Soukot

02.Coutume des branches de saule, à l’époque du Temple et de nos jours

En plus de la mitsva toranique d’agiter des branches de saule au sein du bouquet des quatre espèces (cf. ci-dessus, chap. 4 § 1), il existe une mitsva dont le statut est de halakha lé-Moché mi-Sinaï [c], consistant à apporter au Temple de longues branches de saule, et de les dresser sur les côtés de l’autel, leur sommet parvenant penché sur la partie supérieure de l’autel. Quand on apportait les branches de saule, les prêtres sonnaient du chofar : successivement une teqi’a (son prolongé), une terou’a (série de notes piquées), puis encore une teqi’a. Ainsi en usait-on chaque jour de Soukot, en dehors du Chabbat, où l’on ne dressait point les branches de saule. Cependant, si Hocha’na rabba tombait un Chabbat, on y accomplissait la mitsva des saules, puisque c’est à Hocha’na rabba que cette mitsva s’applique essentiellement. Et pour ne pas profaner le Chabbat, on cueillait les branches de saule le vendredi, et on les faisait tremper dans de grands récipients d’or remplis d’eau, afin qu’elles ne flétrissent pas ; puis, le lendemain, on les dressait sur les côtés de l’autel (Souka 45a)[1].

Comme prolongement à cela, les prophètes donnèrent pour directive coutumière aux Israélites de porter des branches de saule en tout endroit, non seulement au Temple. De plus, ils fondèrent la coutume consistant à frapper les branches à terre. Après la destruction du Temple, les Juifs continuèrent d’observer la coutume des prophètes, consistant à prendre des branches de saule le septième jour de Soukot en souvenir du Temple. Bien qu’à l’époque du Temple on prît des branches de saule chaque jour de Soukot, l’usage fut, après la destruction du Temple, de ne prendre le bouquet de saules qu’un seul jour. Les sages choisirent le septième jour, parce que c’est en ce jour que s’applique essentiellement la mitsva des saules, et qu’au Temple on tournait sept fois avec eux autour de l’autel. Les maîtres de la Kabbale expliquent qu’il existe un lien profond entre le septième jour et la mitsva des saules.

La coutume des branches de saule est si importante que, de l’avis de certains Amoraïm, même après la destruction du Temple, lorsqu’on proclamait encore les nouveaux mois au beit-din, on s’abstenait de fixer Roch hachana un dimanche, afin que le septième jour de Soukot ne tombât pas un Chabbat, et que l’on n’annulât point la coutume des branches de saule de Hocha’na rabba (Souka 43b). De même, dans le calendrier hébraïque institué par le dernier beit-din en terre d’Israël, il a été prévu que jamais le jour de Hocha’na rabba ne tomberait le Chabbat, afin que la coutume des branches de saule ne fût pas annulée (Ran, Levouch ; cf. Zemanim – Fêtes et Solennités juives I 1, 3).

De prime abord, la branche de saule (‘arava) fait allusion au juif le plus simple, car elle ne possède ni goût ni odeur – ni Torah ni bonnes actions ; et toute la raison pour laquelle la Torah a ordonné de l’assembler aux trois autres espèces est qu’il importe qu’un tel juif ne se perde pas (Lv Rabba 30,12 ; cf. ci-dessus, chap. 4 § 2-3). Dans ces conditions, il y a lieu de demander pour quelle raison on prend, à Hocha’na rabba, un bouquet de saules seuls.

Mais les branches de saule expriment encore une autre notion : c’est précisément parce qu’elles n’ont ni goût ni odeur qu’elles incarnent le ba’al téchouva [d], qui connaît sa modeste valeur et ses manques, et sait qu’il ne pourra être sauvé que par le Saint béni soit-Il. De ce point de vue, le ba’al téchouva est lié au Saint béni soit-Il, plus que ne le sont des justes accomplis. En effet, les justes se maintiennent par le mérite de leurs bonnes actions, et n’ont pas besoin d’une aide particulière du Ciel, tandis que le ba’al téchouva sait qu’il dépend entièrement de Dieu, béni soit-Il, qui, malgré ses fautes, ouvre la main pour accueillir sa téchouva ; de ce fait, il est davantage relié à Dieu. À ce propos, nos sages ont dit : « Au lieu où se tiennent les repentants (ba’alé téchouva), les justes accomplis ne sauraient se tenir » (Berakhot 34b).

À Hocha’na rabba, après nous être évertués de toutes nos forces à accomplir toutes les étapes de la téchouva et l’ensemble des prières de Roch hachana et de Kipour, nous venons rechercher le secours divin, avec modestie, en suppliant, portant nos saules, tels ces repentants qui savent bien que tout leur salut dépend de l’Éternel seul. Aussi les branches de saule sont-elles surnommées hocha’not (« secours »), car, par le mérite de la modestie à laquelle elles font allusion, nous sommes délivrés. La coutume de la ‘havata (consistant à frapper les branches de saule à terre), elle aussi, exprime notre disposition à annuler notre ego et notre mauvais penchant, afin de servir l’Éternel d’un cœur entier.


[c]. Loi reçue par Moïse au mont Sinaï : norme de rang toranique, mais transmise oralement par Dieu à Moïse, et non au sein de la Torah écrite. 

