Pniné Halakha

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03. Contenu des bénédictions de la Torah et leur lien avec les femmes

Les bénédictions de la Torah comportent trois parties. Dans la première, nous bénissons Dieu de nous avoir sanctifiés par ses commandements et de nous avoir ordonné de nous livrer à l’étude de la Torah. Dans la deuxième, nous demandons à Dieu que la Torah qu’Il enseigne à son peuple Israël soit agréable à notre bouche, que nous méritions de l’étudier avec plaisir, et que nous méritions, nous et nos descendants, de connaître la Torah[2]. Dans la troisième partie, nous bénissons Dieu et Lui exprimons notre reconnaissance pour nous avoir choisis parmi tous les peuples et nous avoir donné Sa Torah. Nos sages disent (Berakhot 11b) qu’il s’agit de la partie la plus importante des bénédictions de la Torah, dans la mesure où elle mentionne l’élection d’Israël : Dieu nous a « choisis parmi tous les peuples », et en vertu de cela « nous a donné Sa Torah ». Telle est la nature de l’âme d’Israël que d’être liée et attachée à Dieu et à Sa Torah ; aussi, seul le peuple d’Israël peut-il recevoir la Torah et éclairer le monde à sa lumière.  Parmi les nations du monde, il peut se trouver des non-Juifs justes et pieux ; mais il s’agit de la piété particulière d’individus, qui ne peuvent réparer le monde dans son ensemble. Seul le peuple d’Israël peut servir Dieu dans un cadre national et œuvrer à la réparation du monde par les chemins de la vérité et de la bonté, comme en témoigne notre longue histoire.

Les deuxième et troisième parties incombent évidemment aux femmes autant qu’aux hommes. Dans la troisième partie, nous louons l’Eternel et Lui exprimons notre reconnaissance pour ce qu’il nous a choisis d’entre tous les peuples et nous a donné Sa Torah : à cet égard, comme nous l’avons vu (§ 1), les femmes et les hommes ont même rang. La deuxième partie, également, concerne les femmes, car elles aussi prient pour que la Torah soit agréable à nos bouches et à celles de nos descendants. Cependant, en ce qui concerne la première partie, la question s’est posée de savoir comment les femmes pourraient réciter les mots : « qui nous as sanctifiés par Tes commandements et nous as ordonné de nous adonner à l’étude des paroles de la Torah ». En effet, les femmes ne sont-elles pas dispensées de la mitsva d’étudier la Torah ? À cette question, certains répondent que les femmes peuvent prononcer des bénédictions sur des mitsvot dont elles sont dispensées ; en effet, la formulation de celles-ci n’est pas « qui m’as sanctifiée », mais bien « qui nous as sanctifiés » : nous, c’est-à-dire la collectivité d’Israël, si bien que les femmes peuvent réciter les bénédictions, y compris de la Torah (Rabbénou Tam, Ran, Rama). D’autres disent qu’en principe il est interdit aux femmes de réciter les bénédictions relatives aux mitsvot dont elles sont dispensées (Maïmonide, Or Zaroua’, Choul’han ‘Aroukh), mais qu’elles doivent néanmoins réciter les bénédictions de la Torah car, comme nous l’avons vu, les femmes elles-mêmes doivent étudier les règles pratiques et les principes de la foi, de sorte qu’elles ont bien lieu de dire : « qui nous as sanctifiés par Tes commandements »[3].


[2]. Les Richonim comme les A’haronim sont partagés sur la question du nombre des Birkot ha-Torah. Selon Rabbénou Tam, le Roch et d’autres, il y a deux bénédictions, car la deuxième partie ci-dessus mentionnée n’est que la continuation de la première. Aussi faut-il, selon eux, introduire cette deuxième partie par la conjonction de coordination (ו) : vé-ha’arevet rends agréable… »). Dès lors, il est clair qu’il n’y a pas lieu de répondre amen après avoir entendu son prochain terminer la première partie de ces bénédictions. Pour Maïmonide et d’autres auteurs, en revanche, on compte trois bénédictions ; la première partie constitue une bénédiction à elle seule, à laquelle un tiers répond amen, et qui est suivie de ha’arev (« rends agréable »). Le Choul’han ‘Aroukh, Ora’h ‘Haïm 47, 6 écrit qu’il vaut mieux introduire la deuxième partie par (vé-ha’arev) afin d’être quitte aux yeux de tous les décisionnaires. Le Michna Beroura 12 rapporte que, de l’avis de la majorité des A’haronim, on ne répond pas amen après la fin de la première partie ; aussi est-il recommandé de dire cette première partie à voix basse, afin de sortir du doute. Toutefois, le Ben Ich ‘Haï et le Kaf Ha’haïm 47, 10-13 écrivent, au nom de Rabbi Isaac Louria, que l’on répond amen à la suite de la première partie, car les deux premières parties constituent des bénédictions distinctes, et que, malgré cela, on dit vé-ha’arevet non ha’arev.

