Pniné Halakha

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04 – Juxtaposition de la bénédiction de la Délivrance et de la ‘Amida

La partie essentielle de la libération s’est produite de jour, car c’est alors que les enfants d’Israël sont sortis d’Egypte. Aussi, l’obligation d’enchaîner la mention de la Délivrance – qui se trouve dans la bénédiction Emetgaal Israël (« qui délivras Israël ») – à la ‘Amida, s’applique-t-elle essentiellement le matin. Néanmoins, puisque la Délivrance a commencé dès la nuit, c’est également une mitsva que d’enchaîner la mention de la Délivrance à la ‘Amida durant la nuit. Simplement, en cette matière, on n’est pas pointilleux le soir comme on l’est le matin. C’est ainsi que les sages ont pu instituer la bénédiction Hachkivénou après celle de la Délivrance, considérant que celle-ci se prolongeait en celle-là. En effet, dans la bénédiction de la Délivrance, nous bénissons Dieu pour la libération de l’ensemble du peuple, tandis que dans Hachkivénou, nous demandons la libération de l’individu face aux dangers de la nuit. Mais si l’on s’était montré strict dans l’enchaînement de la mention de la Délivrance et de la ‘Amida, il n’eût pas été possible d’insérer la bénédiction Hachkivénou après la mention de la Délivrance.

De même, on récite le Qaddich abrégé entre les bénédictions du Chéma et la ‘Amida. En effet, l’ordonnancement de la prière, tel qu’il est fixé par les sages, veut qu’à chaque changement de section à l’intérieur de l’office on dise le Qaddich. Et ce n’est qu’en raison de la stricte exigence de ne pas s’interrompre entre la Délivrance et la ‘Amida que l’on ne dit pas de Qaddich avant la ‘Amida du matin. En revanche, à Arvit, où il n’est pas nécessaire d’être si exigeant dans la juxtaposition de la Délivrance et de la ‘Amida, on récite le Qaddich entre les bénédictions du Chéma et la ‘Amida.

Dans le même ordre d’idées, il est d’usage dans de nombreux endroits que, le soir de la néoménie (Roch ‘hodech), l’administrateur de la synagogue énonce avant la ‘Amida les mots « Yaalé véyavo », afin de rappeler aux fidèles d’inclure le passage additionnel commençant par ces mots. Même chose les soirs où l’on passe de la prière pour la pluie à celle pour la rosée et vice-versa. Certes, à Cha’harit, on ne s’interrompt pas par la parole, et c’est en tapant sur le pupitre que l’officiant ou l’administrateur rappelle au public qu’il y a un ajout ou un changement apporté au texte de la ‘Amida. Mais à ‘Arvit, on est indulgent, et l’on permet de faire ce rappel par la parole (Choul’han ‘Aroukh 236, 2 ; Michna Beroura 7). Certains ont soin, même à Arvit, de taper sur le pupitre afin de ne pas s’interrompre par des paroles (cf. Kaf Ha’haïm 236, 17, Pisqé Techouva 236, 6).

Si l’on est en retard à l’office d’Arvit et que l’on trouve l’assemblée sur le point de dire la ‘Amida, on se joindra aux autres fidèles pour réciter la ‘Amida au sein du minyan, après quoi l’on rattrapera le Chéma et ses bénédictions. Et bien qu’à Cha’harit la règle veuille que l’on prie dans l’ordre du rituel, du fait que l’enchaînement de la Délivrance et de la ‘Amida de Cha’harit a priorité sur le fait de dire la ‘Amida en minyan, la priorité est inversée à Arvit : prier en minyan est plus important ; aussi récite-t-on la ‘Amida avec l’assemblée, et rattrape-t-on le Chéma et ses bénédictions seulement après (Choul’han ‘Aroukh 236, 3)[2].


[2]. Le Kaf Ha’haïm 111, 12 écrit que, selon la Kabbale, il est interdit d’inverser l’ordre, même à l’office d’Arvit. Quoi qu’il en soit, le Michna Beroura lui-même tranche conformément au Choul’han ‘Aroukh ; c’est aussi en ce sens que se prononce le Yalqout Yossef III p. 661; et telle est l’opinion du Gaon Rabbi ‘Haïm Falagi.

Une coutume ancienne voulait que l’on récitât, entre Hachkivénou et le Qaddich, une bénédiction commençant par les mots Yirou ‘einénou (« Que nos yeux voient, que notre cœur se réjouisse et que notre âme exulte en ton secours, ô notre Roi, en vérité, quand on dira à Sion : “Ton Dieu règne”… »), bénédiction comprenant dix-huit versets. Cf. Michna Beroura 236, 5, qui explique que ce texte a été institué pour venir en lieu et place de la ‘Amida [pour ceux qui n’avaient pas le temps de prier ; les dix-huit versets viennent en remplacement des dix-huit bénédictions]. Certains Richonim pensent que l’on ne disposait pas de l’autorité nécessaire pour instituer cette bénédiction après la clôture du Talmud, et qu’il n’y a donc pas lieu de la dire (Méïri). Mais nombreux sont ceux qui ont pris l’usage de la réciter. Selon les élèves de Rabbénou Yona, on avait coutume de la dire à la place de la ‘Amida d’Arvit, laquelle est facultative dans son fondement ; et même après que le peuple eut pris sur lui l’obligation de réciter cette ‘Amida, la coutume consistant à dire Yirou ‘einénou n’a pas été annulée. Certains voient dans cette récitation une preuve de ce qu’il n’est pas obligatoire, à l’office d’Arvit, de juxtaposer Délivrance et prière. C’est l’opinion de Rav Amram Gaon et, selon lui, c’est pour cette même raison que l’on récite le Qaddich après les bénédictions du Chéma : parce que cette juxtaposition n’est pas obligatoire à Arvit. Na’hmanide et le Rachbam ne disaient pas Yirou ‘einénou, ni le Qaddich, afin de ne pas marquer d’interruption entre Délivrance et prière.

En pratique, dès la fin de la période des Richonim, on n’avait plus l’usage de réciter ce texte dans les communautés séfarades, tandis que certaines communautés ashkénazes continuaient de le dire. De nos jours, en Israël, on n’a pas l’usage de le dire (cf. Kaf Ha’haïm 236, 12, Pisqé Techouva 7). En revanche, tout le monde a l’usage de réciter le Qaddich. Et bien que de nombreux Richonim pensent qu’il n’y a pas lieu de le réciter, afin de ne pas s’interrompre entre Délivrance et prière, tout le monde, en pratique, a coutume de réciter ce Qaddich. Une explication possible à cela est celle que j’ai indiquée dans le corps de l’ouvrage. Selon le ‘Aroukh Hachoul’han 236, 8, le Qaddich relève, lui aussi, de la notion de Délivrance, puisque nous y demandons que l’honneur du Ciel se dévoile dans le monde ; aussi ne constitue-t-il pas vraiment une interruption. Cf. Bérour Halakha, Berakhot 4b.

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