Pniné Halakha

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09. Âge de la mitsva, en pratique

Plusieurs décisionnaires, parmi les plus grands, ont écrit, se basant sur le Talmud (Qidouchin 30a) que, pour les besoins de l’étude de la Torah, ou dans les périodes de difficultés financières pressantes, il est permis de repousser le mariage jusqu’à l’âge de vingt-quatre ans (Yam Chel Chelomo, Birké Yossef).

Dans les dernières générations, la vie est devenue plus complexe, et s’y préparer prend davantage de temps. Autrefois, il suffisait d’une étude simple de la Bible, de la morale (le moussar), de la halakha et de ses motifs, pour être prêt à fonder une maison juive. Il suffisait de seconder son père quelques heures par jour pour acquérir, jusqu’à l’âge de dix-huit ans, la capacité professionnelle de travailler et de gagner sa vie, voire d’économiser un peu d’argent pour les besoins de ses noces et de la construction de sa maison, qui consistait en une seule pièce. De nos jours, en revanche, pour se mesurer aux défis qui se dressent devant lui, l’homme doit étudier la Torah beaucoup plus. À cette fin, la majorité des jeunes doivent étudier dans le cadre d’une yéchiva, après l’âge de dix-huit ans, pendant un an au moins, généralement davantage. Une autre obligation sainte incombe aux jeunes : celle de défendre le peuple et la terre dans le cadre de l’armée. L’accomplissement de cette mitsva conduit lui aussi à repousser le mariage. De même, l’acquisition d’un métier convenant à ses talents nécessite, généralement, des études supérieures, qui durent quelques années, et s’accomplissent après le service militaire. En outre, les maisons dans lesquelles il est d’usage de vivre, de nos jours, sont plus chères, parce qu’elles sont plus vastes, et sont équipées de systèmes de conduction d’eau et de courant électrique, de sorte que, pour acquérir une telle maison, il faut généralement travailler plusieurs années.

Si l’on devait repousser le mariage après l’étude de toutes les bases de la Torah, l’apprentissage d’un métier adéquat et l’acquisition d’une maison, la majorité des jeunes ne se marieraient qu’après trente ans. Un tel report n’est pas possible, selon la halakha, car, bien que les conditions qui nous entourent soient devenues plus complexes, plus difficiles à affronter, la nature de l’homme, tant psychique que physique, n’a pas changé, et l’âge qui convient à son mariage est de dix-huit ans.

Par conséquent, dans les conditions complexes qui sont celles de nos vies actuelles – que l’on peut assimiler à un cas de nécessité pressante (cha’at had’haq) –, il est permis de repousser le mariage au-delà de vingt ans ; mais on ne dépassera pas vingt-quatre ans. D’un côté, on est obligé de laisser aux jeunes quelques années supplémentaires afin qu’ils puissent consolider leurs bases de Torah, modeler leur conception du monde, et qu’ils aient le temps de faire leurs premiers pas vers l’acquisition d’un métier, ou qu’ils se fixent au moins un programme concret d’acquisition d’un métier et d’un gagne-pain familial. De l’autre, on ne saurait s’éloigner davantage de la période qui, d’un point de vue psychique et physique, convient au mariage ; cela, afin de ne pas perdre l’enthousiasme et la joie de la jeunesse, que requiert la construction du couple dans ses premières années. Nous voyons bien, en effet, que ceux qui repoussent leur mariage à un âge plus avancé ont plus de difficulté à trouver leur conjoint ; certains restent même célibataires pendant de longues années. Au-delà de cela, la mitsva du mariage et celle de la procréation obligent l’homme à exprimer sa personnalité de manière complète ; comme le disent nos sages, quiconque demeure sans femme ne s’appelle pas véritablement homme (Yevamot 63a), et se trouve sans joie, ni bénédiction, ni bienfait, ni Torah, ni muraille protectrice, ni paix (ibid. 62b) ; or le nombre d’années durant lesquelles un homme peut vivre de manière si carencée est limité. De plus, nous l’avons vu, le report du mariage au-delà de ce qui est indispensable a pour effet que le mauvais penchant prend le dessus sur l’homme, au point que celui-ci, jour après jour, ne peut se libérer des pensées fautives (Qidouchin 29b). Aussi faut-il donner pour instruction au grand public de ne point repousser le mariage au-delà de l’âge de vingt-quatre ans. Ceux qui peuvent se marier avant cela, sans léser significativement leur étude de Torah, leur service militaire et la préparation à l’acquisition d’un métier convenant à leur talent, seront bénis pour cela[8].


