Quand celui qui se confesse détaille son péché, il accomplit la mitsva à un plus haut degré d’élévation ; car grâce à cela, il éprouve davantage de regret, et se renforce dans son repentir. Telle est l’opinion de Rabbi Yehouda ben Baba, qui se fonde sur la confession prononcée par Moïse notre maître après la faute du veau d’or, comme il est dit : « Moïse revint vers l’Éternel et dit : “De grâce ! ce peuple a commis une grande faute, ils se sont fait un dieu d’or” » (Ex 32, 31). D’un autre côté, citer le détail de sa faute porte atteinte, dans une certaine mesure, à l’honneur dû au Ciel, car la téchouva tend à amoindrir l’importance de la faute, tandis que le fait d’en parler lui donne de l’importance. De plus, la honte que l’on éprouve d’avoir fauté fait partie des principes de la téchouva, comme l’enseignent nos sages : « Quiconque commet une faute et en éprouve de la honte, on lui pardonne toutes ses fautes » (Berakhot 12b) ; or celui qui cite sa faute en détail risque de paraître n’en avoir pas honte. Telle est l’opinion de Rabbi Aqiba, selon qui celui qui se confesse n’a pas besoin de mentionner le détail de sa faute, comme il est dit : « Heureux celui dont le péché est remis, la faute recouverte » (Ps 32, 1).
En pratique, on peut se rendre quitte du Vidouï en disant simplement ‘Hatati, ‘aviti, pacha’ti (« J’ai failli, j’ai fauté, j’ai péché »), sans mentionner en quoi ont consisté ses fautes. À plus forte raison peut-on accomplir son obligation en récitant le texte du Vidouï que nous disons dans le cadre de l’office : Achamnou, bagadnou, etc. (« Nous nous sommes rendu coupables, nous avons trahi… »). Celui qui sait que la mention explicite de sa faute aura pour effet d’approfondir sa téchouva, fera bien de la mentionner à voix basse. Par exemple, si la faute a consisté à manger de la nourriture tarèfe (non cachère), on dire : « J’ai mangé du tarèfe » (Choul’han ‘Aroukh 607, 2 ; Gaon de Vilna ad loc. ; Cha’ar Hatsioun 3)[4].
Dans le même ordre d’idées, au traité Yoma 86b, les sages discutent le point que voici : certains disent qu’il ne convient pas de se confesser à nouveau de fautes que l’on avait déjà confessées au précédent jour de Kipour ; à celui qui se confesse d’elles à nouveau, s’applique le verset : « Comme le chien revient à sa vomissure, ainsi le sot répète sa folie » (Pr 26, 11). Mais selon Rabbi Eliézer ben Yaaqov, « à plus forte raison est-ce digne d’éloge, parce qu’il est dit : “Car je reconnais mes péchés, et ma faute est face à moi toujours” » (Ps 51, 5). C’est en ce sens qu’est tranchée la halakha : il est permis de se confesser à nouveau devant Dieu pour des transgressions que l’on a déjà confessées au précédent jour de Kipour (Choul’han ‘Aroukh 607, 4).
On peut dire que, tant que l’homme ressent que sa téchouva n’est pas complète, et qu’il n’a pas encore réussi à effacer entièrement sa faute de son cœur, il est préférable de la confesser à nouveau. Mais si l’on sent que sa téchouva est entière, et que la faute est effacée de son cœur, il ne convient pas d’y revenir, car, ce faisant, on manifesterait que l’on n’a pas foi dans la force de la téchouva.
Il arrive qu’une personne ait le mérite d’accomplir une entière téchouva, de sorte que sa faute est effacée de son cœur ; mais que, plusieurs années après, elle se la rappelle subitement, et s’en afflige. La raison en est que, par le passé, lorsqu’on se trouvait à son précédent niveau spirituel, la téchouva accomplie suffisait à ce qu’aucune trace de la faute passée ne fût reconnaissable ; tandis qu’à présent, alors que l’on a accédé à un plus haut niveau, où la lumière est plus forte et abondante, la téchouva précédente ne suffit plus à nettoyer la personne de toute empreinte de la faute. Aussi faut-il se confesser à nouveau, afin d’effacer la légère empreinte qui demeure encore de sa faute (Tsidqat Hatsadiq 134, 67).
De prime abord, il y a lieu de demander : comment pouvons-nous adopter le point de vue du Choul’han ‘Aroukh, selon lequel il n’est pas nécessaire de mentionner explicitement sa faute, alors que plusieurs Richonim estiment cela nécessaire ? Il y a lieu de répondre que, dans la mesure où tout le monde récite une version détaillée du Vidouï (Achamnou, bagadnou…), on se rend ainsi quitte d’après les deux opinions. D’un côté, ce texte détaille abondamment les diverses catégories de fautes, ce par quoi on s’acquitte de la mitsva du Vidouï aux yeux de Rabbi Yéhouda ben Baba (Tossephot Yechanim, Yoma 76b) ; de l’autre, puisque c’est le texte que récite tout le peuple juif, celui qui le récite est considéré comme un dont la faute est recouverte [selon l’expression de Ps 32, 1] et qui a honte de son péché (Darké Moché et Rama 607, 2). Aussi écrivons-nous dans le corps de texte qu’il n’est pas nécessaire de détailler ses fautes personnelles, mais que, si cela présente une utilité pour sa téchouva, il sera bon d’en citer le détail de façon individuelle. Cf. Har’havot.