[3]. Selon le Choul’han ‘Aroukh (47, 14), « les femmes récitent les bénédictions de la Torah ». Le Beit Yossef mentionne les propos du Agour et du Maharil (Nouvelles Responsa 45), selon lesquels, s’il est vrai que les femmes n’ont pas l’obligation d’étudier la Torah, et que Rabbi Eliézer affirme qu’enseigner la Torah à sa fille est comparable au fait de lui livrer un vain enseignement (Sota 20a), cela n’est dit qu’à l’égard de la Torah orale, et non de la Torah écrite. De plus, poursuit-il, les femmes elles-mêmes lisent les paragraphes relatifs aux sacrifices, et il est donc nécessaire de réciter au préalable les Birkot ha-Torah. Par ailleurs, elles doivent apprendre les lois qui leur incombent, comme l’a écrit le Smaq. De ces différentes raisons, on peut inférer qu’une femme peut acquitter des hommes par sa propre récitation des bénédictions de la Torah.

Le Gaon de Vilna explique (dans son commentaire du Choul’han ‘Aroukh, fin du chap. 47), que les femmes récitent les Birkot ha-Torah au même titre que les autres bénédictions portant sur des mitsvot conditionnées par le temps. Car de l’avis de Rabbénou Tam, du Ran et du Rama (Ora’h ‘Haïm 589, 6), les femmes sont autorisées à réciter de semblables bénédictions. C’est encore ce qu’écrivent de nombreux A’haronim. Si l’on s’en tient à ce motif, une femme ne peut acquitter des hommes de leur obligation par sa propre bénédiction.

Toutefois, un tel motif soulève une objection : comment le Choul’han ‘Aroukh peut-il conclure que les femmes récitent les bénédictions de la Torah, alors qu’il tranche par ailleurs (Ora’h ‘Haïm 17, 2 et 589, 6) conformément à l’avis de Maïmonide, pour qui les femmes ne sont pas autorisées à réciter les bénédictions relatives aux mitsvot auxquelles elles ne sont pas tenues ? En ce sens, l’auteur des responsa ‘Haqré Lev (Ora’h ‘Haïm 10) estime que les femmes ne doivent pas réciter la formule « qui nous as sanctifiés par Tes commandements et nous as ordonné de nous livrer à l’étude des paroles de la Torah » ; en revanche, ses propos laissent entendre qu’elles sont autorisées à réciter la troisième partie, « qui nous as choisis », puisqu’il s’agit d’une bénédiction de louange.

Le ‘Hida (responsa Yossef Omets 67), quant à lui, explique que, si le Choul’han ‘Aroukh décide que les femmes prononcent les Birkot ha-Torah, c’est en vertu d’une coutume ancienne ; et l’on est obligé d’expliquer, dit-il, que cette coutume a pour raison d’être le fait que les femmes sont tenues d’étudier les lois qui leur sont applicables afin de savoir les observer (le Séfer ‘Hassidim 313 se prononce dans le même sens). Et bien que cette obligation ne trouve pas son fondement dans la mitsva d’étude de la Torah proprement dite [– selon cette opinion, l’obligation des femmes est dérivée de la nécessité de pratiquer les mitsvot, et ne relève pas de la mitsva toranique d’étude de la Torah –], elles peuvent néanmoins prononcer les bénédictions de la Torah, puisque en pratique elles sont bien obligées d’étudier.

On explique, au nom de Rabbi ‘Haïm de Brisk, que les bénédictions de la Torah ne sont pas seulement des bénédictions afférentes à une mitsva, mais qu’il existe une loi (din) particulière obligeant à bénir Dieu avant de se livrer à l’étude de la Torah ; or, puisque les femmes doivent se livrer à l’étude de la Torah afin de connaître les règles à elles applicables, elles sont tenues de dire ces bénédictions. Le Ora’h Michpat (11) se prononce de manière voisine. Cf. encore Halikhot Beitah 3, 1-2 et Yalqout Yossef 47, 18, qui résument la question ; pour d’autres sources, cf. également Iché Israël 7, notes 31-32.

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