Pniné Halakha

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05. Si ces bénédictions sont une obligation de la Torah ; règle de la bénédiction Ahavat ‘olam

Rabbi Yehouda a dit au nom de Rav : « D’où savons-nous que la bénédiction préalable à l’étude de la Torah trouve sa source dans la Torah ? En ce qu’il est dit (Dt 32, 3) : “Quand j’invoque le nom de l’Eternel, glorifiez notre Dieuˮ » (Berakhot 21a).

Ce passage talmudique s’explique de la façon suivante : toute la Torah consiste en noms du Saint béni soit-Il (Zohar II 87, 1 ; Tiqouné Zohar, Tiqoun 10) ; en effet, Lui-même reste totalement soustrait à notre connaissance, et c’est par le biais de la Torah que le Saint béni soit-Il se révèle au monde. La Torah est donc constituée de noms du Saint béni soit-Il, car c’est par elle qu’Il se révèle au monde[c]. C’est à ce propos qu’il est dit : « Lorsque j’invoque le nom de l’Eternel » – avant d’étudier la Torah – « glorifiez notre Dieu » – prononcez une bénédiction en l’honneur de Celui qui donne la Torah[d].

En pratique, les Richonim sont partagés sur le sens de ce midrach. Selon la majorité des Richonim, parmi lesquels Na’hmanide et le Rachba, ce passage doit être compris littéralement : la mitsva de dire les bénédictions de la Torah trouve sa source dans la Torah écrite[e]. Aussi, dans un cas d’incertitude – quand on ne sait plus si l’on a dit ou non les bénédictions de la Torah –, on doit être rigoureux et les réciter, conformément au principe sfeqa de-oraïtha lé’houmra (« en cas de doute sur une règle de rang toranique, on doit être rigoureux »). Tel est l’usage ashkénaze (Michna Beroura 47, 1 ; cf. La Prière d’Israël 10 § 3). Mais selon Maïmonide et le Choul’han ‘Aroukh (Ora’h ‘Haïm 209, 3), il s’agit d’une obligation rabbinique, et l’interprétation midrachique du verset cité n’est qu’un appui textuel apporté à la règle[f]. D’après cela, en cas de doute, il faut être indulgent et ne pas dire la bénédiction. Tel est l’usage séfarade (Kaf Ha’haïm 47, 2).

Toutefois, quand c’est une femme qui ne sait plus si elle a récité ou non les bénédictions de la Torah, tous les avis s’accordent à dire qu’elle ne devra pas les répéter. Si elle veut néanmoins sortir du doute, elle récitera la bénédiction Ahavat ‘olam (appelée Ahava rabba dans le rituel ashkénaze, c’est la bénédiction qui précède le Chéma Israël). Elle aura alors soin de réciter, à la suite de cette bénédiction, le Chéma lui-même, afin « d’étudier » quelque passage à la suite de ce qui lui tiendra lieu de bénédiction de la Torah[4].

Si, a posteriori, le fait d’avoir récité la bénédiction Ahavat ‘olam est de nature à rendre quitte des bénédictions de la Torah, c’est parce qu’Ahavat ‘olam inclut tout le contenu thématique des bénédictions de la Torah (Choul’han ‘Aroukh 47, 7). Certes, dans la formule finale d’Ahavat ‘olam on ne mentionne point la Torah, mais seulement l’élection d’Israël : « Béni sois-Tu… qui choisis Ton peuple Israël par amour » ; toutefois, la mention d’Israël est considérée comme équivalente à la mention de la Torah, car le thème de la Torah et celui d’Israël sont enchâssés l’un dans l’autre[g]. Dans le même ordre d’idées, nous avons vu que, parmi les bénédictions de la Torah, la plus importante était la dernière, « qui nous as choisis d’entre tous les peuples et nous as donné Ta Torah », ce qui illustre bien l’idée qu’Israël et la Torah sont indissociables.


[c]. C’est par son nom que l’on se manifeste. La notion de nom signifie ici le mode de manifestation, dans le monde, de ce qui est caché. De ce point de vue, les noms divins constituent un voile de Dieu, puisque Son essence est inconnaissable ; mais dans le même temps, ils sont une médiation entre Lui et l’homme, et manifestent Sa présence dans le monde.

[d]. Le verbe eqra (j’invoquerai, j’appellerai) a pour racine les lettres קרא, et peut également se comprendre : je lirai. Dans cette perspective midrachique, le verset se lit : « Quand je m’apprête à lire la Torah constituée de noms divins, je dois d’abord bénir notre Dieu pour le don de cette Torah. »

[e]. Sur les différentes catégories de normes, voir chap. 1, note c.

[f]. Asmakhta: appui, référence. Illustration scripturaire apportée à une règle rabbinique. L’asmakhta peut avoir un aspect mnémotechnique, mais plus profondément, elle a pour but de révéler le fondement toranique de la norme produite par les sages – tout autonome qu’elle est – fondement dernier, enfoui dans les mots du verset.

[4]. Selon le Birké Yossef 47, 8, de l’avis même de ceux qui estiment que les bénédictions de la Torah sont un commandement toranique, les femmes n’y sont obligées que d’un point de vue rabbinique. Aussi, de l’avis de tous, il n’y a pas lieu de les réciter en cas de doute. Toutefois, selon le Béour Halakha 47, 14 fondé sur une explication du Maguen Avraham, une femme peut acquitter un homme de son obligation, alors que, à l’égard de l’homme, cette obligation est de rang toranique, ce qui laisse bien entendre que l’obligation de la femme est, elle-même, de rang toranique. Cf. Halikhot Beitah 3, 3. Quoi qu’il en soit, par la récitation d’Ahavat ‘olam, la femme sortira du doute, de l’avis de tous. Plus haut, au chapitre 6, note 4, nous avons vu que la lecture du Chéma est, de façon certaine, considérée à l’égard des femmes comme une étude, bien que, à l’égard des hommes, cela ne soit pas certain.

[g]. Quant au contenu même de cette bénédiction, il fait largement référence à la Torah, comme dans ce passage : « Donne à notre cœur l’intelligence de comprendre, d’intégrer, d’entendre, d’apprendre et d’enseigner, de garder, d’accomplir et d’observer toutes les paroles de l’enseignement de Ta Torah, avec amour. Eclaire nos yeux par ta Torah, attache notre cœur à tes commandements, unifie nos cœurs dans l’amour et la crainte de Ton nom. »

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