière se trouve au-delà du te’houm sabbatique, il est permis d’en sortir, le deuxième jour de Yom tov, pour accompagner le mort. Mais s’il faut, pour cela, voyager en automobile, ce n’est qu’à celui qui doit procéder à son enterrement qu’il sera permis de voyager avec lui, tandis qu’aux autres personnes, parmi lesquelles les endeuillés, il sera interdit de voyager en voiture (Choul’han ‘Aroukh 526, 7, Ora’h Michpat 130 ; quant au retour, cf. Choul’han ‘Aroukh 526, 6, Michna Beroura 35, Béour Halakha, passage commençant par Vé’hozrin).

Si une personne meurt un premier jour de Yom tov, il ne faut pas repousser son enterrement au second jour afin que des Juifs s’en occupent. A posteriori, si l’on a fautivement repoussé cet enterrement au second jour, il sera permis aux Juifs de l’enterrer (Choul’han ‘Aroukh 526, 2, Béour Halakha, passage commençant par Assour). Certains ont cependant pour coutume de repousser a priori l’enterrement du premier au second jour (Raavad). De nos jours, où le fait qu’un non-Juif procède à l’enterrement est considéré comme un grand outrage envers le mort, certains ont coutume d’être indulgents à cet égard ; ceux qui veulent s’appuyer sur cette coutume y sont autorisés (cf. Pisqé Techouvot 526, 3).

Quand il est à craindre que, si l’on procède à l’enterrement le Yom tov, les gens ne transgressent des interdits supplémentaires – par exemple, que certaines personnes ne téléphonent pour informer du moment de l’enterrement, et que d’autres ne voyagent en voiture pour y participer –, il est juste de ne pas procéder à l’enterrement pendant Yom tov. En particulier, de nos jours, où il est possible de conserver le corps du défunt dans un lieu réfrigéré, ce par quoi l’outrage est moindre, il est juste de ne fixer aucun enterrement au second jour, en tout lieu où il se trouve des Juifs qui risquent de profaner le Yom tov à l’occasion de l’enterrement (Igrot Moché, Ora’h ‘Haïm III 76).

Il semble également que, puisqu’il est aujourd’hui possible de conserver le corps du défunt en un lieu réfrigéré, de façon qu’il ne soit pas porté atteinte à son honneur, les proches parents du défunt soient autorisés, même quand aucune profanation du Yom tov n’est à craindre, à repousser l’enterrement du premier et du second jours de Yom tov au lendemain de la fête, afin que davantage de personnes puissent se joindre à l’enterrement. Et bien qu’il y ait une mitsva à enterrer le défunt au jour de son décès, et à ne pas remettre l’enterrement au lendemain, il n’y a pas là d’interdit lorsque cet ajournement répond à une grande nécessité pour l’honneur dû au défunt (Choul’han ‘Aroukh, Yoré Dé’a 357, 1).

Contents

Série Pniné Halakha 9 volumes
Commandez maintenant