En toute matière ayant trait à la Torah, la nuit précède le jour ; aussi, le jour de Kipour commence au début de la nuit et se termine à la fin de la journée. Simplement, un doute se présente quant au moment précis où s’achève le jour et où commence la nuit. Est-ce au moment où le soleil se couche et disparaît de notre vue, ou bien au moment où il fait sombre, et où trois étoiles de taille moyenne s’aperçoivent dans le ciel ?
En Israël, il y a un délai d’environ vingt minutes entre le coucher du soleil (cheqi’at ha’hama) et l’apparition des étoiles (tset hakokhavim) ; ce délai diminue quelque peu ou s’allonge selon les saisons et l’altitude locale par rapport à la mer. Le temps qui sépare le coucher du soleil de l’apparition des étoiles s’appelle bein hachmachot (crépuscule, litt. « entre les soleils »). Puisque les mitsvot que sont le Chabbat et les fêtes sont de rang toranique, il faut être rigoureux pendant toute cette période crépusculaire, conformément au principe bien connu : « En cas de doute portant sur une norme toranique, on est rigoureux. » Par conséquent, pour tous les Chabbats et fêtes, on considère que l’entrée du jour a lieu au coucher du soleil, et que l’issue du jour a lieu lors de la tombée de la nuit (l’apparition des étoiles).
En plus de cela, c’est une mitsva que d’ajouter une part de temps profane au temps saint, c’est-à-dire de recevoir la sainteté du jour un peu avant qu’il ne commence de lui-même, et de s’en séparer un peu après qu’il ne s’achève de lui-même. Et puisque, si l’on s’en tient à la stricte règle, le jour commence au coucher du soleil, c’est une mitsva que d’en prendre sur soi la sainteté quelques minutes avant le coucher du soleil. De même, puisque, à s’en tenir à la stricte règle, le jour s’achève quand apparaissent les étoiles, la mitsva consistera à s’en séparer quelques minutes après l’apparition des étoiles – la coutume étant d’attendre environ dix minutes après l’apparition des étoiles (Choul’han ‘Aroukh 608, 1 ; Pniné Halakha – Les Lois de Chabbat I 3, 1-2). Par l’ajout (tosséfet) apporté au jour saint, nous manifestons que ce jour nous est très cher et très précieux, et que, pour cette raison, nous nous efforçons de le recevoir avant l’heure, et d’en prolonger la sainteté après l’heure. De plus, en prélevant une part de temps profane pour l’ajouter au temps saint, nous montrons qu’il existe un lien entre le profane et le saint, puisque des minutes profanes deviennent saintes. Grâce à cela, la sainteté du jour s’épanchera sur tous les jours profanes et les élèvera[6].
C’est une mitsva que d’accueillir la sainteté du jour par le biais de paroles. Les femmes ont coutume de prendre sur elles la sainteté de Kipour au moment où elles allument les veilleuses et où elles prononcent la bénédiction relative à cet allumage, bénédiction dans laquelle on mentionne ce jour (comme nous le verrons au paragraphe suivant) ; les hommes prennent sur eux la sainteté de Kipour en récitant la bénédiction Chéhé’héyanou, ou par une déclaration explicite (comme nous le verrons au paragraphe 10).
Si l’on a terminé son repas alors qu’il faisait encore grand jour, on est autorisé à manger et à boire jusqu’à ce que l’on prenne sur soi la sainteté du jour. Si, par négligence, on n’a pas accompli la mitsva d’ajouter du temps profane au temps saint, on devra, dès le coucher du soleil, se garder de tous les interdits de Yom Kipour (Choul’han ‘Aroukh 608, 1-3). Le temps le plus précoce, à partir duquel on peut déjà recevoir la sainteté du jour, est le plag hamin’ha, c’est-à-dire environ une heure solaire et quart avant le coucher du soleil (Michna Beroura 608, 14 ; Pniné Halakha – Les Lois de Chabbat 3 § 2, note 2).