[1]. Certes, si l’on s’en tient à la stricte obligation, ce n’est qu’au sujet du bouquet du loulav qu’il était à craindre qu’on en vînt à une profanation du Chabbat. En effet, la mitsva du loulav est pratiquée par tout Israélite, et il y a donc lieu de craindre que des gens ne portent leur loulav sur une distance de quatre coudées, dans le domaine public ; tandis que la mitsva d’apporter des branches de saule sur l’autel, fondée sur la halakha lé-Moché mi-Sinaï, était accomplie par les cohanim au sanctuaire. Et il y a lieu d’ajouter que, d’après la coutume des prophètes elle-même, qui voulait que tout Israélite, en quelque lieu qu’il soit, prît en main des branches de saule [comme nous allons le voir dans le corps de texte], il n’était pas à craindre que l’on profanât le Chabbat, puisque les administrateurs des synagogues (les gabaïm) apportaient ces branches à la synagogue la veille de Chabbat ; il n’y avait point de question halakhique quant à leur validité, de sorte qu’aucune profanation du Chabbat par le biais de ces branches n’était à craindre. Simplement, si l’on avait maintenu, le Chabbat, la mitsva des branches de saule, laquelle n’est pas écrite dans la Torah, elle aurait semblé plus importante que la mitsva du loulav qui, elle, est écrite dans la Torah. Par conséquent, on n’accomplissait pas non plus la mitsva des branches de saule le Chabbat (Souka 44a). Il est vrai cependant que, dans le cas où Hocha’na rabba tombait un Chabbat, on faisait la mitsva des branches de saule au Temple, afin que tout le monde fût témoin de son importance, en ce qu’elle a le statut de halakha lé-Moché mi-Sinaï ; si bien que, d’un certain point de vue, elle est considérée comme une mitsva de la Torah (Souka 43b).

[d]. Celui qui revient au judaïsme après en avoir été éloigné.

03.La ‘havata, battage des branches de saule

C’est une coutume juive (minhag Israël) que de prendre des branches de saule, le septième jour de Soukot, en souvenir du Temple, et de les frapper sur la terre ou sur un objet, comme les prophètes en ont initié l’usage à l’époque du Temple (Maïmonide, Hilkhot loulav 7, 22). Les Amoraïm sont partagés quant au fait de savoir si les prophètes instituèrent le battage des saules en tant que décret (taqana), pour lequel une bénédiction serait à réciter, ou comme simple coutume sur laquelle ne se récite pas de bénédiction (Souka 44a-b et Rachi ad loc.). En pratique, il a été tranché qu’il s’agit d’une coutume, pour laquelle on ne récite pas de bénédiction (Choul’han ‘Aroukh 664, 2).

La longueur de la branche doit être de trois téfa’him au moins, comme celle que l’on joint au loulav. Si l’on s’en tient à la stricte obligation, on peut se contenter d’une seule branche de saule pour accomplir la ‘havata. Mais de nos jours, on a l’usage, d’après Rabbi Isaac Louria, de prendre cinq branches (Choul’han ‘Aroukh 664, 4, Michna Beroura 16). Certains auteurs préféraient ne pas assembler les cinq branches ; d’autres recommandaient de les attacher ensemble, et tel est l’usage (Michna Beroura 664, 17, Kaf Ha’haïm 35).

Pour la mitsva des quatre espèces, si la branche de saule a perdu la majorité de ses feuilles, elle n’est plus valide ; mais pour la coutume de la ‘havata, il suffit qu’il reste une feuille sur la branche. Néanmoins, il ne convient pas d’être indulgent en la matière : il est juste de donner à la mitsva un supplément de perfection, et d’accomplir la ‘havata avec de belles branches de saule, qui seraient cachères pour figurer dans le loulav (Choul’han ‘Aroukh et Rama 664, 4, Kaf Ha’haïm 664, 34).

A priori, on a coutume de prendre, pour la ‘havata, des branches de saule nouvelles, qui n’ont pas encore été frappées sur le sol. Mais si l’on s’en tient à la stricte obligation, de nombreuses personnes peuvent accomplir la mitsva avec les mêmes branches. En effet, la ‘havata ne les invalide pas ; et tant que la longueur des branches est de trois téfa’him, et qu’il reste à chacune une feuille, d’autres personnes peuvent accomplir avec elles cette mitsva coutumière.

On frappe les branches de saule deux ou trois fois sur la terre, ou sur un objet (Maïmonide, Choul’han ‘Aroukh 664, 4). Selon Rabbi Isaac Louria, on a coutume de frapper les branches cinq fois sur la terre. Certains A’haronim écrivent qu’il est bon de frapper d’abord les branches sur le sol, conformément à la coutume de Rabbi Isaac Louria, puis sur des objets, tels que des bancs, car certains décisionnaires pensent qu’il est souhaitable que des feuilles se détachent pendant la ‘havata ; or si l’on frappe les branches sur des objets, les feuilles se détachent davantage (Bekhori Ya’aqov 664, 16, Michna Beroura 19). Ceux qui appliquent avec précision les coutumes de Rabbi Isaac Louria ont soin de frapper les branches cinq fois sur la terre même, et non sur un sol carrelé ; ils veillent également à ce que les branches restent potentiellement valides pour être adjointes au loulav, ce jusqu’à la fin de la ‘havata (Kaf Ha’haïm 664, 37).

On a coutume de ne pas prendre les quatre espèces et le bouquet de saules ensemble : on accomplit les sept haqafot avec les quatre espèces seulement ; puis on continue de réciter avec elles des poèmes et des prières. Après cela, on dépose les quatre espèces et l’on prend le bouquet de saules. Alors, on récite encore quelques poèmes et prières, puis on frappe ces branches de saule (Rama 664, 7 ; Michna Beroura 26, d’après Rabbi Isaac Louria ; Kaf Ha’haïm 32). La coutume yéménite, en revanche, est de tenir, pendant les haqafot de Hocha’na rabba, aussi bien le loulav que le bouquet de saules (c’est aussi ce qu’écrit le Choul’han ‘Aroukh 664, 3).

