La coutume de la majorité des communautés juives est de fixer le festin de Pourim l’après-midi, après l’office de Min’ha. En effet, jusqu’à midi, on s’occupe d’adresser des mets à son prochain et de faire des dons aux pauvres, et l’on a à cœur d’exprimer avec soin son amour et son affection envers les membres de sa famille et ses amis. En milieu de journée, il est juste de faire l’office de Min’ha assez tôt, avant le repas, car, si l’on commençait le repas avant de faire Min’ha, il serait à craindre de ne pas pouvoir prier ensuite, en raison de l’ivresse.
Certains retardent de beaucoup le repas, qu’ils commencent peu de temps avant le coucher du soleil, de sorte que la majorité du repas a lieu la nuit. De nombreux auteurs critiquent cet usage, car la mitsva consiste à prendre un repas festif à Pourim même, alors que, après la tombée de la nuit, commence le jour suivant. Certains répondent à cela que tout va d’après le commencement : dès lors que l’on a commencé le repas à Pourim, la suite, qui se déroule pendant la nuit, est, elle aussi, considérée comme festin de Pourim. La règle est la même s’agissant du Birkat hamazon : si l’on a commencé le repas dans la journée, et qu’on l’ait achevé tard dans la nuit, on dit ‘Al hanissim dans le Birkat hamazon. De plus, à l’issue du Pourim des villes ouvertes, ayant eu lieu le 14 adar, il convient encore de se réjouir, car alors commence le Pourim des villes fortifiées. Quoi qu’il en soit, a priori, il est juste de débuter le repas tant qu’il fait encore grand jour ; et, si le repas se poursuit après la tombée de la nuit, on n’aura rien perdu, puisque la partie principale du repas aura eu lieu le jour.
D’autres disent qu’il est préférable de se montrer zélé, et d’accomplir le festin dès le matin, de manière que ceux-là même qui seront ivres pourront se dessoûler avant Min’ha. Mais la coutume la plus fréquente est de fixer le festin l’après-midi[16].
Il est bon d’étudier un peu la Torah avant de commencer le festin, comme il est dit : « Pour les Juifs, ce fut lumière et joie » (Est 8, 16), ce que les sages commentent, sur le mode midrachique : « La lumière (ora) est la Torah » (Méguila 16b) ; par l’étude de la Torah, on peut parvenir à une joie complète (Rama 695, 2).
Si l’on sait que, en s’enivrant, il est possible que l’on ne puisse faire ensuite la prière de Min’ha, ou celle d’Arvit, nombre de décisionnaires estiment que l’on ne devra pas s’enivrer (‘Hayé Adam, Béour Halakha). Toutefois, le Rav Kook – que la mémoire du juste soit bénie –, écrit que celui qui boit à Pourim se livre à la pratique d’une mitsva, or nous avons pour principe que celui qui s’occupe d’une mitsva est dispensé d’en accomplir une autre (Ora’h Michpat, Hachmatot 7).
Certains ont coutume de commencer le repas peu de temps avant le soir ; même parmi les A’haronim, certains ont cet usage. Si la nuit qui approche est celle du 15 adar, c’est de toute façon une mitsva que de se réjouir durant les deux jours de Pourim (Rama 695, 2, Michna Beroura 16). Mais certains, même à Jérusalem, ont l’usage de poursuivre leur repas à l’issue de Pourim. La logique de la chose est que tout est fonction du commencement. De plus, selon le Ran, il n’y a pas d’interdit de vélo ya’avor [cf. ci-après, chap. 17, note c] au sujet des mitsvot « positives » de Pourim, à l’exception de la lecture de la Méguila ; aussi, les années de Pourim haméchoulach (cf. chap. 17 § 5), on fixe [à Jérusalem] le festin au dimanche, qui tombe le 16. Par conséquent, on peut, les autres années, à l’issue du 15, prolonger la mitsva du festin pendant la nuit du 16. Cf. Pisqé Techouvot 695, 8, note 25.