Pniné Halakha

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03 – Interdits rabbiniques

Le Chabbat et le Yom tov sont régis par les mêmes règles, hormis les choses nécessaires à l’alimentation (okhel néfech), qui sont interdites le Chabbat et permises le Yom tov. Même en matière d’interdits rabbiniques, le Yom tov est semblable au Chabbat. Certes, le statut du Chabbat est plus sévère que celui du Yom tov, car celui qui, le Chabbat, accomplit une mélakha intentionnellement est passible de lapidation[a], et si c’est de manière non intentionnelle, il doit apporter un sacrifice expiatoire (‘hatat) ; tandis que, le Yom tov, la transgression intentionnelle est punissable de flagellation, et la transgression non intentionnelle est dispensée de sacrifice expiatoire. Cependant, à l’inverse, il y a lieu d’être plus rigoureux le Yom tov car, puisqu’il est permis d’y accomplir des mélakhot pour les besoins alimentaires, il est à craindre d’en venir à y faire des mélakhot interdites. Aussi convient-il d’être plus sévère le Yom tov, à l’exemple des sages qui ont été plus rigoureux en matière de mouqtsé (cf. ci-dessus, chap. 6 § 6). Et puisqu’il y a un côté de plus grande rigueur dans le Chabbat et un côté de plus grande rigueur dans le Yom tov aussi, la règle du Yom tov sera présumée semblable à celle du Chabbat tant qu’il ne sera pas dit explicitement qu’il y a une différence (cf. Beitsa 35b, 36a, 37a ; cf. Har’havot 6, 6, 7).

Les interdits rabbiniques ont déjà été exposés dans Les Lois de Chabbat ; et puisqu’ils s’appliquent également au Yom tov (Beitsa 36b, Choul’han ‘Aroukh 524, 1), nous les rappellerons ici brièvement : on ne monte pas à un arbre (Les Lois de Chabbat II 19, 7), on ne chevauche pas une bête (ibid. 20, 1), on ne nage pas (ibid. 14 9), on ne joue pas d’un instrument de musique, de crainte d’en venir à le réparer ; on ne danse pas d’une manière telle que l’on veuille s’accompagner d’un instrument de musique, de crainte que celui-ci ne requière une réparation (ibid. 22, 17-18) ; on ne débat pas au tribunal, on ne se marie ni ne divorce, on n’exerce pas le lévirat, et l’on ne se désiste pas du lévirat (par la cérémonie du déchaussage, la ‘halitsa) ; on ne consacre pas une chose au Temple, on ne procède pas aux prélèvements ni aux dîmes (ibid. 22, 5). Mais celui qui, le Yom tov, cuit du pain ou de la pâtisserie, prélève la ‘hala de la pâte (cf. ci-dessus, chap. 4 § 3).

Le fait de demander à un non-Juif de faire pour nous une mélakha – défense ayant rang de chevout</em[b] – est interdit le Yom tov, comme le Chabbat. En d’autres termes, toute chose qu’il est interdit à un Juif de faire, même si cette défense n’est que rabbinique, il est interdit au Juif d’en demander l’exécution à un non-Juif. Mais de même que le Chabbat, quand il est question des nécessités d’une mitsva ou de quelque autre grande nécessité, ou en cas de souffrance, il est permis de demander à un non-Juif d’accomplir une chose qui est rabbiniquement interdite au Juif, de même est-ce permis le Yom tov ; en effet, par le fait que c’est un non-Juif qui l’accomplisse, l’acte descend du statut de chevout à celui de chevout de-chevout (ibid. 25, 4-5, 9, 11-12).

Mais pour les besoins de l’alimentation, de même que la Torah autorise l’accomplissement de pleines mélakhot, de même les sages lèvent leurs interdits. Par exemple, ils ont permis de déposer la peau de l’animal, après son abattage, en un lieu où les passants la fouleront aux pieds (Choul’han ‘Aroukh 499, 3 ; cf. ci-dessus, chap. 4 § 6). De même ont-ils permis de démonter la porte d’un entrepôt de commerçant, afin d’en extraire des aliments ; dans certaines conditions, ils permettent également de remonter la porte de manière provisoire, afin que les marchandises qui s’y trouvent ne soient point volées. Dans le même sens, les sages permettent de monter de manière provisoire une table, une chaise, pour les besoins du repas. Bien que ces choses soient interdites le Chabbat – de crainte qu’on n’en vienne à monter ces objets de façon permanente –, les sages ont été indulgents à l’égard du Yom tov, pour les besoins des repas (Choul’han ‘Aroukh 519, 1-2).