On ne s’acquitte pas de son obligation avec une des branches de saule composant le bouquet du loulav, car, tant que cette branche est assemblée au loulav, il n’y a pas de possibilité d’accomplir avec elle la mitsva de la ‘havata. Mais si, après avoir fait la mitsva de nétilat loulav, on extrait la branche de saule du bouquet du loulav, on peut accomplir par elle la mitsva de ‘havata (Choul’han ‘Aroukh 664, 5, Michna Beroura 21).

04.Les quatre espèces et les branches de saule après la fête

Comme nous l’avons vu (chap. 5 § 8), les quatre espèces sont réservées à la mitsva dont elles sont l’objet (elles sont mouqtsé), et tout au long des sept jours il est interdit d’en faire une utilisation ordinaire. Par conséquent, même après avoir accompli la mitsva de nétilat loulav à Hocha’na rabba, il demeure interdit de manger le cédrat et de sentir le parfum des myrtes (toutefois, si l’on avait émis d’avance cette condition, c’est permis). Dès le moment où le septième jour s’achève, l’interdit expire, et les quatre espèces sont autorisées à la consommation et à la jouissance (Tossephot sur Souka 10b, passage commençant par ‘Ad ; Béour Halakha 665, 1, passage commençant par Etrog).

Si l’on n’en a pas besoin, on peut, dès le septième jour après avoir accompli la mitsva, les déposer dans sa cour, ou en tout endroit où l’on dépose des branchages coupés ou des herbages. En effet, puisque ces végétaux ont le statut de tachmiché mitsva (objets servant à l’accomplissement d’une mitsva), et non de tachmiché qedoucha (objets servant à l’accomplissement d’une mitsva et dotés d’une sainteté), il n’est pas nécessaire de les enterrer dans un dépôt de tels objets usagés (gueniza). Toutefois, on ne les mettra pas dans une poubelle sale, ni en un endroit où tout le monde marche : puisqu’une mitsva a été faite par le biais de ces objets, il est interdit de les déconsidérer (Choul’han ‘Aroukh 664, 8).

S’agissant des branches de saule que l’on a frappées sur le sol (les hocha’not), certains ont pris l’usage de les cacher au-dessus de l’arche sainte de la synagogue. Peut-être cet usage est-il motivé par le souci que ces branches ne soient pas jetées hors de la synagogue, et que l’on n’en vienne pas, par suite, à marcher dessus et à les déconsidérer. Mais en pratique, il est préférable de préserver l’honneur de l’arche sainte, et de déposer les branches de saule sur les côtés de sa cour, ou en un endroit où l’on dépose des branchages coupés. Certains ont coutume de garder les branches de saule jusqu’à Pessa’h, afin de brûler par leur biais le ‘hamets, ou de cuire par elles les matsot (Rama 664, 9). D’autres ont l’usage de les déposer chez eux, ou dans leur cour, comme objet propice à la protection.

05.Sortie de la souka

Il ne faut pas détruire la souka avant la fin de la fête de Soukot. Celui-là même qui a terminé son repas de Hocha’na rabba, et qui n’a pas l’intention de dormir au cours de la journée, s’abstiendra de défaire sa souka. Car la mitsva d’habiter la souka se prolonge jusqu’à l’achèvement du jour[e] ; et si l’on souhaitait étudier ou converser, ce serait une mitsva que de le faire dans la souka. Mais environ deux heures et demie avant le coucher du soleil, il est permis d’ôter les meubles placés dans la souka, à l’approche de Chemini ‘atséret (Choul’han ‘Aroukh 666, 1).

Il convient de demeurer dans la souka quand approche la fin de Hocha’na rabba, afin de s’abriter autant que faire se peut à l’ombre de la mitsva dont nous sommes sur le point de nous séparer pour une année entière. Certains ont coutume d’embrasser la souka au moment de se séparer d’elle, à la fin de Hocha’na rabba (Chné Lou’hot Habrit, Michna Beroura 477, 5). Certains ont coutume de réciter des prières de séparation, comme il apparaît dans les livres de prière (Rama 667, 1).

Le sekhakh de la souka, ses parois et ses décorations, sont réservés (mouqtsé) à la mitsva dont ils sont l’objet ; jusqu’à la fin de la fête, il est donc interdit de s’en servir pour quelque autre besoin. Certes, le huitième jour, il n’y a plus de mitsva de résider sous la souka ; mais puisque l’interdit s’étend jusqu’à la fin du crépuscule du septième jour, et qu’alors commence immédiatement le huitième jour, l’interdit s’étend jusqu’à la fin du huitième jour (Choul’han ‘Aroukh 667, 1 ; cf. ci-dessus, chap. 2 § 16).

Puisque le sekhakh, les parois et les décorations ont le statut de tachmiché mitsva (objets servant à l’accomplissement d’une mitsva), il n’est pas nécessaire de les enfouir à la gueniza ; mais il est interdit de les déconsidérer, par exemple en utilisant le papier des décorations pour les toilettes, ou de marcher sur les bois de la souka d’une façon irrespectueuse (Michna Beroura 638, 24).

Il est interdit de manger dans la souka le huitième jour[f] ; quiconque y mange au nom de la mitsva, un jour autre que les sept jours de Soukot, enfreint un interdit toranique, comme il est dit : « Toute la parole que Je vous ordonne, c’est elle que vous garderez pour l’accomplir ; tu n’y ajouteras pas, et tu n’en retrancheras rien » (Dt 13, 1). Et même si l’on n’a pas l’intention d’accomplir en cela la mitsva de la souka, il est rabbiniquement interdit d’y manger le huitième jour, car on semblerait avoir l’intention d’ajouter à la mitsva. Si l’on n’a pas d’autre endroit pour manger, on devra, avant le huitième jour, retirer du sekhakh de la souka une partie de quatre téfa’him sur quatre (environ 32 cm sur 32) ; cela, afin de ne pas paraître ajouter à la mitsva. De cette façon, il sera visible que l’on n’est pas intéressé par le sekhakh.