[8]. Sur le report du mariage, a posteriori, à l’âge de vingt-quatre ans, nous lisons au traité Qidouchin 30a : « Tant que ta main est sur le collet de ton fils [tu dois le marier]. » Rachi commente l’expression tant que ta main est sur le collet de ton fils : « Tant que ta main a prise sur ton fils ; avant qu’il ne grandisse et n’accepte plus ta remontrance, marie-le. » Et quel est cet âge ? La Guémara poursuit : « De seize à vingt-deux ans, et, selon d’autres, de dix-huit à vingt-quatre ans. » En d’autres termes, selon la deuxième opinion, les sages donnent pour directive aux parents de conduire leurs fils à se marier entre dix-huit et vingt-quatre ans. Pas avant dix-huit ans, parce que les garçons ne sont pas encore assez mûrs et responsables pour fonder une famille ; pas après vingt-quatre ans, car il serait alors difficile de les encourager à se marier. Il faut ajouter que, les années passant, l’homme devient moins souple et moins ouvert, de sorte qu’il lui est plus difficile de se marier, comme nous le voyons de nos propres yeux. Nos sages ont estimé que, jusqu’à l’âge de vingt-quatre ans, il est encore relativement facile de se marier, et plus encore jusqu’à vingt-deux ans.

Se fondant sur ce passage de la Guémara, le Yam Chel Chelomo sur Qidouchin 1, 57 tranche, au sujet de celui qui voudrait continuer d’étudier assidument la Torah : « Le dernier délai, selon l’avis le plus indulgent, ne dépasse pas vingt-quatre ans. » Si la règle est telle pour les besoins de l’étude de la Torah, à plus forte raison en ira-t-il ainsi pour des besoins profanes. C’est aussi l’avis du Birké Yossef 1, 9 et du Pit’hé Techouva 5, qui écrit : « En tout état de cause, on considèrera qu’il n’y a pas lieu de tarder, pour une cause extérieure, au-delà de vingt-quatre ans. » Le Zikhron Moché (de Rabbi Moché Azoulay, petit-fils du ‘Hida) sur Even Ha’ezer 1, 3 se prononce dans le même sens, ainsi que le Toldot Adam (de Rabbi Yits’haq Eizik Shor), Even Ha’ezer 1, 3 et le Rav Pe’alim, Yoré Dé’a II 30. C’est aussi ce qui semble ressortir des propos du Roch (Qidouchin 1, 42), selon qui le report de la mitsva pour des motifs d’étude de la Torah est assorti d’une limite. Certains retiennent l’âge de vingt-cinq ans (‘Hafets ‘Haïm, Chémech Oumaguen II Even Ha’ezer 23), et, pour que leurs propos concordent avec la Guémara, il convient d’expliquer qu’ils visent le commencement de ses vingt-cinq ans.

Le Beit Chemouel 1, 5 écrit que, en effet, selon le Roch, il y a une limite au report, mais que, des propos de Maïmonide, on peut inférer que, selon lui, il n’y a point de limite à un report motivé par l’étude de la Torah ; ce qui laisse entendre que l’on peut, à cette fin, dépasser l’âge de vingt-quatre ans, à la condition que son mauvais penchant ne prenne pas le dessus. On peut dire, à la limite, que celui-là même qui apprend un métier, si cette étude se fait au nom du Ciel – afin d’être utile au monde – est autorisé, à condition que son penchant au mal ne le domine pas, à s’appuyer en cas de nécessité pressante sur l’opinion de Maïmonide, et à repousser son mariage au-delà de vingt-quatre ans (cf. ci-dessus, chap. 4, note 12).

Certains persistent à arguer que nous n’avons pas à prendre en considération les difficultés et défis que la vie moderne place devant nous : il faut, selon eux, continuer d’exiger de tout jeune homme de se marier avant vingt ans. Cependant, leurs paroles contredisent la directive de la Torah selon laquelle on doit se conduire selon l’usage du monde (Sota 44a, Maïmonide, Hilkhot Dé’ot 5, 11). Ils promettent, ce faisant, à la majorité de ceux qui les suivent, une vie de pauvreté, et leur ôtent la possibilité de participer à la bonne marche du monde selon les talents dont Dieu les a gratifiés. Ils ont également tendance à renier la mitsva toranique de servir à l’armée afin de protéger le peuple et le pays. Quant à l’argument des pensées fautives, cf. ci-dessus, chap. 4, note 12.

À l’inverse, certains prétendent qu’il convient de repousser le mariage après l’achèvement de ses études professionnelles, au moment où l’on commencera à gagner sa vie honorablement, même si la chose doit prendre de nombreuses années, comme en ont l’usage les jeunes gens dans les pays développés économiquement et scientifiquement. Leurs propos, eux aussi, contredisent la halakha, qui établit qu’il y a une limite au report du mariage. De même, nous voyons que les jeunes gens qui ont repoussé leur mariage ont beaucoup de mal, après cela, à trouver une épouse, et nombre d’entre eux restent célibataires de longues années. Cela s’explique par le fait que le temps qui convient, du point de vue psychique, à l’entrée dans la vie matrimoniale se situe autour de vingt ans ; plus le temps passe, moins grand est l’enthousiasme, et plus il est difficile de se décider à contracter l’alliance perpétuelle du mariage. C’est l’une des raisons de l’effondrement de l’institution familiale dans les pays où les jeunes repoussent à l’excès le temps de leur mariage.

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