On a coutume de se prosterner, quand se récite le cérémonial du service du Grand-prêtre, pendant la prière de Moussaf, de même que les prêtres et le peuple, qui se tenait dans la cour du Temple, s’inclinaient et se prosternaient au moment où le Grand-prêtre mentionnait le nom ineffable. Comme nous le verrons ci-après (chap. 10 § 15-16), le Grand-prêtre faisait dix mentions du nom ineffable. Trois d’entre elles venaient lors des trois confessions (Vidouïm) : 1) le Vidouï prononcé pour soi-même et pour son épouse ; 2) le Vidouï pour ses frères les prêtres (cohanim) ; 3) le Vidouï récité pour tout le peuple ; une quatrième fois lorsque le Grand-prêtre annonçait lequel des deux boucs le sort avait désigné pour être destiné à Dieu. De nos jours, on a coutume de se prosterner quatre fois, pendant la prière : trois fois, pendant les trois confessions ; quant à la quatrième, les coutumes sont diverses. Les Séfarades se prosternent pendant qu’est mentionné le tirage au sort du bouc réservé à l’Éternel (Beit Yossef) ; les Ashkénazes, pendant que l’on récite « Nous nous inclinons et nous prosternons… », dans le ‘Alénou léchabéa’h qui précède le cérémonial du service (Raavia, Rivach, Rama 622, 4) ; les Yéménites n’ont pas du tout coutume de se prosterner durant Moussaf.
On compte trois catégories de prosternation : la prostration complète (hichta’havaya), consistant à étendre tout le corps à terre, bras et jambes étendus. Dans la qida (révérence), on reste debout sur ses pieds, et l’on baisse la tête, jusqu’à ce qu’elle atteigne la terre. La keri’a (prosternation proprement dite) consiste à se mettre à genoux et à incliner le corps, jusqu’à ce que sa face arrive à terre (Berakhot 34b, Chevou’ot 16b). La coutume courante, le jour de Kipour, est de s’agenouiller ; certains s’étendent à terre, bras et jambes déployés.
On a coutume d’étendre préalablement un tissu sur le sol, afin de marquer une séparation entre son visage et le sol. Cela, parce qu’il n’y avait qu’au Temple qu’il était permis de se prosterner sur des pierres, tandis que c’était interdit dans les autres lieux, comme il est dit : « Vous ne placerez pas de pierre taillée sur votre terre, pour vous y prosterner » (Lv 26, 1). Quant au motif de l’interdit, on peut dire que tel était l’usage des idolâtres que de se prosterner devant la nature, de s’incliner devant des pierres, et de tenter de s’agréger mentalement à elles. C’est pourquoi la Torah a interdit à ceux qui prient de se prosterner sur la pierre, afin de ne pas en venir à mêler à leur prière des pensées étrangères. Au Temple, en revanche, il était manifeste que tout ce qui est créé – êtres vivants comme minéraux – aspire à Dieu, se soumet à Lui et, s’agissant de l’homme, reconnaît que l’on ne saurait se prosterner que devant Lui ; aussi est-il permis de s’y prosterner, même au-dessus de la pierre (Séfer Ha’hinoukh 349).
L’interdit toranique est constitué quand deux conditions sont réunies : a) la prostration est complète, bras et jambes étendues ; b) la tête repose sur le parterre de pierre. Nos sages ont cependant élevé une barrière protectrice autour de cette défense, en l’étendant aux cas où une seule condition est présente. Aussi, la prostration complète est-elle interdite, même sur un sol de terre ; et, sur un sol de pierre, l’agenouillement (keri’a) et le fait de s’incliner debout (qida) sont également interdits. Le fidèle étend donc quelque étoffe sur le sol, afin de marquer une séparation entre sa tête et le sol (Rama 131, 8)[13].
C’est peut-être pour cette raison que de nombreuses personnes ont coutume de s’agenouiller simplement, sans étendre bras et jambes. Ou il se peut que la raison soit que la place, à la synagogue, est étroite, et qu’il est impossible que tous les fidèles se prosternent en étendant bras et jambes.
Toutefois, quand le carrelage est fait de briques, et non de pierre naturelle, il est permis, selon toutes les opinions, d’y étendre une étoffe et de se prosterner en étendant bras et jambes.