La crainte de paraître avoir l’intention d’ajouter à la mitsva se rapporte au huitième jour seulement. En revanche, ceux qui souhaitent manger dans la souka après le huitième jour n’auront pas besoin d’enlever une partie du sekhakh, puisqu’il ne sera pas à craindre que les tiers leur prêtent l’intention d’ajouter à la mitsva (Rama 666, 1).

En diaspora, on mange encore dans la souka le huitième jour, car ce jour est considéré, pour les Juifs de diaspora, comme douteux, possiblement septième (sfeq chevi’i) ; pour autant, on ne récite pas la bénédiction Leichev ba-souka, puisque l’on y applique les lois du Yom tov de Chemini ‘atséret – de sorte que, si l’on récitait la bénédiction sur la souka, on suivrait des usages contradictoires (Souka 47a, Choul’han ‘Aroukh 668, 1 ; cf. Mo’adim – Fêtes et solennités juives II 9, note 4).

Mais le neuvième jour, appelé en diaspora Sim’hat Torah, il est interdit de manger dans la souka, car celui qui y mangerait alors paraîtrait vouloir ajouter à la mitsva. Si l’on n’a pas d’autre lieu pour manger, on ne pourra retirer une partie du sekhakh avant le neuvième jour, en raison de l’interdit de détruire (soter) pendant Yom tov. Pour ne pas sembler transgresser l’interdit de bal tossif (ajouter au nombre des mitsvot), on introduira donc dans la souka des casseroles et des assiettes sales, choses qu’il est interdit de faire pendant Soukot ; par ce biais, il sera manifeste que l’on n’a point l’intention de s’installer là au titre de la mitsva de souka (Choul’han ‘Aroukh 666, 1).

 


[e]. En Israël, on revient à la maison dès le commencement de Chemini ‘atséret. 

[f]. En Israël. La règle applicable en diaspora sera exposée dans la suite du texte.

01.Chemini ‘atséret est une fête autonome

Le Yom tov de Chemini ‘atséret est considéré, d’un côté, comme le prolongement de la fête de Soukot, mais, de l’autre, comme une fête en soi. Puisqu’on l’appelle « huitième » (chemini), c’est bien qu’il est considéré comme la suite des sept jours de Soukot. De même, du point de vue de la mitsva du pèlerinage, de l’oblation de l’holocauste de présence (‘olat réïya) et des rémunératoires propres à la fête (‘haguiga), que l’on offrait à Soukot : on n’avait point l’obligation de les offrir de nouveau à Chemini ‘atséret. Et si l’on n’avait pas réussi à les offrir à Soukot, on pouvait encore le faire à Chemini ‘atséret (Roch Hachana 4b).

En revanche, à différents points de vue, Chemini ‘atséret est considéré comme « une fête en tant que telle » (réguel bifné ‘atsmo). Premièrement, les mitsvot particulières à la fête de Soukot n’y sont pas observées : nous n’avons pas la mitsva, à Chemini ‘atséret, de résider dans la souka, ni d’agiter les quatre espèces, ni d’accomplir les libations d’eau avec le sacrifice journalier. Puisqu’il en est ainsi, le nom même de ce jour est différent : il ne s’appelle pas ‘Hag ha-soukot (fête des cabanes), mais Chemini ‘atséret (« huitième [jour, fête] de clôture »), comme nous le disons dans la prière, dans le Qidouch et dans le Birkat hamazon ה. Deuxièmement, il y a entre ces deux fêtes une différence quant aux sacrifices publics qui y étaient offerts : à Soukot, on apportait chaque jour quatorze agneaux et deux béliers, tandis qu’à Chemini ‘Atséret, on apportait sept agneaux et un bélier. De même, s’agissant des taureaux relatifs à la fête : chacun des sept jours de Soukot, on offrait de nombreux taureaux : treize le premier jour, douze le deuxième jour, et ainsi de suite en décroissant jusqu’au septième jour où sept taureaux étaient offerts. Si Chemini ‘Atséret était la suite de Soukot, on devrait y apporter six taureaux ; or il nous est ordonné d’en offrir un seulement, ce qui montre qu’il s’agit d’une fête autonome (Nb 29, 32-39).

Puisque, à de nombreux égards, ce jour est considéré comme une fête en soi, on récite la bénédiction Chéhé’héyanou lors du Qidouch, le soir de Chemini ‘Atséret. En d’autres termes, la bénédiction Chéhé’héyanou que l’on récite au Qidouch du premier soir de Soukot ne couvre pas Chemini ‘atséret (Soukot 47b, Choul’han ‘Aroukh 668, 1).


[1]. Si, par erreur, on a dit dans la ‘Amida « en cette fête de Soukot » au lieu de « en ce huitième jour, fête de clôture », et que l’on n’ait pas achevé la bénédiction, on reviendra aux mots vatiten lanou (« et Tu nous as donné… »), et l’on corrigera la suite. Si l’on a déjà reculé de trois pas, certains auteurs estiment que, a posteriori, on se sera acquitté de son obligation, puisque, d’un certain point de vue, Chemini ‘atséret est inclus dans Soukot (Beit Yehouda, Ora’h ‘Haïm 4, ‘Hayé Adam 28, 15). Mais la position principale, en pratique, suit la majorité des décisionnaires, selon qui l’on ne se sera pas rendu quitte, et l’on devra répéter la ‘Amida (Bikouré Ya’aqov 668, 2, Maamar Mordekhaï 1, Chenot ‘Haïm de Rabbi Chelomo Kluger 148, Choel Ouméchiv, quatrième édition VI 22, Yabia’ Omer IV 51). Si l’on s’est souvenu que l’on était Chemini ‘atséret, et que sa langue ait seulement fourché, certains auteurs estiment que l’on ne répète pas la ‘Amida (Bikouré Ya’aqov 668, 2, Ben Ich ‘Haï, Vézot haberakha 2). 

