Pniné Halakha

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04. Ecouter de la musique à partir d’un appareil électrique domestique

Selon certains, de même qu’il est interdit d’écouter de la musique instrumentale en concert durant les trois semaines, de même est-il interdit d’en écouter par le biais d’appareils de diffusion électriques domestiques[c]. Seule l’écoute de chants a cappella (sans accompagnement instrumental) est permise, durant l’omer comme durant les trois semaines. C’est la directive que donnent plusieurs grands décisionnaires (Igrot Moché, Yoré Dé’a II 137, Ye’havé Da’at VI 34). Un décisionnaire interdit même l’écoute de chants sans accompagnement d’instruments durant ces jours (Tsits Eliézer XV 33).

Cependant, d’autres décisionnaires autorisent, durant ces jours, l’écoute de musique instrumentale par le biais d’appareils de diffusion électrique. En effet, ce que les A’haronim ont interdit, selon eux, est précisément l’écoute d’un spectacle vivant, où se produisent des musiciens, car cette circonstance possède un caractère festif ou solennel. En revanche, l’écoute de musique instrumentale par l’intermédiaire d’appareils électriques ne présente pas un caractère tellement festif. Il est vrai que, lorsque les premiers récepteurs de radio et les premiers magnétophones commencèrent d’être fabriqués, il y avait une joie spéciale à écouter les airs qu’ils diffusaient. Mais de nos jours, où tout le monde a l’habitude d’entendre, en tout temps, de la musique diffusée par de tels appareils, il n’y a pas là de joie si particulière. Par conséquent, il n’y a pas d’interdit à une telle écoute pendant les trois semaines.

De plus, il faut distinguer entre les airs destinés à la joie et les musiques ordinaires. Ce ne sont que les musiques de joie qu’il convient d’interdire pendant ces jours, tandis qu’il n’y a pas lieu d’interdire des musiques ordinaires, et à plus forte raison des musiques tristes, pendant les trois semaines. Nous apprenons ainsi (au traité Chabbat 151a) que, pendant les enterrements eux-mêmes, on avait coutume de jouer sur les flûtes afin d’éveiller la tristesse et les pleurs en l’honneur du mort ; et cela se faisait au titre de la mitsva d’accompagner le mort. Nous voyons par-là qu’il ne pèse pas d’interdit absolu sur l’écoute de musique instrumentale : l’interdit, pendant les jours de deuil, est d’entendre des airs joyeux. De même, j’ai entendu de la bouche de mon père et maître que, non seulement il est permis, les neuf premiers jours d’av, de diffuser à la radio des chants tristes, évoquant la destruction du Temple, accompagnés d’instruments de musique, mais il y a là un bienfait, car ainsi les cœurs sont portés davantage à s’endeuiller pour la destruction du Temple[3].


[c]. Magnétophone, chaîne haute-fidélité, ordinateur, tablette numérique etc.

[3]. Parmi ceux qui interdisent d’écouter de la musique instrumentale diffusée à la radio, le Igrot Moché, Yoré Dé’a II 137 ; le Or’hot ‘Haïm I 166 tend à l’interdire également. Le Ye’havé Da’at VI 34, quoiqu’il autorise à écouter de la musique instrumentale à notre époque [après la destruction du Temple], interdit d’en écouter par radiodiffusion ou autre support électrique durant l’omer et les trois semaines (toutefois, il l’avait oralement permis à la station de radio Aroutz 7, afin que ne fussent pas annulés les séquences consacrées à la Torah). Le Tsits Eliézer XV 33 interdit même, dans cette période, l’écoute de chansons sans accompagnement instrumental, diffusées par radio. Cf. Pisqé Techouvot 551, 13.

Cependant les arguments des décisionnaires indulgents sont forts. En particulier, l’usage d’interdire l’écoute de musique instrumentale et les danses, durant ces jours, n’est mentionné pour la première fois que chez les A’haronim, et l’on ne trouve pas, à cet égard, de décret ancien. Dans le même ordre d’idées, les responsa ‘Helqat Ya’aqov I 62 font valoir que l’écoute de musique depuis un appareil électronique n’entre pas dans le champ du décret (ni des usages de deuil traditionnels), puisque ces appareils n’existaient pas à l’époque.

Cependant, la règle dépend de la joie qui réside en la chose. On peut déduire cela du fait que les A’haronim ont permis, durant cette période, l’apprentissage d’un instrument, en considérant qu’il n’y a point de joie en l’affaire. Nous voyons donc bien que tout dépend de la joie. Le Maharam Shik, sur Yoré Dé’a 368, s’intéresse à la différence existant entre un air joyeux et un air triste : ce dernier n’est pas interdit, selon lui, durant les jours de deuil. C’est aussi ce qui ressort des propos de Maïmonide, Ta’anit 5, 14, quand il traite de l’interdit du jeu instrumental après la destruction du Temple : « Ainsi, dit-il, nos sages ont décrété de ne jouer d’aucun instrument de musique. De toutes sortes de sons instrumentaux… il est interdit de se réjouir, et il est interdit de les entendre, en raison de la destruction du Temple. » D’après cela, il semble que l’interdit, dans son fondement, vise les chants de joie, qui conviennent au danses et aux rondes ; tandis que les chansons ordinaires, et à plus forte raison tristes, ne sont pas interdites.

D’autres ne prennent pas en compte la différence entre airs gais et airs tristes : d’un côté, ils veillent scrupuleusement à ne pas écouter ni à faire écouter de musique instrumentale pendant les trois semaines et pendant l’omer ; et à l’inverse, ils font entendre des chants joyeux, interprétés par des chanteurs non accompagnés d’instruments. Mais c’est une erreur, car il est plus nécessaire d’être rigoureux en s’abstenant de diffuser des chants joyeux, même sans accompagnement instrumental ; tandis que, s’agissant de chants tristes, même accompagnés d’instruments, on peut s’appuyer sur les décisionnaires indulgents. Telle était l’habitude, à Aroutz 7, que de diffuser, durant les trois semaines, des chansons ordinaires, non caractérisées par la joie ; puis, pendant les neuf derniers jours, on diffusait des musiques tristes rappelant aux auditeurs le deuil pour la destruction du Temple. Cf. encore, dans la revue Te’houmin n°13, l’article du Rav Chemouel David. Cf. ci-dessus, chap. 3 § 10.

De l’avis même des décisionnaires rigoureux, si l’on écoute une émission consistant principalement en paroles, et que, entre les paroles, viennent s’insérer des morceaux de musique, on n’est pas obligé d’éteindre la radio ; mais celui qui éteint sera béni pour cela (Hilkhot ‘Haguim 25, 9).

Il semble que, de l’avis même des décisionnaires rigoureux, on puisse, le vendredi après le milieu du jour et à l’issue de Chabbat, adopter l’usage indulgent, car la sainteté du Chabbat et la joie qui lui est propre planent sur ces moments, puisqu’on ne dit pas de Ta’hanounim (supplications) le vendredi après-midi, et que l’on porte encore ses vêtements sabbatiques à l’issue du Chabbat.

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