Certains auteurs estiment que, de même que les sages ont interdit de jouir d’une mélakha qu’une personne a accomplie le Chabbat de façon transgressive, de même est-il interdit de profiter d’une mélakha faite le Yom tov en infraction à la règle (Maïmonide). D’autres disent que, puisque le statut du Yom tov est plus léger, les sages n’ont pas interdit de profiter d’une mélakha accomplie le Yom tov par l’effet d’une transgression  (Rachba). Tout le monde reconnaît, en revanche, que si la mélakha accomplie de façon interdite était une des mélakhot qui ont été autorisées pour les besoins alimentaires, il n’est pas interdit d’en jouir[3].


[a]. À l’époque du Temple et du Sanhédrin, et dans des conditions de procédure définies par le Talmud. De même pour la peine de flagellation dont il sera ensuite question.

[b]. Comme les autres défenses rabbiniques. Chevout signifie repos, chômage, abstention (sur les notions de chevout et de chevout de-chevout, cf. Les Lois de Chabbat I 9, 11-12).

[3]. Si l’on n’a pas déposé d’érouv tavchilin [cf. chap. 8] et que l’on ait cuisiné à tort pendant Yom tov, ce de manière intentionnelle, il est néanmoins permis de manger, pendant Chabbat, ce que l’on aura cuisiné le Yom tov. En effet, il n’est pas à craindre que les gens soient induits par cela à agir ainsi, puisque tout le monde sait que le plat a été cuisiné en contradiction avec la halakha (Choul’han ‘Aroukh 527, 23). De prime abord, il y a lieu de s’interroger : les sages, nous l’avons vu, ont frappé d’interdit le ma’assé Chabbat (produit d’une mélakha faite pendant Chabbat ; cf. Les Lois de Chabbat II 26, 1-2). En d’autres termes, si un Juif a accompli intentionnellement une mélakha, qu’elle soit toraniquement ou rabbiniquement interdite, il lui sera pour toujours interdit d’en tirer profit ; quant aux autres personnes, il leur sera permis d’en tirer profit à l’issue de Chabbat (telle est l’opinion de la majorité des décisionnaires et du Choul’han ‘Aroukh). On trouve trois opinions, quant à l’interprétation de cette règle :

  1. a) Selon Maïmonide (Chabbat 23, 15, Yom tov 6, 10) tel que l’explique le Or Saméa’h (Yom tov 4, 17), sur l’ensemble des interdits où une même règle s’applique au Chabbat et au Yom tov, pèse l’interdit de ma’assé Chabbat et de ma’assé Yom tov [produit d’une mélakha exécutée à tort pendant Yom tov]. Mais quant aux mélakhot qui ont été autorisées le Yom tov pour les besoins de l’alimentation, telles que la cuisson, et même quand elles ont été commises en infraction à la halakha, l’interdit de ma’assé Yom tov ne s’applique pas. b) Selon le Rachba (Responsa V 8), les sages n’ont pas interdit le ma’assé Yom tov, car le Yom tov a un statut plus léger que le Chabbat ; suivant la formule talmudique, « l’interdit de Chabbat n’est pas du même ordre » (Beitsa 17b). C’est aussi l’opinion du Choul’han ‘Aroukh Harav 502, 1 et 503, 13, et c’est ce que l’on peut inférer du Choul’han ‘Aroukh 503, 1. c) Selon Rachi (Beitsa 17b), quand l’interdit est toranique (de-Oraïtha), il faut interdire de tirer jouissance du ma’assé Yom tov, mais quand l’interdit est rabbinique, ce n’est pas interdit ; or, puisque celui qui cuit un aliment intentionnellement n’enfreint pas, le Yom tov, un interdit toranique – attendu qu’il peut être servi aux invités –, il est permis de tirer profit de ce qui aura été cuit. C’est ce qu’écrivent le Peri Mégadim (introduction aux lois de Yom tov 2, 5) et le Chévet Halévi 6, 68.
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