Quant au Birkat hamazon, on ne se répétera pas puisque, de l’avis de nombreux décisionnaires, dans le cas même où l’on oublie le passage Ya’alé véyavo [relatif aux fêtes] dans le Birkat hamazon, on ne se reprend pas ; on tient compte, en effet, de l’opinion d’après laquelle il n’est pas obligatoire de manger du pain lors des repas de Yom tov. Tel est l’usage séfarade, et celui d’une minorité de communautés ashkénazes. Or dans notre cas, où est présent un autre doute, il n’y a pas lieu de se répéter, cela d’après toutes les coutumes (cf. Mo’adim – Fêtes et Solennités juives II 6, note 5, et Lois des bénédictions 4, 8).

02.La thématique de Chemini ‘atséret

Nos sages enseignent que les soixante-dix taureaux offerts lors de la fête de Soukot correspondent aux soixante-dix nations, tandis que le taureau unique que l’on offre à Chemini ‘atséret correspond à la nation unique, le peuple d’Israël.

Parabole d’un roi de chair et de sang qui dit à ses serviteurs : « Préparez-moi un grand festin. » Le denier jour, il dit à son ami : « Prépare-moi un petit repas, afin que je profite de ta présence » (Souka 55b).

Dans le même ordre d’idées, le Midrach explique :

Parabole d’un roi qui a offert un festin de sept jours, et a invité tous les sujets de son royaume, les sept jours dudit festin. Une fois les sept jours passés, il dit à son ami : « Nous sommes quittes de notre obligation à l’égard des gens du royaume. Préparons, toi et moi, ce que tu trouveras, une livre de viande ou de poisson, ou de légumes. » Ainsi dit le Saint béni soit-Il à Israël : « Le huitième jour sera pour vous un jour de clôture, préparez ce que vous trouverez, un taureau et un bélier » (Nb Rabba 21, 24).

De même, les maîtres du Zohar (III Émor 104b) enseignent que ce jour appartient au Roi seul : c’est le jour où Il se réjouit en Israël.

Parabole d’un roi qui a convié des invités, et tous les gens du palais (Israël) ont fait de leur mieux pour les recevoir. Après cela, le roi dit : « Jusqu’ici, vous et moi avons fait les honneurs à tous les invités, et vous avez offert chaque jour des sacrifices pour les soixante-dix peuples. À présent, vous et moi nous réjouirons un jour. » C’est à ce propos qu’il est écrit : « Le huitième jour sera pour vous un jour de clôture » (Nb 29, 35). Pour vous : car les sacrifices sont pour vous-mêmes.

Autre fragment midrachique :

Dès lors que les enfants d’Israël entendirent cela, ils commencèrent à louer le Saint béni soit-Il en disant : « C’est le jour que fit l’Éternel, exultons, réjouissons-nous en lui (naguila vé-nisme’ha bo) ! » (Ps 118, 24). Rabbi Avin a dit : « [De prime abord] nous ne savons pas de quoi nous sommes invités à nous réjouir [dans ce verset], si c’est du jour, ou du Saint béni soit-Il même. Or Salomon est venu l’expliquer (dans le Cantique des cantiques 1, 4) : “Exultons et réjouissons-nous en toi (naguila vé-nisme’ha bakh)”. En toi [signifie] en ta Torah ; en toi [signifie] en ton secours… » (Yalqout Chim’oni, Pin’has 782).

Tel est le propos spécifique de Chemini ‘Atséret, qui ne comprend aucune mitsva particulière, en dehors de celle de se réjouir en Dieu, en sa Torah et en son secours.

03.Signification de la clôture

Le mot ‘atséret (clôture) est une forme du mot ‘atsara, qui signifie assemblée, réunion ; car en ce jour, on se rassemble pour une réunion de conclusion et de séparation, par laquelle nous quittons l’itinéraire suivi depuis le commencement des fêtes annuelles. Cet itinéraire avait commencé par la fête de Pessa’h, au cours de laquelle nous sortîmes d’Égypte ; il s’était poursuivi avec la fête de Chavou’ot, jour du don de la Torah ; puis avec Roch hachana et Yom Kipour, jours du souvenir, du repentir et de l’expiation ; il s’achève à présent avec Soukot, fête de la récolte, où nous rassemblons tous les fruits, matériels et spirituels, de l’année, et nous en réjouissons. À partir de cela, la joie et la bénédiction se répandent sur le monde entier. Puis, le jour de Chemini ‘atséret, quand approche la conclusion du tout, nous nous rassemblons de nouveau pour une réunion d’au revoir :

Parabole d’un roi qui a invité ses fils à un festin pour tant et tant de jours ; lorsque le moment vient de se séparer, le roi dit : « Mes fils, s’il vous plaît : restez encore un jour avec moi, il m’est difficile de me séparer de vous » (Rachi sur Lv 23, 36).

De ce point de vue, il convient de se réjouir, à Chemini ‘atséret, plus qu’aux autres fêtes, car en ce jour, où est scellée toute l’ascension spirituelle que forme la succession des fêtes, nous jouissons du sommet de la proximité divine, et de l’attachement à Dieu. Or la joie en Dieu ne dépend plus alors d’un commandement particulier, tel que la mitsva de la souka ou des quatre espèces, mais du fait même d’être les enfants et le peuple de l’Éternel. Le Gaon de Vilna dit ainsi que le commandement du jour consiste seulement à se réjouir, comme il est dit : « Et tu seras tout à la joie (véhayita akh saméa’h) » (Dt 16, 15). Dans le même sens, on dit du Gaon de Vilna qu’il était très joyeux à Soukot, mais plus encore à Chemini ‘atséret, car, d’après l’enseignement ésotérique, ce jour est, plus que tout autre jour de la fête, un jour de joie (Ma’assé Rav 233).

Dans cette réunion de clôture festive, où nous nous unissons particulièrement à l’Éternel notre Dieu, l’Éternel nous a donné la possibilité de recueillir et de préserver en notre âme, pour toujours, toute la lumière que nous avons eu le mérite de recevoir au cours de l’année passée. Grâce à cela, nous pouvons continuer de nous élever pendant l’année suivante. À la différence du septième jour de Pessa’h, dont il est dit : « Et le septième jour sera jour de clôture en l’honneur de l’Éternel ton Dieu » (Dt 16, 8) – ce qui veut dire que toute la lumière que nous recueillons et intégrons pendant les jours de Pessa’h, nous la remettons à l’Éternel notre Dieu, afin qu’Il la garde à notre intention, car nous ne sommes pas encore aptes à la conserver en nous –, à Chemini ‘atséret, quand s’achève tout l’ordonnancement des fêtes, il nous est donné de nous élever à un niveau tel qu’il devient possible de conserver en nous, pour toujours, toute la bonne lumière que nous avons reçue pendant l’année, comme il est dit : « Le huitième jour sera pour vous un jour de clôture » (Nb 29, 35 ; cf. Mo’adim – Fêtes et Solennités juives II 13, 6, sur la raison pour laquelle Chavou’ot est aussi appelé ‘Atséret).

Or le huitième jour est celui qui convient à cela, car ce monde-ci, monde de la nature, est lié au chiffre sept : la nature tout entière fut créée en sept jours, et tout ce qui s’y trouve a une fin. Et pour recueillir tout le bien et toute la lumière divine qui se révèle dans la nature, nous devons nous sanctifier et nous élever au degré qui se trouve au-delà de la nature et du temps, degré lié au chiffre huit. Par l’effet de ce degré situé au-dessus de la nature, il est possible de réparer le monde. De même, il nous est prescrit d’accomplir la berit-mila (circoncision) – laquelle parachève la nature – le huitième jour ; car l’alliance qu’elle constitue est éternelle, au-dessus de la nature et du temps. Dans le même sens, la Torah fut donnée un huitième jour, c’est-à-dire après le compte de sept semaines. C’est pourquoi, le jour de Chemini ‘atséret, il convient de fêter aussi la joie de la Torah (Sim’hat Torah) (Maharal, Tiféret Israël 2).

04.Prière de la pluie

Grâce à la pluie, qui apporte l’eau au monde, tous les végétaux, les animaux et les hommes peuvent subsister. Aussi convient-il d’exprimer notre reconnaissance envers Dieu pour l’eau, et de prier pour qu’Il nous prodigue des pluies de bénédiction. C’est pour cela que les sages ont fixé, dans la deuxième bénédiction de la ‘Amida récitée pendant l’hiver, la mention d’une louange : Machiv haroua’h oumorid haguéchem (« Tu fais souffler le vent et tomber la pluie ») ; et, dans la neuvième, la demande à Dieu, béni soit-Il, de faire tomber la rosée et la pluie pour la bénédiction.

Certes, du point de vue de la saison, il y aurait eu lieu de mentionner la pluie et de prier pour elle dès le début de la fête de Soukot, puisque c’est alors que commence la saison des pluies. Mais la pluie est considérée comme un signe de malédiction pendant Soukot, car, quand il pleut, on ne peut accomplir la mitsva de résider dans la souka. C’est pourquoi les sages ont repoussé la mention des pluies après Soukot.

Les sages ont prescrit de commencer cette mention lors de la ‘Amida de Moussaf de Chemini ‘Atséret, car alors, toute la communauté se trouve à la synagogue, et l’on peut annoncer à tous que commence la mention de la pluie. En revanche, jadis, tout le monde ne venait pas à la synagogue pour la prière d’Arvit ; et avant la ‘Amida de Cha’harit, il est impossible de faire une telle annonce, puisque l’on ne doit pas s’interrompre entre la mention de la délivrance d’Israël (c’est-à-dire la fin de la bénédiction Emet véyatsiv) et le début de la ‘Amida (Beit Yossef et Choul’han ‘Aroukh 114, 1-2).

Outre cette première mention des pluies, nous récitons la prière de la pluie (Tiqoun haguéchem), dans laquelle nous demandons à Dieu d’accorder, pour l’année nouvelle, des pluies de bénédiction. On a coutume d’ouvrir l’arche sainte avant cette prière, et de la réciter avec une attention concentrée, dans des supplications. La coutume ashkénaze assimile cette prière à celle des jours redoutables : l’officiant porte un kittel [a] et chante suivant une mélodie proche de celle de Roch hachana et de Kipour.

La coutume séfarade, et d’une partie des communautés ashkénazes, est de réciter le Tiqoun haguéchem avant la ‘Amida de Moussaf. La coutume ashkénaze majoritaire est de la réciter au cours de la répétition de ladite ‘Amida, avec la mention des pluies. D’après cette dernière coutume, l’administrateur de la synagogue doit annoncer à haute voix, avant la ‘Amida de Moussaf dite à voix basse : « Machiv haroua’h oumorid haguéchem ! » (« qui fais souffler le vent et tomber la pluie ! »). En vertu de cette proclamation, et bien que l’on n’ait pas encore récité le Tiqoun haguéchem à ce moment, les fidèles devront mentionner la pluie dans la deuxième bénédiction de leur ‘Amida de Moussaf, dite à voix basse.

De prime abord, dès la ‘Amida d’Arvit, à l’issue de la fête, il y aurait lieu de demander la pluie dans la neuvième bénédiction (birkat hachanim). Mais les sages se sont souciés des pèlerins venus d’une région lointaine ; aussi ont-ils repoussé de quinze jours la demande de la pluie : à la nuit du 7 ‘hechvan. Cela, afin que le dernier pèlerin, venu de la région de l’Euphrate, eût le temps de retourner chez lui sans s’exposer à la pluie sur son chemin (Choul’han ‘Aroukh 117, 1). Et de nos jours encore, nous perpétuons cette précieuse coutume, qui nous rappelle l’époque du Temple.

Si l’on oublie de mentionner la pluie dans la ‘Amida de Moussaf, ou dans l’un des offices suivants, il n’est pas nécessaire de se reprendre, dès lors que l’on a dit Morid hatal (« Tu fais tomber la rosée »). Et si, à partir du soir du 7 ‘hechvan, on oublie de demander la pluie, on devra rattraper cette demande dans la bénédiction Choméa’ téphila, en disant les mots : « Véten tal oumatar livrakha ». Si l’on a oublié cela aussi, on reviendra au début de la neuvième bénédiction. Et si l’on a déjà terminé la ‘Amida, on devra la répéter correctement (cf. La Prière d’Israël 18, 4-5).

La Torah est comparée à l’eau : « De même que l’eau apporte la vie au monde, ainsi les paroles de Torah apportent la vie au monde » (Sifré, ‘Eqev 48). L’eau donne vie au corps, la Torah donne vie à l’âme. Aussi convient-il, lors du Tiqoun haguéchem, de porter également son intention sur l’eau spirituelle, afin que l’année nouvelle, qui commence à présent pour notre bien, soit bénie par une abondance de connaissance toranique.

Même en diaspora, où l’on marque deux jours de Yom tov, on commence à mentionner la pluie dès Chemini ‘Atséret ; et le second jour, appelé Sim’hat Torah, on achève le cycle de lecture de la Torah.


[a]. Long vêtement blanc, que l’on porte à Roch hachana et à Kipour.

05.Clôture du cycle de lecture toranique

Toutes les communautés juives ont coutume de lire, à chaque Chabbat, une paracha (section de la Torah), et de clore la lecture du Pentateuque à Chemini ‘Atséret[b]; et c’est à ce propos que ce jour-là est aussi appelé Sim’hat Torah. Pour achever la lecture de toute la Torah en une année, on lit, environ quatre Chabbats par an, deux parachot ; et les années embolismiques, où un treizième mois est ajouté, on ne lit qu’une paracha à chaque Chabbat[2].

Certes, les autres jours de Yom tov, on appelle à la Torah cinq personnes ; mais ce jour-là, on divise la paracha Vézot haberakha [c] en sept parties. Bien plus : en l’honneur de l’achèvement de la lecture toranique, il est de coutume d’appeler à la Torah tous les fidèles présents. À cette fin, on répète plusieurs fois les cinq premières montées (‘alyot), jusqu’à ce que tous les fidèles présents aient été appelés, à l’exception de quatre personnes destinées à être appelées ensuite : les deux premières pour lire les deux dernières montées, la troisième pour lire le début de Béréchit [d], première paracha de la Torah, la quatrième en tant que maftir (lecteur de la haftara).

A priori, chaque fois que l’on répète la lecture de la paracha, on la lit suivant l’ordonnancement d’usage : le premier appelé est un cohen, le second un lévi, les trois suivants des Israélites. S’il est nécessaire d’appeler des cohanim ou des léviim supplémentaires, on les fait monter également en tant que quatrième et cinquième. Si c’est possible, il est préférable, en ce cas, de les appeler suivant l’ordre d’usage : le cohen en quatrième, le lévi en cinquième (Michna Beroura 135, 37). Dans le cas où sont présents de nombreux cohanim et des léviim en petit nombre, on pourra, chaque fois que recommencera la lecture de la paracha, appeler un cohen pour la première montée, un Israélite pour la deuxième (Méchiv Davar II 48). Si tous les cohanim et léviim ont déjà été appelés, on appellera des Israélites pour les cinq parties de la paracha.

Quand les fidèles sont nombreux dans la synagogue, il est d’usage, au moment de la lecture de la Torah, de se diviser en plusieurs minyanim, afin de raccourcir le temps nécessaire pour faire monter tout le monde ; ensuite, tous les groupes se rassemblent pour les dernières montées, par lesquelles on achève la lecture de la Torah.

Ce jour-là, on a également coutume d’appeler à la Torah les petits enfants, qui ne sont pas encore parvenus à l’âge des mitsvot. La coutume courante est de faire monter séparément chaque enfant qui sait réciter les bénédictions de la Torah et lire en silence les versets de sa montée, tandis que le lecteur (le ba’al qria) les chante à voix haute. Quant aux enfants qui ne sont pas encore arrivés à cette compétence, on les fait monter avec l’un des notables de la communauté : c’est la montée dite de « tous les enfants » (kol hane’arim). C’est ce fidèle qui récitera les bénédictions, lentement et à haute voix, tandis que les petits répéteront après lui, mot par mot. Cette montée est l’avant-dernière, et commence par le mot me’ona (« Refuge »). Aussi nomme-t-on le fidèle qui y est appelé le ‘hatan Me’ona.

Par l’appel de tous les fidèles au séfer-Torah, nous montrons que chaque Juif a part à la Torah, du plus âgé au plus jeune, de l’érudit à l’homme simple.


[b]. En diaspora, le second jour de fête (cf. fin du § précédent).

[2]. À l’époque talmudique, il existait deux coutumes, quant à l’ordre de lecture de la Torah : en terre d’Israël, on terminait toute la lecture du Pentateuque en trois ans, tandis qu’en Babylonie, on achevait le cycle en un an. Au cours du temps, la coutume se répandit de clore chaque année la lecture de la Torah, si bien que, à l’époque des Richonim, toutes les communautés juives avaient adopté l’usage d’achever cette lecture, chaque année, à Chemini ‘atséret (Maïmonide, Téphila 13, 1).

[c]. Dt 33, 1 – 34, 12.

[d]. Récit de la Création (Gn 1, 1 – 2, 3).

06.Les ‘hatanim de la Torah

On distingue quatre montées (‘alyot) particulièrement importantes, à Sim’hat Torah ; et la plus importante de toutes est celle par laquelle on achève la lecture du Pentateuque. Celui qui monte à ce moment est nommé ‘hatan Torah (litt. « fiancé de la Torah »).

La montée qui la précède est, elle aussi, importante, parce que celui qui y est appelé récite la bénédiction en compagnie de tous les enfants ; on l’appelle, comme nous le disions au précédent paragraphe, le ‘hatan Me’ona, du nom du premier mot de ce fragment. On nomme cette montée « montée de tous les enfants » (‘aliat kol hane’arim).

Tout de suite après la clôture de la Torah, on apporte un autre rouleau, et l’on fait monter un appelé supplémentaire pour y lire le début de la Genèse. C’est un grand mérite que d’accéder à une telle portion, et l’on appelle cet appelé le ‘hatan Béréchit (litt. « fiancé de la Genèse »). Cette montée exprime l’attachement à la Torah : lors même que l’on a achevé de lire celle-ci, nous ne nous séparons pas d’elle, fût-ce une heure, mais nous reprenons sa lecture au commencement (Michna Beroura 668, 10).

Après la montée du ‘hatan Béréchit, on apporte un troisième rouleau, et l’on appelle le maftir. On y lit le passage de la paracha Pin’has relatif aux sacrifices de la fête (Choul’han ‘Aroukh 668, 2).

On a coutume de lire, comme haftara, le début du livre de Josué, parce que tout le but vers lequel tend la Torah est de voir accomplis ses commandements sur la terre d’Israël. Aussi, après l’achèvement de la lecture du Pentateuque, il convient de commencer celle de Josué, livre « dans lequel réside la valeur de la terre d’Israël » (cf. Nédarim 22b). Une autre raison à cela est qu’on y lit les importants versets portant sur la valeur de la Torah : « Seulement, sois très fort et courageux, pour accomplir fidèlement toute la Torah que t’a ordonnée Moïse mon serviteur. Ne t’écarte d’elle ni à droite ni à gauche, afin que tu réussisses en toutes tes voies. Ce livre de la Torah ne quittera pas ta bouche, et tu le méditeras jour et nuit » (Jos 1, 7-8). De plus, il convient, tout de suite après la clôture du Pentateuque, de commencer l’étude des Prophètes.

En de nombreux endroits, on a coutume de vendre ces quatre alyot importantes à ceux qui contribuent par leurs nombreux dons à la synagogue et aux étudiants de Torah. Dans certaines communautés, la coutume est d’honorer de ces montées honorifiques des érudits de la Torah ou des dirigeants communautaires. Quand la chose risque de provoquer des controverses, parce qu’il est difficile de décider qui il convient d’honorer davantage, il est préférable de « vendre » ces alyot à ceux qui sont prêts à offrir, pour elles, la somme la plus élevée. Il est bon que l’acheteur soit également un érudit, ou l’un des notables de l’assemblée (Knesset Haguedola, Bikouré Ya’aqov 669, 3). En certains lieux, les personnes fortunées qui achètent les montées honorent les érudits en leur offrant la leur ; et leur mérite est grand, car d’un même geste ils font un important don à la synagogue et honorent la Torah.

Dans certaines communautés, il est d’usage que tous les appelés qui le peuvent prennent sur eux, au moment de leur montée à Sim’hat Torah, de faire un don pour le Talmud-Torah et pour l’entretien de la synagogue (Michna Beroura 669, 7).

Celui qui a déjà été appelé à la Torah au même titre que les autres fidèles, et que les administrateurs veulent honorer en lui confiant une des alyot « de clôture » – celle du ‘hatan Torah, du ‘hatan Me’ona, du ‘hatan Béréchit ou du maftir –, est autorisé à monter de nouveau au séfer-Torah, et il n’y a pas à cela de crainte de bénédiction vaine. Mais celui qui est monté en tant que ‘hatan Torah ne montera pas tout de suite après en tant que ‘hatan Béréchit : il y aurait à cela une atteinte à l’honneur du premier rouleau de la Torah, car on paraîtrait être contraint de monter au second au motif que le premier était invalide (Elya Rabba, Peri Mégadim, Bikouré Ya’aqov 669, 4, Michna Beroura 2). Il est permis d’appeler un cohen ou un lévi comme ‘hatan Torah ou ‘hatan Béréchit (Maharil, Bikouré Ya’aqov 669, 4).

La coutume ashkénaze est d’appeler, le soir de Sim’hat Torah, après les danses (haqafot), trois fidèles au séfer-Torah. Ce qui est lu est la paracha Vézot haberakha, et les appelés récitent les bénédictions relatives à cette lecture (Michna Beroura 669, 15).

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